SEANCE DU 25 NOVEMBRE 2002


M. le président. « Art. 7. - Le troisième alinéa du II de l'article 158 bis du code général des impôts est ainsi rédigé :
« Le taux du crédit d'impôt prévu au premier alinéa est fixé à 25 % pour les crédits d'impôt utilisés en 2001, à 15 % pour les crédits d'impôt utilisés en 2002 et à 10 % pour les crédits d'impôt utilisés à compter du 1er janvier 2003. La majoration mentionnée au deuxième alinéa est portée à 50 % pour les crédits d'impôt utilisés en 2001, à 70 % pour les crédits d'impôt utilisés en 2002 et à 80 % pour les crédits d'impôt utilisés à compter du 1er janvier 2003. »
L'amendement n° I-155 rectifié, présenté par M. Foucaud, Mme Beaudeau, M. Loridant et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« I. - Dans la première phrase du texte proposé par cet article pour le troisième alinéa du II de l'article 158 bis du code général des impôts, remplacer les mots : "et à 10 % pour les crédits d'impôt utilisés à compter du 1er janvier 2003" par le membre de phrase suivant : " ; aucun crédit d'impôt n'est accordé à compter du 1er janvier 2003".
« II. - En conséquence, dans le même texte, remplacer les mots : "en 2001, à 15 %" par les mots : "en 2001 et à 15 %". »
La parole est à M. Paul Loridant.
M. Paul Loridant. Cet amendement porte sur l'avoir fiscal qui, chacun le sait, est aujourd'hui réservé aux seules personnes physiques.
L'article 7 du présent projet de loi de finances est une source de recettes pour le budget de 2003. On constate en effet que, avec une réduction de l'avoir fiscal perçu par les entreprises, ce sont 275 millions d'euros de rentrées fiscales complémentaires qui viennent alimenter le budget de la nation.
Au moment même où l'on est à la recherche d'économies de plusieurs millions d'euros, vous me permettrez de penser que le groupe communiste républicain et citoyen pourrait utilement vous apporter sa contribution si cet amendement était adopté. (Sourires.)
De son côté, la commission des finances a souhaité, par la voix de son rapporteur général, réduire encore de 100 millions d'euros le déficit budgétaire de 2003. Dès lors, cet amendement ne peut recueillir qu'un avis favorable de la commission.
Le fait que l'article 7 génère une rentrée fiscale de 275 millions d'euros, comme je viens de le dire, montre que l'avoir fiscal ne jouit plus, aujourd'hui, de la neutralité fiscale qu'il avait à l'origine et qu'il participe en fait d'un ensemble de mesures favorables aux revenus financiers, y compris ceux des entreprises. Ne vient-il pas rompre le principe d'égalité devant l'impôt ?
On sait, de plus, que l'existence même de l'avoir fiscal est menacée, puisque notre pays est l'un des derniers de l'Union européenne à continuer de le pratiquer.
Cet amendement visant à apporter un rendement fiscal supplémentaire, nous pensons que le Sénat, dans sa sagesse, pourrait tout à fait l'adopter.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. L'article 7 de ce projet de loi de finances a pour objet de réduire de 15 % à 10 % le taux de l'avoir fiscal pour les personnes autres que les personnes physiques et les sociétés bénéficiant du régime des sociétés mères et filiales ; c'est donc la poursuite d'une décroissance du taux de l'avoir fiscal entamée depuis plusieurs années s'agissant des personnes morales.
Puisque vous avez lu avec intérêt - vous nous l'avez dit - le rapport écrit de la commission, vous avez pu observer que, sur l'article 7, il est assez critique. La commission est disposée à « laisser passer » cette diminution du taux de l'avoir fiscal à l'égard des personnes morales parce qu'elle a le sentiment que la disposition se situe dans le contexte d'une réforme globale.
Nous aurions souhaité en savoir un peu plus sur cette réforme globale. Etant bien sûr sensibles, vous le savez bien, à la situation des finances publiques et aux perspectives très préoccupantes du déficit, nous ne contestons pas une mesure qui est susceptible de rapporter 275 millions d'euros au budget de l'Etat. Cependant, nous voudrions savoir vers quel mécanisme nous nous orientons.
Dans le rapport écrit de la commission, j'évoque une réforme susceptible, peut-être, de comporter trois volets, à savoir la substitution à l'avoir fiscal d'un nouveau dispositif, la mise en place d'un crédit d'impôt pour investissement en actions - sujet souvent évoqué - et la suppression du précompte.
S'agissant du nouveau dispositif, il existe, dans les pays européens qui nous entourent, différentes formules qui peuvent être appliquées, à savoir soit un abattement sur les dividendes, comme en Allemagne, soit un prélèvement libératoire, comme en Belgique, soit enfin une retenue à la source.
En résumé, monsieur le ministre, pourriez-vous nous éclairer sur l'état des travaux au sein de votre administration et sur votre opinion à propos de la réforme de l'avoir fiscal ?
Dans l'immédiat, l'amendement n° I-155 rectifié suscite, on l'aura bien compris, un avis défavorable de la part de la commission.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert, ministre délégué. La lecture du rapport de la commission me permet de voyager, et c'est passionnant compte tenu de mon activité assez sédentaire, monsieur le rapporteur général ! (Sourires.)
Ainsi, à l'occasion de la réforme de l'avoir fiscal, il permet d'aller au Royaume-Uni, en Allemagne, en Italie.
Vous citez également chez M. Charzat !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Bonne source !
M. Alain Lambert, ministre délégué. Absolument ! Et j'ai apprécié votre éclectisme !
A dire vrai, votre question anticipe quelque peu sur l'état de nos réflexions sur le sujet.
Etant l'un des meilleurs spécialistes de la question, vous savez que la suppression du précompte était nécessaire et que l'avoir fiscal devra être revu en tant que modalité d'élimination de la double imposition économique. A l'heure où je vous parle, la solution qui a été choisie par l'Allemagne pourrait servir de référence, sous réserve de l'adapter à la situation propre à notre pays. C'est là un avis d'étape que je vous donne.
En tout état de cause, comme je vous l'ai dit à plusieurs reprises à propos de l'ensemble des régimes fiscaux que nous avons pu évoquer depuis le début du débat, le Gouvernement se tient à votre disposition pour engager un dialogue avec vous et avec l'ensemble de la commission des finances. En effet, personne n'est détenteur de la vérité dans ce domaine et le Gouvernement pourra tout à fait tirer profit des avis de votre commission pour trouver le régime le plus approprié et le plus adapté à cette modernisation tout à fait indispensable.
Je veux dire à M. Loridant que je ne peux pas suivre sa proposition d'aller plus loin encore que le dispositif proposé par le Gouvernement. Une pénalisation, qui pourrait apparaître comme excessive, d'un investissement en titres de placement serait imprudente dans le contexte actuel.
Au contraire, M. Loridant, qui est, lui aussi, un bon spécialiste de ces sujets, devrait plutôt nous donner du grain à moudre pour engager la réforme d'ensemble des régimes de distribution, dont l'objectif est de remplacer l'avoir fiscal, à l'instar des réformes qui ont été adoptées par nos partenaires européens. Une réflexion sera engagée dès le début de l'année prochaine, en concertation avec tous les professionnels et les organismes représentatifs des entreprises et avec votre commission des finances si elle le souhaite.
Il s'agit, par cette réforme, de simplifier le régime actuel de distribution qui est complexe et inadapté à la situation des grandes entreprises, comme aux plus petites d'entre elles.
Telles sont, monsieur Loridant, les raisons qui me conduisent à vous demander de retirer votre amendement. Si vous le mainteniez, je demanderais au Sénat de rejeter votre amendement.
M. le président. Monsieur Loridant, l'amendement n° I-155 rectifié est-il maintenu ?
M. Paul Loridant. Oui, monsieur le président.
Vous avez bien compris que, par cet amendement tout à fait raisonnable, nous proposions au Gouvernement d'accélérer la cadence de la réforme de l'avoir fiscal et qu'au surplus nous apportons quelques recettes supplémentaires au budget général. Je pensais donc rencontrer l'adhésion du Gouvernement, et en particulier du ministre délégué au budget. Je regrette son avis défavorable et j'invite le Sénat à voter notre amendement.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° I-155 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 7.

(L'article 7 est adopté.)

Articles additionnels après l'article 7