Séance du 20 juin 2000







M. le président. L'article 1er bis a été supprimé par l'Assemblée nationale mais, par amendement n° 4, M. Paul Girod, au nom de la commission, propose de la rétablir dans la rédaction suivante :
« Le second alinéa de l'article L. 285 du même code est ainsi rédigé :
« En outre, dans ces communes, les conseils municipaux élisent des délégués supplémentaires à raison de 1 pour 700 habitants en sus de 9 000. »
La parole est M. le rapporteur.
M. Paul Girod, rapporteur. Il s'agit du coeur de la position du Sénat.
Nous proposons l'élection des délégués supplémentaires dans les communes d'au moins 9 000 habitants à raison d'un délégué par tranche de 700 habitants en sus de 9 000 habitants.
C'est notre grande divergence avec l'Assemblée nationale en ce qui concerne le collège électoral sénatorial.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Défavorable.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 4.
M. Jean-Jacques Hyest. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Hyest.
M. Jean-Jacques Hyest. Guy Allouche, tout à l'heure, a bien voulu reconnaître que le dispositif prévu présentait le grave inconvénient d'introduire une déformation complète du corps électoral.
Je rappelle que, dans les villes de plus de 3 500 habitants, et donc dans les villes de 9 000 habitants et plus, les conseillers municipaux sont élus à la proportionnelle avec prime majoritaire, de telle sorte que, en cas de triangulaire, une liste peut obtenir 75 % des sièges avec 36 % des voix.
M. Guy Allouche. Absolument !
M. Jean-Jacques Hyest. Comme ce sont les conseils municipaux qui vont élire les délégués sénatoriaux supplémentaires, il en résultera une déformation complète.
Dès lors, qu'on ne nous dise surtout pas qu'on veille à une meilleure représentation des sensibilités et de la démographie !
On aurait peut-être déjà dû s'en rendre compte lorsqu'on a modifié le mode de scrutin aux élections municipales. Mais maintenant, dans certains cas, la déformation va prendre des proportions colossales. Ne serait-ce que pour cela, je pense qu'il existe un grave risque d'inconstitutionnalité : on ne peut pas faire élire par une minorité une majorité de délégués.
M. Henri de Raincourt. Il a raison !
M. Jean-Jacques Hyest. Il y a là un véritable problème qui n'est pas résolu et je considère que, de ce point de vue, le texte du Sénat présente beaucoup moins d'inconvénient dans la mesure où il se rapproche de la situation existante tout en assurant une meilleure représentation des grandes collectivités.
M. Patrice Gélard. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Gélard.
M. Patrice Gélard. J'irai dans le même sens que M. Hyest. D'ailleurs, en commission des lois, j'ai participé, comme lui, à la réflexion menée sur ce problème.
Je rappelle que, lors de l'institution de la Ve République, le mode de scrutin municipal en vigueur était le scrutin proportionnel. Ce n'est qu'en 1959 qu'a été instauré le scrutin majoritaire dans les grandes villes. Cependant, au moment où a été adoptée la loi sur l'élection des sénateurs, c'était encore le scrutin proportionnel qui s'appliquait. Après, il aurait fallu modifier le système de désignation des grands électeurs. On ne l'a pas fait. Quand on a ensuite établi le mode de scrutin actuel, sur lequel nous sommes tous d'accord car il est favorable à une bonne gestion des communes, on n'a pas modifié non plus les règles de désignation des grands électeurs. On est arrivé, ainsi, à ces distorsions que soulignait notre ami Jean-Jacques Hyest à l'instant.
Je prends l'exemple de Marseille. A Marseille, actuellement, pour un conseiller municipal, il y a sept délégués sénatoriaux. Avec la réforme proposée par l'Assemblée nationale, il y en aura un pour vingt-cinq ; d'où des distorsions aggravées par rapport à la situation actuelle.
Bien sûr, à l'heure actuelle, les grandes villes sont quelque peu sous-représentées dans les collèges électoraux sénatoriaux. Ainsi, dans mon département, les trois grandes villes, Le Havre, Rouen et Dieppe, représentent un quart des grands électeurs, contre un peu plus du tiers du total des électeurs.
Mais le système proposé par l'Assemblée nationale va, à l'inverse, aboutir à une sur-représentation des villes par rapport au reste et, en fin de compte, à une non-représentativité de ces délégués municipaux.
C'est pourquoi il ne faut pas aller au-delà de ce que nous propose notre rapporteur.
M. Dominique Braye. Très bien !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 4, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 1er bis est rétabli dans cette rédaction.

Article 2