Séance du 18 mars 1999







M. le président. « Art. 1er. _ Le livre Ier du code civil est complété par un titre XII ainsi rédigé :

« TITRE XII

« DU PACTE CIVIL DE SOLIDARITÉ

« Art. 515-1 . _ Un pacte civil de solidarité peut être conclu par deux personnes physiques majeures, de sexe différent ou de même sexe, pour organiser leur vie commune.
« Art. 515-2 . _ A peine de nullité, il ne peut y avoir de pacte civil de solidarité :
« 1° Entre ascendant et descendant en ligne directe, entre alliés en ligne directe et entre collatéraux jusqu'au troisième degré inclus ;
« 2° Entre deux personnes dont l'une au moins est engagée dans les liens du mariage ;
« 3° Entre deux personnes dont l'une au moins est déjà liée par un pacte civil de solidarité.
« Art. 515-3 . _ Deux personnes qui décident de conclure un pacte civil de solidarité doivent établir une déclaration écrite conjointe organisant leur vie commune.
« A peine de nullité, elles doivent la remettre au greffe du tribunal d'instance dans le ressort duquel elles fixent leur résidence, en y annexant une copie de leur acte de naissance et un certificat du greffe du tribunal d'instance de leur lieu de naissance ou, en cas de naissance à l'étranger, du greffe du tribunal de grande instance de Paris attestant qu'elles ne sont pas déjà liées par un pacte.
« Le greffier inscrit cette déclaration sur un registre et en assure la conservation.
« Il fait porter mention de la déclaration sur un registre tenu au greffe du tribunal d'instance du lieu de naissance de chaque partenaire ou, en cas de naissance à l'étranger, au greffe du tribunal de grande instance de Paris.
« L'inscription sur le registre du lieu de résidence confère date certaine au pacte.
« Les modifications du pacte font l'objet d'un dépôt, d'une inscription et d'une conservation au greffe du tribunal d'instance qui a reçu l'acte initial.
« A l'étranger, la réception, l'inscription et la conservation du pacte, liant deux partenaires dont l'un au moins est de nationalité française, sont assurées par les agents diplomatiques et consulaires français. Le dépôt, l'inscription et la conservation des modifications du pacte sont également assurés par ces agents.
« Art. 515-4 . _ Les partenaires liés par un pacte civil de solidarité s'apportent une aide mutuelle et matérielle. Les modalités de cette aide sont fixées par le pacte.
« Les partenaires sont tenus solidairement à l'égard des tiers des dettes contractées par l'un d'eux pour les besoins de la vie courante.
« Art. 515-5 . _ A défaut de stipulations contraires de l'acte d'acquisition, les biens des partenaires acquis à titre onéreux postérieurement à la conclusion du pacte sont soumis au régime de l'indivision. Les biens dont la date d'acquisition ne peut être établie sont également soumis au régime de l'indivision.
« Art. 515-6 . _ Les dispositions des articles 832 à 832-4 sont applicables en cas de dissolution du pacte civil de solidarité.
« Art. 515-7 . _ Supprimé .
« Art. 515-8 . _ Lorsque les partenaires décident d'un commun accord de mettre fin au pacte civil de solidarité, ils remettent une déclaration conjointe écrite au greffe du tribunal d'instance dans le ressort duquel l'un d'entre eux au moins a sa résidence. Le greffier inscrit cette déclaration sur un registre et en assure la conservation.
« Lorsque l'un des partenaires décide de mettre fin au pacte civil de solidarité, il signifie à l'autre sa décision et adresse copie de cette signification au greffe du tribunal d'instance qui a reçu l'acte initial.
« Lorsque l'un des partenaires met fin au pacte civil de solidarité en se mariant, il en informe l'autre par voie de signification et adresse copies de celle-ci et de son acte de naissance, sur lequel est portée mention du mariage, au greffe du tribunal d'instance qui a reçu l'acte initial.
« Lorsque le pacte civil de solidarité prend fin par le décès de l'un au moins des partenaires, le survivant ou tout intéressé adresse copie de l'acte de décès au greffe du tribunal d'instance qui a reçu l'acte initial.
« Le greffier qui reçoit la déclaration ou les actes prévus aux alinéas précédents porte ou fait porter mention de la fin du pacte en marge de l'acte initial. Il fait également procéder à l'inscription de cette mention en marge du registre prévu au troisième alinéa de l'article 515-3.
« A l'étranger, la réception, l'inscription et la conservation de la déclaration ou des actes prévus aux quatre premiers alinéas sont assurées par les agents diplomatiques et consulaires français qui procèdent ou font procéder également aux mentions prévues à l'alinéa précédent.
« Le pacte civil de solidarité prend fin, selon le cas :
« 1° Dès la mention en marge de l'acte initial de la déclaration conjointe prévue au premier alinéa ;
« 2° Trois mois après la signification délivrée en application du deuxième alinéa, sous réserve qu'une copie en ait été portée à la connaissance du greffier du tribunal désigné à cet alinéa ;
« 3° A la date du mariage ou du décès de l'un des partenaires.
« Les partenaires déterminent eux-mêmes les conséquences que la rupture du pacte entraîne à leur égard. A défaut d'accord, celles-ci sont réglées par le juge. »
Sur l'article 1er, je suis saisi de vingt-trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 4 est présenté par M. Gélard, au nom de la commission des lois.
L'amendement n° 32 est déposé par MM. Lorrain, Badré, Machet et Lambert.
Tous deux tendent à supprimer l'article 1er.
Par amendement n° 57 rectifié, Mme Derycke, MM. Bel, Delanoë et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent, dans le texte présenté par l'article 1er pour l'article 515-1 du code civil, après le mot : « majeures », d'insérer les mots : « non placées sous tutelle ».
Par amendement n° 34, MM. Bret, Duffour, Foucaud, Mme Borvo, M. Fischer, Mme Beaudeau, M. Bécart, Mme Bidard-Reydet, MM. Le Cam, Lefebvre, Mme Luc, MM. Ralite, Renar et Mme Terrade proposent, dans le deuxième alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article 515-3 du code civil, de remplacer les mots : « au greffe du tribunal d'instance dans le ressort duquel » par les mots : « à la mairie de la commune dans laquelle ».
Par amendement n° 35, MM. Bret, Duffour, Foucaud, Mme Borvo, M. Fischer, Mme Beaudeau, M. Bécart, Mme Bidard-Reydet, MM. Le Cam, Lefebvre, Mme Luc, MM. Ralite, Renar et Mme Terrade proposent, au début du troisième alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article 515-3 du code civil, de remplacer les mots : « Le greffier inscrit » par les mots : « Les services de l'état civil inscrivent ».
Par amendement n° 58 rectifié, Mme Derycke, MM. Bel, Delanoë et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent de rédiger comme suit le quatrième alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article 515-3 du code civil :
« Il transmet à la mairie du lieu de naissance de chacun des partenaires à fin d'inscription en marge du registre d'état civil. »
Par amendement n° 36, MM. Bret, Duffour, Foucaud, Mme Borvo, M. Fischer, Mme Beaudeau, M. Bécart, Mme Bidard-Reydet, MM. Le Cam, Lefebvre, Mme Luc, MM. Ralite, Renar et Mme Terrade proposent, dans le quatrième alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article 515-3 du code civil, de remplacer les mots : « au greffe du tribunal d'instance » par les mots : « à la mairie ».
Par amendement n° 37, MM. Bret, Duffour, Foucaud, Mme Borvo, M. Fischer, Mme Beaudeau, M. Bécart, Mme Bidard-Reydet, MM. Le Cam, Lefebvre, Mme Luc, MM. Ralite, Renar et Mme Terrade proposent, dans le quatrième alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article 515-3 du code civil, de remplacer les mots : « au greffe du tribunal d'instance » par les mots : « à la mairie de leur résidence ».
Par amendement n° 38, MM. Bret, Duffour, Foucaud, Mme Borvo, M. Fischer, Mme Beaudeau, M. Bécart, Mme Bidard-Reydet, MM. Le Cam, Lefebvre, Mme Luc, MM. Ralite, Renar et Mme Terrade proposent, dans le sixième alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article 515-3 du code civil, de remplacer les mots : « au greffe du tribunal d'instance » par les mots : « à la mairie ».
Par amendement n° 59 rectifié, Mme Derycke, MM. Bel, Delanoë et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent, à la fin de la première phrase du premier alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article 515-4 du code civil, de remplacer les mots : « une aide mutuelle et matérielle » par les mots : « une aide morale et matérielle ».
Par amendement n° 60 rectifié, Mme Derycke, MM. Bel, Delanoë et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent de compléter in fine le second alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article 515-4 du code civil :
« Les partenaires contribuent aux charges de la vie commune en proportion de leurs facultés. Toute dette contractée par l'un des partenaires pour les besoins de la vie commune oblige solidairement l'autre partenaire. Toutefois, celui-ci n'est pas tenu des dettes excessives eu égard aux ressources des partenaires. »
Par amendement n° 45 rectifié, MM. Bret, Duffour, Foucaud, Mme Borvo, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent de rédiger comme suit le texte présenté par l'article 1er pour l'article 515-5 du code civil :
« Art. 515-5. - Les partenaires peuvent déclarer de manière générale, qu'ils entendent contracter un pacte civil de solidarité sous l'un des régimes prévus au titre V du livre III du code civil.
« A défaut de stipulations spéciales dérogeant au régime de communauté ou le modifiant, les règles établies dans la première partie du chapitre II du titre V du livre III formeront le droit commun des partenaires liés par un pacte civil de solidarité.
« Les règles prévues au titre V du livre III du présent code s'appliquent aux partenaires ayant contracté un pacte civil de solidarité. »
Par amendement n° 61 rectifié, Mme Derycke, MM. Bel, Delanoë et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent de rédiger comme suit le texte présenté par l'article 1er pour l'article 515-5 du code civil :
« Art. 515-5. - Chaque partenaire peut prouver par tout moyen, tant à l'égard de l'autre partenaire que des tiers, qu'il a la propriété exclusive d'un bien.
« Les biens sur lesquels aucun des partenaires ne peut justifier d'une propriété exclusive sont réputés leur appartenir indivisément. »
Par amendement n° 62 rectifié, Mme Derycke, M. Bel et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent de compléter in fine le texte présenté par l'article 1er pour l'article 515-6 du code civil par les mots suivants : « pour l'attribution du domicile principal ».
Par amendement n° 39, MM. Bret, Duffour, Foucaud, Mme Borvo, M. Fischer, Mme Beaudeau, M. Bécart, Mme Bidard-Reydet, MM. Le Cam, Lefebvre, Mme Luc, MM. Ralite, Renar et Mme Terrade proposent, dans la première phrase du premier alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article 515-8 du code civil, de remplacer les mots : « au greffe du tribunal d'instance dans le ressort duquel » par les mots : « à la mairie de la commune dans laquelle ».
Par amendement n° 63 rectifié, Mme Derycke, MM. Bel, Delanoë et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent, à la fin de la première phrase du premier alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article 515-8 du code civil, de remplacer les mots : « dans le ressort duquel l'un d'entre eux au moins a sa résidence » par les mots : « dans lequel ils avaient déposé leur demande initiale ».
Par amendement n° 40, MM. Bret, Duffour, Foucaud, Mme Borvo, M. Fischer, Mme Beaudeau, M. Bécart, Mme Bidard-Reydet, MM. Le Cam, Lefebvre, Mme Luc, MM. Ralite, Renar et Mme Terrade proposent, au début de la seconde phrase du premier alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article 515-8 du code civil, de remplacer les mots : « Le greffier inscrit » par les mots : « Les services de l'état civil inscrivent ».
Par amendement n° 41, MM. Bret, Duffour, Foucaud, Mme Borvo, M. Fischer, Mme Beaudeau, M. Bécart, Mme Bidard-Reydet, MM. Le Cam, Lefebvre, Mme Luc, MM. Ralite, Renar et Mme Terrade proposent, dans le deuxième alinéa du texte présenté par l'article 515-8 du code civil, de remplacer les mots : « au greffe du tribunal d'instance » par les mots : « à la mairie ».
Par amendement n° 42, MM. Bret, Duffour, Foucaud, Mme Borvo, M. Fischer, Mme Beaudeau, M. Bécart, Mme Bidard-Reydet, MM. Le Cam, Lefebvre, Mme Luc, MM. Ralite, Renar et Mme Terrade proposent, dans le quatrième alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article 515-8 du code civil, de remplacer les mots : « au greffe du tribunal d'instance » par les mots : « à la mairie ».
Par amendement n° 43, MM. Bret, Duffour, Foucaud, Mme Borvo, M. Fischer, Mme Beaudeau, M. Bécart, Mme Bidard-Reydet, MM. Le Cam, Lefebvre, Mme Luc, MM. Ralite, Renar et Mme Terrade proposent de rédiger comme suit le cinquième alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article 515-8 du code civil :
« Les services qui reçoivent la déclaration ou les actes prévus aux alinéas précédents portent ou font porter mention de la fin du pacte en marge de l'acte initial. Ils font également procéder à l'inscription de cette mention en marge du registre prévu au troisième alinéa de l'article 515-3. »
Par amendement n° 64 rectifié, Mme Derycke, MM. Bel, Delanoë et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent de rédiger comme suit le cinquième alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article 515-8 du code civil :
« Le greffier qui reçoit la déclaration ou les actes prévus aux alinéas précédents porte ou fait porter mention de la fin du pacte en marge de l'acte initial. Il transmet également un extrait de la déclaration à la mairie du lieu de naissance de chacun des partenaires à fin d'inscription en marge du registre d'état civil. »
Par amendement n° 44, MM. Bret, Duffour, Foucaud, Mme Borvo, M. Fischer, Mme Beaudeau, M. Bécart, Mme Bidard-Reydet, MM. Le Cam, Lefebvre, Mme Luc, MM. Ralite, Renar et Mme Terrade proposent, à la fin du neuvième alinéa (2°) du texte présenté par l'article 1er pour l'article 515-8 du code civil, de remplacer les mots : « du greffier du tribunal désigné à cet alinéa » par les mots : « des services de la mairie ».
Par amendement n° 65 rectifié, Mme Derycke, MM. Bel, Delanoë et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent, au début du dernier alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article 515-8 du code civil, avant les mots : « les partenaires », d'ajouter les mots : « lors de la rupture, ».
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 4.
M. Patrice Gélard, rapporteur. L'amendement n° 4 n'a d'autre objet que de supprimer le PACS.
M. Dominique Braye. C'est clair !
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. Très bien !
M. Patrice Gélard, rapporteur. Soyons logiques. Depuis ce matin, nous avons adopté trois dispositions. En premier lieu, nous avons affirmé que chacun était libre de sa vie personnelle et, du même coup, nous avons reconnu tous les comportements ; il n'est donc point besoin de les préciser. En deuxième lieu, nous avons reconnu que le mariage était l'union d'un homme et d'une femme. Enfin, en troisième lieu, nous avons inséré dans le code civil la notion de concubinage, qui est l'union de deux personnes qui vivent en couple, quelles qu'elles soient, quelles que soient les interprétations que les uns ou les autres veulent donner à ce terme de couple.
Comment peut-on conserver le PACS après le dispositif que nous avons adopté ?
Je suis obligé de reprendre ici les différentes dispositions que l'Assemblée nationale a adoptées et qui sont, je l'ai déjà dit dans mon rapport introductif, complètement dérogatoires au droit commun des contrats. En réalité, elles instituent un sous-mariage, nous le verrons bien avec tous les amendements qui ont été déposés par nos collègues du groupe socialiste et du groupe communiste républicain et citoyen et qui visent, en fait, à rapprocher le PACS du mariage.
Prenons quelques exemples, que je ne détaillerai pas : cela prendrait trop de temps.
Tout d'abord, pourquoi réserver, dans l'article 515-1, la signature du contrat aux seules personnes majeures, alors que le droit général des contrats s'applique également aux mineurs émancipés, sans oublier que l'on ne parle pas ici des majeurs incapables qui, normalement, avec leur organe de tutelle, peuvent également signer des contrats ?
L'article 515-2 transpose ni plus ni moins les dispositions applicables au mariage en ce qui concerne les empêchements de signer un PACS. Pourquoi exclure les alliés ? Pourquoi exclure les collatéraux ? Ces dispositions découlent directement du mariage et elles démontrent bien que le PACS est une transposition du mariage.
L'article 515-3 dispose qu'est déposée une « déclaration écrite conjointe » - mais on ne sait pas qui dépose, si on dépose en personne ou si on fait déposer par quelqu'un d'autre - « organisant leur vie commune ». Cette déclaration vise-t-elle le contrat de PACS ou peut-il y avoir, à côté de la déclaration, un contrat pour la compléter ? Nous ne savons rien ! Quel document sera opposable aux tiers ? La déclaration ou le contrat ? Nous n'en savons pas.
M. Alain Lambert. Très bonne question !
M. Patrice Gélard, rapporteur. Continuons : on nous dit que, « à peine de nullité... » Mais de quelle nullité s'agit-il ? Une nullité relative ou une nullité absolue ? Là encore, nous n'en savons rien, il faudra que la jurisprudence décide.
Ensuite, on nous dit qu'il y a une date certaine. Mais non, il n'y a pas de date certaine ! Le dépôt de la déclaration peut ne pas correspondre du tout avec la transposition sur le registre tenu par le greffier ! On peut très bien remettre la déclaration à un agent du greffe, qui décidera de l'enregistrer le lendemain, le surlendemain ou un mois plus tard, lorsque le greffier sera revenu de vacances ! Il n'y a donc pas de date certaine et les « pacsés » croiront que c'est la date à laquelle ils ont remis la déclaration - ou que l'un des deux l'aura remise, parfois, d'ailleurs, sans que l'autre le sache - alors qu'il peut s'agir de la date que le greffier aura retenue pour enregistrer ladite déclaration sur le registre. Là encore, que d'incertitudes !
Venons-en à l'article 515-4, sur lequel je ne m'étendrai pas non plus : je vous renvoie à mon rapport écrit pour ce qui est des détails.
Cet article dispose que le PACS comporte des obligations et des devoirs. Non ! Il ne comprend aucune obligation ni aucun devoir !
M. Dominique Braye. Absolument !
M. Patrice Gélard, rapporteur. Qu'entendez-vous par les mots « aide mutuelle matérielle » ? Ils ne veulent rien dire ! Faut-il comprendre que l'un va bricoler et que l'autre va faire la vaisselle ? Ces mots n'ont aucune signification ! (Vives protestations sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste, républicain et citoyen.)
Mme Nicole Borvo. Qu'est-ce qu'il ne faut pas entendre !
M. Robert Bret. Est-ce que vous faites la vaisselle, monsieur Gélard ? (Sourires.)
M. Patrice Gélard, rapporteur. Disons-le nettement, le PACS ne comporte pas de devoir. Au demeurant, comment un contrat qu'il est possible de dénoncer à n'importe quel moment pourrait-il comporter un devoir ?
M. Jacques Machet. Très bien !
M. Dominique Braye. Naturellement !
M. Patrice Gélard, rapporteur. Quant à la solidarité pour dettes à l'égard des tiers, comment voulez-vous qu'elle puisse être organisée puisqu'il n'y a pas de publicité ? En effet, les pacsés pourront très bien faire état de leur situation ou la cacher ! Les tiers pourront donc l'ignorer. Cette solidarité est alors vaine, du moins dans l'état actuel de ce texte.
Et ne parlons pas d'indivision ! J'ai déjà abordé cette question : avez-vous bien lu les dispositions relatives à l'indivision qui figurent dans le code civil ? Savez-vous que tous les actes de gestion doivent être réalisés en commun ? Imaginez un commerçant qui « pacserait » avec une personne qui n'exerce pas cette activité, un artisan avec une personne qui n'est pas artisan, un exploitant agricole avec une personne qui ne le serait pas ? Comment voulez-vous que tous les actes de gestion soient contresignés par le « pacsé » ? Ce n'est pas sérieux ! C'est oublier, au moment de la rupture, toutes les difficultés que soulève l'indivision, sans même parler de l'enrichissement sans cause qui pourra en découler, et l'on pourrait multiplier les exemples à l'infini. Quant à l'article 515-6, relatif à l'attribution préférentielle, il est également totalement délirant. Je sais bien qu'un amendement vise à limiter simplement sa portée à l'habitation principale, mais, en ce qui concerne le fonds de commerce, l'exploitation agricole, son application n'est pas envisageable, sauf à se lancer dans des difficultés juridiques absolument insurmontables.
Enfin, la cerise sur le gâteau est constituée par la fin du PACS, qui est totalement dérogatoire au droit des contrats, y compris des contrats à durée indéterminée : on peut y mettre fin quand on veut. Ah ! bien sûr, on nous a dit qu'on avait ménagé une notification par exploit d'huissier trois mois auparavant. Mais à partir du moment où l'un des deux « pacsés » a disparu, comment va-t-on le retrouver ? L'exploit d'huissier va se perdre dans la nature !
Mme Dinah Derycke. Cela arrive dans bien des couples mariés !
M. Patrice Gélard, rapporteur. L'un ou l'autre sera alors « dépacsé » sans le savoir, parce que l'on déroge aux règles contractuelles. En réalité, la partie la plus faible, la victime, ne sera absolument pas protégée dans ce système de dénonciation unilatérale.
De plus, il ne pourra pas être attribué de dommages et intérêts, car, pour cela, il faudrait qu'existe une faute. Le PACS ne génère donc pas d'obligation réelle ni de possibilité de dédommagement de la partie la plus faible en cas de rupture unilatérale.
J'aurais pu continuer comme cela très longtemps, en décortiquant en détail chacun des éléments d'un PACS qu'il n'est pas possible de conserver : il comporte tant de nids à contentieux, de difficultés, de dérogations au droit général que l'on peut même se poser la question de sa constitutionnalité !
Dès lors, on ne peut que demander la suppression du PACS. Au demeurant, si par malheur le texte était adopté en l'état par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, je suis sûr que celui qui, par mésaventure, aurait signé un premier PACS ne le referait plus jamais compte tenu des difficultés qu'il rencontrerait dans sa mise en oeuvre.
Disons-le franchement, en réalité le PACS est uniquement conçu pour que les « pacsés » bénéficient des avantages fiscaux qui y sont attachés. Nous nous trouvons là devant des inégalités, des discriminations totalement inacceptables.
M. Dominique Braye. Absolument !
M. Patrice Gélard, rapporteur. Oui, mes chers collègues, le PACS n'a été fait que pour des raisons fiscales! (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste).
M. le président. La parole est à M. Machet, pour défendre l'amendement n° 32.
M. Jacques Machet. Comme l'amendement n° 4, l'amendement n° 32 vise à supprimer cet article.
Pourquoi faut-il supprimer le PACS ?
D'abord, parce qu'il est ambigu, cela a été dit et redit : sa nature juridique est indéterminée, on ne sait pas s'il s'agit d'un contrat ou d'un simple constat.
Ensuite, parce que le PACS, contrairement au mariage, ne prévoit aucune engagement sur l'avenir.
Mme Nicole Borvo. Ce n'est pas un mariage !
M. Jacques Machet. Il est une source d'instabilité et d'insécurité juridique pour tous ceux qui le signent : la protection du plus faible n'est pas assurée alors que la possibilité de rupture unilatérale ouverte à tout moment peut être considérée comme un retour à la répudiation. C'est une véritable régression.
Par ailleurs, il n'est nulle part question des enfants, beaucoup l'ont dit au cours de ces débats.
De plus, le PACS est fortement inégalitaire parce qu'il va créer une forte inégalité entre les concubins signataires et celles et ceux qui ne le désirent pas.
Mme Nicole Borvo. Et alors ?
M. Jacques Machet. L'union libre est pourtant un choix positif, revendiqué comme tel, d'un lien strictement privé.
Enfin, le PACS menace non seulement le mariage, ce qui est fort critiquable en soi, mais aussi le concubinage, ce qui est fort injuste. Le PACS n'est pas un cadre juridique pour le concubinage, il est une alternative au mariage pour sortir, précisément, du concubinage, alors que le concubinage n'a jamais été un danger pour le mariage.
Le PACS met donc fin à la reconnaissance progressive de l'union libre, alors que l'attachement au concubinage est réel.
Le PACS touche également à la famille, car il touche au couple. Pourtant, c'est dans la famille que s'exprime la solidarité, que s'apprend le respect de l'autre et que se transmettent les vraies valeurs.
M. Emmanuel Hamel. Très bien !
Mme Nicole Borvo. Pas toujours !
M. Jacques Machet. La famille, pour moi, cellule de base de la société, est un refuge pour les jeunes et les moins jeunes. La famille, c'est aussi et surtout le lieu de procréation privilégié, où l'enfant doit trouver le respect de sa personne, car il est bon de le souligner : on n'élève pas un enfant, on l'aide à s'élever.
M. Jean-Luc Mélenchon. Qu'est-ce que cela a à voir ?
M. Jacques Machet. La famille est un maillon central de la cohésion sociale, et c'est pourquoi elle doit être protégée et confortée.
Bref, il n'y a pas de place dans le code civil pour une nouvelle institution entre le mariage et l'union libre, et c'est pour ces raisons que les membres du groupe de l'Union centriste rejetteront le PACS. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à Mme Derycke, pour défendre l'amendement n° 57 rectifié.
Mme Dinah Derycke. En préambule, je tiens à rappeler que nous avons toujours dit qu'il y avait place entre le concubinage et le mariage pour un nouveau cadre juridique, pour encourager la stabilité des couples homosexuels ou hétérosexuels qui, prenant l'engagement d'une vie commune, se soumettent volontairement et librement à des devoirs, à des obligations, et qui, en retour, reçoivent effectivement des droits. Cette forme de contact participe, en effet, de la cohésion sociale.
Contrairement à ce que propose M. le rapporteur, à savoir ni plus ni moins la suppression du PACS, nous nous sommes donc, pour notre part, attachés à porter sur ce texte un regard différent afin de rechercher s'il pouvait effectivement être amélioré et enrichi, et si les conditions - très particulières, il faut le rappeler - de sa discussion à l'Assemblée nationale n'avaient pas écarté tel ou tel point précis.
Nous nous sommes ainsi livrés à une étude juridique de ce texte sur le fond et nous présenterons toute une série d'amendements, dont le premier, l'amendement n° 57 rectifié, vise à préciser que le PACS ne sera pas ouvert aux personnes incapables placées sous tutelle.
Cet exemple montre bien que le texte adopté par l'Assemblée nationale est parfaitement amendable et peut tout à fait être enrichi.
M. le président. La parole est à M. Bret, pour défendre l'amendement n° 34.
M. Robert Bret. Monsieur le président, en présentant l'amendement n° 34, je défendrai également les amendements n°s 35 à 44, qui en découlent directement.
Tous ces amendements ont trait au lieu d'enregistrement de la déclaration organisant la vie commune de deux personnes signataires d'un PACS. C'est une question importante.
L'Assemblée nationale a adopté un amendement transférant de la préfecture vers les tribunaux d'instance le lieu de signature du PACS. Preuve est donc apportée que la solution de la préfecture, initialement retenue, n'était pas la bonne.
Pour notre part, nous estimons depuis le début que le PACS devrait être signé au service d'état civil de la mairie, plus connue, plus accessible et plus proche du citoyen.
De plus, c'est le lieu où sont déjà déclarés tous les actes importants de la vie : naissance, mariage, décès, y compris les certificats de vie commune et de concubinage. Il serait donc plus pratique et plus logique de regrouper tous les événements qui jalonnent la vie d'une personne dans un même lieu.
La solution retenue par l'Assemblée nationale, à savoir l'enregistrement au greffe du tribunal d'instance, pose davantage de problèmes qu'elle ne semble en résoudre.
En effet - la commission des lois l'a bien relevé - des problèmes vont rapidement se poser, dans la pratique, du fait que les greffiers sont d'ores et déjà en nombre insuffisant et donc surchargés. En outre, tous les tribunaux d'instance ne disposent pas d'un greffier à plein temps.
M. le président. L'amendement n° 35 a donc été défendu.
La parole est à Mme Derycke, pour présenter l'amendement n° 58 rectifié.
Mme Dinah Derycke. Cet amendement vise, parmi d'autres, la publicité à l'égard des tiers, la rapidité de la transmission et la date d'effet du PACS.
Le PACS est déclaré au greffe d'instance, mais le greffier transmet l'information à la mairie du lieu de naissance de chacun des partenaires aux fins d'inscription en marge du registre d'état civil. C'est à la fois plus simple et plus rapide et cela permet aux tiers, dans certains cas, la tenue d'un commerce ; par exemple, d'être informés que les personnes ont été pacsées.
M. le président. Les amendements n°s 36, 37 et 38 ont été défendus.
La parole est à Mme Derycke, pour soutenir les amendements n°s 59 rectifié et 60 rectifié.
Mme Dinah Derycke. L'amendement n° 59 rectifié vise à une meilleure rédaction de la formule « aide mutuelle et matérielle », qui a été très critiquée et qui, c'est vrai, laisse à désirer sur le plan de la langue.
Entre les personnes qui contracteront un PACS, il n'y a pas uniquement un lien d'ordre financier, d'ordre pécuniaire ; il y a aussi, bien sûr, un soutien moral, dans la maladie, dans les peines, mais également un partage des joies, qui sont le lot de tous ceux qui vivent en commun.
Voilà pourquoi nous proposons la formule : « aide morale et matérielle ».
Quant à l'amendement n° 60 rectifié, il a pour objet de limiter la solidarité à l'égard des tiers pour les dettes contractées par l'un des partenaires pour les besoins de la vie courante.
Dans un couple marié, il y a solidarité des dettes à l'égard des tiers. La jurisprudence a toutefois veillé à ce que cela ne se retourne pas contre le conjoint le plus faible. En l'espèce, nous adaptons quelque peu cette réalité aux couples qui contractent un PACS, en prévoyant que les dettes ne doivent pas être excessives eu égard aux ressources des partenaires. C'est un élément de justice et d'équité.
M. le président. La parole est à M. Bret, pour défendre l'amendement n° 45 rectifié.
M. Robert Bret. L'article 515-5 du code civil, tel que rédigé par l'article 1er de la proposition de loi, soumet les personnes liées par un PACS au régime de l'indivision.
Ce régime présente plusieurs inconvénients.
Premièrement, l'indivision est instable. En effet, un indivisaire peut, à tout moment, en demander le partage. Dans les faits, c'est la loi du plus fort qui joue.
Deuxièmement, l'indivision est injuste. Par définition, dans ce régime, il n'y a pas de communauté, et chaque partenaire accroît son patrimoine de ses propres revenus.
Pour les biens immeubles, la preuve de la propriété est, somme toute, aisée à apporter. En revanche, les biens meubles, dont on n'aura pas forcément gardé la facture, seront considérés comme indivis.
En pratique donc, à supposer que l'un des partenaires soit aisé et l'autre RMIste, le premier le sera encore plus, alors que le second n'aura droit à rien de ce qu'ils auront acquis pendant leur vie commune.
Ce système se rapproche du régime de la séparation de biens des gens mariés (Voilà ! sur les travées du RPR), à la seule différence que les gens mariés ont aussi la possibilité d'être soumis, à défaut de contrat, au régime de la communauté.
M. Dominique Braye. Voilà ! Ce sont les régimes matrimoniaux !
M. Robert Bret. Les contractants à un PACS souhaitant, dans la plupart des cas, avoir un minimum de biens communs, pourquoi ne pas leur permettre, dès lors, d'être soumis au régime de la communauté réduite aux acquêts ?
Le texte, en l'état, ne leur permet pas ce choix.
C'est pourquoi nous proposons, par amendement, de laisser la liberté de choix en la matière, parce que toutes les situations ne sont pas égales.
Afin d'assurer une meilleure sécurité au couple et de protéger le plus faible, les pacsés devraient pouvoir choisir le régime qui leur est le plus adapté.
M. Dominique Braye. C'est le mariage sans le dire !
M. le président. La parole est à Mme Dinah Derycke, pour défendre les amendements n°s 61 rectifié et 62 rectifié.
Mme Dinah Derycke. L'amendement n° 61 rectifié concerne l'indivision. M. le rapporteur l'a dit, ce n'est pas un régime toujours très simple. De plus, ce régime n'est pas bien connu de nos concitoyens.
Comme l'on peut penser, et espérer, que nombreux seront ceux qui voudront contracter un PACS, il convient d'éviter quelques pièges.
Aux termes de notre amendement, l'indivision serait l'exception, la règle étant la séparation de biens, ou un régime qui s'en approche.
Nous espérons lever ainsi les réticences dont nous avaient fait part certains notaires et avocats concernant le régime qui doit régler la vie commune matérielle, cette fois, des personnes qui auront pacsé.
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. Ce sont des régimes matrimoniaux !
Mme Dinah Derycke. Quant à l'amendement n° 62 rectifié, il a pour objet de limiter l'application des articles 832 à 832-4 du code civil relatifs à l'attribution préférentielle en cas de dissolution du pacte civil de solidarité pour l'attribution du domicile principal.
M. le président. L'amendement n° 39 a été défendu.
La parole est à Mme Derycke, pour défendre l'amendement n° 63 rectifié.
Mme Dinah Derycke. En cas de rupture du PACS, dans un souci de simplification et de rapidité des délais, nous prévoyons que la déclaration de rupture est remise au greffe où le PACS a été originellement conclu.
M. le président. Les amendements n°s 40 à 43 ont été présentés.
La parole est à Mme Derycke, pour présenter l'amendement n° 64 rectifié.
Mme Dinah Derycke. Cet amendement prévoit que, à la fin du pacte civil de solidarité, le greffier du tribunal d'instance transmettra un extrait de la déclaration à la mairie du lieu de naissance de chacun des partenaires aux fins d'inscription en marge de l'état civil.
M. le président. L'amendement n° 44 a été défendu.
La parole est à Mme Derycke, pour présenter l'amendement n° 65 rectifié.
Mme Dinah Derycke. Les partenaires ne peuvent, bien sûr, envisager les conséquences de la rupture du PACS au moment où ils le contractent. C'est lors de la rupture qu'ils pourront éventuellement se mettre d'accord sur les conséquences que celle-ci entraîne pour eux.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'ensemble des amendements, à l'exception, bien sûr, de l'amendement n° 32, qui est identique au sien ?
M. Patrice Gélard, rapporteur. L'avis de la commission sur l'ensemble de ces amendements est naturellement défavorable.
Je tiens tout de même à souligner une chose, madame le garde des sceaux.
Je salue le travail accompli par nos collègues du groupe socialiste et par ceux du groupe communiste républicain et citoyen pour tenter d'améliorer le PACS. Mais que dois-je constater, sinon qu'en voulant l'améliorer ils ne font rien d'autre que du mariage ?
Cela démontre bien ce que je disais au départ, à savoir que le PACS n'est pas amendable, sauf à en faire un sous-mariage.
M. Alain Lambert. Exactement !
M. Patrice Gélard, rapporteur. Que nous proposent nos collègues du groupe communiste républicain et citoyen dans les amendements n°s 34 à 44 ? De tout transférer à l'état civil,...
M. Jean-Jacques Hyest. Voilà !
M. Patrice Gélard, rapporteur. ... avec l'officier d'état civil, avec une cérémonie... exactement comme pour le mariage.
M. Robert Bret. Avec les grandes orgues aussi ! (Sourires.)
M. Patrice Gélard, rapporteur. Et pourquoi pas, pendant qu'on y est ?
De même, que nous propose-t-on, sinon tout simplement de réinventer les contrats de mariage, parce que l'on s'aperçoit que le régime prévu dans le PACS est inapplicable ?
En réalité, cela conforte ce que nous avons dit depuis le début,...
M. Dominique Braye. Absolument !
M. Patrice Gélard, rapporteur. ... à savoir que le PACS est un sous-mariage qui ne veut pas dire son nom. La position de la commission des lois du Sénat en sort renforcée.
M. Lucien Lanier. Très bien !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'ensemble des amendements ?
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Les amendements n°s 4 et 32, s'ils étaient adoptés, auraient pour effet de supprimer l'article 1er de la proposition de loi adoptée en première lecture à l'Assemblée nationale. Je ne peux donc évidemment pas les accepter puisque, ce faisant, ils remettent en cause le principe même du pacte civil de solidarité.
Je m'élève avec force contre l'argument qui veut que le pacte civil de solidarité soit de nature à porter atteinte au mariage.
Je le redis ici, le mariage est une institution qui est plébiscitée par 24 millions de nos concitoyens, qui décident de s'engager solennellement devant un officier de l'état civil, et toute l'originalité, tout l'intérêt du PACS est, précisément, d'offrir aux couples qui ne veulent pas ou qui ne peuvent pas se marier des droits nouveaux en contrepartie - je dis bien « en contrepartie » - d'un engagement à une stabilité de vie commune dès lors qu'ils le souhaitent et l'affirment socialement.
Par ailleurs, vingt et un amendements ont été déposés sur les six articles du code civil visés à l'article 1er de la proposition de loi adoptée par l'Assemblée nationale. Cela démontre qu'il est possible d'améliorer le texte, et je remercie leurs auteurs de participer à ce perfectionnement.
Parmi ces amendements, je ne peux pas accepter ceux qui concernent le lieu d'enregistrement, la mairie en l'occurrence, l'état civil ou les régimes matrimoniaux. Il importe en effet d'éviter, comme je l'ai déjà dit, toute confusion avec le mariage. En revanche, je peux en accepter d'autres, et je vais donner des indications sur ce point.
Certains amendements présentés notamment par Mme Derycke, MM. Bel, Delanoë et Mélenchon et portant sur la capacité, les obligations des partenaires, l'attribution préférentielle, permettent, sous réserve d'améliorations de rédaction, soit de lever des difficultés qui ont été soulevées lors du débat à l'Assemblée nationale ou, postérieurement, par des universitaires, des notaires, soit de préciser des points particuliers.
Ainsi, le Gouvernement n'est pas opposé à l'interdiction faite aux majeurs placés sous le régime de protection de la tutelle de contracter un pacte, à la limitation à certains biens des possibilités d'attribution personnelle ou encore à des précisions sur les obligations des partenaires du pacte civil de solidarité.
Pour ce qui est de l'indivision, le Gouvernement est prêt à apporter des précisions afin d'éviter les difficultés qui pourraient surgir en l'état de la rédaction du texte.
Si le Sénat suit la commission des lois et supprime l'article 1er de la proposition de loi, il faudra que, sur les points que je viens de citer, le débat se poursuive à l'Assemblée nationale.
Je tiens maintenant à répondre à la question qu'a posée M. Lambert concernant le régime juridique prévu par le PACS, qui ne permet pas, s'agissant de la gestion des biens, d'adopter n'importe quel mécanisme.
Pour les biens indivis - c'est volontaire de notre part - il ne peut y avoir que gestion individuelle ou gestion commune. Dans ce cas, les titulaires du PACS ont le choix entre ces deux régimes. Ils n'ont pas - c'est volontaire, je le répète - toute liberté d'organiser la gestion de leurs biens. Cette disposition était nécessaire, parce qu'il n'est pas question que le PACS puisse concurrencer le mariage en empruntant aux dispositions des régimes matrimoniaux.
Enfin, certains se sont inquiétés des difficultés pratiques qui pourraient résulter de l'enregistrement du PACS au sein des tribunaux d'instance, qui présentent l'avantage d'être très près de nos concitoyens et de nos concitoyennes. Selon eux, ces tribunaux ne disposeraient pas toujours des personnels nécessaires, notamment de greffiers.
Qu'il me soit permis de leur apporter les précisions suivantes : sur 473 tribunaux d'instance, 87 n'ont pas d'emploi localisé de greffier de catégorie B, mais 86 ont un greffier en chef de catégorie A qui accomplit les missions de greffier car la charge de travail de ces 86 tribunaux d'instance ne nécessite pas la présence d'un encadrement intermédiaire. En conséquence, un seul tribunal d'instance, celui de Saint-Flour, situé dans le ressort de la cour d'appel de Riom et dans celui du tribunal de grande instance d'Aurillac, ne dispose pas d'effectifs budgétaires de fonctionnaires, l'activité de cette juridiction étant toutefois assurée par le tribunal d'instance de Murat, qui est situé dans le même ressort.
M. le président. Je vais mettre aux voix les amendements identiques n°s 4 et 32.
M. Robert Bret. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à M. Bret.
M. Robert Bret. Nous nous opposons vivement à l'adoption de ces deux amendements, qui, comme vient de le souligner Mme le garde des sceaux, tendent à supprimer l'article 1er, remettant ainsi en cause le travail accompli pendant plusieurs semaines par les députés.
Mais de quoi avez-vous peur, mes chers collègues de la majorité ? Contrairement à ce que vous ne cessez de répéter, le PACS ne porte nullement atteinte au mariage ou à la famille. Mais il n'y a pire sourd que celui qui ne veut pas entendre !
Le pacte vise simplement, ce qui est primordial, à faciliter la vie des couples non mariés en leur accordant des droits dont ils sont depuis trop longtemps exclus. Le PACS est, au contraire, un élément de cohésion sociale qui permet de faire avancer toute la société en faisant reculer les discriminations.
Vous refusez de voir la réalité en face, vous qui vivez avec une image de la société digne d'un autre siècle ! Pour que chacun prenne ses responsabilités lors du vote de ces amendements de suppression de l'édifice même du PACS, nous demandons un vote par scrutin public.
M. Jean-Luc Mélenchon. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Mélenchon.
M. Jean-Luc Mélenchon. Après l'adoption de ces amendements - car nous avons de fortes raisons de penser qu'ils pourraient bien l'être, compte tenu des votes précédents ! - acta est fabula, disait Auguste. La pièce est jouée, dirai-je, plutôt que la messe est dite, pour ne pas choquer M. Chérioux !
M. Emmanuel Hamel. La laïcité, c'est respecter la conviction des autres !
M. Jean-Luc Mélenchon. En fait, avec le vote de ces amendements, on aura anéanti le travail de l'Assemblée nationale.
A l'occasion de cette discussion, on a de nouveau entendu d'émouvants plaidoyers pour la famille, dont je dirai seulement, par respect pour ceux qui les ont prononcés - car je les respecte, eux et leurs plaidoyers - qu'ils sont complètement hors sujet.
Personne ne peut en effet douter dans cet hémicycle que l'ensemble des « pacsés » ont une famille et que les « pacsés » hétérosexuels ont ou auront des enfants... à moins que l'on veuille laisser entendre qu'il s'agirait de « sous-familles » et, pourquoi pas ? de « sous-parents » !
On a aussi entendu une nouvelle fois notre éminent rapporteur M. Gélard dire : le PACS, c'est du « sous-mariage ». Et l'agitation de ce chiffon rouge aura suffi pour que la majorité rappelle, à force cris, tout le dégoût que lui inspire cette formule.
Mais, une fois de plus, cette remarque est hors sujet. En effet, cher rapporteur, s'il y a dans le PACS des formules qui sont inspirées du mariage, c'est parce que le mariage est la forme de communauté de vie de base que nous connaissons jusqu'à présent et que des dispositions qui lui sont applicables paraissent parfaitement judicieuses et méritent d'être étendues à d'autres formes de vie commune.
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. Voilà qui est clair !
M. Jean-Luc Mélenchon. Où est le scandale ?
Par ailleurs et dans le même temps, et c'est pourquoi nous ne pouvons accepter ce qualificatif de « sous-mariage », le PACS, c'est autre chose que le mariage, c'est un mode de vie commune pour d'autres situations que celles qui sont liées par le mariage.
Il n'y a là ni offense, ni matière à s'indigner. C'est pourquoi cela s'appelle, monsieur Patrice Gélard, non pas un « sous-mariage » mais un PACS !
Chers collègues de la majorité sénatoriale, vous aurez passé cette journée et la précédente à enfoncer des portes ouvertes, à vous faire peur et, ensuite, à vous rassurer avec toutes sortes d'amendements créant d'effroyables confusions. Nous espérons que l'Assemblée nationale saura y mettre bon ordre.
Dressons maintenant le bilan de la grande oeuvre législative à laquelle vous aurez procédé. Ce sera trèsrapide compte tenu de la matière. A cette occasion en effet, le Sénat de la République française aura établi - saluons cet événement - que le mariage réunit un homme et une femme. Bravo ! (M. Braye s'exclame.)
Etait-il bien nécessaire de réunir le Sénat et de discuter pendant cinq ou six heures pour établir ce point ? Nous pourrions aussi tenir un débat sur l'eau chaude, ... sur le fil à couper le beurre... ou sur ce qui prête à évidence ! Nous éblouirons ainsi ceux qui voudront bien contempler nos travaux législatifs.
Après avoir précisé que le mariage est hétérosexuel et l'avoir tout entier enfermé dans le caractère sexuel de ceux qui sont liés, pris soudain d'une espèce de recul sur la question du sexe, pour ce qui est du concubinage, vous avez estimé que, là, il n'y avait plus de sexe !
Le Sénat de la République française ne sait pas de quel sexe sont les personnes qui vivront en concubinage ! Il n'a aucune idée sur la question et il préfère s'en remettre aux bénéficiaires de l'opération.
M. Dominique Braye. Non, les deux sexes sont concernés.
M. Jean-Luc Mélenchon. Mais au passage, le concubinage, qui était une liberté dont les bénéficiaires ne demandaient rien à personne, a été restreint par votre travail.
Voilà le bilan de notre discussion sur le PACS.
Le PACS, qui traduit une volonté d'ouverture, de liberté, d'aération de notre société, de tolérance, de bienveillance, est réduit à ceci par le Sénat : le mariage est le fait d'un homme et d'une femme, et personne ne sait de quel sexe sont les concubins. Voilà le travail qui a été accompli !
Après quoi, bien sûr, dans la suite de la discussion, vous allez proposer toutes sortes d'avantages fiscaux à tous le monde - après nous avoir reproché d'en concéder aux pacsés - sans distinction ni de sexe ni de situation, ni de liens de vie commune.
Voilà en quoi aura consisté votre grande opération visant à démontrer que la majorité sénatoriale n'est pas « ringarde ». J'emploie ce mot non pas parce qu'il me plaît, mais parce que vous avez semblé en être obsédés.
Je vous le dis en cet instant, vous êtes « reringardisés » et, après une nouvelle lecture de ce texte à l'Assemblée nationale, vous serez non seulement ringards mais tricards ! (Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. Alain Lambert. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Lambert.
M. Alain Lambert. La République est très souvent invoquée dans cette assemblée, comme dans toutes les autres sans doute. Mais se référer à la République, c'est peut-être d'abord s'engager à se respecter les uns les autres, à respecter les convictions des autres.
Or, personnellement, je ne considère pas que d'avoir un point de vue formé, établi, réfléchi sur un sujet aussi grave que celui dont nous débattons depuis ce matin soit le fait de la ringardise... ou d'autres termes qui ont été utilisés tout à l'heure. Je considère au contraire que c'est la traduction d'une conception de la vie, d'une certaine idée des valeurs qui font qu'une société vit en paix et dans le respect de ceux qui la composent.
M. Dominique Braye. Bravo !
M. Alain Lambert. Voilà qui m'amène à vous dire que je n'ai pas souhaité, depuis ce matin, participer à ce débat trop philosophique pour moi. Je ne suis qu'un provincial, monsieur Mélenchon, pardonnez-m'en ! (Sourires.)
M. Emmanuel Hamel. Un grand provincial !
M. Alain Lambert. Cela étant, je m'intéresse aux conséquences juridiques des textes que nous adoptons, et je vous remercie, madame le garde des sceaux, des précisions que vous avez apportées voilà un instant et qui nous permettent de comprendre que, désormais, les personnes qui souscriront un PACS auront le choix entre deux régimes - que je ne qualifierai pas de matrimoniaux - dont l'un est un peu séparatiste et l'autre un peu communautaire.
Ces personnes n'auront aucune faculté de choisir d'autres dispositifs qui répondraient pourtant plus précisément à leurs souhaits. Cette précision méritait d'être donnée.
Mes chers collègues, je vais voter l'amendement de la commission avec la conscience profonde d'être utile à mes concitoyens et à mes compatriotes. En effet, juridiquement, le PACS est une construction dangereuse, dont on ne peut mesurer les effets, quels que soient les efforts que vous avez faits, mes chers collègues, pour déposer des amendements visant à le corriger.
Vous construisez un édifice dangereux et, ce faisant, vous détruisez l'agrégat jurisprudentiel, réglementaire, doctrinal qui s'est constitué au fil des années sur le concubinage. Cela veut dire que vous instaurez une insécurité juridique complémentaire.
Vous avez, par la décison de construire le PACS, détruit tout ce qui existait au plan juridique, ou vous l'avez menacé. Peut-être serai-je « ringard », mais, en tout cas, je ne serai pas apprenti sorcier ! (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Jean-Pierre Fourcade. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Fourcade.
M. Jean-Pierre Fourcade. Je voterai l'amendement de la commission pour deux raisons.
Premièrement, comme vient de le dire excellemment mon collègue M. Lambert, je considère que nous sommes en présence d'une construction ex nihilo qui se rapproche plus ou moins du mariage sans en avoir les obligations ni les caractéristiques, notamment la présomption pater is est , qui est l'une des bases du mariage. A partir de là - et les amendements de Mme Derycke et M. Delanoë nous le montrent bien - on peut sans doute modifier quelques éléments du dispositif mais, structurellement, on ne peut pas le changer.
Deuxièmement, je ne comprends pas comment le Gouvernement soutient une telle proposition alors que, de nos jours, le problème central de notre société, c'est assurer la protection des enfants et leur adaptation aux formes nouvelles de la société de demain.
Ce texte prévoit l'organisation de la vie en couple. Nous vivons dans une société qui compte encore une majorité de couples hétérosexuels. Peut-être que, dans vingt ans, la majorité d'entre eux sera homosexuelle ; on ne peut pas savoir !
Que peut-il arriver lorsqu'un homme et une femme vivent ensemble ? La naissance d'un enfant. Je suis stupéfait, madame le garde des sceaux, que le Gouvernement privilégie la notion de couple au point de soutenir un texte qui reste muet sur le problème des enfants !
Qu'arrivera-t-il aux enfants nés de personnes ayant conclu un PACS ? La présomption de paternité existera-t-elle ? Quel sera le statut de cet enfant ? Comment va-t-il évoluer ? Quel sera son droit sur les biens indivis ou collectifs ? Quels seront les mécanismes de filiation ? Silence absolu !
Que nos collègues de l'Assemblée nationale déposent une proposition de loi visant à organiser la vie du couple, c'est parfaitement naturel. Mais que le Gouvernement s'engage dans ce processus comme le fait Mme le garde des sceaux, je ne le comprends pas ! Moi qui, depuis vingt ans, m'occupe des problèmes sociaux et des problèmes de famille, je suis, je l'avoue, totalement désemparé.
Je répète ma question au Gouvernement : dans le cadre d'un PACS conclu entre deux hommes ou entre deux femmes, sera-t-il possible d'accéder à l'adoption ou de recourir à la procréation médicalement assistée ? Voilà deux questions précises auxquelles je souhaite avoir une réponse. En tout état de cause, je voterai l'amendement n° 4 de la commission. Car que l'on ne me dise pas que l'adoption ou la procréation médicalement assistée sont impossibles en raison d'autres lois ! A partir du moment où l'on crée un nouveau système juridique dans lequel on fait figurer un certain nombre de dispositions alors qu'on oublie d'en insérer d'autres, il est clair que cela deviendra possible un jour !
Encore une fois, la vraie question qui nous est posée sur le terrain est la suivante : quel sera le statut des enfants de deux personnes ayant conclu un PACS ?
M. Jacques Pelletier. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Pelletier.
M. Jacques Pelletier. Contrairement à mes amis MM. Lambert et Fourcade, je suis contre les amendements de suppression n°s 4 et 32, car je suis favorable au principe du PACS - qui, à mes yeux, n'est ni un mariage ni un sous-mariage - et cela pour deux raisons.
Premièrement, près de 40 % des naissances ont lieu aujourd'hui hors mariage. C'est un phénomène de société dont nous devons tenir compte, et il est inutile de se voiler la face. D'ailleurs, qui parmi nous ne connaît pas chez ses enfants, dans sa famille ou dans son entourage proche des personnes vivant en concubinage et donc confrontées à la fragilité que suppose une telle situation ?
Le PACS apporte des garanties juridiques, administratives, fiscales, ce qui est une bonne chose.
Deuxièmement, en tant qu'élu, mais surtout en tant que médiateur de la République, j'ai connu des drames - je dis bien des drames - au sein de couples vivant, souvent de longue date, en concubinage homosexuel ou hétérosexuel, tout spécialement au moment du décès de l'un des concubins. Là encore, le PACS constitue une réponse, imparfaite, j'en suis sûr, mais une réponse tout de même à de telles situations de détresse.
En revanche, madame la ministre, je souhaite beaucoup qu'à l'occasion de la navette vous usiez de votre influence pour améliorer sérieusement ce texte, qui en a bien besoin ! (Applaudissements sur les travées socialistes ainsi que sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. Emmanuel Hamel. Oh que oui !
M. Philippe Marini. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Marini.
M. Philippe Marini. Les données du débat sont à présent parfaitement explicites et, par touches successives, les positions défendues et préconisées par la majorité du Sénat s'établissent clairement.
En premier lieu, pour nous, l'essentiel, la pierre angulaire de la famille et de la société, c'est bien le mariage. Nous l'avons conforté par une rédaction écartant les dérives ou les tentations qui se font jour dans des pays voisins et qui, un jour ou l'autre, pourraient naître dans certains esprits dans notre pays.
En deuxième lieu, notre approche est réaliste et factuelle. Sans porter de jugement sur les comportements individuels, nous avons recherché et trouvé une formulation concernant le concubinage, situation de fait à laquelle correspondent certains droits et certains devoirs.
En troisième lieu - nous y viendrons dans la suite de cette discussion - nous précisons cette approche réaliste par des dispositifs juridiques et fiscaux qui tiennent compte de la réalité de la vie en commun de certains couples, quels que soient leur choix de vie.
Cela étant fait et le tout formant un ensemble cohérent, il est clair que le PACS n'a aucune place dans ce dispositif et qu'il tombe de lui-même. Par évidence, nous voterons contre cette forme de contrat, qui ne répond strictement à aucune nécessité ni à aucune opportunité.
Au demeurant, madame le ministre, dans les réponses que vous avez faites à nos collègues du groupe socialiste et du groupe communiste républicain et citoyen, j'ai entendu un certain nombre d'arguments qui me renforcent dans le sentiment que je viens d'exprimer.
Lorsque Mme Derycke vous disait que l'indivision ne lui semblait pas être une situation acceptable, vous lui avez répondu que des précisions devront être apportées pour éviter certaines difficultés. Puis vous avez souligné que la gestion des biens des « pacsés » pourrait être individuelle ou commune. Cela ressemble furieusement - plusieurs de nos collègues l'ont remarqué - à des dispositions issues des régimes matrimoniaux existants. La confusion se trouve recréée entre l'institution du mariage et la formule hybride qu'est votre pacte civil de solidarité.
Vous avez conclu en indiquant que les partenaires n'auraient pas toute liberté d'organiser la gestion de leur bien. Avec M. le rapporteur de la commission des lois, nous avons fait valoir, que dans certaines circonstances, s'agissant notamment de professionnels, de commerçants et d'artisans, il pourrait résulter de cette formule des engagements extrêmement confus, pour les personnes concernées et pour les tiers, et que rien de sérieux n'avait été proposé aux assemblées parlementaires pour porter remède à de telles situations.
Madame le ministre, par rapport à ce « nid » à contentieux, à embrouilles, qu'est finalement votre pacte, la stratégie défendue par la majorité sénatoriale est parfaitement claire et limpide, parfaitement ouverte et parfaitement adaptée aux réalités du temps. C'est en vertu de cette analyse globale, que bien entendu, je voterai ces amendements de suppression.
M. Emmanuel Hamel. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Hamel.
M. Robert Bret. Ça va chauffer ! (Sourires.)
M. Emmanuel Hamel. Comme l'explique si bien et si justement la présidente de l'Association pour la promotion de la famille - je vous invite, mes chers collègues, à relire et à méditer ses propos, qui figurent à la page 222 du rapport - le PACS « détruit le mariage républicain, détruit la cellule familiale ». On peut ajouter qu'il constitue une menace pour l'enfance.
C'est la raison pour laquelle, bien entendu, je voterai les amendements de suppression de l'article 1er.
M. Claude Estier. C'est un peu court !
Mme Nicole Borvo. Le PACS n'est pas une obligation !
M. Robert Bret. Il ne faut pas toujours croire tout ce qui est écrit dans les rapports ! (Sourires.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 4 et 32, repoussés par le Gouvernement.
Je suis saisi de trois demandes de scrutin public émanant, la première, de la commission des lois, la deuxième, du groupe communiste républicain et citoyen et, la troisième, du RPR.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.

(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.) M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 86:

Nombre de votants 314
Nombre de suffrages exprimés 314
Majorité absolue des suffrages 158
Pour l'adoption 216
Contre 98

M. Emmanuel Hamel. Et il s'est ainsi grandi en adoptant !
M. le président. En conséquence, l'article 1er est supprimé et les amendements n°s 57 rectifié, 34 et 35, 58 rectifié, 36 à 38, 59 rectifié, 60 rectifié, 45 rectifié, 61 rectifié, 62 rectifié, 39, 63 rectifié, 40 à 43, 64 rectifié, 44 et 65 rectifié n'ont plus d'objet.

Article additionnel après l'article 1er