SEANCE DU 30 NOVEMBRE 2002


M. le président. J'appelle la ligne 35 de l'état E concernant la redevance pour droit d'usage des appareils récepteurs de télévision.



LIGNES


2002


2003

DESCRIPTION

PRODUIT
pour l'année
2002 ou
la campagne

2001-2002

ÉVALUATION
pour l'année
2002 ou la
campagne

2002-2003

38 35

Nature de la taxe : - redevance pour droit d'usage des appareils récepteurs de télévision.

2 119 500 000 2 092 200 000
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Organismes bénéficiaires ou objet : - compte spécial du Trésor institué par l'article 33 de la loi de finances pour 1975.
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Taux et assiettes :
- redevance perçue annuellement :
en 2002 :
- 74,31 EUR pour les appareils récepteurs « noir et blanc » ; - 116,50 EUR pour les appareils récepteurs « couleur ».
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Textes :
- décret n° 92-304 du 30 mars 1992 modifié ; - décret n° 2002-27 du 8 janvier 2002.
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La parole est à M. Jack Ralite, pour explication de vote.
M. Jack Ralite. Je voudrais, en cet instant, dire quelques mots sur l'ensemble des crédits alloués à la culture et à la communication, qui font l'objet de ce débat.
On pourrait être satisfait, et même heureux, qu'il ait lieu le jour où un écrivain, Alexandre Dumas, entre au Panthéon, écrivain créateur de mythes s'il en est, citoyen sans compromission, révolutionnaire courageux qui s'est illustré en 1830 en France et plus tard en Italie, aux côtés de Garibaldi !
Je me souviens de Gramsci, ce lumineux communiste assassiné par le régime mussolinien, qui lui rendait hommage, ainsi qu'à d'autres, dans ses Cahiers de prison . Il y écrivait que la France, au xixe siècle, avait eu la chance d'avoir une grande littérature nationale et populaire. Il citait Hugo, Dumas, Eugène Sue et Ponson du Terrail. Un quatuor dont la musique des mots et la geste des personnages sont là, parmi nous, comme des éclats du passé.
Oui, l'entrée de Dumas au Panthéon aurait dû faire devoir à la majorité de croiser avec sa courtoisie, c'est aussi la nôtre envers Dumas, une courtoisie pour la culture et les arts.
Or, dans notre débat, nous avons perdu des crédits. Le budget est malmené, comme mis par certains en examen. Et je pressens la naissance d'un vrai procès de la dépense culturelle, comme si, sans le dire, on lui reprochait d'exister.
M. Michel Pelchat. La Faucheuse !
M. Jack Ralite. Dans la perspective de 2004, cela va fragiliser les institutions et les artistes, surtout les jeunes.
Plus ponctionné que d'autres, ce budget va tendre à devenir un peu, et l'année prochaine beaucoup, insaisissable et source potentielle de rétrécissement des libertés artistiques et du pluralisme, alors que, dans certaines villes dont le nombre malheureusement s'accroît, les crédits culturels sont diminués au nom notamment du populisme et de l'identitarisme et que, dans plusieurs journaux, se développe une véritable campagne contre la création, dont les bords, disait Melville, sont nécessairement déchiquetés.
Oui, la création et la culture sont comme à la croisée des chemins. N'est-ce pas le cas dans la société aussi ?
Elles sont un peu comme au jeu de bilboquet, cette boule reliée par une ficelle qui, un instant, menace de manquer son but ; et alors la conscience, l'existence, le sens du monde sont mis en vertige, c'est le désarroi, la peur, l'inertie ; mais si le but est atteint, alors c'est un élan du monde, c'est l'inaccoutumance.
Oui, je veux le redire, dans le débat qui s'est institué, les crédits de la culture ont comme une double peine : moins 5,2 % dans le bleu budgétaire et moins deux millions d'euros de réduction décidée par le Sénat suivant sa commission des finances.
Mme Danièle Pourtaud. C'est vrai !
M. Jack Ralite. Alors que, dans le secteur privé, voyez Jean-Marie Messier et Vivendi Universal (Exclamations sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste)...
M. Philippe Nogrix. Allons bon !
M. Jack Ralite. ... qui gâchent, abîment, cassent en culture, sans la moindre peine et sans aucune intervention acceptée démocratiquement par la commission des finances du Sénat.
M. Philippe Nogrix. Ni par Lionel Jospin !
M. Jack Ralite. Et puis, on ne l'a pas dit suffisamment, un amoindrissement culturel affaiblit la France dans les rendez-vous internationaux capitaux qui approchent,...
M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. C'est sûr !
M. Jack Ralite. ... dans les conséquences de la conférence de Doha au plan mondial ou de la directive « Télévision sans frontières » au plan européen.
Il en est ainsi de l'exception culturelle dont nous avons été depuis toujours les artisans passionnés. En écoutant certains, je comprends maintenant qu'on préfère la « diversité culturelle » à l'« exception culturelle ».
Pourquoi est-ce si important ? Cela concerne la culture, mais, devant ceux qui sont présents aujourd'hui et qui s'intéressent à la question, je n'en ferai point le résumé. Mais je veux dire que cela va beaucoup plus loin.
Prenez l'éducation nationale : la gratuité, à la fin du xixe siècle, cette invention française, c'est une exception culturelle. Prenez la sécurité sociale à la Libération : la mutualisation des crédits pour la garantir, c'est une exception culturelle et, si elle est amoindrie, il y aura sans doute la diversité des maladies et des malades, mais la question de la maladie ne sera pas réglée.
Je veux dire, pour terminer, ma pensée profonde. J'aimerais que l'on essaie de bien me comprendre ; je sens naître et se développer dans notre pays comme un vent mauvais, sombre, contre la culture, contre la création, contre la responsabilité publique...
M. Philippe Nogrix. Incroyable !
M. Jack Ralite. ... qui devrait être assumée. Mais, croyez-moi, il y a du monde pour empêcher la dérive !
M. le président. Veuillez conclure, monsieur Ralite.
M. Jack Ralite. Je conclus, monsieur le président. Ecoutez bien : j'étais un jour au marché de Figeac (Exclamations sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste) et je regardais les livres sur un étal. Or, sur un livre d'un ancien ministre de la culture, Edmond Michelet, traitant de la déportation, figurait en exergue une phase de Péguy - que je ne cesse depuis de répéter : « Je n'aime pas les gens qui réclament la victoire et qui ne font rien pour l'obtenir. Je les trouve impolis. »
Eh bien, il y a eu de l'impolitesse dans notre débat, alors qu'il aurait fallu des excès de courtoisie. C'est pourquoi, en annonçant que les états généraux de la culture vont créer un rendez-vous national du spectacle vivant auquel participeront 50 % d'artistes et que je suis en train de créer un comité de vérité et d'avenir sur l'affaire Messier pour lequel j'ai déjà obtenu le soutien de personnes de toutes opinions, j'appelle à des excès de courtoisie pour la culture et, si c'est nécessaire - puisque Dumas nous fait l'honneur d'une halte courtoise -, à la d'Artagnan ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
M. Louis de Broissia, rapporteur pour avis. Très belle chute !
M. le président. Je mets aux voix la ligne 35 de l'état E.

(La ligne 35 de l'état E est adoptée.)
M. le président. Le vote sur l'ensemble de l'article 48 est réservé.
Je vous rappelle que les crédits concernant la communication inscrits à la ligne « Services généraux du Premier ministre » seront mis aux voix le jeudi 5 décembre à la suite de l'examen des crédits affectés à la fonction publique et à la réforme de l'Etat.

ÉTAT B


SERVICES DU PREMIER MINISTRE

I. - Services généraux



M. le président. « Titre III : 24 151 649 euros. »