Séance du 10 février 1999







M. le président. Par amendement n° 11, M. Mahéas et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, après l'article 8 bis, un article additionnel ainsi rédigé :
« L'usage des patins à roulettes et des rollers est interdit aussi bien sur les trottoirs que sur la voie publique ; toutefois, cet usage peut être autorisé par arrêté du maire dans des conditions de lieux, de temps et de sécurité définies par décret. »
La parole est à M. Mahéas.
M. Jacques Mahéas. Loin de moi l'idée, en présentant cet amendement, de vouloir ennuyer les jeunes qui font du patin à roulettes ou du roller. Dans la quasi-totalité des cas, les choses se passent tout à fait convenablement. Il n'y aurait donc pas lieu de légiférer, mais certains jeunes s'exposent à des dangers évidents, notamment en faisant du slalom sur des routes très fréquentées par des véhicules automobiles. Ils risquent alors de provoquer un accident ou d'en être eux-mêmes victimes.
Certains maires sont confrontés à ce problème et ont pris un certain nombre d'arrêtés municipaux de façon à endiguer ce qu'on appelle « la vague des streeters ». Je précise, pour ceux qui ne le sauraient pas, ce que je comprends très bien, qu'il s'agit de jeunes qui font du roller d'une manière agressive, qui arrondissent les marches des escaliers pour éviter les à-coups, qui utilisent le mobilier urbain comme les skieurs des piquets de slalom et qui créent de graves dommages sur la voie publique.
En déposant cet amendement, il s'agit de faire en sorte que, si certains jeunes dépassent les bornes, le Gouvernement appuie la démarche des maires qui prennent des arrêtés pour stopper la casse.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Lucien Lanier, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur cette disposition. En effet, nous ne pouvons pas interdire les patins à roulettes et les rollers, ni mettre derrière chaque usager une personne pour dresser des contraventions.
Par ailleurs, les faits étant ce qu'ils sont, il faut bien se rendre compte que la pratique du patin à roulettes fait désormais partie des usages admis. Nous n'avons pas intérêt, par cet amendement, à inciter à la création d'une association de rollers râleurs, ce qui ne manquerait pas de se produire si cette disposition était adoptée.
C'est la raison pour laquelle je demande à M. Mahéas de bien vouloir comprendre que l'on ne peut empêcher les jeunes de pratiquer leur sport favori ! Il se trouve que, pour certains, c'est le patin à roulettes ou le roller.
Je comprends que vous soyez exaspéré quand il arrive qu'une vieille dame soit renversée sur un trottoir.
M. Emmanuel Hamel. Pas seulement « exaspéré » !
M. Lucien Lanier, rapporteur. Cela étant dit, je crois qu'il y aurait tout intérêt, d'abord, à ne pas compromettre l'usage du patin à roulettes et, ensuite, à laisser à la sagesse de la réglementation le soin d'en assurer l'usage. Dès lors, accepteriez-vous, si M. le ministre vous dit qu'il le fera, de retirer votre amendement ?
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Le ministre dit qu'il le fera. Cette question relève, en effet, du domaine réglementaire,...
M. Michel Charasse. Absolument !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. ... du pouvoir de police des maires. Quand ils l'estiment indispensable, ils peuvent prendre les décisions nécessaires pour éviter qu'il y ait des abus ou des excès dans ce domaine. Je souhaite donc, moi aussi, le retrait de cet amendement.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 11.
M. Michel Charasse. Je demande la parole pour explicitation de vote.
M. le président. La parole est à M. Charasse.
M. Michel Charasse. Avec mes amis, je me réjouis de la position de M. le ministre puisque cet amendement avait aussi pour objet d'entendre des explications. Mais ce que je veux dire à M. le ministre, c'est que, en l'occurrence, il ne faut pas viser seulement les maires car des jeunes circulent aussi sur des voies qui ne sont pas communales et sur lesquelles le maire n'a pas de pouvoir de police. Je pense donc qu'il faut viser les maires et les préfets. Je le dis à M. le ministre : si la disposition doit intervenir par voie réglementaire - et je pense qu'elle est effectivement du domaine réglementaire - il faut viser le maire et, en dehors de la commune, le préfet.
M. Jean-Pierre Cantegrit. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Cantegrit.
M. Jean-Pierre Cantegrit. Je considère, moi aussi, que cette disposition relève du domaine réglementaire.
Cela étant dit, je suis quelque peu surpris par cet amendement. En effet, je lis, dans une presse qui est plutôt favorable à M. Mahéas, que le Sénat serait ringard, qu'il serait composé de vieux croulants qui dorment dans leurs fauteuils. Aussi, monsieur Mahéas, cet amendement n'est-il pas une sorte de provocation, pour que les journalistes puissent dire que le Sénat est contre les jeunes qui pratiquent le roller ? Ne s'agit-il pas d'un piège de votre part ?
M. Emmanuel Hamel. Il faut apprendre aux jeunes à discipliner leur énergie !
M. Dominique Braye. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Braye.
M. Dominique Braye. Je remercie mon collègue M. Cantegrit, même s'il me coupe l'herbe sous le pied.
Je suis l'élu d'un département un peu difficile et président du district de Mantes-la-Jolie. A l'heure actuelle, nous nous efforçons d'inciter les jeunes à pratiquer notamment le roller afin de les distraire ; on met cela en place dans les quartiers. Je me vois mal, demain, le leur interdire au motif que j'aurai voté un tel amendement. Je préfère, pour ma part, qu'ils fassent du roller et leur apprendre, par ce biais, le respect d'autrui et notamment des personnes âgées. Cet amendement paraît être une provocation, comme l'a dit M. Cantegrit.
M. Jacques Mahéas. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Mahéas.
M. Jacques Mahéas. Mes chers collègues, vous m'avez sans doute mal entendu. Loin de moi, en effet, l'idée d'interdire l'usage du patin à roulettes et du roller. J'ai fait allusion à ces patineurs agressifs que sont les streeters. En tant que maire, moi aussi, j'ai fait aménager des pistes spécifiques à l'intention des rollers.
Compte tenu des explications de M. le ministre et de l'appui qu'il donne aux maires confrontés à ces difficultés - naissantes, je l'avoue, au point que certains de nos collègues découvrent peut-être ce problème - je retire cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 11 est retiré.

Article 9