SEANCE DU 29 MAI 2001


M. le président. « Art. 14 bis . - I. - Il est inséré, après l'article 23-1 de la loi du 15 juillet 1845 sur la police des chemins de fer, un article 23-2 ainsi rédigé :
« Art. 23-2 . - Toute personne qui contrevient en cours de transport aux dispositions tarifaires ou à des dispositions dont l'inobservation est susceptible soit de compromettre la sécurité des personnes ou la régularité des circulations, soit de troubler l'ordre public, peut se voir enjoindre par les agents mentionnés à l'article 23 de descendre du train à la première gare suivant la constatation des faits. En cas de refus d'obtempérer, les agents de l'exploitant peuvent requérir l'assistance de la force publique.
« Cette mesure ne peut être prise à l'encontre d'une personne vulnérable, à raison notamment de son âge ou de son état de santé. »
« II. - A l'article 24 de la même loi, les mots : "de l'article précédent" sont remplacés par les mots : "des articles 23-1 et 23-2". »
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 112, M. Bret, Mme Borvo et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent, après les mots : « l'ordre public », de rédiger comme suit la fin du premier alinéa du texte présenté par le I de cet article pour l'article 23-2 de la loi du 15 juillet 1845 sur la police des chemins de fer : « peut se voir enjoindre de descendre du train par des agents de la force publique ».
Par amendement n° 54, M. Schosteck, au nom de la commission des lois, propose, dans la première phrase du texte présenté par le I de l'article 14 bis pour l'article 23-2 de la loi du 15 juillet 1845, de remplacer les mots : « du train à la première gare » par les mots : « du véhicule au premier arrêt ».
La parole est à M. Bret, pour défendre l'amendement n° 112.
M. Robert Bret. L'insécurité dans les transports en commun, que ce soit dans les trains, le métro ou les autobus, est insupportable pour tout un chacun, pour les personnels comme pour les usagers.
Pour autant, si cette question doit faire l'objet d'un examen attentif de la part notamment du législateur, en revanche, elle ne peut être traitée comme elle l'a été, c'est-à-dire au détour d'un amendement introduit à l'Assemblée nationale et prévoyant d'insérer un nouvel article 14 bis.
Il n'a été procédé à aucune consultation préalable des personnes concernées, au premier rang desquelles se trouvent les personnels et les usagers. Aucun grand débat n'a eu lieu non plus lors des discussions à l'Assemblée nationale, comme cela a d'ailleurs été le cas s'agissant des dispositions relatives aux services de sécurité interne de la RATP et de la SNCF qui sont apparues à la fin des débats.
Doter les agents chargés du contrôle des titres de transport du pouvoir d'enjoindre un contrevenant de descendre du train risque d'aboutir au résultat totalement inverse à celui qui est recherché.
En effet, loin de « redonner aux agents une crédibilité à l'égard des contrevenants », loin de « contribuer à la sécurité et à la tranquillité des voyageurs », comme l'affirme, rassurant, M. le rapporteur, cette disposition pourrait bien, au contraire, occasionner un risque supplémentaire d'agression à l'encontre de ces personnels déjà surexposés. En effet, il s'agit d'intervenir non pas uniquement en cas d'infraction tarifaire, mais dans des situations beaucoup plus délicates pour lesquelles, d'ailleurs, ces agents ne sont ni préparés ni formés.
Cette injonction pourrait ainsi avoir lieu dans le cas où une personne contreviendrait à des dispositions dont l'inobservation serait de nature à compromettre la sécurité, à porter atteinte à la régularité de la circulation ou à troubler l'ordre public.
Avec cet article, on élargit encore les catégories de personnes à qui l'on confie des prérogatives relevant de la police nationale.
Une brèche a été ouverte avec les polices municipales et, aujourd'hui, on continue avec le présent texte, tant avec l'article 14 bis qu'avec les articles 27 à 32 relatifs aux services de sécurité interne de la RATP et de la SNCF. Jusqu'où ira t-on ?
La sécurté étant une prérogative régalienne de l'Etat, il revient à la police nationale, et à elle seule, de veiller à la sécurité de tous.
C'est pourquoi, avec l'amendement que nous vous proposons d'adopter, nous souhaitons que le pouvoir de contraindre un contrevenant à descendre d'un train ressortisse exclusivement aux agents de la force publique.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 54 et pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 112.
M. Jean-Pierre Schosteck, rapporteur. La commission est défavorable à l'amendement n° 112, dont l'adoption aboutirait à priver l'article de toute sa portée. Je crois d'ailleurs savoir que, contrairement à ce qu'a dit M. Bret, les agents de la SNCF souhaitent pouvoir enjoindre à un contrevenant de descendre du train.
M. Robert Bret. Nous n'avons pas rencontré les mêmes, alors !
M. Jean-Pierre Schosteck, rapporteur. Moi, j'ai vu les représentants de la CGT, alors je ne comprends pas très bien... (Sourires.)
M. Robert Bret. Moi aussi !
M. Jean-Pierre Schosteck, rapporteur. Par ailleurs, je retire l'amendement n° 54, qui est satisfait par l'amendement n° 150 rectifié de M. Joyandet.
M. le président. L'amendement n° 54 est retiré.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 112 ?
M. Daniel Vaillant, ministre de l'intérieur. Je voudrais rassurer les auteurs de cet amendement et indiquer de nouveau que seuls les agents de la force publique pourront, aux termes de l'article 14 bis , utiliser la contrainte, en tant que de besoin et de façon adaptée et proportionnée. Le texte voté par l'Assemblée nationale ne dit rien d'autre ; l'injonction peut être donnée par les agents des entreprises de transport, mais la contrainte ne peut être le fait que des forces de sécurité publique, comme l'indique la dernière phase du premier alinéa de l'article 23-2 nouveau de la loi de 1845.
Je suis donc défavorable à l'amendement n° 112, non pas sur le fond, mais parce qu'il est inutile et que la rédaction actuelle de l'articlereflète très exactement le souhait de ses auteurs.
Par ailleurs, il ne serait pas réaliste de donner le pouvoir d'injonction aux seules forces de sécurité, qui ne peuvent être présentes en permanence dans toutes les gares et dans tous les trains.
Je précise que la disposition en question a été introduite par le biais d'un amendement parlementaire auquel le Gouvernement avait donné son accord. A cet égard, j'indiquerai, pour être très clair, que le ministre de l'équipement, des transports et du logement souhaite lui aussi très vivement l'adoption de cette mesure.
Au vu de ces explications, j'aimerais que M. Bret retire son amendement. En effet, personne ne comprendrait que les agents de la SNCF, par exemple, ne disposent pas du pouvoir d'injonction à l'encontre d'usagers qui n'auraient pas payé leurs titres de transport.
M. le président. Monsieur Bret, l'amendement n° 112 est-il maintenu ?
M. Robert Bret. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 112 est retiré.
Par amendement n° 55, M. Schosteck, au nom de la commission des lois, propose, dans le II de l'article 14 bis, de remplacer les mots : « des articles 23-1 et 23-2 » par les mots : « de l'article 23 ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Pierre Schosteck, rapporteur. Il s'agit simplement de la correction d'une erreur matérielle.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Daniel Vaillant, ministre de l'intérieur. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 55, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.).
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 14 bis, ainsi modifié.

(L'article 14 bis est adopté.)

Article additionnel après l'article 14 bis