M. le président. « Art. 6 ter. - Le dernier alinéa de l'article 15 de la loi n° 93-980 du 4 août 1993 précitée est ainsi rédigé :
« Dans le cadre des missions visées au premier alinéa, la Banque de France accomplit les prestations demandées par l'Etat ou réalisées pour des tiers avec l'accord de celui-ci. Les modalités d'exécution des prestations et les conditions de rémunération de la Banque de France sont fixées par convention entre celle-ci et l'Etat ou la personne, autre que l'Etat, bénéficiaire de ces prestations. »
Par amendement n° 9, M. Lambert, au nom de la commission, propose de supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Alain Lambert, rapporteur. Cet amendement de suppression, là encore, n'est pas du tout inspiré par le souci de réduire les activités de la Banque de France. La commission des finances a la conviction qu'en énumérant les activités de la banque dans la loi on ne va pas pour autant rendre service à la banque elle-même et à ses activités.
Nous comprenons que certains collègues, préoccupés du maintien de ces activités, souhaitant qu'elles ne soient pas subrepticement supprimées pour des raisons de rentabilité ou autres, puissent être tentés de les décrire dans la loi.
Cependant, mieux vaudrait, selon nous, demander au Gouvernement ses intentions sur la manière dont ces missions pourraient s'exercer à l'avenir, ce qui pourrait donner tous les apaisements nécessaires.
Encore une fois, il ne nous paraît pas de bonne pratique législative de décrire par le menu dans la loi de chaque activité, puisque nous sommes dans le cadre des prestations qui sont fournies par la Banque de France et qui font d'ailleurs l'objet de facturation, ce qui ne pose pas de difficulté particulière.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Cet amendement procède du même esprit que le précédent.
M. le rapporteur, s'exprimant au nom de la commission, nous explique que, comme tout le monde, il est, bien entendu, d'accord pour que soit explicité de façon claire que la Banque de France exerce d'autres missions ; mais chaque fois qu'il s'agit de le dire, il n'est plus d'accord.
Le groupe socialiste a exprimé sa position sur l'amendement précédent ; le groupe communiste républicain et citoyen également.
A l'Assemblée nationale, un amendement a été déposé - à mon avis, dans des termes généraux assez larges ; c'était le cas pour le précédent, c'est encore le cas cette fois-ci - qui prévoit les dispositions suivantes : « Dans le cadre des missions visées au premier alinéa, la Banque de France accomplit les prestations demandées par l'Etat ou réalisées pour des tiers avec l'accord de celui-ci... ». Cela signifie que la Banque de France fait les choses que l'Etat lui demande de faire. Cette disposition n'est certes pas d'une précision extrême, mais elle ne me paraît pas pour autant inutile.
Si le Sénat décide de supprimer cet article, très bien ! Mais il ne faut pas s'y tromper : les élus, le personnel de la Banque de France s'interrogent sur les missions que devra accomplir la Banque de France.
Autant je crois - je le disais tout à l'heure - que cette banque doit évoluer, comme toute entreprise, qu'il faut discuter, autant le fait de dire qu'il y a d'autres missions que celle de la détermination ou de la politique monétaire, que celles-ci doivent perdurer, et en définir le cadre, me paraît tout à fait acceptable.
Par conséquent, je ne vois pas pourquoi on n'apporterait pas ces précisions. Dans le cas contraire, cela signifierait qu'un problème se pose dans l'esprit de ceux qui souhaitent les supprimer.
Je le dis clairement au nom du Gouvernement : il y a des missions d'intérêt général ; il y a des prestations que la Banque de France peut accomplir à la demande de l'Etat. Il faut les définir clairement. C'est ce qu'a fait l'Assemblée nationale en adoptant le texte qui vous est soumis.
Honnêtement, je ne vois pas de raison, sauf s'il existe vraiment une opposition de fond - mais alors, il faut le dire - de supprimer cet article 6 ter.
M. Gérard Delfau. Très bien !
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 9.
M. Michel Sergent. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Sergent.
M. Michel Sergent. Je serai bref car mon argumentation est exactement la même que celle qui vient d'être développée par M. le ministre : un certain nombre de missions utiles peuvent être confiées à la Banque de France.
Nous voterons donc contre l'amendement n° 9.
M. Emmanuel Hamel. Il faut maintenir ces dispositions !
Mme Marie-Claude Beaudeau. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Je constate que, selon une habitude prise depuis quelques mois - pour être tout à fait précise, depuis qu'en juin 1997 une autre majorité siège à l'Assemblée nationale - la majorité sénatoriale nous propose, chaque fois qu'un projet de loi est, en quelque sorte, corrigé par l'Assemblée nationale dans un sens ni exactement ni totalement libéral, de procéder à la suppression de ces corrections.
L'amendement n° 9 découle naturellement de la position défendue par la majorité sénatoriale sur l'article 6 bis du présent projet de loi, attendu que la conception de la Banque centrale adoptée par cette majorité consiste globalement à en faire une « courroie de transmission » de la Banque centrale européenne. Selon elle, toute implication d'un service public en matière d'information économique, de gestion de dossiers de particuliers surendettés ou de développement de la connaissance des tissus économiques locaux serait, par nature, à rejeter.
Y aurait-il, dans l'esprit de la majorité des membres de notre commission des finances, des « professionnels » issus du secteur privé mieux à même que la Banque de France d'assumer ces fonctions et d'exercer les missions que je viens de rappeler ?
Devrions-nous, par exemple, laisser la connaissance de l'activité économique aux seuls organismes consulaires ou aux structures de place des marchés financiers ?
Devrions-nous confier la gestion du surendettement des ménages aux sociétés d'affacturage, et le suivi social de ces dossiers aux seuls huissiers de justice ?
Nous ne le pensons pas et, pas plus que nous n'avons voté l'amendement n° 8, nous ne voterons l'amendement n° 9.
M. Alain Lambert, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Alain Lambert, rapporteur. Je veux reprendre la parole car je ne voudrais pas que le Sénat pût un instant penser que la commission des finances souhaite réduire les activités de la Banque de France.
La loi de 1993, toujours en vigueur, prévoit expressément dans les deux derniers alinéas de son article 15 :
« La Banque de France, à la demande de l'Etat ou avec son accord, peut fournir des prestations pour le compte de celui-ci ou le compte de tiers. Ces prestations sont rémunérées afin de couvrir les coûts engagés par la banque.
« La nature de ces prestations et les conditions de leur rémunération sont fixées par des conventions conclues entre la Banque de France et, selon le cas, l'Etat ou les tiers intéressés. »
Que certains de nos collègues veuillent, parce que le texte proposé est difficile à faire admettre à une majorité, surajouter, développer et détailler plus encore les activités quotidiennes de la banque, c'est possible. Mais, parce que nous n'avons rien à nous reprocher,...
M. Jean Peyrafitte. Nous non plus !
M. Alain Lambert, rapporteur. ... nous estimons qu'il faut maintenir le texte tel qu'il existe et ne pas nous laisser diaboliser.
C'est la raison pour laquelle je propose au Sénat d'adopter cet amendement de suppression de l'article 6 ter.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 9, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 6 ter est supprimé.

Article additionnel après l'article 6 ter