M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.

L'amendement n° 50 est présenté par M. Desessard, Mmes Blandin et Boumediene-Thiery, M. Muller et Mme Voynet.

L'amendement n° 95 est présenté par Mmes David, Hoarau et Pasquet, MM. Autain, Fischer et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Compléter le premier alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 3132-25 du code du travail par une phrase ainsi rédigée :

Seuls les salariés volontaires ayant donné leur accord par écrit à leur employeur peuvent travailler le dimanche.

La parole est à M. Jean Desessard, pour présenter l’amendement n° 50.

M. Jean Desessard. Cet amendement a trait au volontariat pour travailler le dimanche dans les communes touristiques ou thermales et dans les zones touristiques d’affluence exceptionnelle. Il vise à garantir aux salariés de ces communes et zones les mêmes droits que ceux dont bénéficieront les salariés des PUCE, nouvelles zones créées par cette proposition de loi.

Au nom de la liberté de consommer et de travailler, vous faites abstraction des protections collectives contenues dans le code du travail ! Nous proposons de prévoir explicitement que, dans les zones d’affluence touristique et les communes thermales, le travail dominical s’effectuera également, comme dans les PUCE, sur la base du volontariat – étant entendu qu’il doit s’agir d’un volontariat réel !

Nous savons que le volontariat est dévoyé par le lien de subordination entre salarié et employeur et que la liberté du premier est largement contrainte par la nécessité économique. Le commerce est, en effet, un secteur d’activité essentiellement féminin, où 80 % des salariés travaillent à temps partiel et ne touchent que de bas salaires. Ce n’est pas M. Braye, qui les a rencontrés, qui me démentira ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

Dans ces conditions, il est peu probable que les salariés aient réellement le choix de refuser de travailler le dimanche. C’est la raison pour laquelle notre amendement vise à préciser que le volontariat pour travailler le dimanche doit être exprimé par écrit, même dans les communes touristiques ou thermales et dans les zones touristiques d’affluence exceptionnelle.

M. le président. La parole est à Mme Isabelle Pasquet, pour présenter l'amendement n° 95.

Mme Isabelle Pasquet. Il s’agit d’un amendement de précision, portant sur l’épineuse question du volontariat. Il a pour objet de préciser que le salarié exprimera par écrit à son employeur son accord pour travailler le dimanche, sans que soit opérée de distinction entre les différentes catégories de dérogations.

En effet, les salariés des zones touristiques et des communes thermales sont injustement privés de la possibilité de refuser de travailler le dimanche, puisque la rédaction actuelle du texte précise que le travail dominical par roulement y est de droit.

L’examen d’un amendement similaire à l’Assemblée nationale a donné encore une fois au rapporteur et au ministre chargé des relations avec le Parlement l’occasion de se livrer à une interprétation toute particulière du texte. « Vous n’avez pas lu la proposition de loi, qui prévoit déjà que les salariés volontaires auront “donné leur accord par écrit” : c’est écrit noir sur blanc ! », n’ont-ils en effet pas hésité à dire, comme en témoigne le Journal officiel. Or cette nécessité d’un accord par écrit ne vaut que pour les dérogations prévues à l’article L. 3132-20 du code du travail, c’est-à-dire celles qui seront accordées par le préfet ou au titre de l’article L. 3132-25-1 du même code, c’est-à-dire pour les PUCE…

Autrement dit, il suffit de lire le texte de cette proposition de loi pour se rendre compte que l’accord écrit du salarié pour travailler le dimanche ne sera pas exigé dans le cadre des dérogations accordées sur le fondement de l’article L. 3132-25 du code du travail, concernant les zones et communes touristiques.

Nous entendons remédier à cette situation par cet amendement, parfaitement cohérent avec ceux que nous avons déjà défendus.

M. le président. L'amendement n° 21, présenté par Mme Le Texier, M. Desessard, Mme Printz, M. Jeannerot, Mmes Demontès, Jarraud-Vergnolle, Khiari et Blondin, MM. Caffet, Yung, Daudigny, Courteau et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Compléter le premier alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 3132-25 du code du travail par une phrase ainsi rédigée :

Cette possibilité est réservée aux établissements de vente au détail qui mettent à la disposition du public des biens et des services destinés à faciliter son accueil ou ses activités de détente ou de loisirs.

La parole est à Mme Raymonde Le Texier.

Mme Raymonde Le Texier. Cet amendement de précision suit à la lettre la logique du texte.

Dans les villes touristiques, où le travail le dimanche va devenir de droit, donc obligatoire, nous entendons réserver les dérogations au principe du repos dominical aux seuls commerces vendant des biens ou des services ayant un lien avec l’activité touristique. En effet, c’est précisément en raison de cette activité que les commerces des villes dites touristiques pourront ouvrir le dimanche. Si l’on s’en tient à la logique du texte, les commerces sans rapport avec l’activité touristique n’ont aucune raison d’être ouverts le dimanche.

Monsieur le ministre, vous nous dites depuis deux jours que ce texte ne généralisera pas le travail dominical et qu’il ne s’appliquera qu’à quelques cas particuliers, notamment le secteur du tourisme. Cet amendement vous donne l’occasion de mettre vos actes en cohérence avec vos propos et de nous prouver que le présent texte ne vise pas à permettre le travail le dimanche dans tous les commerces, qu’il n’institue pas la généralisation du travail dominical.

M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.

L'amendement n° 53 est présenté par M. Desessard, Mmes Blandin et Boumediene-Thiery, M. Muller et Mme Voynet.

L'amendement n° 91 est présenté par Mmes David, Hoarau et Pasquet, MM. Autain, Fischer et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après le premier alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 3132-25 du code du travail, insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Les salariés privés de repos dominical perçoivent pour ce jour de travail une rémunération au moins égale au double de la rémunération normalement due pour une durée équivalente et bénéficient d'un repos compensateur équivalent. »

La parole est à M. Jean Desessard, pour présenter l’amendement n° 53.

M. Jean Desessard. Il s’agit d’un amendement de simplification, qui prévoit que si le principe du repos dominical est d’ordre public, celui d’une rémunération double et d’un repos compensateur l’est également.

Nous proposons donc que les salariés privés de repos dominical perçoivent une rémunération au moins double de la rémunération normalement due pour une même durée et bénéficient d’un repos compensateur équivalent.

Cette disposition doit évidemment s’appliquer dans les communes touristiques ou thermales et dans les zones touristiques d’affluence exceptionnelle, comme La Défense. (Sourires.)

Cet amendement vise à maintenir l’égalité de traitement entre les salariés. S’il devait ne pas être adopté, des salariés d’une même entreprise, par exemple d’une chaîne de la grande distribution, ne seraient pas embauchés dans des conditions similaires pour une même fiche de poste ! Ainsi, les salariés d’un magasin situé dans un PUCE seraient payés double et bénéficieraient d’un repos compensateur en cas de travail dominical, tandis que les contreparties ne seraient pas systématiques si le magasin est implanté dans une commune ou une zone d’intérêt touristique.

M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour présenter l'amendement n° 91.

Mme Marie-France Beaufils. Lors de la discussion de l’article 1er, un amendement de notre groupe tendant à faire du doublement du salaire et du repos compensateur les contreparties légales offertes à tous les salariés travaillant le dimanche avait été rejeté.

La question des contreparties au travail dominical est cruciale pour les salariés et nous entendons, pour chaque exception au principe du repos dominical, revenir sur ce sujet.

Je regrette d’autant plus votre opposition, monsieur le ministre, que la lecture du compte rendu des débats de l’Assemblée nationale ne m’a pas permis d’y trouver la moindre justification. Un député, M. Dell’ Agnola, s’est contenté de dire que « le droit commun s’applique dans les zones touristiques pour l’ensemble des commerces ». Or le droit commun, que la nouvelle rédaction que vous proposez pour l’article L. 3132-3 du code du travail est censée réaffirmer, c’est précisément le repos dominical, les autres dispositions, à partir du II de l’article 2, étant des dérogations.

Surtout, pour la majorité, il n’y aurait pas lieu de prévoir de contreparties pour les salariés qui travaillent le dimanche dans les zones touristiques, au motif que « le régime d’exception s’applique pour autant qu’il n’est pas banalisé par le droit commun ». Or, faut-il une nouvelle fois le rappeler, le droit commun, c’est le repos le dimanche, à moins que vous n’ayez déjà décidé d’anticiper de futures rectifications au droit actuel et que vous ne vous projetiez dès maintenant dans une société où le droit commun serait le travail dominical, et la dérogation, le repos…

Je réitère donc la question soulevée à l’Assemblée nationale et restée, à ce jour, sans réponse : quels éléments justifient l’absence de rémunération complémentaire pour les salariés qui travailleraient tous les dimanches ? J’espère que vous nous apporterez une réponse sur le fond, sans vous abriter derrière des considérations techniques. L’argumentaire que vous utilisez pour vous opposer à l’inscription de contreparties légales pour les salariés des zones touristiques est celui de la banalisation du travail le dimanche. J’aimerais que vous nous expliquiez en quoi cette banalisation justifierait l’absence de contreparties légales.

Reconnaissez-le, notre position a au moins le mérite de la clarté, puisque que nous proposons l’égalité des droits entre tous les salariés. (M. Jacky Le Menn applaudit.)

M. le président. L'amendement n° 92, présenté par Mmes David, Hoarau et Pasquet, MM. Autain, Fischer et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Après le premier alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 3132-25 du code du travail, insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Le dimanche, l'amplitude horaire des salariés ne peut dépasser sept heures de travail. Les pauses et les coupures étant intégrées dans le décompte des heures travaillées et rémunérées comme des heures de travail effectif. »

La parole est à Mme Éliane Assassi.

Mme Éliane Assassi. Il s’agit d’un amendement de repli, tendant à préciser que le dimanche, jour qui n’est pas comme les autres, l’amplitude horaire du travail ne peut dépasser sept heures. En outre, il vise à intégrer dans ce temps de travail les pauses et les coupures. Il s’agit de reconnaître au travail le dimanche une dimension particulière.

Nous ne nous lasserons jamais de le répéter, l’effort fourni par le salarié qui travaille le dimanche, qu’il soit volontaire ou non, doit impérativement être mesuré, reconnu et pris en compte.

Travailler le jour normalement consacré aux occupations sociales, culturelles et familiales n’est pas anodin, non plus que l’absence de deux jours consécutifs de repos, les médecins du travail, notamment, s’accordant à reconnaître qu’ils sont nécessaires pour permettre au salarié une pleine récupération.

Afin d’éviter la banalisation du travail le dimanche, vers laquelle tend ce texte, nous proposons de limiter à sept heures l’amplitude horaire de ce dernier, en y intégrant le temps des pauses, ce qui aurait d’ailleurs pour effet de garantir un rythme plus propice à la récupération.

M. le président. L'amendement n° 93, présenté par Mmes David, Hoarau et Pasquet, MM. Autain, Fischer et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Après le premier alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 3132-25 du code du travail, insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Les salariés qui travaillent déjà le dimanche dans des zones et communes reconnues touristiques d'affluence exceptionnelle ou d'animation culturelle permanente, ou thermales, ou qui se verraient reconnaître comme étant touristiques d'affluence exceptionnelle ou d'animation culturelle permanente, ou thermales et bénéficient déjà de contreparties, conservent le bénéfice de ces dernières si elles sont plus favorables que les dispositions prévues par la loi. »

La parole est à Mme Annie David.

Mme Annie David. Cet amendement a pour objet d’empêcher que les salariés qui travaillent déjà le dimanche dans une zone touristique ou appelée à être considérée comme telle et qui perçoivent à ce titre des contreparties n’en perdent le bénéfice lorsque la loi s’appliquera. Je pense, par exemple, aux salariés des zones commerciales qui ne seront pas incluses dans les PUCE mais qui, pour continuer à ouvrir le dimanche, obtiendront d’être reconnues comme touristiques, à l’image de celle qui est située à proximité de la ville d’Orly – après La Défense, Orly !

Une telle situation serait profondément injuste et pèserait sur les salariés déjà les plus précarisés, ceux qui ont consenti à travailler le dimanche pour obtenir les rallonges salariales que leurs employeurs leur refusent normalement. Ne pas agir constituerait pour la majorité, qui prétend sauver le pouvoir d’achat des Français, un aveu d’échec, à moins qu’elle ne souhaite en réalité accorder un cadeau supplémentaire aux grands patrons et aux actionnaires…

M. le président. L’amendement n° 94, présenté par Mmes David, Hoarau et Pasquet, MM. Autain, Fischer et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Après le premier alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l’article L. 3132-25 du code du travail, insérer deux alinéas ainsi rédigés :

« Les salariés qui refusent de travailler le dimanche dans les communes d’intérêt touristiques ou thermales intéressées, dans les zones touristiques d’affluence exceptionnelle ou d’animation culturelles permanente, ou thermale, ne peuvent faire l’objet de sanctions à leur encontre.

« Les salariés travaillant déjà dans les communes d’intérêt touristique ou thermal, dans les zones touristiques d’affluence exceptionnelle ou d’animation culturelles permanente, ou thermale et bénéficiant de contreparties pour ce travail mais perdent le bénéfice de ces contreparties en raison de l’application de la présente loi, et refusent de travailler le dimanche, ne peuvent faire l’objet de sanctions. »

La parole est à Mme Annie David.

Mme Annie David. Cet amendement s’inscrit lui aussi dans notre logique de protection des salariés contre un texte mal rédigé, ou délibérément construit pour affaiblir les droits des salariés.

Nous proposons donc que les salariés qui travaillent déjà le dimanche dans des zones touristiques et bénéficient actuellement de contreparties ne soient pas sanctionnés s’ils refusaient, à l’avenir, de travailler le dimanche sans contreparties.

M. le président. L’amendement n° 96, présenté par Mmes David, Hoarau et Pasquet, MM. Autain, Fischer et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Dans le deuxième alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l’article L. 3132-25 du code du travail, remplacer les mots :

communes d’intérêt touristique

par les mots :

communes touristiques au sens de l’article R. 3132-20

La parole est à Mme Isabelle Pasquet.

Mme Isabelle Pasquet. Il s’agit d’un amendement de cohérence avec un autre déjà défendu.

M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.

L’amendement n° 22 est présenté par M. Caffet, Mme Khiari, MM. Assouline et Madec, Mmes Le Texier et Printz, M. Jeannerot, Mmes Demontès, Jarraud-Vergnolle, Blondin et les membres du groupe Socialiste et apparentés.

L’amendement n° 54 est présenté par M. Desessard, Mmes Blandin et Boumediene-Thiery, M. Muller et Mme Voynet.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Dans le deuxième alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l’article L. 3132-25 du code du travail, remplacer les mots :

de l’autorité administrative visée à l’article L. 3132-26

par les mots :

des conseils municipaux

La parole est à M. Jean-Pierre Caffet, pour présenter l’amendement n° 22.

M. Jean-Pierre Caffet. Je souhaite attirer l’attention de mes collègues sur le sort que cette proposition de loi réserve à Paris.

Pour Paris, aux termes de la législation actuelle, il existe deux catégories de dérogations au principe du repos dominical : les cinq dimanches dits « du maire », qu’il revient en fait au préfet d’accorder ou non, et les zones touristiques, dont la délimitation est décidée par le préfet sur proposition du conseil municipal, conformément au droit commun.

Ce système a fonctionné à la satisfaction générale jusqu’à présent. Les gouvernements, les maires, les majorités municipales qui se sont succédé depuis une trentaine d’années n’ont jamais souhaité le remettre en cause. Sur la base de cette législation, un travail fécond a pu être effectué, puisqu’il existe à l’heure actuelle à Paris sept zones d’intérêt touristique, où les commerces peuvent ouvrir le dimanche.

Or, de manière curieuse, et même incompréhensible, cette proposition de loi inverse la hiérarchie des responsabilités. En effet, si elle ne remet pas en cause les dispositions relatives aux cinq dimanches du maire, qui continueront à relever des prérogatives du préfet – nous ne revendiquons nullement qu’ils soient décidés par le maire –, en revanche, elle prévoit textuellement que le préfet prendra des décisions aussi cruciales que la transformation de Paris, capitale du pays, en commune d’intérêt touristique ou que la création ou l’extension de zones touristiques sans que le conseil municipal de Paris ait son mot à dire !

Alors que Paris était rentré dans le droit commun depuis la grande loi de 1975 adoptée sous le septennat de Valéry Giscard d’Estaing, qui a ouvert la voie aux élections municipales de 1977, on nous propose aujourd’hui, sans la moindre explication, de créer au travers de cette proposition de loi un statut particulier pour Paris et de priver ses élus de voix au chapitre sur un sujet d’une importance majeure !

Cette situation est incompréhensible, d’autant, je le répète, que le dispositif en vigueur donnait satisfaction à tout le monde !

Hier, dans son intervention liminaire, M. le ministre nous a certes indiqué qu’il entendait tenir compte des préoccupations des élus parisiens, qui demandent de façon presque unanime – Mme Hermange s’est exprimée à peu près dans les mêmes termes ce matin, et M. Dominati ira peut-être dans le même sens dans quelques minutes – que Paris jouisse exactement des mêmes prérogatives que les autres communes et que les décisions qui seront éventuellement prises par le préfet le soient sur demande ou sur proposition du conseil municipal, comme partout ailleurs en France. Personne ne saurait comprendre que Paris soit traité différemment de Marseille ou de Lille !

Monsieur le ministre, vous nous avez assuré que vous régleriez la question par décret, mais la hiérarchie des responsabilités demeurera inversée : le préfet aura l’initiative et prendra sa décision après avoir demandé l’avis du Conseil de Paris, dont le rôle pourrait n’être que consultatif.

M. Nicolas About. C’est normal !

M. Jean-Pierre Caffet. Il s’agit pour Paris d’une véritable régression démocratique – il faut appeler un chat un chat –, contraire à mes yeux à l’esprit de la loi de 1975 et des lois de décentralisation, voire à la Constitution. Nous n’hésiterons d’ailleurs pas à le faire vérifier, monsieur le ministre ! Cela est absolument inique, incompréhensible, d’où notre amendement.

Ce matin, quand un certain nombre d’entre nous se sont émus de la précipitation avec laquelle ce texte a été présenté, Mme le rapporteur a répondu qu’il avait au contraire été longuement mûri, qu’il avait donné lieu à de multiples échanges avec M. Richard Mallié et qu’il en était à sa quatrième version.

Mme Isabelle Debré, rapporteur. Je ne me suis pas exprimée dans ces termes !

M. Jean-Pierre Caffet. Madame le rapporteur, puisque vous avez longuement étudié ce texte et en connaissez presque chaque ligne, comment avez-vous pu accepter qu’une telle disposition y soit inscrite en catimini, sans que les élus parisiens, en particulier le maire, aient jamais été consultés ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour présenter l’amendement n° 54.

M. Jean Desessard. Je serai bref, après l’excellent plaidoyer de mon collègue sénateur de Paris Jean-Pierre Caffet.

Les sénateurs Verts souhaitent eux aussi que les conseils municipaux concernés soient associés à la détermination des zones touristiques. À cet égard, il est particulièrement scandaleux que la proposition de loi, dans sa rédaction actuelle, prévoie un régime particulier pour la ville de Paris, alors que, comme l’a rappelé Mme Hermange ce matin, lors de la discussion du projet de loi portant réforme de l’hôpital, Mme Bachelot-Narquin nous avait expliqué qu’il n’y avait aucune raison de traiter Paris différemment des autres villes de France.

Aux termes de la rédaction actuelle du texte, le préfet de Paris pourrait imposer l’extension du travail du dimanche, sans en référer ni au maire ni au Conseil de Paris. Il est impensable que le préfet prenne seul, de manière discrétionnaire, une décision qui concernerait plus de 2 millions de Parisiens et de 11 millions de Franciliens, soit un Français sur six !

M. le ministre nous a indiqué, lors de la discussion générale, que le cas particulier de Paris serait réglé par un décret en Conseil d’État, qui déterminera les modalités d’application de cet article. Il nous a garanti que le décret précisera que le Conseil de Paris devra être consulté. (M. le ministre acquiesce.)

Dans ces conditions, monsieur le ministre, puisque nous sommes d’accord, pourquoi ne pas l’inscrire dès aujourd’hui dans le texte par le biais de nos amendements ? Évidemment, mes chers collègues, nous devrions alors nous retrouver en fin de semaine pour adopter les conclusions d’une commission mixte paritaire, mais nous pouvons tout de même consacrer quatre jours à l’amélioration d’un texte qui obligera 200 000 salariés supplémentaires à travailler le dimanche !

Redonnons un peu de pouvoir au Sénat et osons voter un petit amendement pour régler cette question, puisqu’il semblerait que nous soyons tous d’accord ! À moins que vous ne soyez pas sûr de vous, monsieur le ministre, et que vous attendiez encore un arbitrage et des coups de téléphone ! Mais si nous sommes tous d’accord pour que Paris ne soit pas un cas particulier, adoptons ces amendements identiques ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. L’amendement n° 98, présenté par Mmes David, Hoarau et Pasquet, MM. Autain, Fischer et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Dans le deuxième alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l’article L. 3132-25 du code du travail, remplacer les mots :

sur proposition de l’autorité administrative visée à l’article L. 3132-26

par les mots :

sur demande des conseils municipaux

La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Je ne répéterai pas ce qu’a très bien dit Jean-Pierre Caffet. Force est de constater que si tous les élus parisiens sont d’accord, ils se heurtent malheureusement à la volonté du Président de la République. Voilà le problème !

Pour lui, il est évident que tous les commerces de Paris, ville touristique s’il en fut, doivent être ouverts le dimanche. Par le jeu des diverses dérogations et autorisations, beaucoup de magasins sont déjà ouverts le dimanche à Paris dans les lieux touristiques. Dorénavant, en plus des zones d’intérêt touristique délimitées par le préfet, il y aura des PUCE : toute la ville sera zone touristique ! Quant aux salariés, leur statut variera d’un coin de rue à l’autre !

Il est évident que l’on a cherché à contourner les élus parisiens, qui refusent l’extension des zones touristiques dans Paris, estimant que les périmètres existants suffisent. La situation actuelle permet à certains commerces de proximité de profiter du tourisme, quand tant d’autres ont succombé sous la concurrence des grands magasins : dans ce secteur d’activité, 50 000 emplois ont disparu à Paris dans les dix dernières années, alors que l’amplitude des horaires d’ouverture n’a cessé de croître ! Il existe donc une contradiction entre l’objectif que vous prétendez viser et la réalité des choses.

Restons-en donc à ce qui existe aujourd’hui en matière de zones touristiques à Paris, d’autant que l’on nous annonce déjà que la concurrence va faire rage entre les grands magasins de La Défense et ceux du boulevard Haussmann. Que vont faire les touristes ? En tout cas, il est certain que la concurrence jouera au détriment des salariés parisiens du commerce, déjà exploités et soumis à des horaires insupportables.

Les élus parisiens entendent d’abord être respectés, comme les autres, car la démocratie doit prévaloir partout, y compris dans la capitale de la France ! À une large majorité, ils refusent l’extension des zones touristiques et n’acceptent pas d’être tenus pour quantité négligeable, soumis au bon vouloir du préfet. Les élus parisiens sont responsables : ils savent que Paris reçoit beaucoup de touristes de toutes nationalités, mais ils ont aussi la sagesse de penser que la relance économique de notre pays, y compris de la capitale, ne repose pas sur le chiffre d’affaires de LVMH ! Cela se saurait !

M. Robert del Picchia. Décidément, elle en veut à LVMH !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Revenez donc à la raison, mes chers collègues, et adoptez ces amendements. Paris doit rester dans le droit commun et ses élus doivent être respectés ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)

M. le président. L’amendement n° 97, présenté par Mmes David, Hoarau et Pasquet, MM. Autain, Fischer et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Dans le deuxième alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l’article L. 3132-25 du code du travail, remplacer les mots :

à l’article L. 3132-26

par les mots :

à l’article L. 2122-4 du code général des collectivités territoriales

La parole est à Mme Annie David.

Mme Annie David. Le principe de la libre administration des collectivités territoriales est posé par la Constitution et s’impose donc au législateur, ainsi qu’à toutes les autorités administratives.

Par conséquent, les conseils municipaux, représentants des habitants, doivent être à l’initiative d’une éventuelle demande de classement de la commune en tant que commune touristique ou thermale ou de la délimitation de zones touristiques. Cet amendement a pour objet de réaffirmer ce principe fondamental, qui peut jouer le rôle de garde-fou en matière de travail dominical. Il s’agit d’éviter que ce texte ne devienne le prélude à une généralisation du travail le dimanche qui ne s’accompagnerait pas, pour autant, d’une généralisation des contreparties et des protections pour les salariés concernés.

En effet, ne nous leurrons pas : même si l’on ne cesse de marteler que seules les communes touristiques au sens du code du travail seront concernées, la frontière est ténue entre celles-ci et les communes touristiques au sens du code du tourisme !

D’ailleurs, dans mon département, l’Isère, à l’exception de quatre d’entre elles, les communes touristiques au sens du code du tourisme et du décret n° 2008-884 du 2 septembre 2008 figurent également dans la liste des communes touristiques au sens du code du travail, qui sont actuellement au nombre de cinquante-trois.

Nul besoin d’être un visionnaire pour comprendre que les deux listes sont destinées à converger et que l’on pourra bientôt travailler « de droit » le dimanche dans plusieurs milliers de communes touristiques. La voie est ouverte à la généralisation du travail dominical.

C’est pourquoi nous proposons que le conseil municipal soit le pivot du dispositif. Il doit lui incomber de demander, ou non, le classement en commune touristique au sens du code du travail.