Séance du 2 février 1999







M. le président. « Art. 44. _ L'article 276-4 du code rural est ainsi rédigé :
« Art. 276-4 . _ Chaque propriétaire est tenu de faire identifier les équidés qu'il détient par toute personne habilitée à cet effet par le ministre de l'agriculture, selon tout procédé agréé par le ministre de l'agriculture. Le ministre de l'agriculture délivre les numéros d'identification. Les changements de propriété doivent être déclarés. Les modalités d'application du présent article sont fixées par décret en Conseil d'Etat. »
Sur l'article, la parole est à M. le rapporteur.
M. Michel Souplet, rapporteur. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, j'ai eu connaissance du projet de décret relatif à l'organisation et au fonctionnement de l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments, l'AFSSA.
Ce projet appelle des observations de fond, qui touchent l'ensemble des missions que le Parlement a confiées à cette agence.
Les missions de cet organisme devraient affirmer spontanément la pluridisciplinarité de l'agence dans le domaine de la sécurité sanitaire et la propriété nutritionnelle des aliments destinés à l'homme, en consacrant l'appui scientifique et technique aux ministères de la santé, de l'agriculture et de la consommation.
Or, il n'apparaît pas, dans la rédaction proposée, que les aliments destinés à l'homme soient l'un des domaines prioritaires de l'agence. Ce manque de considération pour les questions de l'alimentation humaine se confirme malheureusement dans l'organisation de l'agence.
C'est ainsi qu'il n'est pas fait mention de manière explicite d'une direction chargée de la sécurité sanitaire et de la propriété nutritionnelle des aliments destinés à l'homme, dont le directeur serait nommé par arrêté conjoint des ministres chargés de la santé, de l'agriculture et de la consommation sur proposition du directeur général.
Par ailleurs, le conseil devra également accueillir des personnalités scientifiques compétentes, y compris dans les domaines de la nutrition humaine et du bien-être des hommes, afin d'évaluer les propriétés nutritionnelles des aliments.
De plus, je m'interroge sur la signification des « comités de filière » et sur la composition du conseil d'administration de l'agence qui, outre deux membres des organisations de consommateurs, comprendra treize représentants de l'administration, à savoir onze représentants de l'Etat et deux représentants du personnel de l'agence.
Enfin, soucieux de garantir la transparence des travaux de l'agence, je souhaiterais connaître les modalités de la politique en matière de communication et des relations avec les médias qui sont envisagées.
Alors que le travail du Parlement, notamment du Sénat, a donné à notre pays la chance d'avoir une organisation de la sécurité sanitaire des aliments considérée comme exemplaire à l'échelon international, je crains que l'accent mis dans le projet de décret sur les aspects de bien-être des animaux, de santé animale ou de médicament vétérinaire n'en altère sérieusement la portée et le renom.
M. le président. La parole est à M. Huriet.
M. Claude Huriet. Je tiens tout d'abord à remercier M. le rapporteur de l'intérêt qu'il porte à la sécurité sanitaire, ainsi qu'à la loi du 1er juillet 1998 relative au renforcement de la veille sanitaire et du contrôle de la sécurité sanitaire des produits destinés à l'homme. Je rappelle que ce texte, qui a finalement aboutit à un vote quasi unanime des deux assemblées, n'avait pas été sans poser quelques problèmes.
Or, monsieur le ministre, au-delà des observations et des interrogations que vient d'exprimer M. Souplet, je veux vous faire part, en tant que rapporteur de cette proposition de loi, de mon inquiétude et de mon mécontentement. En effet, à travers deux gouvernements successifs, deux Premiers ministres s'étaient formellement engagés à placer le renforcement de la sécurité sanitaire qu'attendent les Français au rang des priorités gouvernementales. Le Sénat a donc pris l'initiative de déposer une proposition de loi qui a finalement été adoptée, dans les conditions que je viens d'évoquer à l'instant, le 1er juillet 1998.
Ce texte devait s'appliquer au 31 décembre 1998. Nous sommes au début du mois de février et la loi ne s'applique pas. Aucun texte n'est publié. Les désignations des directeurs généraux, attendues avec de plus en plus d'impatience, ne sont pas encore intervenues. Monsieur le ministre, compte tenu des difficultés que nous avons rencontrées au cours des travaux préliminaires avec la haute administration, plus particulièrement celle de votre ministère, je m'interroge sur ce que cachent ce retard de calendrier et le projet de décret sur lequel M. le rapporteur vient d'attirer, à juste titre, votre attention.
Conscient de l'importance de renforcer la sécurité sanitaire - tout ce qui concerne la sécurité de l'aliment doit être inscrit dans cette nouvelle agence à créer - le Premier ministre va-t-il traduire dans les faits, la volonté qu'il a exprimée au moment de la prise de fonctions du Gouvernement ?
C'est une véritable question. Monsieur le ministre, je souhaite, comme M. le rapporteur, obtenir très rapidement, et si possible aujourd'hui même, une réponse sur la volonté du Gouvernement et du ministre de l'agriculture de ne pas tergiverser plus longtemps, de ne pas traîner les pieds s'agissant de l'élaboration des textes d'application et de ne pas déformer la volonté unanime exprimée par le législateur à travers le vote du 1er juillet dernier.
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je viens d'apprendre le décès de Michel Péricard, député des Yvelines depuis 1978. Je l'ai bien connu à l'Assemblée nationale, puisque j'ai siégé à ses côtés au sein de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales pendant quelque quatre ans et demi et j'ai été, comme lui, vice-président de cette assemblée pendant un an et demi.
Au nom du Gouvernement, je voulais rendre hommage à Michel Péricard.
M. le président. Monsieur le ministre, permettez-moi de dire combien nous sommes attristés par cette nouvelle.
Nous avons tous connu Michel Péricard, à divers titres. D'abord, à la télévision, puis en tant qu'homme politique ; à une certaine époque, il a même été président du groupe du RPR à l'Assemblée nationale.
Le Sénat s'associe à l'hommage que vous venez de rendre à Michel Péricard et, dès à présent, il adresse à sa famille ses plus sincères condoléances.
Veuillez poursuivre, monsieur le ministre.
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Monsieur le rapporteur et vous aussi, monsieur Huriet, vous avez appelé mon attention sur le projet de décret relatif à l'organisation de l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments.
Monsieur Huriet, ce décret est devant le Conseil d'Etat, ce qui répond d'une certaine manière à votre demande. Le Gouvernement a quasiment tenu les délais dans la transmission de ce texte qui demande un examen attentif, comme vous l'imaginez, du Conseil d'Etat. La volonté du Gouvernement est d'aboutir vite et que le léger retard que nous connaissons aujourd'hui par rapport aux engagements pris soit le plus réduit possible. Que les choses soient claires : notre volonté est bien de mettre en place cette agence dans les semaines à venir.
Monsieur le rapporteur, vous vous interrogez sur le caractère interdisciplinaire du futur établissement et vous semblez reprocher au décret de faire plus référence à des missions relatives à la santé animale, à la protection animale et au médicament vétérinaire qu'aux objectifs qui ont guidé le législateur pour la création de cet établissement public.
Si je peux concevoir que la lecture du texte du décret hors de son contexte législatif procure cette impression, je souhaite vraiment dissiper tout malentendu. Les missions et les prérogatives de l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments ont été particulièrement détaillées par le Parlement. Vous conviendrez donc qu'il est particulièrement inélégant en droit, et d'ailleurs inefficace, de recopier dans un décret l'ensemble des dispositions que la loi a prévues, lorsque celle-ci est suffisamment précise. Il est donc clair que le décret n'est que le complément de la loi et quand celle-ci est précise, il n'est pas besoin d'y revenir.
Ainsi ne restait-il au pouvoir réglementaire, après avoir fait référence aux articles L. 794-1 et L. 794-2 du code de la santé publique, que le soin de préciser les éventuelles missions confiées à l'agence que le législateur n'aurait pas intégralement citées. Or, par voie législative, le Centre national d'études vétérinaires et alimentaires, le CNEVA, a été totalement intégré à la future agence, alors que ses missions, actuellement définies dans un décret, méritaient d'être reprises par l'agence. C'est la raison pour laquelle le projet de décret relatif à l'organisation de l'agence fait explicitement référence à l'appui scientifique et technique nécessaire à l'élaboration, à l'application et à l'évaluation des mesures prises dans les domaines de la santé animale, du médicament vétérinaire, du bien-être des animaux et de leurs conséquences sur l'hygiène publique, ainsi que la sécurité sanitaire des aliments destinés à l'homme ou à l'animal. Une telle précision doit être lue en gardant à l'esprit que les missions de la future agence sont avant tout celles qui sont explicitement prévues par la loi.
Je souligne, en outre, que l'aliment sera d'autant mieux sécurisé que la filière qui l'élabore sera elle-même sécurisée. Les missions assurées par le CNEVA contribuent à cette sécurisation de la filière et, par voie de conséquence, à la sécurisation des produits.
Pour ce qui concerne l'organisation du futur établissement, le décret laisse de larges prérogatives au conseil d'administration. Le directeur de l'Agence nationale du médicament vétérinaire, comme le prévoit le code de la santé publique, sera nommé par arrêté conjoint des ministres chargés de l'agriculture et de la santé, sur proposition du directeur général de l'agence, et un directeur chargé de la santé et du bien-être des animaux sera nommé par arrêté du ministre de l'agriculture, également sur proposition du directeur général. La nomination à d'autres postes de direction sera de la responsabilité du directeur général, lui-même nommé, selon la loi, par décret.
Ainsi, si le décret ne précise pas la création d'une direction de l'évaluation de la sécurité des aliments, c'est pour laisser au futur établissement public une plus grande souplesse d'organisation, ce qui me semble répondre au besoin de transparence et d'indépendance de la future agence, placée, comme vous le savez, sous la triple tutelle des ministres chargés de la santé, de l'agriculture et de la consommation.
S'agissant du conseil d'administration, force est de constater que la loi, en précisant qu'il serait composé, outre son président, pour moitié de représentants de l'Etat et pour moitié de représentants des organisations professionnelles concernées, de représentants des consommateurs, de personnalités qualifiées et de représentants du personnel, n'a pas laissé au pouvoir réglementaire une très grande marge d'appréciation.
La reconnaissance de cette agence passera par la qualité et l'indépendance de l'expertise scientifique qu'elle réalisera. Elle sera, pour ce faire, assistée d'un conseil scientifique et de comités d'experts spécialisés qui associeront dans une interdisciplinarité totale sur toute question de son domaine de compétence, y compris les aspects nutritionnels des aliments, des scientifiques extérieurs à l'établissement. A l'inverse de la pratique actuelle, il est envisagé que ces experts soient indemnisés pour les travaux qu'ils mèneront pour l'agence. Ils pourront également disposer, au sein de l'agence, de l'infrastructure nécessaire pour mener à bien leurs missions d'expertise.
Pour conclure, je souhaite vous assurer que le Gouvernement partage vos préoccupations pour la mise en oeuvre d'une agence dont l'indépendance et l'impartialité seront les principes directeurs. Il est toutefois nécessaire, dans le décret de tirer toutes les conséquences du transfert intégral du Centre national d'études vétérinaires et alimentaires, dont 70 % de l'activité concernent la santé animale. Seule une lecture conjointe du décret et de la loi permet de donner une vision complète des activités du futur établissement.
Enfin, vous m'avez interrogé sur les modalités de diffusion des avis de l'agence. C'est un principe de transparence qui a été retenu puisque tous ses avis seront publics et diffusés par ses soins.
M. le président. Par amendement n° 406, M. Deneux et les membres du groupe de l'Union centriste proposent de compléter in fine le texte présenté par l'article 44 pour l'article 276-4 du code rural par les mots : « en cohérence avec les dispositions de l'article 253 du présent code ».
La parole est à M. Deneux.
M. Marcel Deneux. Cet amendement répond à un souci de cohérence.
En effet, les dispositions présentées par l'article 44 pour l'article 276-4 du code rural ne semblent pas cohérentes avec celles qui figurent dans l'article 253. Il est souhaitable de rechercher une cohérence de l'ensemble du dispositif d'immatriculation, à la fois pour faciliter la tâche des éleveurs multi-espèces et pour mieux organiser le texte.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Michel Souplet, rapporteur. Favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 406, accepté par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 612, le Gouvernement propose :
A. - De compléter l'article 44 par un paragraphe ainsi rédigé :
« ... - Après le onzième alinéa 8°) de l'article 340-1 du code rural, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« ... ° Les fonctionnaires et agents contractuels relevant du service des haras, des courses et de l'équitation du ministère chargé de l'agriculture peuvent être spécialement habilités à réaliser l'identification électronique complémentaire des équidés sous l'autorité médicale d'un vétérinaire, dans des conditions fixées par un décret en Conseil d'Etat. »
B. - En conséquence, de faire précéder le début de cet article de la mention : « I. »
La parole est à M. le ministre.
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Compte tenu des risques pour la santé et le bien-être des animaux qui s'attachent à l'implantation de transpondeurs électroniques, l'identification des équidés par ce moyen doit être considérée comme un acte médical, qui relève de l'exercice de la médecine vétérinaire.
Cependant, il convient d'aménager une dérogation permettant aux agents des haras, spécialement habilités, de la réaliser sous l'autorité médicale d'un vétérinaire.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Michel Souplet, rapporteur. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 612, accepté par la commission.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 44, modifié.

(L'article 44 est adopté.)

Article 44 bis