Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Alain Milon, rapporteur. Cette idée est intéressante, mais je pense qu’elle est déjà appliquée par de nombreux directeurs d’établissement.

La commission estime que ce type de mesure relève plus du règlement que de la loi. C’est pourquoi elle a émis un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Avis défavorable également.

Car à vouloir établir un inventaire des substances dangereuses, on risque d’en oublier beaucoup d’autres. Pourquoi ne pas dresser un inventaire des matériaux contenant des substances cancérigènes ou des perturbateurs pulmonaires ?

De nombreuses substances ont des effets nocifs ou réputés nocifs pour la santé : leur inventaire relève, bien sûr, de la compétence du directeur d’établissement. La commission médicale d’établissement, dans son programme continu d’amélioration des soins, doit également proposer des indicateurs de suivi qui permettront d’éliminer progressivement ces substances.

Je souscris à votre souci, mais le champ d’application de la disposition proposée est trop limité : lorsqu’on désigne une catégorie de produits, on oublie tous les autres. Par ailleurs, les mesures de ce type surchargent les dispositifs législatifs.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.

M. Jean Desessard. Je sais être discipliné et m’adapter !

M. le rapporteur me dit que cette mesure est d’ordre réglementaire. Je suis prêt à l’accepter, mais il faudrait que Mme la ministre nous assure qu’elle va prendre un décret.

M. le rapporteur me dit par ailleurs que certains directeurs appliquent déjà cette mesure. Mais il en va de même de la sécurité sur autoroute : tous les conducteurs ne dépassent pas 130 kilomètres par heure ! Alors, pourquoi prévoir des amendes ? Pour les contrevenants, évidemment ! Donc, si nous voulons introduire une disposition dans la législation, ce n’est pas à l’intention de ceux qui appliquent déjà une telle disposition !

Et si, comme l’indique Mme la ministre, d’autres substances mériteraient un traitement semblable, j’y souscris entièrement.

J’aurais préféré que M. le rapporteur me demande de retirer mon amendement, mais nous n’en sommes plus à nous faire des politesses…

M. Alain Milon, rapporteur. Veuillez m’excuser, cher collègue !

M. Jean Desessard. Vous êtes dans un rapport de force constant, monsieur le rapporteur ! (Sourires.) Je l’accepte…

Je retire donc mon amendement, et j’attends de Mme la ministre qu’elle prenne un décret et qu’elle encourage les directeurs d’hôpitaux à agir en ce sens.

Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission.

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Notre collègue Jean Desessard réclame un décret : c’est peut-être beaucoup ! S’agissant de fluides, une circulaire serait plus appropriée. (Sourires.)

M. Jean Desessard. Vous avez raison, il faut appeler un chat un chat !

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Dans la hiérarchie des normes, plusieurs catégories de mesures réglementaires existent et il convient de choisir la plus appropriée. Je vous promets de traiter cette question ! Vous avez d’ailleurs pu constater que nous avons organisé, avec ma collègue secrétaire d’État chargée de l’écologie, un colloque consacré aux perturbateurs endocriniens, qui posent un très grave problème de santé publique.

M. François Autain. Il y va de l’avenir de l’humanité !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Je suis très attentivement ce dossier depuis ma prise de fonctions, en particulier depuis la désastreuse pollution au chlordécone qui frappe les Antilles.

Soyez assuré, monsieur le sénateur, que je prendrai toutes les dispositions réglementaires appropriées.

M. Jean Desessard. C’est donc avec joie que je retire mon amendement !

Mme la présidente. L’amendement n° 133 est retiré.

L'amendement n° 428, présenté par MM. Autain et Fischer, Mmes David, Hoarau, Pasquet et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Dans le dix-septième alinéa (10°) du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 6143-7 du code de la santé publique, après le mot :

soumet

insérer les mots :

pour approbation

La parole est à Mme Annie David.

Mme Annie David. Il apparaît que cet amendement est satisfait …

M. Alain Milon, rapporteur. En effet !

Mme Annie David. … puisque, dans l’article 5, il a été rajouté, à la suite des travaux de la commission, que le conseil de surveillance délibère sur le projet d’établissement.

Par conséquent, je le retire.

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Merci !

Mme la présidente. L'amendement n° 428 est retiré.

L'amendement n° 132, présenté par M. Desessard, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet et M. Muller, est ainsi libellé :

Compléter le dix-septième alinéa (10°) du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 6143-7 du code de la santé publique par les mots :

ainsi que la politique environnementale de l'établissement

La parole est à M. Jean Desessard.

M. Jean Desessard. Nous avons vu que la politique environnementale était un élément très important et Mme la ministre nous a confirmé qu’elle y était très attentive.

J’ai déjà évoqué hier soir, à l’occasion de la présentation de mon amendement n° 136, la nécessité de mettre en place une véritable politique environnementale : cela doit être un axe de modernisation de nos hôpitaux.

Primum non nocere, deinde curare, telle était la devise d’Hippocrate : « avant tout ne pas nuire, ensuite soigner ». C’est d’abord en améliorant la qualité de l’environnement que l’on améliorera la santé de nos concitoyens.

Ainsi, nous vous proposons, par cet amendement, de confier aux directeurs d’hôpitaux la responsabilité de définir une politique environnementale pour leur établissement. Ne me dites pas que certains directeurs le font déjà, monsieur le rapporteur : cette disposition vise les autres !

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Alain Milon, rapporteur. J’adresse tout d’abord mes excuses à notre collègue M. Desessard pour ne pas lui avoir demandé le retrait de son amendement précédent ; je n’ai pas l’intention d’entrer dans un rapport de force avec lui. (Sourires.)

Sur l’amendement n° 132, la commission a émis un avis défavorable par cohérence avec les positions qu’elle a précédemment adoptées sur des amendements répondant à la même aspiration.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Je suis défavorable à votre amendement, monsieur Desessard, mais mon désaccord ne porte pas sur le fond.

À l’évidence, les règles en vigueur – ce sera aussi le cas de celles qui découleront du Grenelle de l’environnement ou d’autres dispositifs à venir - s’appliquent aux établissements hospitaliers. Je constate d’ailleurs que ces derniers ont largement anticipé ces démarches environnementales.

J’ai décidé qu’au premier rang des critères permettant de retenir un dossier d’investissement figurait le respect des normes haute qualité environnementale, ou HQE. C’est extrêmement important, en particulier en ce qui concerne la politique des déchets, les fluides, l’isolation, l’air intérieur.

Ainsi, à Metz-Thionville - puisque nous allons parler tout à l’heure des centres hospitaliers régionaux - j’ai constaté que les projets étaient particulièrement performants en ce domaine.

Soyez donc assuré qu’un dispositif à la fois législatif et réglementaire s’impose en la matière aux établissements hospitaliers. De plus, une démarche volontariste est engagée par le ministère de la santé et, bien entendu, par les établissements eux-mêmes.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.

M. Jean Desessard. Madame la ministre, vous comprendrez que, pour moi, c’est le fond qui compte. Peu importe que cet amendement soit considéré comme très bon : s’il n’est pas adopté, cela n’a pas beaucoup d’intérêt.

Vous avez déclaré que vous aviez conditionné certains plans d’investissement au respect des normes HQE. Pouvez-vous me préciser à quelle occasion ? Par quelle circulaire ou quel décret ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Dans le cadre du plan Hôpital 2012, qui va mobiliser 10 milliards d’euros de crédits jusqu’en 2012, un certain nombre d’opérations sont proposées. J’ai défini plusieurs critères, que j’ai déjà eu l’occasion d’évoquer devant vous.

Premièrement, je souhaite favoriser les opérations qui anticipent un certain nombre de coopérations hospitalières. L’ensemble des acteurs du monde hospitalier pensent en effet que c’est la meilleure façon d’assurer la sécurité et la qualité des soins dans une optique de gradation de l’offre de soins.

Deuxièmement, j’entends privilégier les opérations de sécurité, pour des raisons qu’il est aisé de comprendre.

Troisièmement, j’accorde une importance particulière aux systèmes d’information hospitaliers, car comment mettre en place des coopérations sans systèmes d’information hospitaliers ? J’ai donc décidé d’allouer une enveloppe de 1,5 milliard d’euros, soit 15 %, aux opérations dédiées aux systèmes d’information hospitaliers, sur les 10 milliards d’euros de crédits du plan Hôpital 2012.

À partir de là, je demande aux porteurs de projets d’adopter une démarche extrêmement respectueuse de l’environnement et des normes HQE. C’est en quelque sorte un cahier des charges que je me suis fixé à moi-même pour choisir les opérations.

Mme la présidente. Monsieur Desessard, l'amendement n° 132 est-il maintenu ?

M. Jean Desessard. Si Mme la ministre s’est fixé à elle-même et, je l’espère, à l’ensemble des investisseurs, un cahier des charges, je ne peux que retirer mon amendement.

Mme la présidente. L'amendement n° 132 est retiré.

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Très bien !

Mme la présidente. L'amendement n° 57, présenté par M. Pozzo di Borgo, est ainsi libellé :

Compléter le dix-huitième alinéa (11°) du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 6143-7 du code de la santé publique par les mots :

, après avis conforme de la commission médicale d'établissement transmis au directeur par son président

Cet amendement a été retiré.

L'amendement n° 333, présenté par M. Desessard, Mme Voynet, MM. Le Menn et Cazeau, Mmes Alquier et Blondin, M. Botrel, Mme Campion, M. Chastan, Mme Chevé, MM. Daudigny et Daunis, Mmes Demontès et Durrieu, MM. Fauconnier et Fichet, Mme Ghali, M. Godefroy, Mme Jarraud-Vergnolle, MM. Jeannerot et Lagauche, Mmes Le Texier et Printz, MM. Mirassou et Rebsamen, Mme Schillinger, M. Teulade et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Compléter le vingtième alinéa (13°) du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 6143-7 du code de la santé publique, par les mots :

, dans le respect de la durée légale du travail

La parole est à M. Jean Desessard.

M. Jean Desessard. Nous proposons qu’en l’absence d’accord sur l’organisation du travail avec les organisations syndicales représentant le personnel, la direction de l’établissement ne puisse pas déroger à la durée légale du travail ; cela incitera la direction à négocier un véritable accord avec les personnels.

Est-ce à dire que les 35 heures à l’hôpital sont une chimère ?

Plusieurs sénateurs de l’UMP. Oui !

M. Jean Desessard. Très rares sont les personnels hospitaliers, aussi bien médecins que personnels soignants, qui ne font pas d’heures supplémentaires et qui ne reportent pas leurs jours de repos indéfiniment pour effectuer des gardes et pallier le manque de moyens humains dont souffre l’hôpital public depuis trop longtemps.

Certes, le principe du respect de la durée légale du travail est inscrit dans le code du travail et semble être incontournable. Pourtant, la réalité de l’hôpital démontre le contraire.

En janvier dernier, le nombre de journées de repos accumulées sur les comptes épargne-temps, les CET, s’élevait – vous le savez sans doute mieux que moi, madame la ministre, mais j’insiste sur ce chiffre – à 4 millions pour l’ensemble des personnels hospitaliers, et le nombre d’heures supplémentaires non payées dépassait 23 millions.

La dette de la collectivité publique envers les professionnels hospitaliers, médicaux et soignants s’élève donc à plusieurs milliards d’euros ! Qui a dit : « travailler plus pour gagner plus » ?

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Oui, qui ? (Sourires.)

M. Jean Desessard. En tout état de cause, ce n’est pas le cas à l’hôpital !

Aussi, afin d’inciter la direction de l’établissement à réellement négocier un accord avec les personnels sur l’organisation du travail, il nous semble judicieux de prévoir qu’en l’absence d’un tel accord les personnels hospitaliers ne peuvent se voir imposer de travailler au-delà de 35 heures pour les personnels de jour, ou de 32 heures pour les personnels de nuit.

Tel est le sens de cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Alain Milon, rapporteur. La direction d’établissement est tenue, comme tout un chacun, de faire respecter la loi. En conséquence, la précision qui est demandée au travers de cet amendement est inutile.

La commission a donc émis un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Je remercie M. Desessard d’avoir soulevé cette question, qui me permet de faire un point sur la durée et l’organisation du temps de travail dans la fonction publique hospitalière. Ce sont des éléments qui méritent d’être portés à la connaissance de la Haute Assemblée.

La durée du travail est fixée à 35 heures par semaine dans les établissements hospitaliers. La durée annuelle de travail effectif est de 1 607 heures, sans préjudice des heures supplémentaires susceptibles d’être effectuées. Pour les agents travaillant de nuit, la durée annuelle de travail effectif est réduite à 1 582 heures, hors jours de congés supplémentaires.

La durée hebdomadaire de travail effectif, heures supplémentaires comprises, ne peut excéder 48 heures au cours d’une période de sept jours. Cela signifie que les urgentistes qui travaillent deux fois 24 heures d’affilée bénéficient ensuite obligatoirement de cinq jours de repos.

Les agents bénéficient d’un repos quotidien de 12 heures consécutives minimum et d’un repos hebdomadaire de 36 heures consécutives minimum.

S’agissant de l’organisation du temps de travail, l’aménagement et la répartition des horaires de travail sont fixés par le chef d’établissement, après avis du comité technique d’établissement.

Dans chaque établissement, un tableau de service élaboré par le personnel d’encadrement et arrêté par le chef d’établissement précise les horaires de chaque agent pour chaque mois.

Le tableau de service doit être porté à la connaissance de chaque agent quinze jours au moins avant son application. II doit pouvoir être consulté à tout moment par les agents.

Toute modification dans la répartition des heures de travail donne lieu, quarante-huit heures avant sa mise en vigueur, et sauf contrainte impérative de fonctionnement du service, à une rectification du tableau de service établi et à une information immédiate des agents concernés par cette modification.

En arrivant au ministère de la santé, j’ai trouvé, comme vous l’avez signalé, un solde très important d’heures supplémentaires non payées et un certain nombre d’heures stockées sur ces CET. J’ai immédiatement voulu réparer ce qui m’apparaissait comme une injustice extraordinaire.

J’ai donc pris un certain nombre de dispositions. Ainsi, j’ai demandé aux agents intéressés qu’ils m’exposent très précisément leurs demandes concernant le paiement des heures supplémentaires, bien entendu, mais aussi la façon dont ils voulaient que soit soldé leur compte épargne-temps : ils pouvaient soit demander le paiement des heures supplémentaires, soit les capitaliser sur un compte épargne-temps afin d’en profiter au moment des périodes de congés ou pour anticiper un départ à la retraite.

J’ai également autorisé la transmission des droits acquis aux ayants droit en cas de décès d’un agent : les heures supplémentaires stockées et les droits en compte épargne-temps peuvent désormais être transmis aux ayants droit, ce qui constitue une mesure de justice.

Au total, j’ai mobilisé 260 millions d’euros pour convertir les crédits des comptes épargne-temps et 53 millions d’euros pour payer les heures supplémentaires.

À l’heure où je vous parle, l’ensemble des demandes posées dans ce cadre par les agents ont été satisfaites.

M. Gérard Longuet. Très bien ! Voilà qui est précis !

Mme la présidente. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.

M. Jean Desessard. Madame la ministre, j’apprécie que vous ayez pris le temps de nous apporter des explications, tout comme j’apprécie que vous ayez pris conscience du problème et tenté d’y remédier rapidement.

Je suis toutefois loin d’être d’accord avec les chiffres que vous avancez. Selon vous, 50 à 70 millions d’euros permettraient de résoudre le problème. J’aboutissais, pour ma part, à un total de quelques milliards d’euros. Je vous engage donc à vérifier qu’il ne reste pas des heures supplémentaires et des jours à prendre en considération

En tout cas, je vous encourage à poursuivre la démarche que vous avez entreprise.

Dans ces conditions, je retire mon amendement, qui s’avère superflu.

Mme la présidente. L'amendement n° 333 est retiré.

L'amendement n° 429, présenté par MM. Autain et Fischer, Mmes David, Hoarau, Pasquet et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Supprimer l'avant-dernier alinéa (14°) du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 6143-7 du code de la santé publique.

La parole est à M. François Autain.

M. François Autain. Cet amendement illustre nos divergences avec le Gouvernement en ce qui concerne l’origine du déficit des hôpitaux.

Madame la ministre, vous avez tendance à imputer ce déficit à une mauvaise gestion des directeurs. Avant de « virer » le directeur, vous mettez en œuvre un plan de redressement.

Selon nous, il faut préalablement prendre en considération la situation de l’hôpital. En effet, chaque année, l’ONDAM n’augmente guère que de 3 % à 3,5 %, alors que les dépenses des hôpitaux s’accroissent mécaniquement de 4 %. Leurs recettes diminuent donc au minimum de 0,5 % par an. Les directeurs sont ainsi obligés de réduire d’environ 10 % la masse salariale, qui est l’unique variable d’ajustement. Pour préserver la qualité et la sécurité des soins qui sont dispensés à l’hôpital, la seule solution consiste à maintenir un déficit.

C'est la raison pour laquelle tant d’hôpitaux publics sont en déficit. Madame la ministre, vous nous l’avez annoncé hier, le nombre de ceux-ci est en diminution puisque « seulement » 40 % des hôpitaux sont en déficit. Il en va de même pour le déficit cumulé de l’hôpital public : selon les chiffres de la Fédération hospitalière de France, il avoisinerait 1 milliard d’euros pour 2009 ; vos services semblent moins pessimistes.

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. La moitié !

M. François Autain. En tout cas, il y a véritablement un sous-financement de l’hôpital public. On ne peut donc pas imputer les difficultés de l’hôpital public uniquement à des erreurs de gestion.

C'est la raison pour laquelle nous demandons la suppression de tout ce qui a trait à ces plans de redressement. Avant d’envisager de tels plans, il faudrait, dans la plupart des cas, augmenter les recettes des hôpitaux. Si l’on continue dans cette voie, dans dix ans, il n’y aura plus d’hôpital public !

Et je n’ai pas parlé de la « liste en sus », à savoir des médicaments facturables en sus des prestations d’hospitalisation. Ces fameuses molécules onéreuses sont un véritable sujet de préoccupation, car elles augmentent chaque année de 15 % et pèsent considérablement sur l’équilibre des hôpitaux publics.

Ce n’est pas la mesure qui a été adoptée l’année dernière, laquelle confère aux directeurs d’hôpitaux publics des responsabilités qu’ils ne peuvent pas assumer, qui changera les choses ! On compte sur les hôpitaux pour freiner le développement de cette « liste en sus », alors qu’il faudrait agir en amont sur le prix des médicaments.

Il nous arrive rarement de défendre les directeurs d’hôpitaux, mais nous estimons qu’ils sont malheureusement, trop souvent, des boucs émissaires : ils servent de fusible, alors que ce rôle devrait revenir au Gouvernement, qui est le responsable.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Alain Milon, rapporteur. Je serai bref pour laisser à Mme la ministre le soin de s’expliquer. La commission considère qu’il est souhaitable de donner aux établissements les moyens de s’en sortir, quelles que soient les causes de leurs difficultés. Elle a donc émis un avis défavorable sur l'amendement n° 429.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Monsieur Autain, je vous remercie de me donner de nouveau l’occasion d’apporter un certain nombre de précisions.

Tout d’abord, contrairement à ce que j’entends ici ou là, le déficit des hôpitaux n’est pas une fatalité. Je le répète, 60 % des hôpitaux – de toutes tailles, du CHU au petit hôpital local – sont en excédent budgétaire. Ils sont financés par la tarification à l’activité, la T2A, méthode juste,…

M. François Autain. Très contestée !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. …qui n’a pas réduit les financements : elle les a redistribués selon l’activité des établissements.

Du reste, personne ne souhaite revenir à la dotation globale ! (Plusieurs sénateurs du groupe CRC-SPG le contestent.) La T2A n’empêche pas d’autres financements, notamment forfaitaires, comme les dotations affectées au financement des missions d'intérêt général et à l'aide à la contractualisation, les MIGAC, ou le forfait ATU – accueil et traitement des urgences – pour les services d’urgences.

Monsieur Autain, vous avez choisi un exemple particulièrement malheureux lorsque vous avez évoqué la « liste en sus » : le financement de ces médicaments n’entre pas dans la T2A et les hôpitaux présentent sans limitation leurs demandes de financement des médicaments de cette « liste en sus » à la sécurité sociale.

Il n’y a aucun lien entre le financement des hôpitaux et la « liste en sus » des médicaments onéreux, car il n’est pas possible d’intégrer ceux-ci dans la dotation globale ou dans la T2A. Ce financement est donc particulièrement juste. Monsieur Autain, vous avez commis une erreur, sans doute par confusion : cela n’a rien à voir !

M. François Autain. Je parlais de l’ONDAM, pas de la T2A !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Je le répète, les hôpitaux présentent la facture des médicaments de la « liste en sus » à la sécurité sociale sans limitation, ce qui n’est d’ailleurs pas sans poser quelques difficultés. En effet, dans ce domaine, certains établissements…

M. Gilbert Barbier. Exagèrent !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Je vous remercie, monsieur Barbier, je cherchais le mot qui convenait ! Certains dépassements peuvent être justifiés, d’autres moins…

Donc, le montant cumulé de déficit s’établirait – j’emploie le conditionnel, car les chiffres doivent être consolidés, mais la différence devrait être de l’épaisseur du trait – à moins de 600 millions d’euros, soit 0,9 % des recettes totales des établissements de santé. En 2007, il s’élevait à 715 millions d’euros, soit une amélioration, entre 2007 et 2008, de 115 millions d’euros sur le compte de résultat principal.

Le déficit est concentré, pour 95 %, sur les établissements pratiquant au moins une activité MCO, médecine-chirurgie-obstétrique, et, pour 40 %, sur seulement 11 établissements, dont 9 CHU. Les déficits des Hospices civils de Lyon et de l’AP-HP représentent, à eux seuls, 20 % du déficit national. Au vu de cette très grande concentration, on voit bien que le déficit hospitalier n’est pas un phénomène global : il est bien une caractéristique récurrente de certains établissements.

M. Guy Fischer. Arrêtez de généraliser !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Il est important de donner ces chiffres pour que nous discutions sur des bases indiscutables !

M. Guy Fischer. Bien sûr !...

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Si l’on tient compte des budgets annexes, le déficit final est beaucoup moins important, puisqu’il n’est plus que de 400 millions d’euros.

Il y a des raisons historiques à cela : certains établissements ont bénéficié de dotations globales plus importantes que d’autres, notamment en raison d’une plus grande proximité avec les décideurs politiques. Il arrivait que des enveloppes soient négociées dans le bureau du ministre…

M. Guy Fischer. Et voilà !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Cela se pratiquait sous des gouvernements de droite ou de gauche, monsieur Fischer ! Ce n’est plus possible aujourd'hui,…

M. Guy Fischer. Ah bon ?

M. François Autain. Cela existe encore !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. …puisque, dorénavant, un système juste et transparent préside au financement des hôpitaux.

Il y a également eu des investissements hasardeux, faute d’anticipation. Je n’aurai pas la cruauté d’énumérer ici ces opérations que tout le monde connaît. En tout état de cause, nous aidons et accompagnons certains établissements qui traînent un passif extrêmement lourd.

On observe aussi de très grandes disparités : pour exercer exactement les mêmes activités, le ratio de personnels médico-administratifs peut varier du simple au double, ce qui n’est pas le cas pour le personnel soignant. Je dis non pas que les uns ont raison et les autres tort, mais simplement que les disparités sont très grandes. Prenons l’exemple de deux hôpitaux comparables – Ajaccio et Montauban –, qui emploient chacun 1 500 personnes. Pour les mêmes structures, l’un compte 300 lits et l’autre 800 lits ! Vous ne pouvez pas dire qu’il n’y a pas là une explication, au moins partielle, du déficit de l’hôpital d’Ajaccio, d’autant que cet hôpital a pratiquement externalisé l’ensemble des services. Je n’accuse personne, je constate !

Il convient d’accompagner ces établissements, car le déficit n’est pas une fatalité. Les chiffres que je vous ai cités le démontrent !

Mme la présidente. La parole est à M. François Autain, pour explication de vote.

M. François Autain. Je comprends bien que ce débat sur un texte qui porte sur l’organisation de l’hôpital n’est pas le meilleur moment pour évoquer le déficit hospitalier. Nous reviendrons sur cette question à la fin de l’année, lors du débat sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Madame la ministre, vous dites que la « liste en sus » n’a rien à voir avec la T2A. Je suis d’accord avec vous, mais elle a un rapport avec l’ONDAM. À ma connaissance, les crédits utilisés pour la financer sont tout de même prélevés sur l’ONDAM.

En ce qui concerne la T2A, ce n’est pas la panacée !