compte rendu intégral

PRÉSIDENCE DE M. Philippe Richert

vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à seize heures.)

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PROCÈS-VERBAL

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n'y a pas d'observation ?...

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.

2

Décès d'un ancien sénateur

M. le président. J'ai le regret de vous faire part du décès de notre ancien collègue François Louisy, qui fut sénateur de la Guadeloupe de 1986 à 1995.

3

Candidatures à des organismes extraparlementaires

M. le président. Je rappelle au Sénat que M. le Premier ministre a demandé au Sénat de bien vouloir procéder à la désignation de sénateurs appelés à siéger au sein de plusieurs organismes extraparlementaires.

La commission des affaires sociales a fait connaître qu'elle propose les candidatures suivantes :

- M. Jean-Pierre Cantegrit pour siéger comme membre titulaire au sein de la Commission permanente pour la protection sociale des Français de l'étranger ;

- Mme Anne-Marie Payet pour siéger comme membre titulaire au sein du conseil de surveillance du Fonds de financement de la protection complémentaire de la couverture universelle du risque maladie ;

- Mme Gisèle Printz pour siéger comme membre suppléant au sein du conseil d'administration de l'Agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances ;

- Mme Bernadette Dupont pour siéger comme membre suppléant au sein de l'Observatoire national des zones sensibles.

Ces candidatures ont été affichées et seront ratifiées, conformément à l'article 9 du règlement, s'il n'y a pas d'opposition à l'expiration du délai d'une heure.

4

Dépôt d'un rapport du Gouvernement

M. le président. M. le Président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre, en application de l'article 67 de la loi n° 2004 1343 du 9 décembre 2004 de simplification du droit, le rapport sur la mise en application de la loi n° 2006-1772 du 30 décembre 2006 sur l'eau et les milieux aquatiques.

Acte est donné du dépôt de ce rapport.

Il a été transmis à la commission des affaires économiques et est disponible au bureau de la distribution.

5

Démission d'un membre d'une commission et candidatures

M. le président. J'ai reçu avis de la démission de Mme Michelle Demessine, comme membre de la commission des affaires économiques.

Le groupe communiste républicain et citoyen a fait connaître à la présidence le nom du candidat proposé en remplacement.

Il a en outre communiqué à la présidence le nom du candidat proposé pour siéger à la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, à la place laissée vacante par Mme Hélène Luc, démissionnaire de son mandat de sénateur.

Ces candidatures vont être affichées et les nominations auront lieu conformément à l'article 8 du règlement.

6

Souhaits de bienvenue à une délégation parlementaire du Québec

M. le président. Mes chers collègues, il m'est particulièrement agréable de saluer la présence, dans notre tribune officielle, d'une délégation de l'Assemblée nationale du Québec, conduite par son président, M. Michel Bissonnet.

Cette visite s'inscrit dans le cadre du renforcement des relations interparlementaires entre nos deux pays francophones, qui connaissent une vitalité importante sous l'impulsion du président du groupe interparlementaire, notre éminent collègue Jean-Pierre Raffarin.

Je forme des voeux pour que la venue de nos amis québécois fortifie les liens indéfectibles qui nous unissent à nos frères d'Amérique et nous renforce dans le combat pour la défense de la langue française que nous partageons avec tant de conviction. (M. le secrétaire d'État, Mmes et MM. les sénateurs se lèvent et applaudissent.)

7

 
Dossier législatif : projet de loi portant création d'une délégation parlementaire au renseignement
Discussion générale (suite)

Création d'une délégation parlementaire pour le renseignement

Adoption définitive d'un projet de loi en deuxième lecture

Discussion générale (début)
Dossier législatif : projet de loi portant création d'une délégation parlementaire au renseignement
Article unique

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion en deuxième lecture du projet de loi, modifié par l'Assemblée nationale, portant création d'une délégation parlementaire au renseignement (n°s 422, 450).

Dans la discussion générale, la parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, j'ai l'honneur de vous présenter, en deuxième lecture, ce projet de loi portant création d'une délégation parlementaire au renseignement, dans le prolongement du débat que nous avons déjà eu en juin dernier.

Le projet de loi que vous soumet le Gouvernement répond à un double impératif : il permet l'information du Parlement sur l'activité des services spécialisés, selon les exigences propres à toute démocratie, tout en assurant la sécurité de ces spécialistes du renseignement qui accomplissent une mission essentielle pour la sécurité de notre pays.

Comme vous le savez, ce projet de loi a fait l'objet d'une concertation approfondie avec les deux assemblées afin de permettre que, pour la première fois en France, le Parlement soit associé au suivi des activités des services de renseignement.

Je tiens d'ailleurs à saluer le travail de grande qualité qui a été accompli par le Sénat et par ses rapporteurs : il contribuera à améliorer sensiblement la composition comme les conditions de fonctionnement de cette future instance parlementaire. Je pense notamment à la modification introduite par le Sénat qui vise à porter à huit le nombre de parlementaires au sein de la délégation, ce qui permettra de conférer à ses travaux une vision pluraliste.

En vertu d'un autre amendement du Sénat, la délégation pourra entendre non seulement les ministres de l'intérieur et de la défense, les directeurs des services de renseignement et le secrétaire général de la défense nationale, ainsi que le prévoyait le projet de loi initial, mais également le Premier ministre.

Pour donner plus de poids et de lisibilité au travail de la délégation, le Sénat a également souhaité que son rapport d'activité soit rendu public, afin que tous les élus et les citoyens puissent avoir une information directe, et non simplement relayée par voie de presse.

L'Assemblée nationale a, pour sa part, permis à la délégation de suivre l'activité générale d'administrations relevant du ministère du budget et du ministère de l'économie et des finances et qui ont une compétence en matière de renseignement. Je pense ici à la direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières ainsi qu'à la cellule TRACFIN - traitement du renseignement et action contre les circuits financiers clandestins.

Ces deux administrations s'ajouteront aux cinq directions qui relèvent déjà de la compétence de la délégation : la direction de la surveillance du territoire et la direction centrale des renseignements généraux, administrations qui sont susceptibles d'être rapprochées prochainement, la direction générale de la sécurité extérieure, la direction du renseignement militaire et la direction de la protection et de la sécurité de la défense.

Les députés ont également souhaité que la délégation puisse adresser des recommandations et des observations au Président de la République ainsi qu'au Premier ministre et qu'elle les transmette au président de chaque assemblée.

Enfin, comme l'ont précisé les députés, les informations sensibles communiquées aux membres de la délégation ne pourront pas faire partie du rapport public.

Tel qu'il a été modifié par le Parlement, ce projet de loi est donc un texte essentiel. II honore l'engagement pris devant votre assemblée en décembre 2005 par Nicolas Sarkozy, alors ministre de l'intérieur, de doter la France d'un suivi parlementaire de l'activité des services de renseignement.

Ce texte correspond également - nous aurons l'occasion de le voir lors d'autres discussions - à l'ambition plus large du Président de la République de renforcer le poids du Parlement dans nos institutions.

En associant le Parlement au suivi du renseignement, nous allons également donner à nos services spécialisés une nouvelle légitimité aux yeux de nos concitoyens. Les activités liées au renseignement sont souvent mal connues des Français. Dans le même temps, le renseignement n'a pas toujours la place qu'il devrait avoir dans le processus de décision. Nous allons aussi probablement favoriser l'émergence d'une réelle culture du renseignement, qui, aujourd'hui, nous fait largement défaut.

Je voudrais également insister sur un aspect pratique du travail de la future délégation : le respect du secret des travaux.

Par définition, le Parlement est un lieu de débat et de parole. II est pourtant primordial que les membres de la commission respectent les règles de sécurité inhérentes au renseignement.

Aussi, les travaux de la délégation, même privés des éléments les plus opérationnels, seront couverts par le secret de la défense nationale. Dans certains cas, le secret est même une question de survie, au sens plein de ce mot. Nous le savons, cela induira des contraintes, à la fois pour les services de renseignement et pour les parlementaires.

Aux services cela imposera de faire état d'informations couvertes par le secret de la défense nationale, sans, bien sûr, dévoiler les éléments à caractère opérationnel, ni leurs sources, afin que ne soit pas mise gravement en péril la vie de nos agents.

Quant aux parlementaires membres de la délégation, ils devront donc concilier cet impératif du « besoin d'en connaître », bien légitime, avec leur statut de représentants de la nation. La participation de plusieurs parlementaires aux commissions administratives de vérification des fonds spéciaux et du secret de la défense nationale montre que l'on peut parfaitement concilier les deux.

Le respect de ces règles pratiques favorisera l'établissement, entre la délégation parlementaire et les responsables des services, d'une relation de confiance essentielle au succès de la démarche : confiance envers les membres de la délégation, qui auront à traiter en toute discrétion des informations essentielles ; confiance entre les services de renseignement et les membres de la délégation qui sera déterminante pour l'efficacité du travail de la délégation ; enfin, confiance des citoyens dans leurs services de renseignement grâce au travail de la délégation parlementaire pour le renseignement.

Avant de conclure, je souhaite, comme je l'avais fait lors de la première lecture, rendre hommage à l'action courageuse des hommes et des femmes qui travaillent au sein des services de renseignement. Il faut souligner l'importance de leurs missions dans un monde devenu plus instable, plus difficile, car l'adversaire potentiel est souvent invisible et imprévisible. Cette délégation, je n'en doute pas, oeuvrera à la reconnaissance de leur rôle essentiel à la sécurité de notre pays.

Mesdames, messieurs les sénateurs, la création d'une instance parlementaire spécialisée dans le domaine du renseignement est évoquée de longue date, dans les deux assemblées : elle l'était déjà dans des rapports établis voilà dix à quinze ans. Elle trouve sa justification fondamentale dans un souci d'exigence démocratique, tout en confortant et en valorisant la politique du renseignement, plus que jamais fondamentale pour notre sécurité nationale.

Je crois qu'une telle ambition peut être partagée sur toutes les travées de cette assemblée. Le texte qui vous est proposé aujourd'hui, tel qu'il a été enrichi par les deux chambres du Parlement, répond à ces attentes légitimes : c'est pourquoi je vous invite à l'adopter. (Applaudissements sur les travées de l'UMP, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. René Garrec, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, le Sénat est appelé à examiner en deuxième lecture le projet de loi portant création d'une délégation parlementaire pour le renseignement, adopté par l'Assemblée nationale en première lecture le 26 juillet dernier.

Monsieur le secrétaire d'État, je vais reprendre certains de vos propos. Vous voudrez bien m'en excuser, mais, mon intellect étant naturellement lent, j'ai besoin de répéter ce qui a été dit pour en être sûr moi-même ! (Sourires.)

M. Charles Pasqua. Pourquoi « naturellement » ? (Nouveaux sourires.)

M. René Garrec, rapporteur. Mon cher collègue, je vous renvoie à Nietzsche : « Qui se méprise se prise de se mépriser. » (Nouveaux sourires.)

Ce projet de loi fait suite à l'accord de principe donné par M. Nicolas Sarkozy, alors ministre de l'intérieur, lors des débats sur la loi n° 2006-64 du 23 janvier 2006 relative à la lutte contre le terrorisme, en faveur de la création d'un organisme parlementaire ad hoc de suivi des services de renseignement, à l'occasion de la discussion d'un amendement de notre collègue M. Peyronnet...

M. René Garrec, rapporteur. ... qui avait été voté par l'ensemble des groupes.

La création d'une délégation commune aux deux assemblées doit mettre fin à une singularité française, notre pays restant l'une des rares démocraties - avec le Portugal - à ne pas disposer d'instance parlementaire chargée de suivre, selon des modalités adaptées, l'activité des services de renseignement.

Le projet de loi présenté par le Gouvernement! prévoyait une délégation composée de trois députés et de trois sénateurs - je rappelle, pour mémoire, qu'il s'agissait des deux présidents des commissions des lois, des deux présidents des commissions chargées de la défense et de deux autres parlementaires, issus de la majorité et de l'opposition - habilités à connaître d'informations classifiées sur l'activité générale, le budget ou l'organisation des services de renseignement relevant des ministères de la défense et de l'intérieur.

Cette délégation devait avoir la possibilité de procéder à l'audition périodique des ministres de la défense et de l'intérieur et des directeurs de service, sans pouvoir toutefois accéder aux informations concernant les activités opérationnelles des services, ce qui s'explique parfaitement.

Saisi en premier lieu de ce texte emblématique au moment même où une réflexion sur le renforcement des pouvoirs du Parlement est engagée, le Sénat a adopté douze amendements lors de son examen en première lecture, le 27 juin 2007.

Sans remettre en cause l'équilibre du texte et soucieux de préserver les conditions permettant d'établir une relation de confiance entre les membres de la future délégation et les responsables des services, confiance sans laquelle aucun travail efficace ne sera possible, le Sénat a souhaité ménager à la délégation parlementaire une liberté d'action plus conforme au rôle de la représentation nationale, donc plus large.

Notre assemblée a, en particulier, adopté plusieurs amendements présentés conjointement par la commission des lois et la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, qui était saisie pour avis.

Le nombre respectif de députés et de sénateurs membres de la délégation a ainsi été porté de trois à quatre afin que soit mieux remplie la condition d'une représentation pluraliste au sein de la délégation, tout en conservant un effectif resserré, de huit membres.

Un autre amendement a précisé la mission de la délégation de façon à confier à celle-ci un rôle moins passif que ne le prévoyait le projet de loi initial, ce qui nous a valu, monsieur le secrétaire d'État, quelques discussions, au demeurant parfaitement amicales ! (Sourires.)

Le Sénat a également souhaité permettre à la délégation de procéder à des auditions du Premier ministre ainsi que de personnes ne relevant pas d'un service de renseignement : des professeurs d'université spécialisés dans ces types de problèmes, par exemple. Il est en effet nécessaire que la délégation puisse prendre en compte la dimension interministérielle du renseignement et donc entendre le Premier ministre. Surtout, il est difficilement imaginable que des parlementaires ou une commission parlementaire se voient interdire d'interroger toute personne extérieure aux services de renseignement.

Enfin, le Sénat a prévu la remise d'un rapport public annuel dressant le bilan de l'activité de la délégation. Le projet de loi initial prévoyait un rapport annuel remis seulement au Président de la République et au Premier ministre et soumis au secret-défense, comme l'ensemble des travaux de la délégation. Il nous a semblé que cette solution, imaginée dans le souci de préserver la confidentialité, serait en réalité contre-productive. En effet, un silence complet sur les travaux de cette délégation risquait soit de la rendre inutile dans l'esprit du public, soit d'alimenter des fantasmes sur les services de renseignement, du type des élucubrations répandues sur les « manteaux couleur de muraille » et les « services à moustache »...

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Ah, ah !

M. René Garrec, rapporteur. Dois-je conclure de cet écho à mes propos, monsieur le président, que vous en faites partie ? Je serais ravi de l'apprendre ! (Sourires.)

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Je manifestais simplement combien je trouvais votre formule admirable ! (Nouveaux sourires.)

M. René Garrec, rapporteur. N'avouez jamais ! (Nouveaux sourires.)

Au cours de sa séance du 26 juillet 2007, l'Assemblée nationale a examiné en première lecture le projet de loi adopté par le Sénat. Les députés ont voté sept amendements, aucun ne modifiant les apports du Sénat.

Outre des améliorations rédactionnelles, dont je ne parlerai pas, l'Assemblée nationale a souhaité étendre la compétence de la délégation aux services de renseignement placés sous l'autorité des ministres chargés de l'économie et du budget, c'est-à-dire la direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières, la DNRED, et la cellule TRACFIN. Nous avions évoqué cette possibilité en commission et avions pensé que, le ministère des finances communiquant les informations en sa possession aux différents services ainsi qu'au Secrétariat général de la défense nationale, une telle disposition était superflue. Cette précision n'a toutefois rien de choquant et présente au moins l'avantage de faire comprendre aux différents services et aux Français qu'il est bon de resserrer notre dispositif de renseignement.

Je ne sais plus qui a dit qu'une démocratie qui ne se défend pas est une démocratie qui se meurt. Or le renseignement est la base de la défense. L'idée selon laquelle il faut conforter et regrouper les services chargés du renseignement doit donc être encouragée et nous avons pensé que cet amendement enrichissait le texte.

L'Assemblée nationale a également adopté des amendements relatifs au rapport public annuel. Nous avions considéré qu'il ne pouvait pas comprendre d'informations couvertes par le secret-défense. Les députés ont souhaité indiquer explicitement que ce rapport ne pouvait faire état d'aucune information ni d'aucun élément d'appréciation protégés par le secret-défense. Cette précision n'ajoute rien au texte, mais ne lui nuit pas non plus. Cela ne mange pas de pain, comme dit le bon sens populaire !

Je ne voulais pas dire de mal des députés,...

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission. Loin de nous cette idée !

M. René Garrec, rapporteur. ... d'autant que j'ai été l'un d'eux !

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission. Nous avons pour eux le plus grand respect ! À condition qu'ils nous respectent aussi !

M. René Garrec, rapporteur. Bien sûr, monsieur le président, mais cela m'a échappé ! (Sourires.)

M. Charles Pasqua. Ce débat entre vous est passionnant ! (Nouveaux sourires.)

M. René Garrec, rapporteur. Quoi qu'il en soit, je le répète, cette précision ne nuit pas au texte.

Enfin, les députés ont introduit la possibilité pour la délégation d'adresser des recommandations et des observations au Président de la République.

Il nous semblait que, le rapport devant respecter le secret-défense, le président de la délégation serait chargé de transmettre, oralement ou par écrit, des informations qui pourraient lui paraître intéressantes aux présidents des assemblées. Le projet de loi le précise désormais, ce qui n'est pas plus mal, même si cela n'apporte rien de concret.

Notre commission approuve ces précisions, bien que la rédaction issue du Sénat n'interdise nullement à la délégation de communiquer avec le Président de la République et le Premier ministre, autorités habilitées par excellence à connaître de toute information relevant du secret-défense.

Sous le bénéfice de ces observations, nullement hostiles à l'Assemblée nationale, la commission des lois vous propose, mes chers collègues, d'adopter sans modification le présent projet de loi. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Patrick Courtois.

M. Jean-Patrick Courtois. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, le projet de loi portant création d'une délégation parlementaire au renseignement représente une innovation démocratique de première importance, qui permettra à la France de rejoindre l'ensemble des États démocratiques, lesquels disposent tous de structures ad hoc pour suivre l'activité de leurs services de renseignement.

Ce texte manifeste clairement la volonté du Gouvernement d'associer plus étroitement le Parlement aux questions de renseignement. Après plusieurs tentatives avortées, il répond également au large consensus qui s'est dégagé ces dernières années en faveur de la création d'une instance parlementaire chargée de suivre le secteur du renseignement.

Il s'agit d'une promesse du Président de République et je tiens à remercier le Gouvernement et, en premier lieu, notre ancien collègue Roger Karoutchi, de l'avoir concrétisée rapidement et avec efficacité. Je voudrais féliciter aussi notre collègue René Garrec pour la clarté de son rapport et la qualité de son travail.

En bref, ce projet de loi répond à un double impératif : il permet l'information du Parlement sur l'activité des services spécialisés, tout en assurant la sécurité de ces spécialistes qui accomplissent une mission essentielle pour la sécurité de notre pays. Une telle ambition peut être partagée sur toutes les travées de notre assemblée.

Ce texte constitue en effet un premier pas très important en faveur de l'information du Parlement et sans doute est-il utile de bien en analyser la mise en oeuvre à venir dans la perspective de rénovation de nos institutions, et plus particulièrement du Parlement, rénovation dont le processus. Le mouvement plus général de renforcement de la fonction de contrôle et d'information du Parlement sur l'action de l'exécutif me semble indiscutable, légitime et irréversible. Il s'agit d'une tendance lourde, aboutie chez certains de nos voisins anglo-saxons, et que nous devons accompagner. Soyez-en persuadés, mes chers collègues : la rénovation du Parlement est la condition même de sa survie. Cette idée doit conduire nos travaux ; nous en écarter serait pure folie.

Dans ce contexte, la création d'une délégation parlementaire au renseignement constituera une avancée importante pour le Parlement. Il trouvera enfin la place lui revenant dans un domaine qui, s'il obéit à des contraintes de secret bien compréhensibles, ne peut cependant échapper à l'évaluation extérieure, d'autant que le renseignement est devenu un instrument de tout premier plan de la politique de défense et de sécurité.

La création de cette délégation représente aussi un progrès pour l'exécutif, qui disposera d'un regard extérieur susceptible de mieux l'orienter vers d'éventuelles réformes. La délégation sera un lieu où pourront être abordées des questions allant au-delà de la seule analyse des ressources humaines et financières, notamment le cadre juridique dans lequel évoluent les services de renseignement. Elle constitue également une amélioration significative pour ces derniers, desservis par un isolement institutionnel parfois plus subi que voulu.

Il reste que cette réforme ne pourra produire ses effets de manière instantanée. Le temps sera sans aucun doute un élément essentiel dans le succès de la démarche d'information et d'évaluation, tant seront importantes les relations de confiance mutuelle qu'il conviendra de tisser progressivement.

Compte tenu des spécificités des activités de renseignement, la mise en oeuvre d'un suivi parlementaire exigeait de prendre des précautions afin de ne pas nuire à la confidentialité nécessaire à leur fonctionnement. Nous estimons que ce projet de loi parvient à un équilibre, toujours difficile à obtenir, entre les impératifs de la confidentialité et ceux du contrôle démocratique, entre les droits de l'État et l'état de droit, pour reprendre les termes d'un débat traditionnel. Les travaux des deux assemblées ont permis d'atteindre cet équilibre entre la transparence et le secret, deux notions vitales au regard de la protection et de la pérennité de toute démocratie.

Pour autant, si le renseignement est l'affaire de l'exécutif, le Parlement peut s'interroger légitimement sur les conditions de fonctionnement des services, les moyens techniques et les programmes dévolus, l'orientation des missions, les modes de recrutement et le statut des personnels. La future délégation assurera donc cette mission importante, sans interférer avec les activités opérationnelles des services de renseignement. La qualité et l'utilité du travail de la délégation reposeront en effet davantage sur l'existence d'une relation de confiance que sur des prérogatives légales apparemment étendues, mais dépourvues d'efficacité.

L'instauration de ce climat de confiance sera facilitée par les dispositions du texte qui encadrent l'étendue des missions de la délégation et mettent en place la confidentialité nécessaire à sa crédibilité. Les améliorations apportées par notre assemblée en première lecture vont pleinement dans ce sens. Elles ne remettent pas en cause l'équilibre du texte et elles sont soucieuses de tisser une relation de confiance entre les membres de la future délégation et les responsables des services, sans laquelle - j'y insiste une nouvelle fois - aucun travail efficace ne sera possible. Nous avons souhaité ménager à la délégation parlementaire une liberté d'action plus conforme au rôle de la représentation nationale.

La plupart de ces mesures ont été reprises par les députés. Ils ont par ailleurs étendu la compétence de la délégation aux services de renseignement placés sous l'autorité des ministres chargés de l'économie et du budget, c'est-à-dire la direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières et la cellule chargée du traitement du renseignement et de l'action contre les circuits financiers clandestins, connue sous le nom de TRACFIN. Ces dispositions sont les bienvenues, car elles soulignent la nécessité d'une coordination étroite des services de renseignement et la part croissante prise par le renseignement économique.

Avant de conclure, je voudrais, au nom du groupe UMP et en mon nom personnel, rendre hommage à ces hommes et à ces femmes qui travaillent dans un contexte difficile et remplissent pleinement leurs missions.

La création d'une délégation parlementaire pour le renseignement représente une grande innovation pour le Parlement, en lui permettant d'être informé et associé aux questions de renseignement, fonction régalienne, mais aussi pour les services spécialisés, car cet organe doit contribuer à une meilleure prise en compte des enjeux de la politique du renseignement, plus que jamais essentielle pour notre sécurité nationale.

Monsieur le secrétaire d'État, le groupe UMP votera donc avec conviction ce projet de loi. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. Aymeri de Montesquiou.

M. Aymeri de Montesquiou. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, je me félicite de la priorité donnée par le Gouvernement à ce texte qui répond à une demande ancienne et répétée du Parlement et traduit le respect de deux engagements politiques : renforcer les pouvoirs de contrôle du Parlement et mettre fin à une singularité française. Notre pays restait en effet l'une des rares démocraties à ne pas disposer d'une instance parlementaire chargée de suivre l'activité des services de renseignement.

C'était d'autant plus nécessaire que, ces dernières années, la fonction de renseignement s'est valorisée et accrue du fait de la progression des diverses menaces, notamment la menace terroriste. En outre, elle s'intéresse dorénavant à la sphère économique en raison de la sophistication et de l'imbrication croissante de la toile financière internationale qui autorise aujourd'hui toutes les pénétrations anonymes et illicites.

Malgré des pouvoirs particulièrement étendus, les services du renseignement apparaissent comme occultes et impénétrables à nos concitoyens. Il est vrai que leur action, par nature ignorée, se prête mal au démenti et à une communication officielle. Pour autant, la diffusion d'une information est une nécessité à plus d'un titre.

Elle répond tout d'abord à une exigence de contrôle de l'utilisation des ressources publiques dont nul ne peut s'abstraire.

Elle doit aussi permettre aux services concernés eux-mêmes de se défaire des soupçons tenaces et injustes dont ils sont sans cesse l'objet, tout en les faisant sortir d'un tête-à-tête exclusif avec l'exécutif qui leur est moins bénéfique qu'on ne pourrait le penser, notamment lors des arbitrages budgétaires.

Enfin, il s'agit de répondre de manière adaptée à un souhait de plus en plus marqué de ne pas laisser totalement dans l'ombre une activité qui constitue la première ligne de défense face aux menaces actuelles, tout particulièrement le terrorisme.

La création d'une délégation parlementaire au renseignement constitue donc une avancée réelle.

À cet instant, je tiens à saluer les modifications qui ont été apportées au dispositif par le Sénat lors de la première lecture. Elles vont dans le sens d'une plus grande souplesse de fonctionnement de la délégation, tout en conciliant efficacité et respect des impératifs liés au secret-défense.

Je partage bien sûr l'idée selon laquelle un effectif resserré est de nature à réduire les risques de fuites et surtout à favoriser des relations de confiance entre services de renseignement et membres de la délégation. Néanmoins, l'effectif retenu dans le projet de loi initial était plutôt de l'ordre de « l'intime » et ne permettait pas d'assurer une représentation pluraliste, les membres de droit représentant plus de la moitié de l'effectif total. Le Sénat a porté celui-ci à huit parlementaires : c'est mieux, mais cela ne permettra pas la représentation de tous les groupes du Sénat et de l'Assemblée nationale. Nous faisons confiance au président du Sénat pour veiller à une représentation équilibrée, gage d'efficacité et de crédibilité de la délégation.

S'agissant de la mission de la délégation, le projet de loi se bornait à inscrire celle-ci dans un rôle passif. Le Sénat a dynamisé ce dernier, en prévoyant que la délégation aura pour mission de suivre l'activité générale et les moyens des services de renseignement. On peut déplorer que ce soit un simple suivi, et non un contrôle. Pour ma part, je considère toutefois qu'il y a effectivement là un progrès.

Ma dernière interrogation concerne la fonction de président de la délégation. Le texte adopté par le Sénat donne un peu plus de souplesse au dispositif par rapport à la rédaction initiale, en organisant une alternance à la tête de la délégation entre un président de commission permanente de l'Assemblée nationale et un président de commission permanente du Sénat, la durée du mandat étant d'un an.

Cependant, chacun sait que cette mission exigera une forte disponibilité et une implication personnelle de l'intéressé, alors que les activités des présidents des commissions permanentes compétentes sont d'ores et déjà accaparantes. Pourquoi ne pas avoir prévu une désignation libre du président de la délégation par les membres de celle-ci ?

Pour conclure, je dirai que ce texte est opportun pour trois raisons.

Tout d'abord, il met la France au même niveau que ses partenaires européens.

Ensuite, les travaux de la délégation constitueront un apport à l'action du Gouvernement dans le secteur de la défense, qu'il s'agisse du domaine spatial, des drones, des satellites, des écoutes téléphoniques, de l'interception ou des hautes fréquences.

Enfin, il est important d'indiquer à l'opinion publique que les services de renseignement sont constitués de gens responsables, travaillant de manière précise, selon des orientations claires, et obtenant des résultats. Le rapport public souhaité par nos rapporteurs jouera un rôle fondamental à cet égard.

Pour toutes ces raisons, la majorité du groupe du RDSE votera ce projet de loi. (Applaudissements sur les travées du RDSE, de l'UC-UDF et de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Peyronnet.

M. Jean-Claude Peyronnet. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, nous avions appelé de nos voeux la création d'un organe adapté au contrôle parlementaire des services de renseignement. Sur le principe d'une telle création, nous sommes donc évidemment d'accord. Cependant, malgré quelques sensibles améliorations apportées en première lecture par le Sénat et par l'Assemblée nationale, notre satisfaction n'est pas totale.

Comme cela a été dit à plusieurs reprises aujourd'hui, notamment par M. le rapporteur, cette création participe de la revalorisation du rôle du Parlement. À ce titre, elle est la bienvenue. Elle tend à placer nos institutions dans le droit commun des démocraties avancées en matière de contrôle parlementaire des services de renseignement et elle nous permet de continuer dans la voie dans laquelle notre pays s'était engagé en 2001 avec la réforme des fonds spéciaux.

Toutefois, malgré ce progrès démocratique, sénateurs et députés socialistes ont déploré la timidité du projet de loi, qui tend à privilégier, nous semble-t-il - je ne suis pas tout à fait d'accord avec M. Courtois lorsqu'il estime que nous serions parvenus à un équilibre -, les impératifs liés à la protection du nécessaire secret, au détriment de l'instauration de réels pouvoirs de contrôle. M. de Montesquiou a indiqué combien il regrettait que l'on n'aboutisse pas à un tel contrôle.

Il ne faudrait pas que la création de cette nouvelle instance parlementaire serve d'alibi à la poursuite d'une relation peu transparente. Elle doit constituer au contraire un outil de contrôle efficace. Aussi avons-nous sans cesse réclamé davantage de garanties quant au juste équilibre entre la confidentialité des travaux de la délégation, qui représente une impérieuse nécessité, et l'efficacité du contrôle exercé, condition essentielle pour asseoir la crédibilité de la nouvelle instance.

Nous souhaitons donc garantir le pluralisme de la délégation, pour que l'exercice d'un contrôle parlementaire puisse apporter une légitimité démocratique à l'activité de renseignement.

Par ailleurs, lors de la première lecture, nous avions déjà fait remarquer l'importance croissante du renseignement dans la conduite de la politique extérieure et de sécurité. Plusieurs intervenants ont souligné cette évidence. Sans trop insister sur cet aspect, nous pouvons signaler que la mondialisation de l'économie et la fluidité des relations internationales, assortie de menaces en constante évolution, donnent une prime aux sociétés, aux États, aux ensembles régionaux capables d'anticiper et de prévoir.

Comme vous l'avez vous-même indiqué, monsieur le secrétaire d'État, c'est là le coeur du renseignement : offrir aux décideurs la capacité d'avoir un ou plusieurs « coups » d'avance, si je puis employer cette expression. Disposer de services de renseignement est donc indispensable et primordial, parce qu'ils constituent un premier rempart, la première ligne de notre défense.

Cela étant, nous pensons aussi que, dans une démocratie moderne, le Parlement doit pouvoir s'assurer que les orientations politiques et les moyens mis à la disposition des services de renseignement sont adaptés aux circonstances, sont à la hauteur des exigences nées de l'intensité de la menace, sont respectueux des libertés publiques et des principes démocratiques.

Je le répète, instituer un équilibre dynamique et réactif entre, d'une part, l'obligation stricte de préserver les secrets de la défense, de la sécurité et de la protection des intérêts de notre pays, et, d'autre part, l'exercice d'un contrôle parlementaire réel, sans lequel il n'y a pas de démocratie, nous semble une évidente nécessité.

Nous souhaitons une délégation vivante, active et efficace ; nous aimerions que l'opposition parlementaire ne soit pas réduite à un simple rôle de figuration ; nous ne voudrions pas que les compétences de la délégation soient bridées. La question se pose donc de savoir si le « suivi » défini par le texte deviendra un véritable contrôle de la politique du renseignement et des moyens des services de renseignement.

Bien entendu, dans la mesure où le Parlement a été tenu à l'écart de ces questions pendant tant d'années, tout est à inventer - M. le secrétaire d'État l'avait expliqué en première lecture - et je conçois que l'expérience puisse permettre des évolutions ; nous sommes d'accord sur ce point.

Il s'agira en effet d'instaurer une relation de confiance entre les membres de la délégation et les responsables des services afin de développer un travail efficace et mutuellement utile, sans oublier toutefois que la représentation nationale a pour mission de contrôler la politique du Gouvernement dans tous les domaines, y compris celui, crucial, de la sécurité, et donc du renseignement !

En outre, si le renseignement comporte bien sûr une dimension étatique, je n'oublie pas que, de plus en plus, des organismes privés s'en occupent également. On les appelle des SRP, des sociétés de renseignement privé ; elles agissent notamment dans le domaine économique et financier, mais pas seulement. Il faudrait que la future délégation puisse suivre aussi l'action de ces organismes privés qui ont établi d'ores et déjà des liens et des rapports de travail avec les services de renseignement de l'État.

Enfin, n'oublions pas l'espace européen du renseignement : nous ne devons pas négliger l'aspect de la coopération européenne et les partenariats déjà en cours dans la lutte contre certaines menaces terroristes ou criminelles. D'autres parlements en Europe traitent déjà de cette question ; il ne faudrait pas que, après avoir été les derniers, ou presque, à aborder le problème du contrôle parlementaire des services de renseignement, nous soyons aussi les derniers à prendre en compte la dimension européenne de cette activité.

Tout le monde propose actuellement de renforcer les pouvoirs du Parlement. C'est bien ! Il faudra cependant vérifier dans la pratique que, après la saison des annonces, les réalités seront au rendez-vous. En attendant, nous avons, avec ce texte, la possibilité de faire un pas, un petit pas certes, mais un premier pas quand même, dans la bonne direction... Il conviendrait, pour que ce premier pas débouche sur une avancée concrète, que nos amendements soient adoptés, chers collègues de la majorité. Toutefois, après vous avoir entendu appeler à un vote conforme, monsieur le rapporteur, je ne me fais guère d'illusions sur ce point...

Voilà pourquoi, si nous saluons l'examen d'un tel texte au Sénat, nous pensons aussi qu'il peut être amélioré. À cette fin, nous présenterons quelques amendements visant à modifier le dispositif dans trois domaines.

Premièrement, nous souhaitons améliorer la capacité de contrôle de la délégation à partir de quelques mesures simples, en lui permettant d'abord de faire oeuvre utile en recueillant toutes, je dis bien toutes, les informations nécessaires à l'accomplissement de sa mission.

Lors de la première lecture, les rapporteurs des commissions saisies au fond et pour avis, MM. Garrec et Vinçon, avaient partagé cette volonté d'octroyer à la délégation une grande liberté d'action. Dans le même sens, nous proposerons un élargissement mesuré, contrôlé, de la capacité d'investigation de la délégation, en lui permettant d'auditionner toute personne susceptible d'éclairer ses travaux.

En outre, nous proposons que la délégation, sans avoir bien entendu à connaître des activités opérationnelles en cours, puisse travailler sur des actions éteintes, susceptibles de révéler des dysfonctionnements et donc d'apporter sans doute de riches enseignements.

Deuxièmement, si nous avons le souci de rendre cette délégation efficace, nous avons aussi la préoccupation d'y assurer une réelle représentation pluraliste.

Nous pensons donc qu'il est important que toutes les sensibilités politiques s'exprimant au Parlement soient représentées au sein de la délégation. À cet égard, je souhaite faire remarquer que nous avions défendu, lors de la première lecture, le strict respect du pluralisme au sein de la future délégation, en prenant en compte ce critère fondateur dans la désignation du président et du rapporteur de cette instance...

Troisièmement, nous persistons dans notre souhait de rapprocher utilement les travaux de la future délégation et ceux de la commission de vérification des fonds spéciaux qui existe déjà.

Au chapitre des points positifs, nous saluons l'extension de la compétence de la délégation aux services de renseignement placés sous l'autorité des ministères chargés de l'économie et du budget. Nous-mêmes avions plaidé en ce sens. Toutefois, pourquoi ne pas aller jusqu'au bout en incluant, comme nous l'avions proposé, des représentants des commissions des finances parmi les membres de la délégation ?

Pour terminer, j'évoquerai d'un mot l'actualité.

Le chantier de la fusion des services de renseignement civils, c'est-à-dire la direction centrale des renseignements généraux et la direction de la surveillance du territoire, est en cours, tandis que certains parlent déjà d'un nouveau chantier, concernant cette fois la fusion des services chargés du renseignement extérieur et du renseignement militaire, à savoir la direction générale de la sécurité extérieure, la DGSE, la direction du renseignement militaire, la DRM, et la direction de la protection et de la sécurité de la défense, la DPSD.

Il est vrai que la France, malgré les bons résultats obtenus par ses services et le dévouement de ses agents, auxquels je rends à mon tour hommage, avait pris quelque retard en la matière. Des doublons avaient été constatés, et parfois de la concurrence entre services ; cela est connu de tous. Une « rationalisation du renseignement français » était devenue nécessaire et des réformes sont effectivement inévitables, s'agissant d'organisations mises en place, pour l'essentiel, dans les années soixante-dix.

Par ailleurs, le renseignement économique, financier et technologique prend dans nos sociétés une importance grandissante. Devant cette réalité, une coordination exemplaire des organismes étatiques travaillant dans tous ces domaines du renseignement « non traditionnel » est nécessaire.

Toutefois, il serait utile que la représentation nationale puisse être informée de la réorganisation en cours. Cela pourrait constituer un des premiers dossiers soumis à l'examen de la future délégation parlementaire. Plus tard, il sera intéressant d'aborder la question du futur conseil national de sécurité, dont certains annoncent l'imminente création et qui aura vocation à se substituer aux actuels organismes d'aide à la décision dont dispose le pouvoir exécutif.

Mais cela relève de l'avenir, aussi proche soit-il ; s'agissant du présent texte, dans l'attente du débat et de la discussion de nos amendements, nous réservons notre décision quant au vote final.