SEANCE DU 12 JUIN 2001


M. le président. « Art. 19. - Les comptes annexes ne peuvent être ouverts que par une loi de finances. Les catégories de comptes annexes sont les suivantes :
« 1° Le compte de gestion des participations de l'Etat ;
« 2° Le compte de gestion de la dette et de la trésorerie ;
« 3° Les comptes d'opérations monétaires ;
« 4° Les comptes de concours financiers.
« L'affectation d'une recette à un compte annexe ne peut résulter que d'une loi de finances. »
Par amendement n° 56, M. Lambert, au nom de la commission, propose, dans les première et seconde phrases du premier alinéa de cet article, de remplacer (deux fois) les mots : « comptes annexes » par les mots : « comptes spéciaux ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Alain Lambert, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 56, pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 57, M. Lambert, au nom de la commission, propose de rédiger comme suit le deuxième alinéa (1°) de l'article 19 :
« 1° Les comptes d'affectation spéciale ; ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Alain Lambert, rapporteur. Parmi les comptes spéciaux figure la catégorie des comptes d'affectation spéciale. Nous suggérons de maintenir ces comptes, tout en dénonçant l'usage qui est parfois fait de cette formule, contrairement à l'Assemblée nationale, qui a adopté la logique de suppression au motif que ces comptes ont souvent été mal utilisés.
J'ai la conviction qu'il appartient aux autorités budgétaires de notre pays d'exercer leurs responsabilités et de ne pas favoriser les travers auxquels peut conduire un usage abusif des comptes spéciaux du Trésor.
En même temps, la commission considère qu'il est imprudent d'en figer l'utilisation dans la présente loi organique.
Enfin, comment ne pas remarquer que, si la présente loi organique avait été adoptée dans les termes issus des travaux de l'Assemblée nationale, voilà un an, cette même assemblée n'aurait pu procéder comme elle le fit en loi de finances pour 2001, à la création du compte « UMTS » que moyennant une réforme de la loi organique ?
Si ce rappel est un peu anecdotique, il n'est pas non plus sans signification.
M. Philippe Marini. Il pèse lourd !
M. Alain Lambert, rapporteur. Il importe à tout prix, dans le courant de la réforme ici entreprise, de ne pas empêcher des pratiques budgétaires dont l'utilité pourrait se révéler dans l'avenir, tout en faisant en sorte que, naturellement, elles ne soit utilisées qu'à bon escient.
J'ajoute que, pour la commission des finances, les pseudo-débudgétisations évoquées parfois à propos des comptes d'affectation spéciale ne sont en rien de nature à faire échapper des recettes et des charges de l'Etat aux disciplines démocratiques et financières dont les lois de finances sont l'expression, bien au contraire.
Dans l'esprit de la commission des finances, les comptes spéciaux sont aussi des moyens offerts à tout gouvernement soucieux de sincérité de retracer les flux financiers propres à telle politique particulière qu'on souhaite distinguer des opérations du budget général. Plusieurs exemples récents le démontrent.
La commission des finances, tout en ayant rejeté, pour des motifs de fond, l'article qui a créé l'affectation du produit des licences UMTS dans le projet de loi de finances pour 2001, s'est félicitée sans réserve du rattachement des opérations projetées dans un compte d'affectation spéciale. C'était le moyen en effet de pouvoir suivre.
A l'inverse, la commission partage pleinement la consternation exprimée avec force par de nombreux parlementaires devant les errements constatés à l'occasion du projet de création du FOREC, et M. Descours y revenait il y a un instant.
Il est, en effet, tout à fait inadmissible qu'un mécanisme financier destiné à couvrir des coûts collectifs d'une politique publique et conduite par l'Etat, par exemple la réduction du temps de travail, puisse emprunter des canaux permettant d'éluder les disciplines imposées dans le cadre de la gestion du budget de l'Etat.
M. Philippe Marini. C'est scandaleux !
M. Alain Lambert, rapporteur. De tels montages, qui relèvent d'une ingénierie comptable destinée à dissimuler les conséquences financières pour l'Etat des politiques qu'il entreprend, constituent une atteinte à la démocratie d'où résultent toutes les confusions qui sont dénoncées à juste titre dans les travaux du Sénat.
La commission des finances considère donc, mes chers collègues, qu'en maintenant la catégorie des comptes d'affectation spéciale, le Parlement ôte toute excuse à quiconque voudrait dorénavant porter atteinte à la sincérité du budget de l'Etat, qui est une nécessité.
M. Philippe Marini. Très bien !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Cet amendement vise à rétablir les comptes d'affectation spéciale.
J'ai eu l'occasion de dire au cours de ce débat que je suis favorable à tout ce qui peut améliorer la lisibilité des lois de finances. Or le maintien de l'ensemble des comptes d'affectation spéciale existants ne me paraît aller dans le sens ni de la transparence, ni de la lisibilité.
En effet, ces comptes retracent des opérations qui, pour la plupart, ont vocation à figurer dans le budget général.
Je ne prendrai que deux exemples.
Le fonds national pour le développement du sport, le FNDS, est un compte d'affectation spéciale dont le montant est équivalant aux politiques budgétaires financées par le budget de la jeunesse et des sports, lequel supporte donc des crédits équivalant à ceux qui se trouvent dans le FNDS.
Mon second exemple n'est plus d'actualité puisque, entre-temps, ce compte d'affectation spéciale a été supprimé ; je veux parler du FITVN, le fonds d'investissement des transports terrestres et des voies navigables.
La politique des transports était répartie entre, d'un côté, le budget des transports et, de l'autre, un compte d'affectation spéciale. Quelle logique y avait-il à cela ? Je n'en vois, pour ma part, aucune et j'y vois même un obstacle à l'évaluation globale des politiques publiques au regard des objectifs et des résultats qui constituent les épines dorsales de cette réforme que nous souhaitons tous.
En conséquence, après avoir rappelé tous les obstacles que je vois au rétablissement des comptes d'affectation spéciale, je m'en remets à la sagesse de la Haute Assemblée.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 57, pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 58, M. Lambert, au nom de la commission, propose de rédiger comme suit le troisième alinéa (2°) de l'article 19 :
« 2° Les comptes de commerce ; ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Alain Lambert, rapporteur. Il s'agit purement et simplement de prévoir que, parmi les comptes annexes, figure la catégorie des comptes de commerce.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Même argumentation et même avis que précédemment : sagesse.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 58, pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 59, M. Lambert, au nom de la commission, propose de rédiger comme suit le dernier alinéa de l'article 19 :
« L'affectation d'une recette à un compte spécial ne peut résulter que d'une disposition de loi de finances d'initiative gouvernementale. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Alain Lambert, rapporteur. Il s'agit de réserver à l'initiative gouvernementale la création d'une affectation de recettes à un compte spécial.
La solution qui a été adoptée par l'Assemblée nationale et qui consiste à ouvrir cette initiative aux parlementaires apparaît discutable. Comme l'article 40 de la Constitution fait obstacle à l'instauration d'une charge nouvelle, cette faculté ne déboucherait que sur la constitution de ressources dont le Gouvernement serait libre de régler lui-même l'usage.
L'intérêt pratique tout à fait limité de cette faculté, les délégations excessives qu'elle ouvrirait à l'exécutif et sa compatibilité douteuse avec l'article 39 de la Constitution ont déterminé notre commission à l'écarter.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Il s'agit d'une mesure de sagesse : j'y suis favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 59, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 19, modifié.

(L'article 19 est adopté.)

Article 20