SEANCE DU 24 JANVIER 2002


« Les dispositions de la présente loi s'appliquent à compter du 1er juillet 2001 et jusqu'à l'agrément, dans les conditions prévues par l'article L. 352-1 du même code, des aménagements mentionnés à l'alinéa précédent. »
M. Jean Chérioux. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Chérioux.
M. Jean Chérioux. Je n'avais pas l'intention d'intervenir, mais j'ai été choqué par la réponse de M. le secrétaire d'Etat. Que M. le secrétaire d'Etat défende une position, c'est très bien ; qu'il fasse référence à Malraux, c'est encore mieux, mais qu'il se permette de tancer ceux qui ne sont pas de son avis et qu'il s'adresse comme il l'a fait à M. le rapporteur et à l'un de nos collègues, c'est tout simplement inadmissible ! Nous vivons dans un pays libre, nous siégeons dans un parlement où chacun a le droit de s'exprimer en fonction de ce qu'il pense être juste, et nous n'avons pas de leçons à recevoir, fût-ce d'un membre du Gouvernement !
M. Roland Muzeau. Mais si mais si !
M. le président. Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 1, présenté par M. Fournier, au nom de la commission, est ainsi libellé :
« Après la date : "1er juillet 2001", rédiger comme suit la fin du second alinéa de l'article unique : "et jusqu'au 30 juin 2002, à défaut de l'agrément avant cette date, dans les conditions prévues par l'article L. 352-1 du même code, des aménagements mentionnés à l'alinéa précédent." »
L'amendement n° 2, présenté par M. Renar et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« I. - Après la date : "1er juillet 2001", rédiger comme suit la fin du second alinéa de l'article unique : "et jusqu'au 31 décembre 2002 à défaut d'agrément avant cette date dans les conditions prévues par l'article L. 352-1 du même code, des aménagements mentionnés à l'alinéa précédent."
« II. - Compléter in fine l'article unique par un alinéa ainsi rédigé :
« En l'absence d'agrément à cette date, les annexes VIII et X au règlement annexé à la convention du 1er janvier 1997 relative à l'assurance-chômage seront rattachés à la convention du 1er janvier 2001. »
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 1.
M. Bernard Fournier, rapporteur. Je ne reviendrai pas sur les raisons qui ont conduit la commission à déposer cet amendement, car je les ai exposées lors de la discussion générale.
Faute d'agrément, nous sommes toujours fondés à intervenir pour combler un vide juridique dont nul ne conteste l'existence. Nous nous substituons non pas aux partenaires sociaux, mais au Gouvernement. Le dispositif proposé par l'Assemblée nationale, en prorogeant les annexes VIII et X sans prévoir de date limite, hypothèque la possibilité de parvenir à un accord.
La solution que nous préconisons permet, à mon sens, tout en garantissant la situation des allocataires, de prendre acte de la volonté des partenaires sociaux d'engager une réforme que tout le monde estime nécessaire.
M. le président. La parole est à M. Muzeau, pour présenter l'amendement n° 2.
M. Roland Muzeau. Le régime d'assurance chômage des intermittents du spectacle est au point mort, puisque les partenaires sociaux n'ont toujours pas engagé les négociations sur une nouvelle mouture des annexes VIII et X de la convention UNEDIC, alors que celle-ci a été signée le 1er janvier 2001.
Or les annexes de 1997 ne sont aujourd'hui plus valides, et nous sommes donc confrontés à un vide juridique, personne ne le conteste, que le législateur se doit de combler en attendant que les partenaires sociaux parviennent à un accord et que cet accord soit agréé.
Il est donc nécessaire, pour l'heure, de proroger les annexes liées à la convention de 1997, comme le prévoit la proposition de loi que nous examinons.
Notre amendement vise tout d'abord, en fixant une date limite de validité de la prorogation, à inciter les partenaires sociaux à reprendre au plus vite les négociations, en vue d'aboutir à un accord et à l'agrément de celui-ci.
Parallèlement, nous considérons qu'il est nécessaire de laisser suffisamment de temps aux partenaires sociaux pour que la négociation paritaire puisse se dérouler de façon constructive et dans des conditions sereines, et non pas dans la précipitation. C'est pourquoi nous proposons de fixer la date limite de validité de la prorogation au 31 décembre 2002, et non au 30 juin 2002, comme le suggère la commission.
Il faut en effet rappeler que, avant cette dernière date, le législateur n'aura pas la possibilité d'intervenir, puisque le Parlement ne se réunira pas du fait du calendrier électoral. Un vide juridique apparaîtra donc si nous acceptons la proposition de M. le rapporteur.
Par ailleurs, pour renforcer encore le caractère incitatif de ce texte, mais également pour des raisons de justice sociale, nous suggérons que, dans le cas où les négociations n'auraient toujours pas abouti au 31 décembre 2002, les annexes VIII et X soient rattachées à la convention UNEDIC du 1er janvier 2001. Cela permettrait aux intermittents du spectacle, passé cette date, de bénéficier malgré tout de certains dispositifs auxquels ont déjà accès l'ensemble des salariés.
Toutefois, il est bien évident que, dans ce cas, le vide juridique que nous connaissons aujourd'hui réapparaîtra. Le législateur devra alors, sans doute, intervenir de nouveau, ce qui n'est évidemment pas souhaitable. Cependant, nous pensons que les partenaires sociaux, soucieux d'éviter une reprise en main par le législateur de ce qui relève de la négociation paritaire, seront incités à ouvrir les négociations et à les mener dans les délais à leur terme.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Très bien !
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 2 ?
M. Bernard Fournier, rapporteur. La commission est défavorable à cet amendement.
En premier lieu, il convient de maintenir le 30 juin 2002 comme date butoir de la prorogation des annexes VIII et X. La commission a estimé ce délai suffisant, compte tenu de la volonté exprimée par les partenaires sociaux de relancer rapidement le processus de négociation. Les termes de l'accord conclu le 10 janvier dernier ont d'ailleurs confirmé cette volonté. Retenir une date différente de celle qui a été arrêtée par les partenaires sociaux reviendrait à méconnaître la compétence de ces derniers et à modifier les conditions de la négociation, donc à hypothéquer la possibilité de parvenir rapidement à un accord et de mettre enfin un terme à une situation de crise permanente.
En second lieu, la commission ne peut accepter le paragraphe II de l'amendement, qui vise à régler le cas où, à l'échéance de la date butoir, un accord n'aurait pas été conclu. Le dispositif présenté - on conçoit mal, au demeurant, comment l'on peut envisager de rattacher des annexes à une convention générale qui est largement incompatible avec elles - ne respecte pas le champ de la négociation collective et dessaisit les partenaires sociaux, ce qui ne me semble pas souhaitable alors même que ceux-ci ont manifesté, au-delà du souci de garantir la sécurité des allocataires, la volonté d'engager une réforme du régime, ô combien nécessaire, comme nous le savons tous.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 1 et 2 ?
M. Michel Duffour, secrétaire d'Etat. J'ai déjà longuement exposé les arguments du Gouvernement.
Il me semble que, pour obtenir un accord, il faut du temps et un climat social détendu : instaurer une date couperet pourrait engendrer des conflits. Cela m'amène à émettre un avis défavorable sur l'amendement n° 1.
En ce qui concerne l'amendement n° 2, même si la date retenue est différente, l'argumentation du Gouvernement est identique. Je donne également un avis défavorable sur cet amendement, d'autant que l'Etat ne peut ni ne veut se substituer aux partenaires sociaux, qui ont seuls compétence pour négocier. Le Gouvernement n'est favorable qu'à la prorogation transitoire du régime conventionnel dont la négociation a été conclue le 1er janvier 1997.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 1.
M. Jean-François Picheral. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à M. Picheral.
M. Jean-François Picheral. Au nom de mon groupe, j'indique que nous ne pouvons voter cet amendement.
En effet, le délai qu'il prévoit ne nous paraît pas réaliste, d'autant que nous allons vivre une période pré-électorale et électorale. Comment peut-on croire que les partenaires sociaux pourront, dans un laps de temps aussi court, trouver un accord, alors qu'ils n'ont pu y parvenir depuis la signature de la dernière convention UNEDIC, qui est intervenue le 1er janvier 2001 ?
M. Roland Muzeau. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Muzeau.
M. Roland Muzeau. Il me semble que M. le rapporteur n'a pas répondu à certaines des objections que j'ai formulées à propos du vide juridique qui, de toute façon, subsistera si la date butoir du 31 juin 2002 est retenue.
En effet, nous savons que le Parlement ne pourra se réunir et que le législateur ne pourra donc intervenir avant plusieurs mois. Il est tout à fait irréaliste d'espérer qu'un accord puisse être trouvé d'ici au 30 juin. Pour mieux s'en convaincre, il suffit d'ailleurs de prendre connaissance de la position adoptée par un « partenaire social » dont on vient de nous vanter les qualités, à savoir le MEDEF. On prend alors toute la mesure de la difficulté qu'il y aura à combler le fossé séparant les représentants des intermittents du spectacle du patronat, dont la volonté, disons-le nettement, est de mettre à bas un système qu'il combat depuis des années.
Vous avez donc présenté un amendement, monsieur le rapporteur, qui va à l'encontre des objectifs des salariés du spectacle. Mieux vaut appeler un chat un chat ! Pour notre part, en revanche, nous prévoyons un délai suffisant pour permettre un rapprochement des positions, bien que nous n'ignorions pas que la négociation sera ardue, eu égard aux desiderata qui ont été exprimés par le patronat. Même si le Gouvernement n'est pas favorable à la date du 31 décembre 2002 que nous avons retenue, notre proposition nous semble raisonnable.
M. Bernard Fournier, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Fournier. Mes collègues du groupe socialiste et du groupe communiste républicain et citoyen ne m'ont pas convaincu. Je rappellerai simplement que la commission a retenue la date du 30 juin 2002. Cette date correspond à celle qui a été fixée par les partenaires sociaux, tous syndicats confondus : syndicats salariés et syndicats patronaux. Cela nous conforte dans le choix que nous avions arrêté, la veille, en commission.
M. Roland Muzeau. Vous ne me répondez pas ! Le Parlement ne se réunira pas !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'amendement n° 2 n'a plus d'objet.
Je mets aux voix, modifié, l'article unique constituant l'ensemble de la proposition de loi.

(La proposition de loi est adoptée.)

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