2. ... qui a été détournée de son objet initial ....

Le pacte de stabilité issu de l'article 32 de la loi de finances pour 1996, comme le contrat de croissance et de solidarité prévu par l'article 57 de la loi de finances pour 1999, organisent, pour une période de trois ans, le plafonnement du montant total des dotations comprises dans l'enveloppe normée.

Chacune de ces dotations, à l'exception de la dotation de compensation de la taxe professionnelle (DCTP), continue d'évoluer en fonction du taux d'indexation qui est le sien. De son côté, l'enveloppe normée évolue en fonction d'un mode d'indexation qui lui est propre. La DCTP joue le rôle de variable d'ajustement du dispositif : son montant est égal à la différence entre le montant total de l'enveloppe normée et le montant de la somme des différentes dotations qui la composent.

Les taux d'indexation retenus pour l'enveloppe normée reflètent la situation macroéconomique du pays. En 1996, en période de basse conjoncture, l'indexation retenue était le taux d'évolution des prix. En 1999, l'amélioration de la situation économique a permis de prendre en compte une fraction du taux de croissance du produit intérieur brut (PIB) dans le taux d'indexation de l'enveloppe normée. Cette fraction s'établit à 20% pour 1999, 25 % pour 2000 et 33 % pour 2001.

Ce mécanisme ne permet pas d'atteindre l'objectif de stabilité financière recherché par les élus locaux :

- malgré son caractère pluriannuel, il ne permet pas de remédier à l'imprévisibilité de l'évolution des concours de l'Etat aux collectivités locales. Comme le soulignait le rapporteur général de la commission des finances, notre collègue Alain Lambert, " l'évaluation a priori de leur DCTP par les collectivités devient rigoureusement impossible " 241( * ) . De même, les dotations indexées sur le taux d'évolution de la DGF restent soumises aux conséquences sur ce taux des mécanismes de recalage et de régularisation, qui le rendent totalement imprévisibles . Les dotations de l'Etat aux fonds national de péréquation de la taxe professionnelle et au fonds national de péréquation, indexées sur l'évolution des recettes fiscales nettes de l'Etat sont également tributaires des modifications du périmètre du budget général ;

- il remet en cause le principe de la compensation des exonérations d'impôts locaux en transformant la DCTP en variable d'ajustement ;

- il aboutit à une perte de recettes pour les collectivités locales . En effet, tant que l'augmentation du montant total de l'enveloppe normée reste inférieure à celle de l'ensemble des dotations qui composent l'enveloppe (à l'exception de la variable ajustement), l'Etat réalise des économies puisque l'écart entre les deux progressions se traduit par une baisse de la DCTP. Ce phénomène s'explique par le fait que, pour le calcul de l'enveloppe normée, la principale dotation qui la compose, la DGF, évolue en fonction d'un indice qui prend en compte l'évolution des prix et 50 % du taux de croissance du produit intérieur brut. La DGF augmente plus vite que l'enveloppe normée, ce qui se traduit par une baisse de la DCTP ;

- il repose sur une logique purement budgétaire et, comme le faisait remarquer le président Poncelet, ne s'étend pas " à l'ensemble des flux financiers entre l'Etat et les collectivités locales ". Alors que les élus locaux attendaient principalement la création d'un lien entre l'évolution de leurs charges et celle des dotations de l'Etat , le dispositif proposé en 1996 et repris en 1999 laisse de côté cette question. Il ne tient aucun compte de l'évolution des charges locales et ne s'interroge pas sur l'efficacité et le caractère adapté ou non des dotations de l'Etat aux collectivités locales. Au contraire, l'ensemble des dotations de fonctionnement et d'investissement sont maintenues en l'état, le seul changement résidant dans le régime de la DCTP, qui devient la dotation " sacrifiée ".

La création de l'enveloppe normée s'apparente donc surtout à une nouvelle astuce destinée à réduire le montant des compensations versées aux collectivités locales . De fait, le montant de la DCTP inscrit en loi de finances est passé de 19,1 milliards de francs en 1995 à 11,8 milliards de francs en 2000.

Comme le soulignait le Président Poncelet dès 1995, le dispositif de l'enveloppe normée " reflète avant tout, une fois de plus, la volonté du Gouvernement d'utiliser les concours qu'il verse aux collectivités locales comme la variable d'ajustement de son propre budget ".

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