Rapport d'information n° 357 : l'évolution de la politique néerlandaise en matière de stupéfiants


M. Nicolas ABOUT, Sénateur


Délégation du Sénat pour l'Union Européenne - Rapport n°357 1996/1997

Table des matières


INTRODUCTION
I.LES PAYS-BAS ONT PRIS TRÈS AU SÉRIEUX LES REMARQUES FAITES PAR LA FRANCE
A.LE PLAN " VICTOR " A ROTTERDAM
B.UNE LÉGISLATION PLUS RÉPRESSIVE
C.UNE POLITIQUE PÉNALE PLUS RESTRICTIVE
II.LES RELATIONS FRANCO-NÉERLANDAISES S'AMÉLIORENT GRÂCE AUX EFFORTS DES PAYS-BAS
A.LA COOPÉRATION DOUANIÈRE
B.LA COOPÉRATION POLICIÈRE
C.LA COOPÉRATION JUDICIAIRE
III.DES ZONES D'OMBRE SUBSISTENT QUI MÉRITERAIENT D'ÊTRE LEVÉES
A.UN DISCOURS DE SANTÉ PUBLIQUE AMBIGÜ
B.LA CULTURE DU CANNABIS
C.LA FABRICATION DE DROGUES DE SYNTHESE
CONCLUSION
EXAMEN DU RAPPORT PAR LA DELEGATION
ANNEXES
I.ANNEXE 1
A.DIRECTIVES NÉERLANDAISES EN VUE DE LA MISE EN OEUVRE DE LA POLITIQUE DE RECHERCHE ET DE POURSUITES DES INFRACTIONS À LA LOI SUR L'OPIUM, ARRÊTÉES LE 11 SEPTEMBRE 1996 ET ENTRÉES EN VIGUEUR LE 1ER OCTOBRE 1996
B.DIRECTIVE RELATIVE AUX SUBSTANCES DE LA LISTE (DROGUES DURES)
C.DIRECTIVE RELATIVE AUX SUBSTANCES FIGURANT SUR LA LISTE II (DROGUES DOUCES)
D.INDICATEURS D'ACTIVITÉ PROFESSIONNELLE CONCERNANT LA CULTURE DE CANNABIS
II.ANNEXE 2



N° 357

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1996-1997

Annexé au procès verbal de la séance du 12 juin 1997.

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

au nom de la délégation du Sénat pour l'Union européenne (1),

sur

l'évolution de la politique néerlandaise en matière de stupéfiants

Par M.Nicolas ABOUT,

Sénateur.

(1) Cette délégation est composée de : MM. Jacques Genton, président ; James Bordas, Michel Caldaguès, Claude Estier, Pierre Fauchon, vice-présidents ; Nicolas About, Jacques Habert, Emmanuel Hamel, Paul Loridant, secrétaires ; MM. Robert Badinter, Denis Badré, Gérard Delfau, Mme Michelle Demessine, M. Charles Descours, Mme Marie-Madeleine Dieulangard, MM. Ambroise Dupont, Jean-Paul Emorine, Philippe François, Jean François-Poncet, Yann Gaillard, Pierre Lagourgue, Christian de La Malène, Lucien Lanier, Paul Masson, Daniel Millaud, Georges Othily, Jacques Oudin, Mme Danièle Pourtaud, MM. Alain Richard, Louis-Ferdinand de Rocca Serra, Jacques Rocca Serra, André Rouvière, René Trégouët, Marcel Vidal, Robert-Paul Vigouroux, Xavier de Villepin.


Union européenne - Trafic de stupéfiants - Coopération policière UE - Coopération judiciaire UE - Santé - Rapports d'information.

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Le Sénat a montré depuis plusieurs années une préoccupation constante au regard de la politique néerlandaise en matière de stupéfiants (1) .

Le rapport remis le 31 janvier 1996 par M. Paul MASSON au Premier Ministre sur les conditions d'application des Accords de Schengen a contribué largement à la prise de conscience des conséquences de cette politique pour les partenaires des Pays-Bas. Après une phase de tensions diplomatiques et de gesticulations médiatiques, les relations entre la France et les Pays-Bas ont retrouvé la sérénité qui sied pour traiter ces problèmes essentiels.

J'ai souhaité, un an après que le rapport de notre collègue Paul MASSON eut été rendu public par le Premier Ministre, faire le point sur la politique néerlandaise en matière de stupéfiants.

Au cours de ma visite au Pays-Bas, les 22 et 23 janvier dernier, j'ai eu des entretiens avec MM. HIRSCH-BALLIN, sénateur et ancien ministre de la justice, DEMMINK, secrétaire général adjoint du ministre de la justice chargé du troisième pilier de l'Union, et KORTENHORST, conseiller du ministre de la justice pour la politique des stupéfiants. Je me suis également entretenu avec M. SIBLESZ, directeur au ministère des affaires étrangères chargé des migrations et des affaires consulaires. J'ai également rencontré le commissaire VAN HULST, président de l'association des commissaires en chef, M. MOSTERT, commissaire en chef de la région de Maastricht, Mme NEPPERUS, directeur des douanes chargé de l'administration, M. VAN BODEGRAVEN, directeur de la législation fiscale et douanière.

J'ai visité les installations de l'aéroport d'Amsterdam Schipol avec le chef de la maréchaussée royale en charge du contrôle des frontières. J'ai également été reçu par le directeur-adjoint des douanes du port de Rotterdam qui m' a fait visiter le terminal de conteneurs " Europaweg " où va être installé le scanner dont les néerlandais viennent de faire l'acquisision. Enfin le directeur de la CRI (Centrale de recherche d'information) de la police néerlandaise m'a présenté les activités de son service qui est plus spécialement chargé des relations internationales dans le cadre de la criminalité organisée.

Il ressort de cette mission que les Pays-Bas ont pris très au sérieux les remarques faites par la France, et notamment par notre collègue Paul MASSON au regard de leur politique en matière de stupéfiants. Les relations franco-néerlandaises s'améliorent grâce aux efforts des Pays-Bas. Mais des zones d'ombre subsistent qui mériteraient d'être levées.

I. LES PAYS-BAS ONT PRIS TRÈS AU SÉRIEUX LES REMARQUES FAITES PAR LA FRANCE

Il ne fait pas de doute que la persévérance et l'intensité des critiques émises par la France - celles notamment du Sénat français - au regard de la politique néerlandaise en matière de stupéfiants a porté ses fruits.

Un document officiel néerlandais (2) le reconnaît sans fard : " On se préoccupe aujourd'hui explicitement des conséquences possibles de la politique néerlandaise sur les relations entre les Pays-Bas et leurs voisins, que ce soit dans le domaine de la coopération avec les autorités étrangères, ou encore dans celui des répercussions transfrontalières de la politique néerlandaise, en matière de recherche et de poursuites des infractions. A cela s'ajoute que la Convention d'application de l'Accord de Schengen y appelle, elle aussi ".

" Dans ce contexte, il y a aussi lieu de se préoccuper des coffee-shops qui se livrent à la vente de stocks, à usage commercial ou personnel, destinés à l'exportation. Il peut être souhaitable de rechercher périodiquement les personnes non domiciliées aux Pays-Bas et qui y achètent des quantités de drogues, dures ou douces, à usage commercial, aux fins d'exportation. Le ministère public doit s'efforcer d'arriver à une bonne coopération avec les instances étrangères en matière de recherche et de poursuites tout particulièrement dans le cadre de la lutte contre le tourisme de la drogue. Cela vaut aussi bien pour la recherche et les poursuites que pour la transmission des poursuites judiciaires dans les cas où les Pays-Bas n'ont pas un intérêt majeur a procéder aux poursuites sur leur propre territoire ".

" Il est (en outre) apparu que la culture du nederwiet (la variété néerlandaise de cannabis) a connu un formidable essor, ces dernières années. Il faut absolument y mettre un terme. Les directives prévoient à cet effet une action en conformité avec le rapport du gouvernement sur la politique en matière de drogue ".

Il y a en réalité au moins trois types d'actions qui montrent que les Pays-Bas ont pris très au sérieux les remarques françaises :

- la mise en place du " plan Victor " à Rotterdam ;

- le vote par le Parlement néerlandais d'une législation plus répressive en matière de stupéfiants ;

- l'adoption d'une politique pénale plus sévère.

A. LE PLAN " VICTOR " A ROTTERDAM

On a constaté depuis un an une plus grande mobilisation de la police aux Pays-Bas dans la lutte contre la petite délinquance liée aux trafics de stupéfiants .

Sur ce point, la ville de Rotterdam, qui était soumise à une forte pression de sa population, a joué un rôle de pionnier. Depuis le mois de juillet 1995, la ville s'est dotée d'une politique radicale de réduction des nuisances contre le " tourisme de la drogue " ; cette politique appelée plan " Victor " va à l'encontre de la pratique de tolérance pour les usagers en cours dans le reste des Pays-Bas : application stricte des lois et règlements, contrôle systématique des titres de séjours et des lieux de vente, et autant que possible, expulsion des étrangers en infraction à la législation sur les stupéfiants.

Le plan " Victor " a permis l'interpellation de 3286 personnes en 1995, dont 798 étrangers, parmi lesquels 332 Français et de 2850 personnes en 1996, dont 303 étrangers parmi lesquels 120 Français. Les Français représentaient 41 % des étrangers interpellés en 1995 et 39% en 1996. En 1995, 301 Français ont été remis à la DICILEC du Nord en application du plan " Victor " ; en 1996 ils ont été 233. Au bout de dix-huit mois, le plan " Victor " , qui continue d'être appliqué avec rigueur, est peu à peu victime de son succès. le nombre d'interpellations mensuelles est passé de 550, en 1995, à 240, en 1996. Il semble que l'objectif de détruire l'image de " supermarché de la drogue ", qui était celle de Rotterdam il y a deux ans, ait été en partie réalisé. La méthode pourrait être reprises par d'autres municipalités néerlandaises.

A l'échelon du pays, plusieurs opérations de police ont démantelé des réseaux de trafiquants de drogues dures et d'XTC. De plus, une équipe interministérielle, regroupant les services de police, de douane, de renseignement, des finances sous le contrôle du procureur général de Bois-le-Duc (Nord Brabant) pour lutter contre les laboratoires d'XTC, est en cours de formation et devrait être opérationnelle en septembre 1997 .

B. UNE LÉGISLATION PLUS RÉPRESSIVE

Deux projets de loi visent à réduire le nombre de lieux où est vendue de la drogue :

- pour les drogues douces , un projet de loi permettant aux maires de fermer les coffee-shops, même s'ils ne provoquent pas de nuisances (dit projet Damoclès), a été déposé au conseil d'Etat pour avis en décembre 1996. Il sera ensuite transmis à la deuxième Chambre ;

- pour les drogues dures , un projet de loi pour faciliter la fermeture administrative des lieux de vente clandestins (drugspanden) de drogues dures (dit loi Kohnstamm) a été adopté par la deuxième Chambre en novembre. Il est en discussion au Sénat, mais le PvdA (social-démocrate) s'oppose à la fermeture des appartements privés.

Le projet d'amendement à la loi sur l'opium, qui fait passer de deux à quatre ans la sanction pour la culture industrielle de cannabis a été examiné par le Conseil d'Etat en décembre 1996 et janvier 1997. Ce projet de loi interdit la culture sous serre et tolère la seule culture individuelle à l'extérieur.

C. UNE POLITIQUE PÉNALE PLUS RESTRICTIVE

La nouvelle directive aux parquets - citée plus haut - a été arrêtée par le collège des procureurs généraux le 11 septembre 1996 et est entrée en vigueur le ler octobre 1996 . Elle répond à un besoin d'uniformisation de la politique en matière d'action pénale, mais elle vise surtout à modifier l'application de la loi sur l'opium pour prendre en compte les conséquences, pour les pays voisins, de la politique de tolérance. Il est notable que la première modification mentionnée dans ce document est la nécessité de " se préoccuper des coffee-shops qui se livrent à la vente de stocks (..) destinés à l'exportation ". La réduction de 30 à 5 grammes de la quantité de drogues douces considérée comme destinée à l'usage personnel a été d'ores et déjà décidée.

La directive exige des procureurs une plus grande fermeté et pour cela elle se fait plus précise (définition de la quantité destinée à l'usage personnel, description précise des cinq critères de tolérance des coffee-shops, échelle des peines préconisées en fonction des quantités saisies... ). Pour la première fois, il est stipulé que le dépassement de la quantité destinée à l'usage personnel implique une présomption de trafic. Il est précisé que la quantité maximale de stock qui peut être détenue dans un coffee-shop est de 500 grammes.

La deuxième priorité soulignée est la lutte contre la culture locale de cannabis: " il faut absolument mettre un terme... au formidable essor de ces dernières années " . La directive décrit une série d'indicateurs qui doivent être mentionnés dans les procès-verbaux (éclairage, chauffage, arrosage...) et conduire à la qualification de délit de culture de cannabis de caractère professionnel.

L'interdiction de la publicité pour la vente de cannabis, qui est inscrite dans la loi, mais qui n'est pas appliquée, est rappelée aux parquets . Les procureurs sont appelés à exercer une vigilance particulière à l'encontre des publicités destinées aux clients étrangers. D'une façon générale, les procureurs sont plus actifs et poursuivent davantage pour faire appliquer la législation sur les stupéfiants. A titre d'exemple, le parquet de Breda a enregistré depuis 1993 une progression constante des affaires de stupéfiants (une affaire en 1993, 6 en 1994, 41 en 1995 et 505 en 1996).

Les condamnations prononcées contre les trafiquants sont également de plus en plus lourdes . En décembre, un trafiquant d'héroïne a été condamné à dix ans de réclusion, ce qui est sévère aux Pays-Bas ; un autre trafiquant vient d'être condamné à huit ans de prison. A Amsterdam, en janvier 1997, s'est déroulé le procès d'un très important trafiquant de drogues douces surnommé " le bègue ". A cette occasion, et pour la première fois, le ministère public s'est déclaré insatisfait des peines prévues dans la loi pour ce type de trafic, estimant qu'elles n'étaient pas assez dissuasives. Le coupable a été condamné à six ans de prison.

II. LES RELATIONS FRANCO-NÉERLANDAISES S'AMÉLIORENT GRÂCE AUX EFFORTS DES PAYS-BAS

Compte tenu de la proximité géographique et de la libre circulation des personnes et des marchandises, la politique particulière des Pays-Bas en matière de stupéfiants entraîne pour la France plusieurs conséquences négatives :

- d'abord une population de quelques dizaines de toxicomanes français vit aux Pays-Bas, essentiellement à Rotterdam, et pose un problème humanitaire . En 1996, 12 décès par surdose de ressortissants français ont été enregistrés aux Pays-Bas (465 en 1995 en France), contre 17 en 1995, 24 en 1994 et un seul en 1991 ;

- par ailleurs des centaines de Français " touristes de la drogue " se rendent régulièrement aux Pays-Bas pour consommer et pratiquer au retour un trafic de " fourmis ", notamment à destination du Nord et de l'Est de la France ;

- enfin les Pays-Bas sont devenus le premier fournisseur de drogues dures de la France, notamment dans le cadre de filières organisées : 58 % de l'héroïne saisie par la police en France en 1995, soit 289 kg, avait été acquise aux Pays-Bas ; 64 % des saisies douanières d'ecstasy avaient la même origine (chiffres O.C.T.R.I.S.). Les risques réduits encourus aux Pays-Bas, la qualité et la disponibilité des drogues dures, et surtout les prix très bas, qui garantissent d'énormes profits en France (le gramme d'héroïne acheté environ 80 F à Rotterdam, en quantités de demi-gros, se revend, après coupage, jusqu'à 1.200 F dans le Sud de la France), attisent ces trafics.

A la suite des entretiens que le Président de la République avait eus, le 26 octobre 1995 avec le Premier ministre des Pays-Bas, il a été décidé de créer un groupe de travail pour développer la coopération bilatérale en matière de douanes, de justice et de police. Ce groupe a travaillé et est parvenu à des résultats qui demandent à être suivis et approfondis, aussi bien en matière douanière, policière que judiciaire.

A. LA COOPÉRATION DOUANIÈRE

En matière de douanes, une expérience d'échange de douaniers entre Rotterdam et Marseille a eu lieu au premier semestre 1996 . Un mémorandum d'accord pour améliorer la coopération en matière de lutte contre la fraude -et tout particulièrement de lutte contre le trafic de stupéfiants-, a été signé par le ministre délégué au budget, M. Alain Lamassoure, et par le secrétaire d'Etat aux finances néerlandais, M. Vermeend, le 3 février 1997.

Une nouvelle expérience d'échanges de douaniers concernant les aéroports de Roissy et de Schiphol devrait être conduite en 1997 . La décision néerlandaise d'acquérir des scanners de conteneurs pour Rotterdam et de fret aérien pour Amsterdam et Schipol est positive et répond à un souhait exprimé par la partie française au sein du groupe de travail; le fournisseur a été choisi en novembre 1996 .

B. LA COOPÉRATION POLICIÈRE

La coopération policière a été renforcée par la mise en place dans chaque pays d'un dispositif comprenant un attaché de police et deux officiers de liaison . La coopération policière se heurte encore au problème de la très grande décentralisation de l'organisation de la police néerlandaise qui comprend vingt cinq régions de police. Les policiers français en poste aux Pays-Bas ont obtenu le droit d'établir des relations directes avec six régions de police du pays, mais ils doivent encore pour les autres régions utiliser le canal d'un service de police spécial, la D.C.R.I. (direction centrale de recherche et d'information).

Les demandes de renseignements sont traitées avec plus de célérité qu'il y a un an (trois semaines au lieu de trois mois). L'antenne de l'OCTRIS à l'Ambassade de France a été saisie de 69 dossiers entre septembre et décembre 1996 contre 3 pendant le trimestre précédent. Des opérations conjointes ont pu être menées (dont une livraison surveillée alors qu'aucune opération de ce type n'avait été réalisée l'année précédente) et ont permis le démantèlement de réseaux de trafiquants opérant à destination de la France. Quatre demandes d'opérations émanant des services de police français ont été exécutées pendant le second semestre 1996. Le climat des relations entre polices semble s'améliorer.

Dans le cadre du groupe de travail franco-néerlandais, le principe d'une réactivation des opérations Hazeldonk (du nom d'une commune belge à la frontière avec les Pays-Bas) menées avec la Belgique et les Pays-Bas contre les drugsrunners sur les autoroutes a été adopté . Trois nouvelles opérations de ce type doivent avoir lieu en 1997. Elles associent étroitement les services de police et les parquets de la région Nord en France avec leurs homologues du sud des Pays-Bas et de la Belgique.

C. LA COOPÉRATION JUDICIAIRE

La coopération en matière de justice s'appuie sur les magistrats de liaison qui sont en activité dans les ministères respectifs de la justice depuis le ler décembre 1993. Ils contribuent à l'amélioration de l'exécution des commissions rogatoires. En 1996, sur 60 commissions rogatoires adressées aux Pays-Bas, 46 ont été exécutées.

Un groupe de travail justice s'est réuni en 1996 avec pour objectif de trouver le moyen de poursuivre les " touristes " de la drogue, notamment par le biais des dénonciations officielles . Un système de dénonciation accélérée avec établissement de procès-verbaux en deux langues et transmission par fax des procédures a été arrêté pour le parquet de Rotterdam, puis étendu à Breda et Dordrecht . Ce système a fait l'objet d'une circulaire du ministère de la justice aux 181 parquets français qui est entrée en vigueur au ler décembre 1996 . Il a été utilisé pour la première fois au début du mois de février 1997 : trois premiers cas ont donné lieu à une dénonciation et à des poursuites exercées en France.

III. DES ZONES D'OMBRE SUBSISTENT QUI MÉRITERAIENT D'ÊTRE LEVÉES

A. UN DISCOURS DE SANTÉ PUBLIQUE AMBIGÜ

La politique particulière des Pays-Bas en matière de tolérance et de dépénalisation des drogues douces placent ces derniers dans une situation difficile vis-à-vis de leurs voisins.

La loi néerlandaise sur l'opium de 1976 réprime certes la possession de tous les stupéfiants. Mais la politique suivie est déterminée pour l'essentiel par les conditions d'application de la loi. D'une part, la distinction entre drogues douces et drogues dures a mené à une dépénalisation de fait de la possession des drogues douces pour consommation personnelle , jusqu'à une certaines quantité qui fait l'objet d'une appréciation par les magistrats. Le commerce de détail est également accepté dans les coffee-shops, sous conditions. D'autre part le principe d'opportunité de la mise en oeuvre de cette répression a conduit à instaurer une tolérance de fait pour la détention et pour consommation personnelle des drogues dures (jusqu'à 0,5 g d'héroïne).

La politique sanitaire et sociale en faveur des toxicomanes, qui dépasse le milliard de florins par an, a débouché sur des programmes de méthadone de grande ampleur (14 000 bénéficiaires par an). Les Pays-Bas recensent 28 000 toxicomanes. Le nombre de décès par surdose est évalué à 80 par an. Les consommateurs de drogues douces sont environ 700 000 et les utilisateurs réguliers d'amphétamines 50 000.

La politique censée maintenir dans des limites strictement définies la production et la consommation de drogues est mal contrôlée : inflation du nombre des coffee-shops qui ne respectent par les conditions légales, développement de l'importation et de l'exportation des drogues dures (" tourisme de la drogue ") favorisée par leur faible coût aux Pays-Bas. Par voie de conséquence, une véritable économie de la drogue s'est formée aux Pays-Bas (60 milliards de florins de chiffre d'affaires selon un rapport fourni au Parlement) qui s'appuie sur deux des plus grands centres portuaire et aéroportuaire du monde, Rotterdam et Amsterdam-Schipol.

B. LA CULTURE DU CANNABIS

Le climat de tolérance traditionnel aux Pays-Bas, qui va à l'encontre de l'application des mesures répressives prévues (légèreté relative des peines d'emprisonnement), a également contribué au développement de la production et de l'exportation de nouveaux stupéfiants (XTC, culture sous serre de cannabis ayant un plus grand pouvoir psychotrope, le " nerderwiet ").

L'Organe International de contrôle des Stupéfiants des Nations-Unies (OICS), qui est à Vienne, a souligné dans son dernier rapport pour 1996 que " la culture à grande échelle sous abri du cannabis se limite aux Pays-Bas, mais (que) la culture à petite échelle se propage dans d'autres pays européens, poussées par l'exportation des graines de cannabis, en provenance principalement des Pays-Bas ". L'Organe a pris note des initiatives récentes prises par le Gouvernement néerlandais en vue de s'attaquer plus vigoureusement aux questions relatives à la culture illicite sous abri du cannabis et à l'exportation des graines de cannabis.

En outre les Pays-Bas bénéficient du soutien de la Commission européenne, comme le constate l'OICS qui souligne que le cannabis est cultivé de manière licite à des fins industrielles dans un nombre croissant de pays d'Europe : " Les Etats membres de l'Union européenne encouragent, au moyen de subventions, la culture licite du chanvre pour des raisons écologiques et autres. Ils sont toutefois tenus de se conformer aux critères adoptés par l'Union européenne concernant la teneur en tétrahydrocannabinol (THC), les variétés de cannabis, les contrôles, etc.

" L'Organe demande à nouveau à l'Union européenne de lui communiquer des informations sur le fonctionnement de ce système, y compris en ce qui concerne l'évaluation de l'efficacité des mesures prises pour empêcher la culture et le trafic illicites de variétés de cannabis qui ne répondent pas aux critères formulés par l'Union européenne. Il invite les gouvernements de la région à lui faire part de leurs expériences, étant donné que le développement de la culture licite de cannabis pourrait donner lieu, pour les gouvernements, à des problèmes de contrôle insurmontables tenant à la détection et à l'élimination des cultures illicites de cannabis ".

C. LA FABRICATION DE DROGUES DE SYNTHESE

D'après I'OIPC/Interpol, les saisies d'amphétamines ont augmenté en moyenne d'environ 18 % entre 1994 et 1995, mais plus encore dans certains pays dont les deux principaux pays sources, qui sont les Pays-Bas et la Pologne . Dans ces deux pays, les quantités d'amphétamines saisies sont passées entre 1994 et 1995 de 281 kg à 625 kg aux Pays-Bas et de 78 kg à 112 kg en Pologne. La consommation d'amphétamines se développe dans la plupart des pays de la région. Des saisies de précurseurs de l'amphétamine ou de dérivés de l'amphétamine destinés aux Pays-Bas ont été signalées dans plusieurs pays : à Malte, une tonne de phényl-1-propanone-2 a été saisie et 200 kg de la même substance ont été saisis en Fédération de Russie.

La fabrication et la consommation illicites de MDMA (" ecstasy ") ont considérablement augmenté en 1995 en Europe. L'OICS constate que " la MDMA est produite pour l'essentiel aux Pays-Bas , mais l'existence de laboratoires clandestins a également été signalée dans d'autres pays, surtout d'Europe centrale et orientale. L'Organe note avec préoccupation qu'il n'y a eu qu'un très petit nombre de rapports concernant les saisies de précurseurs de MDMA en Europe. Le développement de la consommation de MDMA et d'autres dérivés d'hallucinogènes de l'amphétamine, tels que la méthylènedioxyamfétamine (MDA), la N-éthylméthylènedioxyamfétamine (aussi appelée MDEA ou MDE), le MBDB et la brolamphétamine (DOB), a été signalé dans la plupart des pays de la région. Il existe également des signes selon lesquels ces drogues seraient exportées en contrebande d'Europe vers d'autres régions. L'Organe considère que le rapport qui existe entre 1' " ecstasy " et un certain style de musique, le fait que les autorités nationales tolèrent des messages ambigus au sujet des vertus apparentes de 1' " ecstasy " et même l'utilisation de ce nom dans toute l'Europe pour une boisson énergétique lancée au Liechtenstein ont peut-être contribué au développement rapide de la consommation " .

En 1995, l'OICS a noté une augmentation de la consommation de LSD dans de nombreux pays d'Europe. " Le LSD continue d'être exporté en contrebande des États-Unis vers des pays d'Europe, principalement les Pays-Bas qui, en dépit de l'activité intense de leurs services nationaux de détection et de répression pour stopper ces envois, restent l'un des principaux centres de distribution de LSD ". En 1995, les services des douanes russes ont fait état de la saisie d'une quantité extrêmement importante (30 kg) d'ergotamine et d'ergométrine en provenance des États-Unis, qui aurait sinon bien pu servir à fabriquer 100 millions de doses de LSD.

CONCLUSION

Les Pays-Bas ont à l'évidence pris en compte les critiques de leurs partenaires Schengen et commencent à infléchir leur politique en matière de stupéfiants.

Le poids du passé et les habitudes acquises ne peuvent cependant pas être modifiés en quelques mois : des efforts tenaces doivent être menés par les administrations concernées avec l'appui des gouvernements.

Les Pays-Bas doivent être encouragés dans leurs efforts. Mais ce ne serait pas un bon service à leur rendre que de relâcher la pression engagée par la France alors que cette politique commence à porter ses fruits en matière de coopération policière, judiciaire et douanière.

Le prétexte d'un élargissement européen - pourtant justifié - de cette action ne pourrait légitimer une politique plus souple au regard d'un enjeu de société qui reste essentiel pour l'avenir de l'Europe et des démocraties. Il faut d'ailleurs rappeler que l'article 71 des accords de Schengen fait obligation aux Etats participants de lutter contre l'exportation de drogues et que, si un Etat ne respecte pas ses engagements dans ce domaine, ses partenaires sont alors autorisés à agir pour que cela ne porte pas atteinte à leurs intérêts.

Pour l'avenir, il est clair que le renforcement de la coopération entre Etats européens pour lutter contre le trafic de drogue est lié à la réforme du troisième pilier de l'Union européenne qui devrait voir le jour après la signature du traité en cours de discussion. A plus long terme, il conviendra de réfléchir à la création d'un véritable espace judiciaire européen qui assurerait la cohérence de la politique conduite en matière de lutte contre les stupéfiants.


EXAMEN DU RAPPORT PAR LA DELEGATION

M. Nicolas About a présenté son rapport au cours de la réunion de délégation du 11 juin 1997.

Au cours du débat, M. Paul Masson s'est déclaré en complet accord avec le rapporteur et s'est félicité de la continuité et de la cohérence des travaux du Sénat sur ce sujet. Il a souligné que l'Europe tout entière était concernée par ce problème et qu'il ne s'agissait pas d'une question neutre ou technique, mais d'un danger menaçant la jeunesse des pays européens. Il a estimé que le contexte international en cette matière était très pernicieux, dans la mesure où il est souvent difficile de coopérer avec certains gouvernements d'Amérique latine, d'Asie du Sud-Ouest ou d'Europe de l'Est qui subissent des influences mafieuses.

A propos des Pays-Bas, M. Paul Masson a observé que les néerlandais étaient un peuple de commerçants, traditionnellement méfiant à l'égard de toute intervention de l'Etat. Il a rappelé qu'il existait encore, il y a quelques années, deux cents régions de police aux Pays-Bas et que les communes étaient très soucieuses de préserver leur indépendance. Il a en outre fait valoir qu'il existait un aspect financier non négligeable dans la politique conduite par les Pays-Bas, les taxes prélevées sur les coffee-shops rapportant environ six milliards de francs à la collectivité chaque année.

M. Paul Masson a enfin rappelé que l'article 71 des accords de Schengen imposait aux Etats membres de lutter contre l'exportation des drogues (y compris le cannabis) et que, si un Etat ne se conformait pas à cette obligation, les autres pouvaient prendre les mesures nécessaires pour que cela ne porte pas atteinte à leurs intérêts.

M. Pierre Fauchon a souligné que les approches de coopération policière ne pourraient avoir que des effets limités face à un fléau tel que le trafic de stupéfiants. Observant que le trafic et la consommation de drogues ne concernaient plus seulement certaines banlieues, mais touchaient désormais les zones rurales, il s'est prononcé pour la mise en oeuvre d'un droit pénal européen et la création d'un parquet au niveau européen.

Mme Danielle Bidard-Reydet a mis l'accent sur les sommes considérables que représentait le trafic de drogue et a souligné la nécessité de s'attaquer au blanchiment de l'argent. Elle a fait valoir qu'on ne pourrait limiter le trafic de stupéfiants qu'en s'attaquant aux bénéfices des trafiquants. Elle a enfin rappelé que de nombreuses régions françaises, en particulier la région Nord-Pas-de-Calais, devaient faire face à un afflux massif de drogue en provenance des Pays-Bas.

M. Jacques Genton, président, a ajouté qu'on notait également un trafic sensible transitant par le canal latéral à la Loire.

M. Nicolas About, rapporteur, a indiqué qu'il avait pu se rendre dans un coffee-shop lors de sa mission aux Pays-Bas et que le responsable lui avait indiqué qu'il retirait de son commerce un bénéfice mensuel de 60.000 francs, mais avait refusé de divulguer le prix auquel il achetait sa marchandise et l'identité de ses fournisseurs. Puis, le rapporteur a proposé de modifier la conclusion de son rapport pour tenir compte des remarques formulées au cours du débat.

La délégation a adopté le présent rapport.

ANNEXES

I. ANNEXE 1

A. DIRECTIVES NÉERLANDAISES EN VUE DE LA MISE EN OEUVRE DE LA POLITIQUE DE RECHERCHE ET DE POURSUITES DES INFRACTIONS À LA LOI SUR L'OPIUM, ARRÊTÉES LE 11 SEPTEMBRE 1996 ET ENTRÉES EN VIGUEUR LE 1ER OCTOBRE 1996

Les directives en vue de la mise en oeuvre de la politique de recherche et de poursuites des infractions à la loi portant dispositions en matière d'opium et autre stupéfiants, ci-après désignés loi sur l'Opium de 1976, ont été complétées en 1994 par de nouvelles directives concernant les coffee-shops. Pour un certain nombre de raisons, ces directives sont aujourd'hui adaptées et actualisées.

La première des ces raisons est la parution, en septembre 1995, du rapport intitulé " La politique en matière de drogue aux Pays-Bas : continuité et changement", dans lequel le gouvernement expose sa politique pour les années à venir. Ce rapport apporte, sur certains points de la politique, des changements inspirés par les développements dans les domaines tant social (apparition de nouveaux produits sur le marché, changements au niveau de la consommation, des consommateurs et de la criminalité, nuisances, recul de la tolérance), qu'international et politique (conséquences de la politique néerlandaise pour les pays voisins, acceptation de la politique néerlandaise à l'étranger, tourisme de la drogue). Un certain nombre de ces changements, qui ont un impact sur la politique de recherche et de poursuites du ministère public, ont été pris en compte dans ces nouvelles directives.

En deuxième lieu, il existe un besoin d'uniformisation de la politique en matière d'action pénale. Il est apparu, en effet, que les différents ressorts judiciaires avaient développé leurs propres directives dans ce domaine. Il est souhaitable, pour garantir l'uniformité du droit et l'égalité juridique, d'harmoniser ces directives.

Enfin. la loi sur l'Opium a été modifiée plusieurs fois depuis 1976, notamment en ce qui concerne les peines (loi sur les sanctions pécuniaires). En outre, la liste H faisant partie de la loi a été modifiée à la suite de la ratification, par les Pays-Bas, de la Convention des Nations Unies contre le trafic illicite de stupéfiants et de substance s psychotropes (1971), et ces modifications n'avaient pas encore été intégrées dans les directives.

Les principales modifications des directives sont les suivantes.

En premier lieu, on se préoccupe aujourd'hui explicitement des conséquences possibles de la politique néerlandaise sur les relations entre les Pays-Bas et leurs voisins, que ce soit dans le domaine de la coopération avec les autorités étrangères, ou encore dans celui des répercussions transfrontalières de la politique néerlandaise en matière de recherche et de poursuites des infractions. A cela s'ajoute que la Convention d'application de l'Accord de Schengen y appelle, elle aussi.

Dans ce contexte, il y a aussi lieu de se préoccuper des coffee-shops qui se livrent à la vente de stocks, à usage commercial ou personnel, destinés à l'exportation.

Il peut être souhaitable de rechercher périodiquement les personnes non domiciliées aux Pays-Bas et qui y achètent des quantités de drogues, dures ou douces. à usage commercial, aux fins d'exportation. Le ministère public doit s'efforcer d'arriver à une bonne coopération avec les instances étrangères en matière de recherche et de poursuites tout particulièrement dans le cadre de la lutte contre le tourisme de la drogue.

Cela vaut aussi bien pour la recherche et les poursuites que pour la transmission des poursuites judiciaires dans les cas où les Pays-Bas n'ont pas un intérêt majeur à procéder aux poursuites sur leur propre territoire.

En deuxième lieu., les directives exposent la politique néerlandaise en matière de poursuite de la culture de cannabis. Il est en effet apparu que la culture du nederwiet (la variété néerlandaise de cannabis) a connu un formidable essor, ces dernières années. Il faut absolument y mettre un terme. Les directives prévoient à cet effet une action en conformité avec le rapport du gouvernement sur la politique en matière de drogue.

Troisièmement, les directives ont été adaptées en ce qui concerne les coffee-shops. Outre le fait que la quantité autorisé à la vente a été ramenée de 30 grammes à 5 grammes, les directives indiquent plus clairement que par le passé que la politique en matière de coffee-shops est définie au sein de consultations tripartites entre la commune, le ministère public et la police, et ce, naturellement, dans le cadre de la directive. Cela peut aussi signifier qu'aucun coffee-shop ne sera toléré dans une commune donnée et que s'il s'en ouvre, le ministère public est autorisé à intervenir, même en l'absence d'infraction aux critères ADNJG (voir ci-dessous, Troisième partie, 3). Le ministère public n'est du reste pas le seul à devoir veiller au respect de l'"option zéro" au niveau local. Un autre point à discuter dans le cadre de la concertation tripartite est celui du stock maximal dont peut disposer un coffee-shop. Le maximum est généralement de 500 grammes, mais une quantité inférieure peut être fixée au sein des consultations tripartites.

Enfin, la directive a été complétée par deux annexes contenant les critères applicables aux poursuites, qui harmonisent les directives en vigueur jusqu'à ce jour dans les cinq ressorts judiciaires et qui prévoient qu'il y a lieu de prendre en compte un certain nombre de circonstances spécifiques aggravantes, telles que la vente à des groupes vulnérables (scolaires, malades psychiatriques) ou la vente à proximité d'établissements scolaires ou de cliniques psychiatriques, et de quelle manière ces circonstances doivent être prises en compte.

Il existe du reste assez fréquemment, au niveau local, des nuisances imputables aux épiphénomènes qui accompagnent la consommation de drogues dures par des toxicomanes en errance. Dans l'intérêt de l'ordre public, l'action contre ces nuisances sera d'abord administrative, mais elle pourra être appuyée, au besoin, par un arsenal d'instruments répressifs.

Des initiatives locales ont été déployées dans ce cadre Pour créer des lieux spécifiquement destinés aux consommateurs de drogues, où les toxicomanes peuvent consommer leur dose sans occasionner de nuisances et où un personnel d'encadrement est Généralement présent, étant entendu que la fourniture ou le trafic de drogues -fût-ce en quantités destinées à l'usage personnel- y sont interdites et poursuivies, et ce afin d'éviter que ces lieux n'aient un pouvoir d'attraction et n'entraînent d'autres effets négatifs.

Une telle situation de tolérance ne peut exister que dans le cadre plus large d'une approche intégrée, à formuler au sein des consultations tripartites et préservant les intérêts de la santé et de l'ordre public.

La directive est organisée comme suit.

La première partie des Directives expose les principes généraux de la politique de recherche et de poursuite dans le cadre de la loi sur l'Opium.

La deuxième partie énonce les directives en matière d'infractions liées aux drogues dures, autres que la possession d'une petite quantité destinée à l'usage personnel. La troisième partie énonce les directives en matière d'infractions liées aux produits du chanvre, autres que la possession d'une petite quantité destinée à l'usage personnel. Les quatrième et cinquième parties énoncent les directives en matière d'infractions liées à la possession d'une petite quantité respectivement de drogues dures et de produits du chanvre destinée à l'usage personnel.

Dans les annexes sont exposées les directives en matière de sanctions à requérir contre les infractions liées aux drogues dures (Annexe A et aux drogues douces (annexe B). Enfin, l'annexe C indique quels sont les critères permettant d'apprécier le caractère professionnel ou non de la culture du cannabis.

1. Principes généraux

Le principe général de la politique néerlandaise en matière de drogue est la distinction, établie dans la loi sur l'Opium, entre les stupéfiants présentant un risque inacceptable pour la santé publique (drogues dures) et les drogues présentant un risque moindre (drogues douces). Le législateur a établi cette distinction en se fondant sur les risques induits par la consommation des différentes drogues et dans le but d'établir une séparation nette entre les deux marchés. Il a aussi établi une distinction entre trafiquants et usagers , de manière à empêcher que les consommateurs de cannabis n'aient accès au marché des drogues dures, directement lié à la criminalité.

Dans le cadre de la politique suivie en matière de coffee-shops et de " lieux de consommation " les directives parlent d'infractions "tolérées". Dans d'autres cas, la recherche des infractions ne jouit que d'une faible priorité.

La politique de tolérance est fondée sur l'appréciation des intérêts, un intérêt général supérieur évident devant l'emporter sur le respect de la loi. Dans le contexte de la politique en matière de drogue, cet intérêt supérieur est celui de la santé publique (séparation des marchés) et de l'ordre public. Il est donc sciemment décidé de ne pas rechercher et de ne pas poursuivre certaines infractions, quels que soient les effectifs de police disponibles.

L'attribution d'une faible priorité à certaines catégories d'infractions procède généralement de l'appréciation de la gravité relative des infractions et, très souvent, de considérations d'effectifs policiers.

Petite quantité destinée à l'usage personnel

L'article 10, paragraphe 5, de la loi sur l'Opium prévoit une peine maximale moins élevée pour les substances figurant sur la liste I, s'il s'agit d'une petite quantité, destinée à l'usage personnel.

On entend par "  petite. quantité " les unités de consommation -généralement proposées (1 boulette, 1 joint, 1 pilule, 1 dose ou 1/2 gramme). Pour les produits du chanvre (liste IIb), cette petite quantité est de 5 grammes.

Une politique répressive distincte est toutefois appliquée en cas de détention de petites quantités de drogues - dures ou douces- dont on présume qu'elles sont destinées à la vente.

Le principe fondamental de la politique à l'égard des coffee-shops est que ces établissements ne doivent pas vendre d'alcool. La raison en est notamment que l'on réduit ainsi le segment d'activité économique à contrôler, tout en limitant la partie de la population susceptible d'entrer en contact avec les drogues douces. Les communes disposent d'instruments pour réglementer le secteur de la restauration sans boissons alcoolisées.

Exception faite de la méthadone, le principe est qu'un seul et unique régime est applicable à toutes les substances figurant sur la liste I de la loi sur l'Opium.

Dans la perspective de la fixation des peines, les directives établissent une distinction -dans la mesure où celle-ci est pertinente- entre les différentes catégories d'auteurs (membres d'organisations criminelles, trafiquants, petits trafiquants et usagers). Une telle catégorisation n'est pas faite pour l'importation et l'exportation, en raison de la grande diversité non seulement des auteurs, mais aussi des circonstances dans lesquelles les infractions sont commises.

Dans les cas de crime. organisé, l'article 140 du Code pénal sera appliqué dans la mesure du possible.

Une attention toute particulière doit être accordée, dans les poursuites, à la confiscation des avantages acquis grâce à des infractions (article 36e du Code pénal).

Saisie et renonciation

Lorsqu'une infraction à la loi sur l'Opium est constatée, toutes les substances découvertes figurant sur la liste I et/ou la liste II doivent en tout cas être saisies, à l'exception de la méthadone pour autant qu'il s'agisse d'une quantité destinée à l'usage personnel et obtenue sur ordonnance médicale.

Absence de directives pour certaines infractions

Les infractions décrites à l'article 3b, paragraphe 1 (publications ayant un caractère d'incitation) et à l'article 4, paragraphe 3, sous a et b (falsification d'ordonnances) de la loi sur l'Opium présentent un caractère si particulier et peuvent être tellement différentes les unes des autres qu'il n'est guère possible d'édicter des directives. La politique devra être arrêtée au cas par cas en concertation entre le ministère public et la police, sauf dans les deux cas suivants, pour lesquels des directives ont été édictées. Il s'agit tout d'abord de la publicité pour la vente de cannabis - y compris toute la gamme de revues et de publications dans les médias et les annuaires - dont la recherche doit faire l'objet d'une attention particulière. En second lieu, il s'agit de la falsification d'ordonnances portant sur une faible quantité destinée à l'usage personnel.

2. Directives concernant les infractions liées aux substances figurant sur la liste 1 (drogues dures), autres que la possession d'une petite quantité destinée à l'usage personnel

Les agissements interdits relatifs aux substances figurant sur la liste 1 sont décrites à l'article 2 de la loi sur l'Opium. Il existe trois catégories d'infractions.

2.1. Importation sur le territoire des Pays-Bas et exportation hors du territoire des Pays-Bas

L'article 2, paragraphe 1, sous A, de la loi sur l'Opium interdit l'importation sur le territoire des Pays-Bas ou l'exportation hors de ce territoire des substances figurant sur la liste I.

Celui qui viole intentionnellement cette interdiction est passible d'une Peine d'emprisonnement de 12 ans au plus et/ou d'une amende de 100 000 florins (article 10, paragraphe 4, de la loi sur l'Opium).

L'importation et l'exportation portant sur des quantités destinées à la distribution impliquent presque toujours plusieurs auteurs dans le pays de provenance et dans le pays de destination. L'auteur peut être, par exemple, commanditaire/propriétaire de l'envoi, pourvoyeur ou transporteur effectif, " controller " (celui qui surveille le pourvoyeur et/ou le transport) ou encore celui qui prend livraison de l'envoi. Dans les réseaux encore plus vastes, d'autres personnes sont souvent encore impliquées, notamment au niveau de la livraison au pourvoyeur ou au transporteur. du règlement des transports transfrontaliers et/ou de la réception.

C'est en raison de cette diversité que la directive relative à l'action pénale a été formulée en termes très généraux. Il peut néanmoins être nécessaire parfois d'y déroger, notamment sur la base du rôle joué par un prévenu dans un cas donné. Si le cas se répète, le procureur principal de la Reine doit en avertir le Collège des Procureurs généraux.

Si le fait concerne une petite quantité destinée à l'usage personnel, la peine maximale prévue par la loi sur l'Opium est plus légère. Voir à ce sujet les directives énoncées au paragraphe 4.

Recherche : recherche ciblée ; garde à vue ;

Poursuites : demande de détention provisoire ;

Peine à requérir : voir annexe A.

2.2 Fabrication, préparation, transformation, traitement, vente, livraison, fourniture et transport

L'article 2, paragraphe 1, sous B, de la loi sur l'Opium interdit de préparer, de transformer, de traiter, de vendre, de livrer, de distribuer et de transporter des substances figurant sur la liste I.

L'article 2, paragraphe 1, sous D, de la loi sur l'Opium, interdit de fabriquer des substances figurant sur la liste I.

Celui qui viole intentionnellement cette interdiction est passible d'un peine d'emprisonnement de 8 ans au plus et/ou d'une amende de 100 000 florins (article 10, paragraphe 3, de la loi sur l'Opium).

Pour cette catégorie d'infractions, il importe peu qu'il s'agisse ou non d'une petite quantité destinée à l'usage personnel.

Recherche : recherche ciblée ; garde à vue ;

Poursuites : demande de détention provisoire (avec assistance précoce par des organismes d'aide s'il s'agit de petits trafiquants eux-mêmes consommateurs) ;

Peine à requérir : voir annexe A.

2.3. Détention

L'article 2, paragraphe 1, sous C, de la loi sur l'Opium interdit de détenir des substances figurant sur la liste I.

Celui qui viole intentionnellement cette interdiction est passible d'une peine d'emprisonnement de 4 ans au plus et/ ou d'une amende de 100 000 florins (article 10, paragraphe 2, de la loi sur l'Opium).

La peine maximale prévue par la Loi sur l'Opium est moins élevée lorsque l'infraction porte sur une petite quantité destinée à l'usage personnel (voir paragraphe 4). Lorsqu'un prévenu est trouvé en possession d'une quantité de substances figurant sur la liste I plus élevée qu'"une petite quantités destinée à l'usage personnel", il est présumé détenir cette quantité de substances en vue de commettre des actes décrits à l'article 2, paragraphe 1, sous A et B de la Loi sur l'Opium.

Recherche : recherche ciblée ; garde à vue ;

Poursuites : demande de détention provisoire (avec assistance précoce par des organismes d'aide s'il s'agit de petits trafiquants eux-mêmes consommateurs ;

Peine à requérir : voir annexe A.

3. Directives concernant les infractions liées à des substances figurant sur la liste II, sous b (produits du chanvre), en quantités égales ou supérieures à 30 grammes.

Les infractions relatives aux substances figurant sur la liste II. sous b, (produits du chanvre) sont décrites à l'article 3, paragraphe 1, de la loi sur l'Opium. Il y a lieu de distinguer deux catégories d'infractions.

3.1 Importation sur le territoire des Pays-Bas et exportation hors du territoire des Pays-Bas.

L'article 3, paragraphe 1, sous A, de la loi sur l'Opium interdit l'importation sur le territoire des Pays-Bas et l'exportation hors du territoire des Pays-Bas des substances figurant sur la liste II. Celui qui viole intentionnellement cette interdiction est passible d'une peine d'emprisonnement de 4 ans au plus et/ou d'une amende de 100 000 florins (article 11, paragraphe 3).

Si, formellement, la quantité impliquée importe peu dans le cas de ces infractions, il est cependant logique de tenir compte, lors de la recherche et des poursuites, des quantités découvertes. En effet, il ressort de l'article 11 de la loi sur l'Opium que les infractions décrites à l'article 3, paragraphe 1, sous B, C, et D, sont des contraventions lorsqu'elles portent sur des quantités égales ou inférieures à 30 grammes.

Concernant les produits du chanvre, est considérée comme une petite quantité destinée à l'usage personnel une quantité de 5 grammes au plus. Pour les quantités égales ou inférieures à 5 grammes, ni la garde à vue, ni la détention provisoire ne s'imposent. Voir paragraphe 5.

La règle générale concernant l'importation sur le territoire des Pays-Bas et l'exportation hors des Pays-Bas est la suivante :

Recherche : recherche ciblée ; garde à vue ;

Poursuites : demande de détention provisoire ;

Peine à requérir : voir annexe B.

3.2 Fabrication, préparation, transformation, traitement, vente, livraison, fourniture, transport et détention

L'article 3, paragraphe 1, sous B, de la loi sur l'Opium interdit la préparation, la transformation, le traitement, la vente, la livraison, la fourniture et le transport des substances figurant sur la liste II ;

L'article 3, paragraphe 1, sous C, de la loi sur l'Opium interdit la détention des substances figurant sur la liste II ;

L'article 3, paragraphe 1, sous D, de la loi sur l'Opium interdit la fabrication des substances figurant sur la liste II ;

Celui qui viole intentionnellement ces interdictions est passible d'une peine d'emprisonnement de 2 ans au plus et/ou d'une amende de 25 000 florins (article 11, paragraphe 2, de la loi sur l'Opium).

Ici aussi, la recherche et les poursuites sont fonction des quantités en cause.

Culture de cannabis

Aussi longtemps que n'auront pas été prises des dispositions légales distinctes, l'article 3, paragraphe 1, sous C de la loi dur l'Opium s'applique également à la culture de cannabis, à l'intérieur comme à l'extérieur, ainsi qu'aux boutures dans des boutiques spécialisées, les growshops . Il est logique d'adopter un règlement spécifique pour ce matériel végétal vivant, les quantités concernées ayant tôt fait de dépasser les 5 grammes.

La priorité va à la culture professionnelle du cannabis. L'appréciation du caractère professionnel de cette culture ne fait pas uniquement intervenir le nombre de plants et de récoltes par an ; d'autres facteurs (éclairage, chauffage, arrosage, par exemple), indiqués dans l'annexe C, jouent aussi un rôle. Ils doivent être expressément mentionnés dans les procès-verbaux.

La culture de petites quantités destinées à l'usage personnel ne jouit pas de la priorité dans la recherche et les poursuites, -si elle est le fait d'adultes. En revanche la culture de cannabis par des mineurs sera toujours poursuivie.

Citons encore les possibilités offertes par la loi sur la gestion de l'environnement de lutter contre la culture illicite de cannabis. Aux termes de cette loi, la création et/ou l'exploitation d'un établissement pouvant avoir des effets nuisibles sur l'environnement sont soumis à autorisation (article 8. 1, paragraphe 1, rapproché de l'article 1. 1, paragraphes 3 et 4).

Les possibilités offertes par le droit administratif, d'une part, et par le droit pénal, d'autre part, devront être utilisées de façon complémentaire. La consultation tripartite est le forum adéquat pour conclure des accords sur ce plan.

Recherche : recherche ciblée ; garde à vue

Poursuites : pas de demande de détention provisoire, sauf en présence d'un intérêt majeur de sûreté publique énoncés à l'article 67a, paragraphe 2, du Code de procédure pénale, tel qu'un risque pour la santé publique ou l'intérêt de l'enquête, ou s'il y a lieu d'appliquer l'article 140 du Code pénal ;

Peine à requérir : voir annexe B.

3.3 Les coffee-shops

Les coffee-shops sont des débits de boissons non alcoolisées où s'effectuent le commerce et la consommation de drogues douces. On les appelle aussi, parfois. reggaebar, koffiehuis, shoarina-huis, sappenbar , etc. Les présentes directives les ont réunis sous l'appellation de coffee-shops, parce que c'est le terme le plus fréquemment utilisé. Leur nombre a considérablement augmenté ces dernières années. Compte tenu notamment des nuisances qu'ils entraînent, la nécessité s'impose dans un nombre croissant de localités, d'en réduire le nombre.

Comme déjà signalé dans l'introduction, la concertation tripartite peut décider de ne tolérer aucun coffee-shop dans une commune donnée.

Le ministère public coopère avec les autorités locales pour l'élaboration et l'application au niveau local d'une politique intégrale en matière de coffee-shops. qui recoure de façon équilibrée aux divers instruments à disposition. ( La structure et les instruments juridiques prévus pour cette politique intégrale sont indiqués dans le rapport du groupe de travail " Drogues et nuisances " publié sous la direction de P.H.A.J. Cremers en février 1993, et dans le rapport " La politique en matière de drogue, notamment à l'égard des coffee-shops", publié par 1'Association des Communes néerlandaises en janvier 1994 .)

Le rôle actif joué par le ministère public indique que la Justice souscrit à l'intérêt de cette approche, qu'il soutient pénalement l'action administrative et qu'il engage sa propre responsabilité.

L'appréciation de la question de savoir si un coffee-shop - rappelons que les coffee-shops sont interdits par la loi - doit faire l'objet de poursuites pénales est basée sur les critères suivants :

A. pas d'affichage : c'est-à-dire absence de toute publicité, à l'exception d'indications sommaires dans l'établissement ;

D. pas de drogues dures : c'est-à-dire que la détention et/ou la vente de drogues dures sont interdites ;

N. pas de nuisances : on entend par là les nuisances occasionnées par le stationnement aux alentours des coffee-shops, les nuisances sonores, les souillures et/ou la présence des clients devant ou à proximité des coffee-shops ;

J. pas de vente aux mineurs et interdiction de l'accès des coffee-shops aux mineurs compte tenu de l'augmentation de la consommation de cannabis parmi les jeunes, il a été décidé d'appliquer strictement la limite d'âge de 18 ans ;

G. pas de vente de grandes quantités par transaction : c'est-à-dire pas de vente de quantités supérieures à celles destinées à l'usage personnel, soit 5 grammes. Par " transaction " on entend tout achat et toute vente, dans un coffee-shop donné, un jour donné, à un acheteur donné.

Ces interdictions s'adressent à l'exploitant du coffee-shop, en particulier l'interdiction de l'accès des coffee-shops aux mineurs : l'exploitant est autorisé à exiger des personnes pénétrant dans l'établissement qu'elles justifient de leur identité. La loi portant obligation de justifier de son identité ne prévoit pas l'obligation pour les personnes présentes dans un coffee-shop de justifier de leur identité devant un fonctionnaire de la police judiciaire. Rien n'empêche toutefois que l'on demande à ces personnes de se soumettre (volontairement) à un contrôle d'identité. La minorité d'un jeune peut, en outre, apparaître ou être prouvée par d'autres moyens.

Si les conditions énoncées ci-dessus sont respectées, les coffee-shops tolérés sur la base de la concertation tripartite ne sont pas poursuivis.

La structure et les instruments juridiques prévus pour cette politique intégrale sont indiqués dans le rapport du groupe de travail "Drogues et nuisances ", publié sous la direction de P.H.A.J. Cremers (février 1993), et dans le rapport "La politique en matière de drogue, notamment à l'égard des coffee-shops ", publié par l'Association des communes néerlandaises (janvier 1994).

Pour pouvoir maîtriser et contrôler la situation, ces dispositions ne s'appliquent expressément pas à la vente de drogues douces dans, par exemple, les débits de boissons, les magasins et les centres de distribution, ou par l'intermédiaire de pourvoyeurs ou de taxis, de numéros verts (06), de sociétés de vente par correspondance ou encore selon d'autres voies. Dans la mesure où de telles situations ont été tolérées dans le passé, la politique doit viser à y mettre fin.

Si la concertation tripartite a opté pour l'option zéro (aucun coffee-shop dans la coriunune), des poursuites peuvent être engagées contre les coffee-shops qui s'établissent néanmoins dans la commune, même s'ils respectent les critères susmentionnés. Mais la fermeture des coffee-shops relève de la seule compétence des autorités locales.

C'est également à la concertation tripartite qu'il revient de fixer la quantité maximale de drogues douces pouvant être détenues par les coffee-shops tolérés. La détention d'un stock commercial inférieur au maximum autorisé n'est en principe pas poursuivie. Dans tous les cas, le stock ne devra pas être supérieur à 500 grammes. En cas de non-respect par un coffee-shop toléré des critères susmentionnés, l'exploitant et le propriétaire du coffee-shop s'exposent au risque de poursuites pour la détention d'un stock de drogues destinées à la vente.

Il est également possible d'engager des poursuites pour infraction à l'article 3b de la loi sur l'Opium. en cas de publicités en vue de la vente, de la livraison ou fourniture de produits du cannabis, par exemple sous la forme d'annonces dans des revues et lors d'événements.

4. Directives relatives aux infractions liées à de faibles quantités, destinées à l'usage personnel, de substances figurant sur la liste 1 (drogues dures)

L'article 2, paragraphe 1, sous 4, de la loi sur l'Opium interdit l'importation sur le territoire des Pays-Bas et l'exportation hors des Pays-Bas des substances figurant sur la liste I ;

L'article 2, paragraphe 1, sous C, de la loi sur l'Opium interdit la détention des substances figurant sur la liste I ;

L'article 4, paragraphe 3, de la loi sur l'Opium interdit la falsification d'ordonnances pour des substances figurant sur la liste I.

La peine maximale est une peine d'emprisonnement d'un an et/ou une amende de 10 000 florins (article 10, paragraphe 5, de la loi sur l'Opium).

Si les agissements susmentionnés portent sur de petites quantités destinées à l'usage personnel, la peine maximale est moins élevée. Dans de tels cas, la priorité devra aller à l'assistance au consommateur. Il devra être pris contact à un stade aussi précoce que possible avec un bureau de consultation pour l'alcoolisme et la toxicomanie et d'éventuelles autres institutions d'aide.

Recherche : pas de recherche ciblée ; pas de garde à vue ;

Poursuites : exclusivement dans un but d'assistance ;

Peine à requérir : voir annexe, A.

5. Directives relatives aux infractions liées à des quantités inférieures à 30 grammes des substances figurant sur la liste II, sous b.

L'article 3, paragraphe 1, sous B, de la loi sur l'Opium interdit la préparation, la transformation, le traitement, la vente, la livraison, la fourniture et le transport de substances de la liste II ;

L'article 3, paragraphe 1, sous C, de la loi sur l'Opium interdit la détention de substances de la liste II ;

L'article 3, paragraphe 1, sous D, de la loi sur l'Opium interdit la fabrication de substances de la liste II.

Celui qui viole ces interdictions est passible, si les quantités ne sont pas supérieures à 30 grammes, d'une peine d'emprisonnement d'au mois au plus et/ou d'une amende de 5 000 florins (s'agissant d'une contravention et non d'un délit, cf. article 11, paragraphes 4 et 1, de la loi sur l'Opium).

La limite de la quantité tolérée de produits du chanvre qui peut être vendue dans les coffee-shops ayant été fixée à 5 grammes. il est logique d'appliquer en principe la même limite à la détention de tels produits. Il y a donc classement sans suite par la police pour la détention de quantités jusqu'à 5 grammes.

Recherche : pas de recherche ciblée ;

Poursuites : transaction (pour un montant m n mal de 50 florins).

Peine à requérir : voir annexe B.

B. DIRECTIVE RELATIVE AUX SUBSTANCES DE LA LISTE (DROGUES DURES)

La présente directive prévoit un régime unique pour les substances de la liste I. Il y a toutefois des différences pour ce qui est de l'indication des quantités. Celles-ci sont indiquées en granules (ou leurs subdivisions) pour l'héroïne et la cocaïne, tandis que pour les drogues de synthèse comme les amphétamines, le LSD et les drogues de type ecstasy l'unité pourra également être 1 pilule, 1 dose, etc. Ces unités (symbole " u "), sont indiqués entre parenthèses, par exemple (1 u).

Pour le commerce dans la rue/en appartement, l'indication est donnée en termes de durée du délit.

Une exception au régime général est faite pour la méthadone, qui fait l'objet d'une directive séparée. Pour les infractions b, c, d et e, le principe consiste à appliquer, outre la peine d'emprisonnement, une amende substantielle, assortie ou non de la privation des profits tirés de l'infraction.

Héroïne, cocaïne et drogues de synthèse


Peines à requérir
a. Détention

< 0,5 g (1 u)

classement sans suite (assorti de renonciation)

0,5 - 5 g (1-10 U) de 1 semaine avec sursis à 2 mois
b. Détention avec présomption d'intention de vente
jusqu'à 15 g (jusqu'à 30 u) 6 mois maximum
15-300 g (30-600 u) de 6 à 18 mois
> 300 g (> 600 u) de 18 mois à 4 ans
c. Vente
dans la rue/en appartement

durée du délit :

jusqu'à 1 mois

1-3 mois

> 3 mois

6 mois maximum

de 6 à 18 mois

18 mois et plus


En cas de vente à des personnes appartenant à des groupes vulnérables tels que les mineurs (par exemple, dans des bâtiments scolaires ou à proximité) et les malades psychiatriques, la peine à requérir est celle de la catégorie immédiatement supérieure.


intermédiaires
jusqu'à 1 kg, (jusqu'à 2 000 u)

à partir de 1 kg (à partir de 2 000 u)

de 1 à 2 ans

2 ans et plus

commerce de gros

> 5 kg (> 10 000 u)

de 6 à 8 ans

d. Production

jusqu'à 1 kg (jusqu'à 2 000 u)

à partir de 1 kg (à partir de 2 000 u)

> 5 kg (> 10 000 u)

de 1 à 2 ans

2 ans et plus

de 6 à 8 ans

e. Importation et exportation

jusqu'à 1 kg (jusqu'à 2 000 u)

> 1 kg (> 2 000 u)

3 ans maximum

de 3 à 12 ans

Méthadone

a. Détention

En quantités autres que celles destinées à l'usage personnel à des fins médicales

de 1 semaine avec sursis à 1 mois

b. Détention avec présomption d'intention de vente de 1 à 6 mois

C. DIRECTIVE RELATIVE AUX SUBSTANCES FIGURANT SUR LA LISTE II (DROGUES DOUCES)

I. Détention, préparation, transformation, traitement, vente, livraison, fourniture, transport, fabrication intentionnels de drogues dures

Le critère est la quantité de produit fini.


a. jusqu'à 5 g classement sans suite (assorti de renonciation)
b. de 5 à 30 g de 50 à 100 florins
c. de 30 à 1 000 g de 5 à 10 florins par g (éventuellement par transaction)
d. de 1 à 5 kg de 5 000 à 10 000 florins et/ou 2 semaines par kg
e. de 5 à 25 kg de 3 à 6 mois et une amende de 25 000 florins au plus
f. de 25 à 100 kg de 6 à 12 mois et une amende de 25 000 florins au plus
g. plus de 100 kg de 1 à 2 ans et une amende de 25 000 au plus

Compte tenu des quantités impliquées dans les cas c. à g., on part du principe qu'elles sont destinées à la vente. En cas de récidive dans les 5 ans, la peine requise peut être augmentée d'un quart si la peine maximale n'a pas été appliquée. En cas de vente de quantités destinées à l'usage personnel à des personnes appartenant à des groupes vulnérables de la population tels que les mineurs (par exemple dans des bâtiments scolaires ou à proximité) et les malades psychiatriques, la peine appliquée est plus élevée, l'amende minimale étant de 750 florins. En cas de récidive, ou s'il y -a lieu de présumer que la vente a été pratiquée pendant une période assez longue, la peine appliquée sera au moins celle de la catégorie d.

II. Importation sur le territoire des Pays-Bas ou exportation hors des Pays-Bas de drogues douces

Pour l'importation et l'exportation, la loi n'établit pas de distinction en fonction de la quantité. Tout agissement violant l'interdiction de l'article 3, paragraphe 1, sous A, de la loi sur l'Opium est un délit ou un crime : dans ce cas, la peine requise au titre du paragraphe I peut être doublée (jusqu'à un maximum de 4 ans d'emprisonnement et de 100 000 florins d'amende).

III. Détention intentionnelle (culture)

Le critère est la quantité de produit fini. Le nombre de plants, leur taille ainsi que le nombre de récoltes par an peuvent servir d'indicateurs de la quantité présumée.


a. jusqu'à 5 plants classement sans suite (assorti de renonciation)
b. de 5 à 10 plants

en cas de récidive

50 florins par plant

75 florins par plant

c. de 10 à 100 plants 125 florins et/ou 1/2 jour par plant
d. de 100 à 1 000 plants de 2 à 6 mois et une amende de 25 000 florins au plus
e. plus de 1 000 plants de 6 mois à 2 ans et une amende de 25 000 florins au plus

Ad a - Le classement sans suite s'applique uniquement aux majeurs. La culture par des mineurs devra toujours être recherchée et poursuivie.

Ad c à e - En cas de récidive dans les 5 ans, la peine requise peut être majoré, de 1/4 si la peine maximale n'a pas été appliquée. Si l'activité est effectuée de façon professionnelle, une peine plus élevée devra être requise. Les indicateurs d'activité professionnelle à prendre en compte dans le procès-verbal et devant faire l'objet d'une appréciation rigoureuse figurent dans le tableau ci-après.

Substances de la sous-division a de la liste Il


a. Détention

avec présomption d'intention de vente

5 florins par pilule


D. INDICATEURS D'ACTIVITÉ PROFESSIONNELLE CONCERNANT LA CULTURE DE CANNABIS

II. ANNEXE 2

Rapport d'étape du Gouvernement néerlandais sur la mise en oeuvre de la politique de recherche et de poursuites des infractions à la loi sur l'opium, arrêtées le 11 septembre 1996 et entrées en vigueur le 1er octobre 1996

Dans le débat sur le Rapport relatif à la politique en matière de drogue aux Pays-Bas, publié en 1995, le Parlement néerlandais a souscrit à la conclusion du gouvernement, selon laquelle la politique néerlandaise de dissuasion et de réduction des dommages a, de manière générale, porté ses fruits et sera donc poursuivie. Pour veiller à ce que l'approche de la question reste équilibrée, il faudra accorder une attention suffisante à toutes les facettes du problème. Le 17 septembre, le gouvernement informera le Parlement, par écrit, où en sont les choses dans la mise en oeuvre du rapport, notamment sur les points principaux suivants.

Ecstasy :

Plus que par le passé, la lutte contre la production et le commerce de drogues de synthèse illicites sera pour le ministère public une priorité à part entière. La loi sur la prévention du détournement de substances chimiques, entrée en vigueur en 1995, permet de lutter contre le commerce de précurseurs (des substances qui ne sont pas illicites en elles-mêmes, mais qui peuvent entrer dans la fabrication de drogues), lorsqu'il a pour objet la fabrication de substances illicites. L'importation et l'exportation de précurseurs sont soumises au contrôle douanier.

Une équipe spécialement chargée de coordonner au niveau national l'analyse et la mise en oeuvre du dépistage d'ecstasy et d'autres drogues de synthèse sera créée, si possible encore en 1996. Dans cette équipe coopéreront, sous la direction du ministère public, notamment la douane, le CRI, la police et le Service de la Sécurité intérieure. L'amélioration de la coopération internationale dans la lutte contre les effets transfrontaliers a été engagée dans le cadre de contacts bilatéraux avec l'Allemagne, la France et le Royaume-Uni. Un certain nombre d'institutions faisant autorité en la matière et d'universités ont entrepris une étude commune des effets médicaux et pharmacologiques de l'ecstasy, visant à améliorer la connaissance des symptôme pathologiques et des profils à risques.

Répression du trafic de drogue transfrontalier :

La contribution des Pays-Bas à la lutte contre le trafic international de drogue ne le cède en rien ni au niveau des efforts engagés ni en ce qui concerne les résultats, aux autres pays européens. Il n'en reste pas moins que l'importance du volume de drogues transitant par les Pays-Bas oblige à renforcer encore les contrôles aux frontières extérieures et la coopération internationale.

A cet effet, le port de Rotterdam sera doté notamment d'un scanner pour conteneurs. L'acquisition d'un tel appareillage est envisagée pour Schiphol et le port d'Amsterdam. Dans les aéroports et les ports maritimes, le renforcement des effectifs sera encore intensifié par la création d'équipes spéciales au sein desquelles coopèrent les services de recherche concernés. Dans le cadre du troisième pilier de l'Union européenne, on s'emploie à améliorer la coopération dans la lutte contre les filières de la drogue en Europe. Des accords ont été conclus avec l'Allemagne, la Belgique et le Luxembourg en vue d'intensifier la coopération policière. Un mémorandum d'entente concernant la coopération douanière avec la France ne demande plus qu'à être signé. Entre temps ont déjà lieu, à échelle réduite, des échanges entre des fonctionnaires de police et des agents des douanes français et néerlandais.

Cannabis :

La nouvelle directive du ministère public, qui entre en vigueur le 1er octobre, accorde notamment la priorité au dépistage de la culture industrielle de cannabis. Le décret d'application de la loi sur l'Opium, qui autorise la culture de cannabis pour la production de fibres ou de semences ou à titre de coupe-vent, sera modifié. Cette exception à des fins agricoles ne s'appliquera plus à la culture en serre ou à l'intérieur. Il deviendra ainsi plus facile de lutter contre la culture du nederwiet, qui a lieu à 90 % sous serre ou dans des locaux d'habitation. Parallèlement, la peine maximale d'emprisonnement pour la culture de nederwiet sera portée de deux ans à quatre ans. La pénalisation de détention et de la vente, par correspondance ou directe, de semences de cannabis, ainsi que des activités y afférentes telles que la réclame, est encore à l'étude.

Coffee-shops :

Le nombre de coffee-shops a déjà été réduit depuis 1994, et il le sera davantage encore. Il s'agit là du reste d'une politique relevant de la responsabilité des communes. Les directives du ministère public concernant les coffee-shops seront durcies. La quantité de cannabis autorisée par transaction sera ramenée de 30 à 5 grammes. L'entrée dans un coffee-shop sera interdite aux jeunes de moins de 18 ans. Le ministre de la Justice a diligente une enquête pour savoir s'il est possible d'interdire la vente de drogues douces aux non-résidents. Jusqu'à présent, on a toujours considéré qu'une telle interdiction était contraire à la Constitution.

Prévention :

L'évolution rapide de la consommation de drogues rend plus importante que jamais l'action préventive. C'est la raison pour laquelle l'information sur les risques de l'usage de drogue sera renforcée. Une vaste campagne d'information sera lancée le 1er novembre 1996 pour informer les jeunes, les parents et les éducateurs sur les risques de l'usage de cannabis. Au printemps de 1997 suivra une campagne similaire pour l'ecstasy.

Rétention pénale des toxicomanes :

Une expérience sera lancée fin 1996 à Rotterdam dans le cadre de laquelle des toxicomanes causant systématiquement des nuisances pourront être mis en détention de longue durée et soumis à un programme très rigoureux de resocialisation. Après évaluation de l'expérience de Rotterdam, au moins trois autres villes lanceront un programme similaire en 1988.

Distribution d'héroïne :

Le ministère de la Santé, du Bien-être et des Sports prépare une étude scientifique sur les effets de la distribution d'héroïne à des fins médicales à des toxicomanes dont l'état ne laisse aucun espoir de guérison. Une commission a été créée pour définir l'objet précis de l'étude et veiller à son exécution. L'objet de l'étude sera soumis à l'appréciation de conseillers scientifiques internationaux, à la Commission centrale de l'éthique et de la recherche médico-scientifique et à l'Organe international de contrôle de contrôle des stupéfiants.

17/09/1996



(1) Voir les rapports du Sénat :

- n° 167 (1991-1992) fait le 11 décembre 1991 par M. Paul MASSON, président et M. Xavier de VILLEPIN, rapporteur au nom de la commission de contrôle chargée d'examiner la mise en place et le fonctionnement de la convention d'application de l'accord de Schengen du 14 juin 1985 , créée en vertu d'une résolution adoptée par le Sénat le 26 juin 1991 ;

- n° 72 (1992-1993) déposé par M. Gérard LARCHER le 1er décembre 1992 au nom de la mission commune d'information chargée d'examiner la mise en place et le fonctionnement de la convention d'application de l'accord de Schengen du 14 juin 1985 sur le trafic de la drogue dans l'espace Schengen ;

- n° 384 (1992-1993) de M. Xavier de VILLEPIN fait le 23 juin 1993 au nom de la mission commune d'information chargée d'examiner la mise en place et le fonctionnement de la convention d'application de l'Accord de Schengen du 14 juin 1985 ;

- n° 262 (1993-1994) de M. Xavier de VILLEPIN fait le 25 janvier 1994 au nom de la mission commune d'information chargée d'examiner la mise en place et le fonctionnement de la convention d'application de l'Accord de Schengen du 14 juin 1985 ;

- n° 117 (1994-1995) fait le 7 décembre 1994 par M. Paul MASSON au nom de la délégation du Sénat pour l'Union européenne sur l'Europe et sa sécurité intérieure ;

- n° 235 (1994-1995) fait le 15 mars 1995 au nom de la délégation du Sénat pour l'Union européenne par M. Paul MASSON sur Europol et la lutte contre les trafics de drogue ;

- n° 316 (1994-1995) fait le 16 juin 1995 par M. Paul MASSON au nom de la délégation du Sénat pour l'Union européenne sur la phase initiale d'application des Accords de Schengen ;

- n° 155 (1995-1996) fait le 21 décembre 1995 par M. Nicolas ABOUT au nom de la délégation du Sénat pour l'Union européenne sur l a troisième conférence interparlementaire de suivi de Schengen (Luxembourg, décembre 1995)

(2) Directive rédigée par le collège des procureurs de la Reine du 11 septembre 1996

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