2. Une solution inadaptée au contexte français

Si la notion d'autonomie fiscale est aussi étroitement associée au principe de libre administration, c'est que la fiscalité locale est perçue comme un rempart contre la tentation centralisatrice de l'Etat.

Lors de son audition par la mission le 8 mars dernier, notre collègue Jean-Pierre Fourcade, président du Comité des finances locales, a souligné que " dans un Etat encore jacobin comme la France, il était fondamental et conforme à notre culture que coexistent des recettes fiscales propres, levées sous la responsabilité des collectivités locales, et des transferts de l'Etat ". M. Alain Guengant, professeur à l'université de Rennes, a pour sa part qualifié de décentralisation " tronquée " un système dans lequel les collectivités locales ne pourraient plus voter le taux des impôts qu'elles perçoivent.

En théorie, la libre administration pourrait se contenter de la liberté de dépenser. Cependant, en France, force est de constater que la réduction de l'autonomie fiscale des collectivités locale s'inscrit dans une logique centralisatrice puisqu'elle s'accompagne de la réduction de la capacité des collectivités à décider de leurs dépenses. Un nombre croissant de dispositions législatives et réglementaires imposent aux collectivités des dépenses obligatoires nouvelles, tandis que, par le biais des contrats de plan, l'Etat oriente les choix de dépenses des collectivités locales.

Par conséquent, faute du maintien de la capacité des collectivités locales à agir sur le montant de leurs ressources, la tendance décrite par notre collègue Jean-Pierre Raffarin, lors de l'examen par le Sénat du projet de loi de finances rectificative pour 2000, ne sera pas susceptible d'être renversée : " Nous devenons des quasi-préfets. Nous gérons des dotations et des circulaires. Il ne nous manque plus que les casquettes, mais nous sommes prêts à les porter, s'il nous faut assumer jusqu'au bout ce destin, qui est de servir la cause non pas de la décentralisation mais d'une certaine déconcentration ! " 360( * ) .

Notre collègue Pierre Mauroy, lors du débat consacré à la décentralisation, organisé au Sénat le 3 novembre 1998, a parfaitement résumé l'importance du lien entre libre administration et fiscalité locale dans le contexte français : " En France, il existe en effet, presque mécaniquement, une tendance forte de l'Etat à recentraliser (...) En France, l'Etat recentralise normalement, naturellement, quelle que soit la couleur de ceux qui sont au pouvoir, et notamment au Gouvernement (...) Je comprends la préoccupation des élus de vouloir, par exemple, établir des budgets assis sur des recettes clairement définies afin de ne pas être à la merci des dotations de l'Etat, trop facilement susceptibles d'être remises en cause " 361( * ) .

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