III. LE RETARD FRANCAIS

Le retard pris par la France, en ce qui concerne son entrée dans la société de l'information, est aujourd'hui incontestable - et, d'ailleurs, incontesté même si la situation évolue favorablement depuis quelques mois.

Il a été abondamment analysé dans de nombreux rapports (notamment ceux du groupe de travail présidé par Thierry Mileo , de M.Pierre Laffitte , au nom de l'OPECST, et de la mission commune sénatoriale d'information...).

Selon le graphique p. 110, tiré du numéro du 15 février 1997 de " The Economist ", notre pays, en janvier 1997, ne devançait, en effet, que de peu la République tchèque, la Hongrie, l'Espagne et l'Italie en ce qui concerne le nombre d'ordinateurs par millier d'habitants raccordés à Internet. Il était distancé non seulement, très largement, par les Etats-Unis et les pays nordiques, mais également par nos principaux partenaires européens (Grande-Bretagne, Allemagne), ainsi que par l'Irlande, la Belgique et les Pays-Bas.

Certes, les ventes d'ordinateurs personnels ont augmenté très fortement, en 1997, de 20 %, et depuis Décembre dernier nous pouvons dire qu'une famille sur cinq possède un ordinateur . Cependant, notre taux d'équipement demeure très inférieur à celui de nos voisins européens (25 % pour l'Allemagne, 22 % au Royaume-Uni) et surtout à celui des Etats-Unis qui approche de 40 %.

Un rattrapage s'est également produit au cours de l'année 1997 en ce qui concerne les connections à Internet (+ 100 %), mais il demeure encore insuffisant pour que la France comble son retard.

S'agissant de nos entreprises, une récente enquête du Plan, citée par Le Monde du 2 octobre 1997, démontre qu'elles demeurent relativement imperméables aux technologies de l'information ou qu'elles ne savent pas, en tout cas, en tirer tout le parti possible, faute d'avoir su adapter leur organisation à la révolution des réseaux.

Isolée, l'entreprise française, n'a pas encore réticularisé ses relations, ni avec ses partenaires (clients, fournisseurs...), ni avec son environnement (université, laboratoires, centres de formation...), de sorte qu'elle se prive des avantages de la circulation de l'information.

Ces conclusions rejoignent celles de l'étude précitée, réalisée au printemps 1997, en préparation de la conférence interparlementaire des pays membres d'Euréka : pratiquement toutes nos entreprises, comme celles de nos principaux concurrents, sont équipées d'ordinateurs ; mais dès qu'il s'agit d'utilisations en réseaux (modems, accès à Internet, vidéo conférences, courrier électronique, sites web...) ou de multimédia (lecteurs de CD-ROM) ou encore d'usages individuels (portables), nous sommes encore très largement distancés.

1997

PAYS Modems Accès Courrier Sites Conférences Lecteur Portables
internet électronique Web Vidéo deCD-ROM


Japon 75 % 63 % 51 % 28 % 14 % 85 % 81 %

Royaume-Uni 73 % 35 % 52 % 27 % 11 % 67 % 60 %

Allemagne 67 % 27 % 43 % 16 % 8 % 75 % 59 %

Etats-Unis 81 % 51 % 56 % 39 % 7 % 75 % 58 %

France 61 % 13 % 32 % 9 % 6 % 48 % 44 %

Source :NOP Research Group Conquête réalisé sous forme d'entretien auprès d'un échantillon de cadres d'entreprises et de consommateurs)



Soyons clairs : le retard accusé par la France n'est pas de nature intellectuelle (le niveau d'ensemble de notre enseignement et de notre recherche est plus qu'honorable) ; il ne s'agit donc pas d'une insuffisance de connaissances.

D'autre part, nos entreprises ne connaissent pas non plus de sous-équipement informatique global.

A l'examen , le problème semble surtout d'essence culturelle : bien que beaucoup d'éléments aient changés, dans les réseaux, dans ces derniers mois, les mentalités de nos dirigeants (politiques, administratifs, économiques, etc...) n'ont pas suffisamment évolué pour qu'ils prennent conscience de la nécessité de modifier leurs schémas d'organisation et de relations ainsi que leurs analyses, afin de tirer parti des avantages procurés par les réseaux (élargissement de l'accès aux connaissances, fécondité des échanges intellectuels, gains de notoriété, de temps, d'efficacité ; accroissement des débouchés, création d'activités nouvelles...).