2. L'automobile

Au-delà des aléas de court terme qui affecteraient la demande en raison de la suppression de la prime qualité automobile, la demande serait soumise à moyen terme à deux effets contradictoires :

- d'une part, la nécessité de remplacer les véhicules acquis à la fin des années 1980, nécessité avivée par la hausse des exigences du contrôle technique ;

- d'autre part, la mise en place de normes techniques plus sévères pour les véhicules neufs comme pour les véhicules en circulation (contrôle technique notamment), qui serait un obstacle à la réduction des coûts d'achat et d'entretien des petites voitures, donc à la solvabilisation de la demande et qui pourrait dès lors inciter les consommateurs au déséquipement.

Au total, le secteur de l'automobile connaîtrait sur la période 1996-2001 une croissance de la demande de l'ordre de 2,5 % par an selon ERECO 17( * ) . Cependant, en raison d'une perte de compétitivité de l'industrie automobile française, au profit notamment des industriels japonais implantés au Royaume-Uni, la croissance moyenne de la production française serait limitée à 2,1 % par an en volume.

Par ailleurs, les équipementiers automobiles, qui réalisent déjà près de 60 % de la valeur ajoutée du secteur, devraient connaître une intense concentration de nature à faire apparaître une vingtaine de grands équipementiers-chefs de file avant la fin du siècle. Il est d'ailleurs permis de se demander si, à l'instar des producteurs de logiciels et de micro-processeurs dans le secteur informatique, les équipementiers automobiles ne prendront pas à terme le contrôle du secteur aux dépens des "assembleurs". Votre Rapporteur souligne que le contrôle des grands équipementiers français, qui pourraient être relativement sous-capitalisés, serait dès lors un enjeu industriel majeur selon de nombreux experts.

3. Textile-Habillement




Textile

 
 

1994

Taux de croissance annuel moyen

en volume sur la période

 
 

milliards d'ECU 1

1988-1990

1991-1994

1995-2001 2

France

Production

Marché domestique

12,9

12,5

1,0

0,2

1,1

0,0

- 1,5

- 1,0

Italie

Production

Marché domestique

26,2

22,6

1,5

2,7

1,9

0,9

0,5

- 0,5

UE 12

Production

Marché domestique

Exportations hors UE

Importations hors UE

73,2

69,4

14,2

10,4

1,6

1,8

1,6

3,2

-0,5

- 1,6

9,5

4,3

0,0

- 1,0

7,0

5,0

1 1 ECU = 6,58 F en 1994.

2 Prévisions ERECO.

Source : European Economic Research and Advisory Consortium (ERECO), juin 1996

Habillement

 
 

1994

Taux de croissance annuel moyen en volume sur la période

 
 

milliards d'ECU 1

1988-1990

1991-1994

1995-2001 2

France

Production

Marché domestique

13,3

16,8

- 0,2

1,3

- 2,3

- 1,1

- 3,0

0,0

Italie

Production

Marché domestique

24,0

16,5

3,6

3,3

1,0

1,4

0,0

1,0

UE 12

Production

Marché domestique

Exportations hors UE

Importations hors UE

76,2

94,4

32,2

14,0

1,7

3,6

8,9

- 1,0

- 0,7

1,7

11,0

5,4

- 2,5

0,5

8,0

7,0

1 1 ECU = 6,58 F en 1994

2 Prévisions ERECO

Source : ERECO.

La filière textile-habillement combinerait trois handicaps :

- une demande très sensible aux évolutions du revenu familial (dont la croissance serait très modérée sur la période 1996-2001) ;

- la poursuite de la contraction du marché intérieur, en raison d'une tendance, quasi générale en Europe, à la déconsommation de biens issus du secteur textile-habillement (la part du textile-habillement dans la consommation des ménages s'est ainsi réduite de 8 % en 1970 à 6,4 % en 1985 et 5,1 % en 1994) ;

- enfin pour l'habillement, la forte concurrence de pays à bas salaires entraînerait une pression à la baisse sur les prix (- 1 % par an sur la période 1996-2001 selon le BIPE).

En revanche, la filière pourrait être globalement bénéficiaire du démantèlement progressif de l'accord multifibres (AMF), programmé par étapes d'ici 2005. En effet, l'ouverture des marchés européens ne ferait que s'inscrire dans la continuité d'un régime dans lequel les quotas étaient sans cesse révisés à la hausse, tandis que l'ouverture des marchés du sud-est asiatique, qui en sera désormais la contrepartie, pourrait permettre des stratégies de conquête par les exportateurs européens des débouchés que représentent des classes moyennes asiatiques en plein essor. Selon ERECO, l'excédent commercial de l'Union européenne dans le textile pourrait ainsi doubler d'ici 2001. Il semblerait malheureusement que l'industrie française ait pris un certain retard sur ces nouveaux marchés par rapport à ses concurrents européens, en dépit de l'atout que représentent les capacités de promotion et de projection du luxe et du haut de gamme français 18( * ) .

Par ailleurs, dans la mesure où la majorité des échanges de textile et d'habillement s'opèrent dans un cadre européen, la filière française pourrait bénéficier à moyen terme du renforcement de l'intégration monétaire et réglementaire européennes. Celui-ci est en effet de nature à réduire les avantages concurrentiels de l'Italie (notamment en permettant la stabilisation de la lire à des parités plus favorables aux exportateurs français).

Cependant , le succès de l'Italie , premier producteur européen et le seul à maintenir sa production d'ici 2001 selon ERECO, ne proviendrait pas de moindres coûts unitaires de main-d'oeuvre (cf. tableau infra), mais de stratégies dynamiques de la part des fabricants italiens : investissements dans le design et l'image, différenciation des produits, intégration verticale avec la vente au détail qui permet une meilleure anticipation des besoins, organisation flexible en réseaux de PME travaillant en partenariat et recourant à la sous-traitance étrangère, temps de réponse rapides, positionnement sur les segments supérieurs du marché, qui sont les plus dynamiques à mesure que les baby-boomers alimentent la génération des 35-54 ans (la classe d'âge qui dépense le plus pour s'habiller).

Comparaison du coût de travail dans l'industrie textile en 1994

(États-Unis : base 100)

Allemagne de l'Ouest

Italie

France

États-Unis

Royaume-Uni

Espagne

175

132

129

100

90

72

Taïwan

Corée du Sud

Portugal

Turquie

Maroc

Chine

50

34

34

19

15

4

Source : Werner International, cité par ERECO .

L'industrie italienne préfigurerait ainsi l'évolution du secteur, avec une spécialisation croissante de l'Europe sur des niches en développement rapide (vêtements imperméables par exemple), sur les segments supérieurs du marché et sur les phases de la production comportant le plus de valeur ajoutée.

L'avis adopté à la quasi-unanimité le 27 mars 1996 par le Conseil économique et social soulignait ainsi que la filière textile-habillement française était confrontée à une double nécessité :

- d'une part, réorienter progressivement la filière vers les processus de production pour lesquels nous disposons d'avantages comparatifs (innovation, technologie, salariés hautement qualifiés), ce qui suppose de favoriser l'investissement immatériel et la " requalification des salariés " ;

- d'autre part, favoriser l'émergence de filières intégrées , organisées autour de la distribution , afin d'anticiper ou de réagir très rapidement à l'évolution des besoins et des goûts des consommateurs.

Ce processus impliquerait la poursuite de gains de productivité rapides (la productivité du travail s'est déjà accrue de 30 % entre 1988 et 1994 dans le secteur textile, contre seulement 12 % pour l'ensemble du secteur manufacturier) et une nouvelle contraction de l'emploi .

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