M. le président. « Art. 2. _ La Commission consultative du secret de la défense nationale comprend cinq membres.
« Le président de la Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité est, de droit, président de la commission mentionnée à l'article 1er. Celle-ci comprend, en outre, deux personnalités qualifiées choisies par le Président de la République sur une liste de six membres du Conseil d'Etat, de la Cour de cassation ou de la Cour des comptes, établie conjointement par le vice-président du Conseil d'Etat, le premier président de la Cour de cassation et le premier président de la Cour des comptes.
« La commission comprend au surplus :
« _ un député, désigné pour la durée de la législature par le Président de l'Assemblée nationale ;
« _ un sénateur, désigné après chaque renouvellement partiel du Sénat par le Président du Sénat.
« Le mandat des membres de la commission n'est pas renouvelable.
« Le mandat des personnalités qualifiées de la commission est de six ans.
« Sauf démission, il ne peut être mis fin aux fonctions de membre de la commission qu'en cas d'empêchement constaté par celle-ci. Les membres de la commission désignés en remplacement de ceux dont le mandat a pris fin avant son terme normal sont nommés pour la durée restant à courir dudit mandat. Par dérogation au sixième alinéa, lorsque leur nomination est intervenue moins de deux ans avant l'expiration du mandat de leur prédécesseur, ils peuvent être renouvelés en qualité de membre de la commission. »
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 16, M. About, au nom de la commission des affaires étrangères et de la défense, propose de rédiger comme suit les deux premiers alinéas de cet article :
« La commission consultative du secret de la défense nationale comprend cinq membres :
« - un président et deux membres choisis par le Président de la République sur une liste de six membres du Conseil d'Etat, de la Cour de cassation et de la Cour des comptes, établie conjointement par le vice-président du Conseil d'Etat, le premier président de la Cour de cassation et le premier président de la Cour des comptes ; ».
Par amendement n° 5, M. Amoudry, au nom de la commission des lois, propose, dans le premier alinéa de l'article 2, de remplacer le mot : « cinq » par le mot : « trois ».
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 16.
M. Nicolas About, rapporteur. La commission n'a pas estimé opportun de faire figurer dans une loi le principe d'une présidence commune à deux instances qui ont, certes, des points communs, mais dont les missions sont assez différentes.
Toutefois, le recours à la présidence commune n'est pas exclu. En effet, certaines circonstances, comme le démarrage de la future commission consultative, pourraient justifier le recours provisoire à une même personne ayant acquis l'expérience juridique du secret de la défense nationale.
En outre, la rédaction proposée par cet amendement vise à substituer le mot « membres » à l'expression « personnalités qualifiées », qui vise traditionnellement davantage des experts techniques membres d'autorités indépendantes que les juristes mentionnés à l'article 2 du présent projet de loi. M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour défendre l'amendement n° 5.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur pour avis. Il s'agit par cet amendement, comme je l'indiquais dans mon exposé introductif, de réduire de cinq à trois le nombre des membres de la commission consultative du secret de la défense nationale en supprimant la présence des parlementaires.
En effet, la commission consultative du secret de la défense nationale aura un simple rôle de donneur d'avis. Ce sera un conseiller du Gouvernement plus qu'un contrôleur du pouvoir exécutif, et ce n'est pas le rôle du Parlement que de conseiller le Gouvernement, je me permets de le rappeler.
Voilà une première différence entre cette commission et des autorités comme la Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité, la CNCIS, la commission nationale de l'informatique et des libertés, la CNIL, ou la commission d'accès aux documents administratifs, la CADA, qui ont, elles, une véritable mission de contrôle.
Par ailleurs, la commission consultative du secret de la défense nationale interviendra au seul niveau réglementaire, dans un domaine qui relève de la compétence exclusive et discrétionnaire de l'exécutif. Voilà une deuxième différence avec les autorités précitées, qui ont expressément pour rôle de veiller au respect des dispositions législatives.
En outre, l'intégration de parlementaires serait contraire à l'objet même du projet de loi. En effet, celui-ci vise à lever le soupçon sur des décisions éminemment politiques. Or ce soupçon ne sera vraiment levé que si la commission est déconnectée de toute influence politique.
Enfin, la mission des parlementaires est de rendre compte de leur action à l'assemblée dont ils sont issus. Or les parlementaires, tenus en l'occurrence au secret, auraient bien du mal à rendre compte de leur propre action.
Bien entendu, l'exclusion des parlementaires ne signifie pas que nous souhaitons qu'ils restent en dehors du secret défense ni en dehors de tout ce qui touche au renseignement, bien au contraire. C'est d'ailleurs pour qu'il n'en soit pas ainsi que nous avons souhaité que les commissions d'enquête parlementaires puissent solliciter l'autorité administrative et utiliser cette possibilité de levée du secret défense.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 5 ?
M. Nicolas About, rapporteur. La commission est défavorable à cet amendement.
En effet, la présence de deux parlementaires au sein de la future commission paraît importante et utile pour diverses raisons.
Tout d'abord, c'est la loi qui précise, à l'article 413-9 du code pénal, les conditions de base qui permettent à l'autorité administrative de décider de ce qui relève du secret de la défense nationale et de ce qui n'en relève pas.
Il paraît donc légitime que des législateurs soient présents dans une instance qui traite d'un sujet défini et encadré par la loi, même si sa mise en oeuvre ne relève que du pouvoir exécutif.
Cet engagement de représentants du monde politique dans la future commission nous semble d'autant plus opportun que le reproche est souvent fait aux autorités administratives indépendantes d'être un moyen privilégié de transfert des responsabilités vers des cercles d'experts, de juristes et de techniciens. Il nous appartient de montrer qu'il n'en est rien et que le Parlement entend bien assumer son rôle.
J'ajoute que, à l'instar de ce qui se passe pour la CNCIS depuis l'origine, ces deux parlementaires représenteraient les deux principales sensibilités politiques du pays. Les présidents de chacune de nos assemblées s'accorderont pour que la minorité parlementaire soit représentée.
Enfin, la présence de deux parlementaires, et de deux seulement, aux côtés de trois juristes, associera la compétence juridique à l'appréciation politique, au sens fort du mot, de sujets essentiels, qu'il reviendra légitimement aux élus de faire valoir.
De toute façon, mes chers collègues, comprendrait-on que des représentants élus de la nation décident d'être absents d'une instance qui aura à débattre de rien moins que des intérêts fondamentaux de ladite nation ? Je ne le crois pas.
Telles sont les raisons pour lesquelles la commission a donné un avis défavorable à l'amendement n° 5.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 16 et 5 ?
M. Alain Richard, ministre de la défense. Le Gouvernement souhaite le rejet de l'amendement n° 5.
En effet, la présence des parlementaires au sein de la commission consultative, qui n'avait pas été retenue dans le projet de loi initial, a reçu l'assentiment du Gouvernement, après débat à l'Assemblée nationale.
La raison essentielle qui avait retenue le Gouvernement de faire figurer les parlementaires dans la composition de cette commission était double.
En premier lieu, comme cette instance assumera une fonction consultative, il n'avait pas semblé opportun de multiplier les situations dans lesquelles des parlementaires seraient susceptibles de donner des avis à l'exécutif.
En second lieu, le Gouvernement a été sensible au risque qui pourrait survenir en cas d'affaires judiciaires présentant un caractère polémique. Dans ce cas, la commission aurait à émettre une appréciation dont le sens serait rendu public et qui pourrait être contestée ; les parlementaires se trouveraient alors dans la position de partenaires critiqués, sans avoir leur pleine liberté d'expression pour se défendre.
A partir du moment où l'Assemblée nationale a pensé que ces inconvénients, qui touchent au statut des parlementaires, pouvaient être surmontés, le Gouvernement a fait sienne cette appréciation. Dès lors, il ne demande pas l'exclusion des parlementaires de cette commission.
En revanche, chacun appréciera le côté paradoxal des votes successifs du Sénat puisque, selon l'option qui a été retenue aujourd'hui, les commissions d'enquête parlementaires pourront demander au Gouvernement, par l'intermédiaire d'une commission consultative, d'avoir accès à des informations, alors que des parlementaires siégeront dans cette commission. Nous sommes en présence d'une interprétation novatrice de la cohérence des processus de décision !
S'agissant de l'amendement n° 16, un point fait difficulté : la présidence commune.
Le Gouvernement ne fait pas de cette question un enjeu majeur. Il a demandé au Parlement d'approuver la composition d'une commission dans laquelle l'élément central est composé d'un groupe de trois magistrats émanant d'organes juridictionnels distinctes. A cet égard, je voudrais souligner que la présence d'un membre de la Cour des comptes n'est absolument pas une incongruité dans la mesure où cette institution est une juridiction administrative dont la fonction est de contrôler les comptes et, par conséquent, toute l'activité d'organismes dont la vie est secrète.
Une chambre de la Cour des comptes est bien chargée de contrôler l'ensemble des activités du ministère de la défense, y compris la gestion des contrats de développement de systèmes d'armes extrêmement délicats. Cette chambre a donc une pratique tout à fait approfondie du secret et de la contradiction qui existe entre le secret et la transparence.
Nous avons donc retenu cette formule selon laquelle trois magistrats seront choisis par le Président de la République sur les propositions de chefs de cour dont l'indépendance, monsieur Vinçon, a tout de même été rarement prise en défaut depuis que la République existe. Si l'on mettait cette indépendance en question, il faudrait alors supposer que nombre d'autres valeurs de la République se fragilisent ! A un moment où chacun en appelle à une certaine rénovation de la moralité dans la vie publique, je ne suis pas certain que nous progressions beaucoup dans cette voie en prétendant que la nomination du vice-président du Conseil d'Etat ou du Premier président de la Cour de cassation par le Premier ministre entraîne une politisation de ces institutions. Je crois que cela n'est pas confirmé par la pratique.
Au sein de cette formation de trois magistrats, le président a une fonction d'instruction, qui réclame un important investissement en temps. C'est en raison de cette nécessité fonctionnelle de sélectionner un haut fonctionnaire ou un haut magistrat qui consacrera une part importante de son activité à ces fonctions, qui réclament une grande spécialisation, que le Gouvernement a préféré mettre en place une présidence commune.
Certes, si le texte de loi ne prévoit pas cette présidence commune, il sera possible d'y recourir dans la pratique, et le souhait du Gouvernement pourra être réalisé de toute manière.
Le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement pour une raison de cohérence, sans émettre d'opposition de principe.
En revanche, le mot « membres » lui semble préférable à l'expression « personnalités qualifiées », de sorte que, même si cet amendement n'était pas retenu, il procéderait à la substitution de termes au cours de la navette.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 16, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'amendement n° 5 n'a plus d'objet.
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 6 rectifié, M. Amoudry, au nom de la commission des lois, propose de supprimer les troisième, quatrième et cinquième alinéas de l'article 2.
Par amendement n° 17, M. About, au nom de la commission des affaires étrangères et de la défense, propose de supprimer le troisième alinéa de l'article 2.
L'amendement n° 6 rectifié, amendement de conséquence de l'amendement n° 5, n'a plus d'objet.
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 17.
M. Nicolas About, rapporteur. Cet amendement est purement rédactionnel.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Richard, ministre de la défense. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 17, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 7 rectifié, M. Amoudry, au nom de la commission des lois, propose, dans le septième alinéa de l'article 2, de remplacer les mots : « des personnalités qualifiées » par les mots : « des membres ».
Par amendement n° 18, M. About, au nom de la commission des affaires étrangères et de la défense, propose, dans le septième alinéa de cet article, de remplacer les mots : « personnalités qualifiées » par les mots : « membres non parlementaires ».
L'amendement n° 7 rectifié n'a plus d'objet.
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 18.
M. Nicolas About, rapporteur. Il s'agit de nouveau d'un amendement rédactionnel, qui tire la conséquence de la nouvelle rédaction retenue au deuxième alinéa de l'article concernant les personnalités qualifiées.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Richard, ministre de la défense. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 18, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 8 rectifié, M. Amoudry, au nom de la commission des lois, propose, dans la dernière phrase du dernier alinéa de l'article 2, de remplacer les mots : « au sixième alinéa » par les mots : « au troisième alinéa ».
Par amendement n° 32, M. About, au nom de la commission des affaires étrangères et de la défense, propose, dans la dernière phrase du dernier alinéa de cet article, de remplacer les mots : « au sixième alinéa » par les mots : « au cinquième alinéa ».
L'amendement n° 8 rectifié n'a plus d'objet.
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 32.
M. Nicolas About, rapporteur. Il s'agit encore d'une coordination rédactionnelle, liée à l'adoption de l'amendement n° 17.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Richard, ministre de la défense. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 32, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 2, modifié.

(L'article 2 est adopté.)

Article 3