PRÉSIDENCE DE M. Christian Poncelet

M. le président. La séance est reprise.

Art. 1er (début)
Dossier législatif : projet de loi de programmation pour la cohésion sociale
Discussion générale

3

Questions d'actualité au Gouvernement

M. le président. L'ordre du jour appelle les questions d'actualité au Gouvernement.

Je rappelle que l'auteur de la question, de même que le ministre pour sa réponse, dispose de deux minutes trente.

charges fiscales et sociales des clubs sportifs

M. le président. La parole est à M. Yvon Collin.

M. Yvon Collin. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.

A l'heure où le Gouvernement demande à chaque Français d'augmenter sa contribution au financement de l'assurance maladie, quand le régime des intermittents du spectacle subit une réforme drastique, le Gouvernement vient de signer un chèque de plusieurs dizaines de millions d'euros tiré sur les contribuables au bénéfice des dirigeants de clubs sportifs à objet commercial.

Cette dépense publique nouvelle, nous la devons à une requalification d'une partie de la rémunération des sportifs professionnels en redevances d'exploitation de droits à l'image qui, à l'inverse des salaires auxquels elles se substitueront, seraient exonérées de charges sociales.

Vous trouverez peut-être déplacé, monsieur le Premier ministre, qu'on vous demande des comptes pour quelques dizaines de millions d'euros. Cependant, outre que les parlementaires sont comptables de chaque euro prélevé sur nos concitoyens, il faut apprécier la mesure en cause à partir de quelques principes essentiels.

En soutenant une initiative qui entend, selon les auteurs, légaliser des pratiques existantes, qui se traduit par la création d'un régime dérogatoire et qui procède à un alignement des prélèvements par le bas, le Gouvernement adopte, sans avoir l'air d'y toucher, une série de positions qui contreviennent directement à des principes fondamentaux.

La légalisation de pratiques frauduleuses a un nom, que je ne prononcerai pas ici pour ne pas être désobligeant. Mais je suis amené à vous interroger sur les actions entreprises par l'administration pour rechercher et poursuivre les pratiques par lesquelles les clubs peuvent, paraît-il, déguiser les salaires versés par eux pour échapper à leurs obligations sociales.

La création d'un régime dérogatoire a, lui aussi, un nom, la rupture de l'égalité devant les charges publiques, et une sanction, l'inconstitutionnalité !

Enfin, l'alignement de la fiscalité vers le bas a également un nom, le renoncement. Le sport commercial, comme tous les secteurs économiques, est en attente d'une souhaitable harmonisation de la fiscalité européenne. La France doit-elle pour autant pratiquer le moins-disant fiscal ? Doit-elle accepter, comme en Espagne, par exemple, qu'un salaire de 1,8 million d'euros ne supporte que 13 000 euros de charges sociales ?

M. le président. Veuillez poser votre question, mon cher collègue.

M. Yvon Collin. Ma question est, vous l'avez compris, monsieur le Premier ministre, une exhortation à refonder votre action en promouvant un Etat respecté, garant de l'égalité devant les charges publiques et défenseur des intérêts de la France en Europe. (Applaudissements sur les travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. René-Pierre Signé. Pris les doigts dans la confiture !

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Christian Jacob, ministre délégué aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. Mesdames, messieurs les sénateurs, permettez-moi tout d'abord de vous présenter les excuses de mon collègue M. Jean-François Lamour, qui malheureusement ne peut pas être parmi nous aujourd'hui.

Monsieur le sénateur, l'ensemble des acteurs du sport professionnel partagent ce constat : nos clubs français souffrent d'un déficit de compétitivité par rapport à ceux de nos concurrents européens et même au-delà de l'Union européenne. Aussi M. Jean-François Lamour s'est-il attelé à ce dossier dès son arrivée à la tête du ministère des sports. Ce furent, tout d'abord, les états généraux du sport, en 2002, puis le rapport demandé à M. Jean-Pierre Denis, et la mise en place de groupes de travail au sein desquels les parlementaires ont été largement associés à la réflexion.

Il ressort de la proposition de loi de vos collègues députés MM. Landrain et Geveaux cinq points importants : la reconnaissance d'une rémunération du droit à l'image pour les sports collectifs, vous y avez fait allusion ; la sécurisation de la situation de travail des sportifs qui sont sélectionnés en équipe de France ; la suppression du 1 % sur les contrats à durée déterminée qui apparaissait tout à fait inadapté au monde du sport, la levée de l'interdiction de la multipropriété pour les sociétés sportives et, enfin, la participation des sociétés sportives au fonctionnement des fédérations.

Ces différentes mesures recueillent le soutien unanime des fédérations, des ligues et des organisations représentatives tant des entraîneurs que des joueurs.

Voilà dans quel état d'esprit cette proposition de loi a été préparée. Ce texte a été examiné par l'Assemblée nationale le 14 octobre dernier. Je ne doute pas que la Haute Assemblée saura l'enrichir par ses réflexions et par ses propositions. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)

M. René-Pierre Signé. Ce n'est guère convaincant !

calendrier électoral en 2007

M. le président. La parole est à M. Henri de Raincourt.

M. Henri de Raincourt. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.

Si l'année 2004 a connu de nombreux scrutins, nous entamons à présent une période de trois années sans élection.

M. René-Pierre Signé. Vous pouvez faire n'importe quoi !

M. Henri de Raincourt. Les hasards du calendrier électoral et des rythmes du renouvellement politique (Exclamations sur les travées du groupe socialiste)...

Mais, mes chers collègues, pourquoi avez-vous peur à ce point des élections ?

Donc, les hasards du calendrier électoral et des rythmes du renouvellement politique programment, pour la seule année 2007, cinq élections différentes au cours desquelles certains de nos concitoyens pourraient se rendre jusqu'à dix fois aux urnes entre les mois de mars et de septembre.

M. Gérard Roujas. La question est téléguidée !

M. René-Pierre Signé. Oui, la question est téléphonée !

M. Paul Raoult. Vive la démocratie !

M. Henri de Raincourt. Si ces enjeux peuvent sembler encore lointains, ils n'en sont pas moins essentiels dans la mesure où nous nous trouvons face à plusieurs difficultés.

En premier lieu, les élus locaux, que nous représentons, connaissent mieux que quiconque les contraintes matérielles qui ne manqueront pas de se présenter tant en termes d'organisation des bureaux de vote qu'en matière de financement desdites campagnes, sans parler des conséquences sur le taux de participation électorale.

En second lieu, l'ordre naturel de ces scrutins appelle également notre attention puisque, sans modification du calendrier, les électeurs seraient appelés à renouveler leurs conseils municipaux et généraux quelques semaines seulement avant les élections présidentielles et législatives,...

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Avant, c'est toujours mieux qu'après !

M. Henri de Raincourt.... provoquant ainsi un enchevêtrement démocratique confus et sans doute peu conforme à l'esprit de nos institutions.

Seule la modification du calendrier électoral peut remettre à l'endroit le déroulement des échéances démocratiques. Différentes options se présentent.

M. René-Pierre Signé. Mais vous n'avez donc pas lu le journal ?

M. Henri de Raincourt. Vous les avez examinées, monsieur le ministre, avec les responsables des formations politiques et des groupes parlementaires. Votre synthèse a fait l'objet d'une communication au conseil des ministres d'hier et elle aura un prolongement législatif.

Nous aimerions connaître, monsieur le ministre, d'une part, les raisons qui ont présidé à ce choix et, d'autre part, les modalités de sa mise en oeuvre.

M. Robert Bret. Et le ministre va même lui répondre !

M. René-Pierre Signé. Alors que nous, nous connaissons déjà la réponse, puisque tout est décidé !

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Dominique de Villepin, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Vous l'avez clairement exposé, monsieur le sénateur, le calendrier électoral pour 2007 est intenable, d'ailleurs chacun en convient, l'ensemble des partis politiques que j'ai consultés ainsi que les groupes et les associations d'élus.

A l'évidence, cinq élections en sept mois, ce n'est pas faisable, et cela pose des problèmes pratiques très concrets en termes d'organisation et de contrôle du financement de chacun des scrutins.

Cela pose également des problèmes d'ordre juridique. Comment, en effet, prévoir le parrainage pour l'élection présidentielle au même moment où il faudrait organiser des élections locales ? Cela pose des problèmes politiques aussi, car, nous le savons tous, au bout du compte, tout cela risque de se payer par une forte abstention électorale.

M. Dominique de Villepin, ministre. A partir de ce constat, deux grandes options étaient possibles.

La première option consistait à prévoir un double report, c'est-à-dire le déplacement des élections locales, municipales et cantonales, de mars 2007 à septembre 2007, et le déplacement subséquent des élections sénatoriales à la fin de cette année 2007.

M. René-Pierre Signé. La question et la réponse ont été préparées !

M. Dominique de Villepin, ministre. Cette option recelait trois risques. D'abord, un risque de confusion, car nous aurions des élections locales et des élections nationales qui se télescoperaient.

M. Dominique de Villepin, ministre. Il y aurait ensuite un risque de précipitation. Comment, en effet, organiser sereinement des élections locales au mois de septembre dans la mesure où cela suppose que la préparation de ces élections et la campagne elle-même se déroulent pendant les vacances d'été ?

Cela présenterait enfin un risque ...

M. René-Pierre Signé. De perdre les élections !

M. Dominique de Villepin, ministre. ...de contradiction avec le travail parlementaire lui-même, notamment en considération des échéances budgétaires de la Haute Assemblée.

Dans ce contexte, nous avons décidé de privilégier la seconde option, qui nous conduit à ne déplacer que les seules élections locales de mars 2007 à mars 2008.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. C'est un scandale !

M. Dominique de Villepin, ministre. C'est, il faut le souligner, le choix de la clarté. (Protestations sur les travées du groupe socialiste.)

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Celui de la magouille !

M. Dominique de Villepin, ministre. Nous aurons ainsi deux blocs d'élections, le bloc des élections nationales en 2007 et le bloc des élections locales en 2008.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. C'est inadmissible !

M. Dominique de Villepin, ministre. C'est aussi le choix du respect de la démocratie.

M. Dominique de Villepin, ministre. Ainsi, en effet, chaque élection pourra donner lieu à une préparation et à un débat sereins. La sérénité est le gage d'une bonne gestion démocratique dans un pays.

M. Jean-Pierre Sueur. Et le corps électoral des sénateurs ?

M. Dominique de Villepin, ministre. Nous prenons acte du nouvel esprit du quinquennat pour que les élections se déroulent conformément à l'esprit de la démocratie.

M. Dominique de Villepin, ministre. Elections nationales, dans un premier temps, élections locales, ensuite, je crois que c'est véritablement le sens de l'intérêt général. (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)

M. Jean-Pierre Sueur. Et le corps électoral des sénateurs ?

M. Roland Muzeau. A quand le résultat des élections par décret ?

situation en Polynésie française

M. le président. La parole est à M. Bernard Frimat.

M. Bernard Frimat. Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'outre-mer.

Madame la ministre, contrairement à vos affirmations et aux déclarations du Premier Ministre ce matin, à la radio, la crise politique s'installe en Polynésie. L'état de confusion institutionnelle qui y règne est manifeste.

Le respect du droit, auquel vous vous référez, ne peut se limiter à un juridisme formel. Il exige avant tout le respect des valeurs de la République et des résultats du suffrage universel.

Or, en mai dernier, les Polynésiens ont choisi clairement, même si cela vous déplaît, de rejeter un pouvoir clanique qui savourait d'avance une victoire annoncée.

Le gouvernement d'Oscar Temaru dispose de la légitimité du peuple. Sa chute, après quelques mois pendant lesquels sa déstabilisation systématique a été organisée, n'est pas un épisode banal d'un fonctionnement parlementaire apaisé.

Elle n'est pas l'expression de la volonté populaire, mais elle est le résultat d'une manoeuvre aboutissant à une défection individuelle sur les motivations desquelles pèsent de lourdes interrogations.

Au moment où l'instruction sur les pratiques de la présidence de M. Flosse est sur le point d'aboutir, nous espérons, madame la ministre, que votre respect du droit ne sera pas sélectif et que rien ne viendra entraver la lente progression de la justice.

La République s'honore quand elle écoute et entend les messages que le peuple lui adresse.

M. Bernard Frimat. Une délégation d'élus sera à Paris dès vendredi pour témoigner de la réalité de la situation politique polynésienne.

Nous demandons au Gouvernement d'abandonner sa démarche trop partisane, de leur accorder enfin la considération qu'ils méritent.

Le seul moyen de faire cesser la violence qui est faite à l'expression démocratique du peuple polynésien, c'est de procéder à la dissolution de l'assemblée territoriale et d'organiser de nouvelles élections. (Bravo ! sur les travées du groupe socialiste.)

II n'y a pas de méthode plus respectueuse de la démocratie.

Si le Gouvernement veut sincèrement l'apaisement, il doit permettre au peuple polynésien d'avoir le dernier mot.

Comptez-vous, madame la ministre, écouter le peuple de Polynésie en proposant au Président de la République la dissolution ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

M. René-Pierre Signé. Elle est autiste !

Mme Brigitte Girardin, ministre de l'outre-mer. Monsieur le sénateur, j'appelle chacun, non seulement au respect du droit, mais aussi à la raison et au sens des responsabilités.

En Polynésie française, l'Etat est absolument impartial. (Sourires et exclamations sur les travées du groupe socialiste.) Il applique scrupuleusement la loi.

Cinq décisions de justice l'ont amplement confirmé : quatre du Conseil d'Etat et une du tribunal de grande instance de Papeete, qui a rejeté tous les recours déposés par les indépendantistes.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Ce n'est pas la question !

M. René-Pierre Signé. La question est politique !

Mme Brigitte Girardin, ministre. Je souhaite attirer solennellement votre attention sur les dangers que représenterait toute violation ostensible de la loi : en effet, c'est quand on méprise la loi que l'on met la démocratie en péril. (Applaudissements sur les travées de l'UMP. - Protestations sur les travées du groupe socialiste.)

Pour le reste, je vous demanderai quelques minutes d'objectivité.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. La dissolution, le Président de la République, il sait ce que c'est, quand même !

Mme Brigitte Girardin, ministre. Les élections du 23 mai ont abouti à une majorité ne tenant qu'à une voix.

Je vous pose donc une question très simple : si, à l'issue de ces élections du 23 mai, le jeu des alliances ayant tout de suite bénéficié à M. Flosse et non à M. Temaru, M. Flosse avait été confirmé comme président de la Polynésie française...

M. Raymond Courrière. Il ne l'a pas été !

Mme Brigitte Girardin, ministre. ... et, se trouvant aujourd'hui victime d'un renversement d'alliances, était vaincu par une motion de censure, le parti socialiste demanderait-il la dissolution de l'assemblée territoriale ? (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.) J'en doute !

Monsieur le sénateur, ce n'est pas parce que la Polynésie française se trouve à 20 000 kilomètres de Paris que le fonctionnement des institutions polynésiennes et l'application de la loi statutaire doivent se faire à géométrie variable en fonction de la sympathie que l'on porte à l'un ou l'autre des élus polynésiens. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Chirac a dissous l'Assemblée nationale pour moins que cela !

Suppression de la taxe sur le foncier non bÂti

M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Gourault.

Mme Jacqueline Gourault. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.

Lors d'un déplacement dans le Cantal, le Président de la République a annoncé la disparition de la taxe sur le foncier non bâti pour les agriculteurs.

Nous regrettons, sur la forme, une fois de plus, les conditions d'annonce de cette décision. Cette mesure, après celle sur la taxe professionnelle, porte atteinte à l'autonomie fiscale des collectivités locales en ce qu'elle diminue les ressources propres de nos communes.

Elle nous paraît, en effet, contredire l'article 72-2 de la Constitution, qui dispose : « Les recettes fiscales et les autres ressources propres des collectivités territoriales représentent, pour chaque catégorie de collectivités, une part déterminante de l'ensemble de leurs ressources. »

La taxe sur le foncier non bâti a représenté, en 2003, quelque 883 millions d'euros, dont 836 millions d'euros au profit des communes et de leurs groupements.

Plus important encore, le produit voté en 2004 par les communes représente, en moyenne, quatorze euros par habitant, mais cinquante-huit euros dans les communes de moins de 500 habitants, ce qui ferait d'elles les premières victimes d'une telle décision.

M. Raymond Courrière. M. Chirac dit n'importe quoi !

Mme Jacqueline Gourault. Enfin, cette décision ne répond pas aux attentes légitimes du monde agricole, d'autres réformes paraissant, en effet, plus nécessaires et plus urgentes pour nos agriculteurs.

M. René-Pierre Signé. Il n'y en a plus !

Mme Jacqueline Gourault. Ma question est donc double.

A un mois du rassemblement de tous les maires de France, comment comptez-vous les rassurer et leur garantir que l'autonomie fiscale ne sera pas entachée par cette décision?

Ne faut-il pas revenir sur cette décision et engager une véritable concertation avec le Parlement et tous les représentants des élus locaux pour réformer globalement et non au coup par coup la fiscalité locale ? (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste et du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du groupe CRC.)

M. René-Pierre Signé. Question embarrassante !

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat au budget et à la réforme budgétaire. Madame le sénateur, puisque vous évoquez la taxe professionnelle, permettez-moi tout d'abord de vous dire, que la commission de réforme de la taxe professionnelle, présidée par M. Olivier Fouquet, poursuit sa réflexion...

M. Jean-Pierre Sueur. Cela fait des années qu'elle travaille !

M. Robert Bret. Cela a l'air compliqué, quand même !

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat. ... et que le Gouvernement espère être en mesure, d'ici à la fin de l'année, de proposer au Parlement un impôt de remplacement de la taxe professionnelle, dont chacun connaissait les défauts.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Cela peut durer longtemps !

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat. Quant à l'impôt sur le foncier non bâti, vous le connaissez bien, comme tous les élus de la ruralité : ses bases n'avaient pas été révisées depuis 1961 et, au fil des années, la part départementale, puis la part régionale avaient été supprimées. De plus, le nombre des exonérations avait été augmenté.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. On l'a compensé !

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat. Très honnêtement, madame le sénateur, j'estime que, quel que soit l'attachement des communes rurales à cet impôt, une remise à plat s'imposait.

M. René-Pierre Signé. Et l'autonomie financière ?

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat. Le Président de la République, avec toute la légitimité qui est la sienne, annonçait, le 19 octobre - le ministre de l'agriculture était à ses côtés - une réforme de la taxe foncière sur les propriétés non bâties qui devrait se traduire par une exonération progressive sur cinq ans de la taxe pour les agriculteurs.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Si le Parlement l'accepte !

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat. Je vous rappelle - mais vous le savez bien ! - qu'il s'agissait là d'une demande très ancienne de la profession agricole.

M. Jean-Pierre Sueur. Et le Parlement, alors, que fait-il ?

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat. D'une part, grâce à une compensation complète, cette mesure ne remettra pas en cause le financement des collectivités, notamment des communes rurales.

M. Jean-Pierre Sueur. Et l'autonomie financière ?

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat. D'autre part, cette réforme ne remettra pas en cause le principe d'autonomie financière.

Elle se fera dans la concertation : à la demande du Premier ministre, un groupe d'études, en liaison avec celui qu'a créé la Haute Assemblée, travaillera sur ce sujet, et, avant la fin de l'année, nous donnera un certain nombre de directives pour que, à partir du 1er janvier 2006, tranquillement mais sûrement, cette exonération se mette en place sur cinq ans, assortie de toutes les garanties pour les collectivités, notamment les communes rurales. (Applaudissements sur quelques travées de l'UMP.)

MM. Paul Raoult et Jean-Pierre Sueur. Il y a très peu d'applaudissements !

Services publics en milieu rural

M. le président. La parole est à M. Thierry Foucaud.

M. Thierry Foucaud. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales

La Poste, le réseau de la Banque de France, les fermetures de classes dans les écoles, France Télécom, le manque d'effectif dans les hôpitaux, dans les gendarmeries, dans la police : l'affaiblissement des services publics, voire leur démantèlement, touche tous les secteurs.

M. Robert Bret. Et ce n'est pas fini !

M. Thierry Foucaud. Il s'accompagne, dans un ensemble européen, d'une mise en concurrence entre les territoires favorisant les grands axes et le déclin des zones rurales.

Nombreux sont celles et ceux qui vous ont dit que cette évolution n'était pas bonne pour notre pays, qu'elle remettait en cause des principes fondamentaux, aux premiers rangs desquels l'égalité entre les usagers : droit à la santé, à l'éducation, à la sécurité, aux transports, aux communications.

Malgré cela, des lois de décentralisation renforçant le désengagement de l'Etat ont été adoptées. Hier a été scellée la loi constitutionnelle sur l'organisation décentralisée de la République.

Cependant, cette tentative de clore définitivement le dossier de la décentralisation se heurte à la réalité vécue par les élus et les populations des territoires, déjà victimes de profonds déséquilibres.

En témoigne la manifestation exceptionnelle des élus de la Creuse : ils sont près de trois cents à avoir démissionné de leur mandat, toutes tendances confondues, pour dire leur « ras-le-bol ».

Les élus creusois, mais aussi ceux de l'Ardèche et de nombreux départements, luttent pour sauver leurs écoles, leurs postes, leurs voies de chemin de fer, leurs routes ou leurs hôpitaux. La fermeture des trésoreries a été, nous ont-ils dit, la goutte d'eau qui a fait déborder le vase.

M. René-Pierre Signé. Il était déjà plein !

M. Thierry Foucaud. C'est bien la preuve que, jusqu'ici, ils n'ont pas été entendus.

L'adoption aux forceps de la loi sur les responsabilités locales ne répond pas à leur inquiétude : elle aggrave les difficultés.

Les dispositions de la loi sur le développement des territoires ruraux ne résolvent rien : elle n'empêche pas le recul des services publics et pousse à la privatisation.

Il est temps de prendre en considération cette grande inquiétude suscitée par la mise en cause des services publics ; il est temps de mettre en place un moratoire sur la fermeture des services publics locaux, pour préparer une modernisation issue d'un dialogue avec les populations et les élus locaux.

J'attends du Gouvernement une réponse à la fois globale et précise à cette colère légitime qui monte dans notre pays. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC.)

M. René-Pierre Signé. Moi, je n'attends rien !

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat au budget et à la réforme budgétaire. Monsieur le sénateur, la fermeture des services publics est un faux débat. (Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. Robert Bret. Allez le dire aux maires !

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat. Ce que souhaite le Gouvernement, c'est réaménager les services autour du public.

Permettez-moi de prendre l'exemple des petites trésoreries, celles qui ont de moins en moins de comptes bancaires à gérer et où, parfois, ne se rendent même pas deux visiteurs par jour.

M. Paul Raoult. C'est la meilleure !

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat. Il est du devoir du Gouvernement de les fermer et de réorganiser le travail sur le terrain. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. Paul Raoult. Quel provocateur !

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat. Cela se fait -  les élus de la majorité le savent bien - après concertation des préfets et des trésoriers-payeurs généraux. Je ne connais pas un canton de France dans lequel cette concertation n'a pas été faite.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Pas dans la Creuse !

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat. Si, et elle a été particulièrement bien faite, vous le savez très bien.

De nouvelles formes de présence se substituent, d'ailleurs, à celle de ces petites trésoreries : les chartes de services, des permanences les jours de marché, des connexions aux logiciels du Trésor public.

M. Raymond Courrière. La disparition des services publics !

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat. Ce n'est pas la désertification que veut le Gouvernement, mais c'est une réorganisation des services publics dans l'intérêt de nos concitoyens. (Protestations sur les travées du groupe CRC.)

Vous verrez qu'ils accepteront cette politique, car ils comprendront qu'elle rendra des services de meilleure qualité. (Applaudissements sur quelques travées de l'UMP.)

M. René-Pierre Signé. Les applaudissements sont maigres !

M. le président. Mes chers collègues, un peu de discipline ! Les enfants sont en vacances et nous regardent : comment vont-ils nous juger ? (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

Fermeture des trÉsoreries en milieu rural

M. le président. La parole est à M. Yannick Texier.

M. Yannick Texier. Ma question s'adresse à M. le secrétaire d'Etat au budget et à la réforme budgétaire.

M. Paul Raoult. C'est un one man show !

M. Yannick Texier. Monsieur le secrétaire d'Etat, les élus locaux sont attachés au maintien de services publics de qualité sur l'ensemble du territoire national. (Sourires et exclamations sur les travées du groupe CRC.)

Cette préoccupation légitime est, malheureusement, exploitée par ceux qui veulent que rien ne change. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Votre question !

M. Yannick Texier. Peu leur importe que certaines implantations administratives ne soient plus adaptées à la répartition actuelle de la population, peu leur importe que la réorganisation des structures, la modernisation des moyens informatiques et la mise en place de permanences puissent améliorer la qualité du service rendu. Seuls comptent leurs intérêts catégoriels. (Très bien et applaudissements sur les travées de l'UMP.)

Chaque fois que la fermeture d'une trésorerie ou d'une autre antenne de l'Etat est annoncée, on fait croire aux élus locaux que le service public est en danger.

On les pousse à démissionner ou à brandir la menace d'une démission, comme nous venons de le voir dans la Creuse et en Ardèche.

S'y ajoute une manipulation politique de la part de ceux qui ont été incapables de réformer l'Etat (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.) et ont imposé la réduction du temps de travail au détriment de la performance et des capacités d'accueil du public.

Dans cette affaire, on oublie l'essentiel : les usagers et la qualité du service rendu.

M. Yannick Texier. Nous ne devons nous tromper ni d'objectif ni de combat. Il existe de réels besoins de services publics de proximité dans notre pays, en particulier dans les zones rurales.

M. Raymond Courrière. Allez le dire aux maires !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Dans les zones urbaines aussi !

M. Yannick Texier. Le groupe de l'UMP est intervenu à plusieurs reprises sur ce sujet.

M. Yannick Texier. Monsieur le secrétaire d'Etat, comment comptez-vous répondre à ces besoins, en concertation avec les élus locaux ? (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)

M. Raymond Courrière. On a déjà la réponse !

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat au budget et à la réforme budgétaire. Monsieur le sénateur, j'ai apprécié le ton mesuré de votre question, (Rires sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste) ainsi que la manière dont vous avez su en homme de terrain la poser.

Nous devons tenir compte - c'est, je crois, la position des groupes de la majorité au Sénat - de la réalité des besoins. De nouveaux moyens de communication existent aujourd'hui. L'accessibilité des services publics n'est donc plus simplement symbolisée par une implantation immobilière permanente : une organisation différente des services publics est possible.

M. Raymond Courrière. Allez le dire aux maires !

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat. Je rappellerai quelle a été l'action du Gouvernement.

D'abord, dans le cadre du projet de loi relatif au développement des territoires ruraux actuellement en cours d'examen, une action très déterminée est présentée aux assemblées parlementaires. Les zones de revitalisation rurale favorisent le maintien et le développement de l'emploi.

Je vous rappelle que le Premier ministre a arbitré, au cours d'un comité interministériel pour le développement et l'aménagement du territoire, en faveur de la généralisation du haut débit sur l'ensemble des territoires ruraux, ce qui est une réponse forte aux besoins de nos entreprises et des services publics.

Quant aux services publics, les sénateurs qui sont sur le terrain le savent bien, il est possible de les organiser...

M. Raymond Courrière. Et de les faire disparaître !

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat. ...sous la forme de regroupements polyvalents avec des moyens modernes de communication. (Marques d'approbation sur les travées de l'UMP.)

On ne va plus aujourd'hui à la poste ou à la trésorerie comme autrefois ; on utilise le téléphone, les courriels, les prélèvements automatiques.

Cela implique également qu'une présence humaine de qualité soit maintenue sur le terrain et soit organisée dans la concertation.

Le Premier ministre a donné des instructions à tous les services de l'Etat, en particulier aux services du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, afin que toute suppression, tout réaménagement, toute réorganisation, aient lieu dans la concertation avec les élus,...

M. Thierry Foucaud. Ce n'est pas vrai !

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat. ...au premier rang desquels les sénateurs, qui connaissent le mieux les réalités du territoire. (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)