C. ... SAUF POUR LES INFRACTIONS PORTANT PARTICULIÈREMENT ATTEINTE À L'APPEL À LA GÉNÉROSITÉ, SPÉCIFIQUEMENT LISTÉES ET POUR LESQUELLES ELLE A L'OBLIGATION DE LES SUSPENDRE

1. Une suspension automatique des avantages fiscaux liés aux dons au II de l'article 1378 octies du code général des impôts, au champ récemment étendu par la loi précitée du 24 août 2021

La marge d'appréciation précédemment évoquée pour la mise en oeuvre de la procédure prévue pour l'article 18 de la loi du 24 août précitée ne s'applique pas pour les infractions listées au II de l'article 1378 octies du code général des impôts (CGI). Pour celles-ci, l'administration fiscale est tenue de suspendre les avantages fiscaux des associations, quelles que soient les circonstances dans lesquelles les infractions ont été commises .

Plus précisément, le II de l'article 1378 octies du code général des impôts dispose que les organismes sans but lucratif perdent le bénéfice de l'avantage fiscal pour les dons aux associations dès lors qu'ils ont été définitivement condamnés au pénal pour les infractions suivantes :

- l'abus de confiance ;

- l'escroquerie ;

- les actes de terrorisme ;

- le blanchiment d'argent ;

- le recel ;

- l'usage de menace ou de violence à l'égard d'un agent public ;

- l'atteinte à la vie d'autrui par la diffusion d'informations relatives à la vie privée, familiale ou professionnelle.

Le mécanisme du II de l'article 1378 octies du code général des impôts a été introduit par la loi n° 2009-1674 du 30 décembre 2009 de finances rectificative pour 2009. À l'origine, il ne concernait que l'abus de confiance et l'escroquerie, et la loi du 24 août 2021 l'a étendu aux autres infractions précitées.

Contrairement à une interprétation courante, la liste donnée au II de l'article 1378 octies du CGI ne comprend pas l'ensemble des infractions pour lesquelles les associations sont susceptibles de voir leurs avantages fiscaux suspendus . Comme cela vient d'être vu, l'administration fiscale peut potentiellement suspendre la réduction fiscale pour les dons pour tout type d'infraction.

En réalité, l'apport du II de l'article 1378 octies du CGI par rapport à la procédure de contrôle décrite à l'article L. 14 A du livre des procédures fiscales est de deux ordres .

Premièrement, pour l'ensemble des infractions listées, l'administration fiscale est tenue de suspendre les avantages fiscaux pour les dons aux associations, sans que son interprétation n'entre en compte . Contrairement au cas général, l'administration fiscale a compétence liée pour les infractions listées au II de l'article 1378 octies .

Ensuite, la suspension de la réduction fiscale est censée suivre la condamnation pénale, sans attendre qu'un contrôle soit mené par l'administration fiscale . La décision pénale définitive de condamnation emporte décision de suspension des avantages fiscaux, sans nécessiter de décision administrative supplémentaire.

Le II de l'article 1378 octies du CGI vise donc à garantir et à accélérer la procédure de suspension du régime du mécénat pour un certain nombre d'infractions précisément identifiées . Cette disposition ne se substitue pas au contrôle prévu par l'article 18 de la loi du 24 août 2021, mais la complète.

2. Des demandes d'extension du champ des infractions conduisant à une suspension automatique qui seraient prématurées sans examen concret de l'exécution du dispositif actuel

Des propositions ont émergé pour ajouter des infractions supplémentaires à la liste du II l'article 1378 octies , parmi lesquelles la « destruction, dégradation ou détérioration d'un bien appartenant à autrui », « l'installation en réunion sur le terrain d'autrui », ou la diffamation, telle qu'elle est définie dans la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse. Il convient toutefois de rester vigilant quant aux infractions qui seraient incluses dans le champ du mécanisme de suspension automatique des dons pour les associations .

En effet, les infractions listées dans la version initiale de l'article 1378 octies , l'abus de confiance et l'escroquerie, ont été retenues car elles étaient manifestement incompatibles avec l'appel à la générosité du public . La loi du 24 août 2021 a ensuite ajouté des infractions de nature économique, comme le blanchiment d'argent, et des infractions particulièrement graves, comme l'atteinte à la vie d'autrui ou les actes de terrorisme. Dans l'ensemble de ces cas, il a été estimé qu'aucune circonstance ne peut justifier que la réduction d'impôt pour les dons ne soit pas suspendue .

D'une manière générale, les infractions listées au II de
l'article 1378 octies du CGI doivent impliquer la suspension du régime du mécénat de manière si évidente que l'appréciation de l'administration fiscale ne serait plus requise . Elles doivent également pouvoir être rattachées avec certitude à l'association en tant que personne morale, et ne pas être le fait de personnes isolées. Dans les cas où les circonstances entourant l'infraction peuvent justifier que le régime du mécénat soit maintenu, il est pertinent de laisser une marge d'interprétation à l'administration fiscale.

Avant de poser la question de l'opportunité d'élargir une nouvelle fois le champ du II de l'article 1378 octies du CGI, il convient d'examiner l'application de cette disposition. Toutefois, pour y répondre, il est nécessaire d'étudier l'articulation entre l'administration judiciaire et l'administration fiscale dans l'application des mécanismes de suspension des dons aux associations .

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