Article additionnel après l'article 2 ter
Dossier législatif : projet de loi relatif à l'entreprise publique La Poste et aux activités postales
Articles additionnels après l'article 3

Article 3

(Non modifié)

Le dernier alinéa du III de l’article 6 de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 relative à l’organisation du service public de La Poste et à France Télécom est supprimé.

M. le président. La parole est à Mme Évelyne Didier, sur l'article.

Mme Évelyne Didier. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’article 3 du projet de loi entend tirer les conséquences du changement de statut de La Poste et ne plus la soumettre au principe de spécialité.

Cet article n’est pas anodin et ne constitue pas une simple conséquence du changement de statut. Il montre la volonté claire du Gouvernement de conforter la direction de La Poste dans la privatisation de la gestion de l’exploitant public, dénomination dont on « apure » la loi par ailleurs car elle est idéologiquement trop encombrante au regard de la société anonyme.

Pour bien comprendre les enjeux de cet article qui paraît si anodin, je voudrais revenir sur les implications du principe de spécialité. Saisi par le ministre de l’industrie, des postes et des télécommunications et du commerce extérieur de la question de la compatibilité de la diversification d’EDF et de GDF avec la spécialité des établissements publics, le Conseil d’Etat, en particulier la section des travaux publics, a rendu un avis le 7 juillet 1994.

Comme vous allez le constater, la haute juridiction administrative n’a pas une interprétation restrictive du principe de spécialité. Ainsi, si ce principe signifie que la personne morale, dont la création a été justifiée par la mission qui lui a été confiée, n’a pas de compétence générale au-delà de cette mission et qu’il n’appartient pas à l’établissement d’entreprendre des activités extérieures à cette mission ou de s’immiscer dans de telles activités, il ne s’oppose pas par lui-même à ce qu’un établissement public, surtout s’il a un caractère industriel et commercial, se livre à d’autres activités économiques.

C’est d’ailleurs ce qui se passe déjà pour La Poste. Seulement, le Conseil d’État pose une double condition : d’une part, que ces activités annexes soient techniquement et commercialement le complément normal de la mission statutaire principale de l’établissement ; d’autre part, que ces activités soient à la fois d’intérêt général et directement utiles à l’établissement public, notamment par son adaptation à l’évolution technique, aux impératifs d’une bonne gestion des intérêts confiés à l’établissement, le savoir-faire de ses personnels, la vigueur de sa recherche et la valorisation de ses compétences, tous moyens mis au service de son objectif principal.

Ces critères valent, pour la spécialité, quelle que soit la méthode de diversification retenue : par l’établissement lui-même, par une filiale à contrôle majoritaire de l’établissement ou par une participation minoritaire.

L’article 6 de la loi de 1990, qui prévoit que « La Poste peut exercer, selon des modalités prévues par décret en Conseil d’État, des activités de prestation de services pour le compte de tiers lorsque ces activités sont compatibles avec l’exercice des missions énoncées à l’article 2 de la présente loi et permettent à La Poste de contribuer à l’aménagement du territoire », encadre de plusieurs façons les dérogations éventuelles au principe de spécialité.

Un décret en Conseil d’État, s’il est pris, précise les modalités d’intervention de La Poste dans ces activités. Les activités de prestation de service doivent être compatibles avec le service public des envois postaux, le service public du transport et de la distribution de la presse et les services de collecte, de tri, de transport et de distribution d’envois postaux, de courrier sous toutes ses formes, d’objets et de marchandises. Il peut donc être dérogé au principe de spécialité si et seulement si ce n’est pas au détriment de ces missions qui servent l’intérêt général.

Enfin, le législateur va plus loin puisqu’il soumet la possibilité de l’exercice des activités annexes à leur utilité en termes d’aménagement du territoire.

La volonté du Gouvernement est très claire. Vous vous appuyez, monsieur le ministre, sur la privatisation du statut de La Poste afin que cette nouvelle entité, tout entière soumise à la logique marchande, puisse développer des activités annexes plus rentables, qui rapporteront certainement plus aux actionnaires qu’aux usagers. Dans ces conditions, on comprend que le principe de spécialité et son objectif de satisfaction de l’intérêt général vous dérangent fortement ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG.)

M. le président. La parole est à Mme Bariza Khiari, sur l’article.

Mme Bariza Khiari. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’article 3 vise à supprimer le dernier alinéa de l’article 6 de la loi du 2 juillet 1990, qui permettait à La Poste d’offrir pour le compte de tiers des prestations de service public après autorisation du Conseil d’État sous forme de décret.

En supprimant cet alinéa, vous considérez, peut-être avec raison, que cette possibilité est devenue superflue compte tenu de la transformation de La Poste en société anonyme – cette transformation permet en effet ce type d’activités du fait de la disparition de la spécialité inhérente au statut d’EPIC –, voire que cette possibilité est devenue contreproductive puisque la procédure de décret en Conseil d’État est lourde.

De surcroît, le fait que La Poste reste une entreprise publique assurerait, selon M. le rapporteur, un contrôle suffisant sur son activité en ce domaine.

Cependant, je ne suis guère convaincue par l’argumentaire développé dans le rapport. L’alinéa visé offrait une possibilité encadrée en droit qui disparaît désormais. L’importance de cette entreprise dans l’aménagement du territoire impose de maintenir un contrôle étroit de ses activités dans ce domaine.

Nos concitoyens, pas plus que les élus, ne comprendraient pas que l’on puisse limiter notre action et se contenter du bon vouloir de La Poste transformée en société anonyme.

Les conventions que signe la Poste avec l’Agence nationale pour la rénovation urbaine et les différentes institutions en charge de l’aménagement du territoire où siège La Poste sont des éléments importants dans la structuration du territoire. Il nous semble essentiel que cette entreprise continue à participer à l’aménagement du territoire, et qu’un contrôle étatique renforcé soit établi afin de la contraindre parfois à agir.

M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.

L'amendement n° 59 est présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.

L'amendement n° 291 est présenté par MM. Desessard et Muller et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet.

L'amendement n° 489 rectifié est présenté par MM. Teston, Botrel, Bourquin, Chastan, Courteau, Daunis et Guillaume, Mmes Herviaux et Khiari, MM. Mirassou et Navarro, Mme Nicoux, MM. Patient, Patriat, Raoul, Raoult, Repentin, Collombat, Bérit-Débat, Berthou et Daudigny, Mme Bourzai, M. Rebsamen et les membres du groupe Socialiste et apparentés.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Jean-François Voguet, pour présenter l’amendement n° 59.

M. Jean-François Voguet. Comme le précise le rapport, l’article 3 ne modifie pas les conditions d’exercice de la mission d’aménagement du territoire telles qu’elles sont fixées par l’article 6 de la loi du 2 juillet 1990. La Poste conserve pour tâche de contribuer à l’aménagement et au développement du territoire au moyen de son réseau de points de contact. Les critères d’accessibilité posés en 2005 sont maintenus.

En bref, aucune amélioration n’est apportée par le texte du Gouvernement, ni même par celui de la commission, pour permettre à l’exploitant public de remplir correctement cette mission d’aménagement du territoire au profit de tous les territoires.

Ce serait pourtant grandement utile, en particulier quand on lit dans le contrat de service public 2008-2012 que la norme d’accessibilité fixée par la loi de 2005, déjà faible, est « respectée dans la plupart des départements, à l’exception de quelques-uns où une augmentation du nombre de points de contacts est nécessaire ».

Que ces territoires et leurs populations nous pardonnent, rien ne sera modifié pour améliorer cela ! En revanche, que la direction de La Poste se rassure : les auteurs du projet de loi ont pensé à supprimer l’alinéa qui autorise sous conditions la prestation de services pour le compte de tiers par La Poste.

Comme le note M. Hérisson dans son rapport, avec le changement de statut, « cette disposition offre une autorisation qui n’est pas nécessaire et la limite par une restriction qui perd sa logique ».

Débarrassons la loi de ces indications que le rapport qualifie de « superflues » puisque le but est d’encourager le caractère purement marchand des services postaux. Supprimons le décret et par là même le résidu de contrôle de la puissance publique ; il n’y a rien à craindre puisque, toujours selon le rapport, « la propriété publique de l’intégralité du capital de la société devrait être de nature à garantir un contrôle sur les activités menées par La Poste ».

Bien sûr, nous n’adhérons à aucune des positions défendues par la commission, positions qui s’inscrivent fidèlement dans la logique mercantile du projet gouvernemental, au détriment de l’intérêt général.

C’est la raison pour laquelle nous vous demandons d’adopter notre amendement. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG. – M. Jean Desessard applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour présenter l'amendement n° 291.

Mme Marie-Christine Blandin. Le dernier alinéa du paragraphe III de l’article 6 encadre, via un décret du Conseil d’État, les activités de prestation de service que peut exercer La Poste. Ces activités doivent être compatibles avec les missions de La Poste, et notamment contribuer à l’aménagement du territoire. Supprimer cette disposition ouvrirait la voie à la dénaturation des activités de La Poste.

Si La Poste a aujourd’hui prétendument besoin d’être recapitalisée, c’est uniquement pour financer des objectifs de prédation commerciale, via ses filiales et ses diverses activités ne relevant pas du service public postal. Si La Poste se restreignait à son cœur de métier, elle aurait les moyens de s’autofinancer. Le taux d’autofinancement pour l’EPIC se situe aujourd’hui aux alentours de 143 %.

En supprimant le cadre précis des activités, vous précipitez La Poste dans la course aux marchés, ceux dans lesquels les maçons font de la télévision, les vendeurs d’armes du journalisme, les distributeurs d’eau des espaces verts ou des colonies de vacances !

Ce genre de pratiques tue le métier et la transmission des savoirs. Il repose sur un concept ultralibéral : n’importe qui peut vendre n’importe quoi. Vous vous y êtes déjà essayés avec la loi instituant un droit d’accueil pour les élèves des écoles maternelles et élémentaires pendant le temps scolaire, en recommandant aux maires de prévoir pour les jours de grève des listings de personnel de rechange pour « garder » les enfants.

Aujourd’hui, ce sont les postiers que vous mobiliseriez bien, au cas où d’autres missions que les leurs s’avéreraient « à pourvoir » ou « juteuses ». À quand le ramassage des papiers recyclés, les stocks de Tamiflu ou la location de voitures ? (Rires et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

M. le président. La parole est à M. Michel Teston, pour présenter l'amendement n° 489 rectifié.

M. Michel Teston. Cet article est l’une des conséquences du basculement de La Poste dans le droit commun des sociétés anonymes, raison pour laquelle nous demandons sa suppression.

Il tend à supprimer le dernier alinéa du paragraphe III de l’article 6 de la loi du 2 juillet 1990 relative à l’organisation du service public de La Poste et à France Télécom, qui permettait à l’entreprise publique postale d’exercer des activités de prestation de services pour le compte de tiers lorsque ces activités contribuaient à l’aménagement du territoire.

Cet alinéa permettait également à La Poste de participer aux instances consultatives chargées de l’aménagement du territoire.

Or, selon le Gouvernement, une telle disposition serait incompatible avec le changement de statut de La Poste en société anonyme. C’est une nouvelle preuve, s’il en fallait encore, que ce changement de statut n’est absolument pas approprié.

Il nous paraît nécessaire de conserver cette disposition dans la mesure où La Poste doit continuer à prendre part à l’aménagement du territoire dans ses relations avec des tiers. Cette activité est complètement dans son rôle, et y renoncer nous paraît problématique.

La suppression annoncée de la taxe professionnelle et la réforme des collectivités territoriales devraient réduire les capacités d’intervention de ces dernières en matière d’aménagement du territoire.

Selon l’exposé des motifs, cet alinéa, qui limite à l’échelon local l’exercice d’activités de prestation de services, serait désormais incompatible avec le changement de statut de La Poste en société anonyme.

Qu’en sera-t-il de l’exécution de missions de défense nationale et de sécurité publique ? En effet, aux termes de l’article R1-1-25 du code des postes et des communications électroniques, La Poste doit concourir à l’organisation et à l’exécution du service de La Poste aux armées. Elle doit également apporter son concours dans le domaine des services postaux aux activités de divers organismes au sein desquels sont spécialement traitées des questions ayant des incidences directes ou indirectes en matière de défense nationale et de sécurité publique. Enfin, elle doit veiller à la satisfaction, par l’ensemble de son groupe, des obligations qui lui incombent en matière de défense nationale et de sécurité publique.

Telles sont les raisons pour lesquelles il nous paraît nécessaire de supprimer l’article 3 du projet de loi.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Pierre Hérisson, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur les amendements identiques nos 59, 291 et 489 rectifié, qui visent à supprimer l’article 3.

En effet, cet article tend seulement à retirer une limitation à l’exercice de prestation de services pour le compte de tiers par La Poste, limitation devenue inopportune avec la transformation de La Poste en société anonyme. Il n’y a donc pas lieu de le supprimer.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Christian Estrosi, ministre. Sur ces trois amendements, le Gouvernement émet le même avis que la commission.

M. le président. La parole est à M. Michel Teston, pour explication de vote.

M. Michel Teston. En défendant l’amendement n° 489 rectifié, j’avais demandé sur quoi portait exactement cet article du projet de loi. Est-il exact, monsieur le ministre, que La Poste ne pourra plus, du fait du changement de statut, exercer certaines missions, notamment celles que j’ai rappelées en matière de défense nationale et de sécurité publique ?

M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.

M. Jean Desessard. Je souhaite moi aussi poser une question. Monsieur le rapporteur, puisque vous avez étudié le sujet et que vous estimez, dans votre rapport, qu’il est bon que La Poste puisse exercer d’autres activités, pourriez-vous nous donner des éléments d’information à cet égard ? Dans le cadre de son audition par la commission, le directeur de La Poste, en proposant le statut de société anonyme, vous a-t-il donné un certain nombre d’exemples précis de ce que La Poste pourrait faire ?

Vous dites que La Poste doit exercer d’autres fonctions pour dégager des recettes qui permettraient de réduire les coûts pour les collectivités et de maintenir les services existants. Nous comprenons bien la logique.

En revanche, nous craignons que La Poste ne conserve son nom, son logo, la puissance de son réseau, de son attrait affectif auprès de la population, pour exercer, un jour, des activités complètement différentes tournées vers la rentabilité financière, au service d’actionnaires banalisés, et qu’elle ne remplisse plus ses missions de service public. Ce serait un hold-up postal ! (M. Alain Gournac s’exclame.)

Monsieur le rapporteur, je compte sur vous pour nous donner des exemples d’activités précises, qui justifient, aux yeux du directeur de La Poste, le changement de statut. J’espère que vous allez nous rassurer, au moins un peu, et ce dans des délais très brefs, puisque nous sommes pressés de traiter cette question !

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Pierre Hérisson, rapporteur. Je souhaite rappeler certaines choses.

Il ne faut pas se tromper de discussion. Nous avons clairement réaffirmé, aux articles 2 et  2 bis, toutes les missions de service public, le service universel, les activités, autrement dit tout ce qui constitue le cœur de métier de La Poste.

La société anonyme La Poste disposera d’une capacité de développement au travers d’un certain nombre d’activités qu’il n’y a pas lieu de lister et d’encadrer dans la loi, puisque l’objectif est précisément de lui donner une certaine liberté de manœuvre.

M. Jean Desessard. Tout à fait !

M. Pierre Hérisson, rapporteur. En tant que législateur, notre souci sur toutes ces travées est d’offrir à La Poste un champ plus vaste de possibilités de diversification, de recherche et de développement d’activités nouvelles, en veillant à n’omettre aucune de ses missions de service universel, de service public, afin qu’elle reste bien l’opérateur historique, entreprise publique de qualité, qu’il s’agisse de la distribution du courrier ou des différentes activités. Mais, pour répondre à votre question, nous n’allons pas faire une liste de ce qu’elle pourrait faire ou ne pas faire.

M. Jean Desessard. Pourriez-vous nous donner des informations ?

M. Pierre Hérisson, rapporteur. Ce qui est important, c’est que la France sera le seul pays de l’Union européenne qui, à l’occasion de la transposition de la directive européenne, aura réaffirmé dans la loi – c’est aux articles 2 et 2 bis – toutes les missions de service public.

Quant à votre crainte de voir l’enseigne de La Poste rachetée ou concurrencée, je dois dire que je ne vois pas bien par qui ! Le capital, je le rappelle, sera à 100 % public et, de ce fait, les membres du conseil d’administration seront issus du secteur public.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Christian Estrosi, ministre. Je vous remercie de vos questions, messieurs les sénateurs, car elles justifient pleinement cette réforme.

Tout d’abord, comme cela a été rappelé par M. le rapporteur, nous réaffirmons dans le texte noir sur blanc que nous préservons toutes les missions de service public exercées aujourd’hui par La Poste,…

M. Alain Gournac. On les renforce !

M. Christian Estrosi, ministre. …et, en effet, nous les renforçons.

Ensuite, nous donnons à La Poste les moyens de diversifier ses activités, dans la mesure où les limitations qui existaient auparavant quant à ses domaines d’intervention sont supprimées.

M. Jean Desessard. Dans quels domaines ?

M. Christian Estrosi, ministre. Nous lui offrons ainsi la possibilité d’élargir son champ d’action et de compétence pour en faire une entreprise moderne qui va créer de nouveaux emplois. (M. Jean Desessard s’exclame.)

Il s’agit donc bien là d’un texte de modernisation de La Poste.

Enfin, pour répondre très précisément à votre question, monsieur Teston, je vous confirme que La Poste continuera à exercer ses missions en matière de défense avec le service de la poste aux armées, conformément à l’article R1–1-25 du code des postes et des communications électroniques. Elle continuera à transmettre aux quatre-vingt-quinze bureaux à l’étranger, y compris en Afghanistan, les envois, notamment de courrier, de paies, comme elle le fait aujourd'hui.

On le voit bien, nous partons de la situation actuelle pour aller beaucoup plus loin, tout en confortant les activités existantes de La Poste.

M. Jean Desessard. Mais quelles sont les activités ? (Protestations sur les travées de lUMP.)

M. Alain Gournac. Le ministre a été clair !

Mme Évelyne Didier. Justement, ce n’est pas clair !

Mme Isabelle Debré. Le ministre a répondu !

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 59, 291 et 489 rectifié.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 223, présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Au début de cet article, insérer deux alinéas ainsi rédigés :

Le dernier alinéa du I de l'article 6 de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de La Poste et à France Télécom est ainsi rédigé :

« Sauf circonstances exceptionnelles, ces règles ne peuvent autoriser que plus de 5 % de la population d'un département se trouve éloignée de plus de cinq kilomètres et de plus de vingt minutes de trajet automobile, dans les conditions de circulation du territoire concerné, des plus proches points de contact de La Poste. »

La parole est à Mme Éliane Assassi.

Mme Éliane Assassi. Par cet amendement, nous visons plus particulièrement les petites communes qui souffrent déjà d’un certain enclavement et qui risquent, avec ce projet de loi, d’être encore plus isolées.

La disposition que nous vous proposons permet de rapprocher les citoyens des points de contact qui permettent le développement du lien social.

La Poste participant de fait au désenclavement des localités isolées, il faut préciser son rôle en matière d’aménagement du territoire. Son réseau de points de contact ne doit pas être touché, car il est indispensable pour le bon fonctionnement du développement du territoire.

Pour éviter autant que possible l’isolement des personnes, notamment celles qui habitent dans des lieux reculés, comme en montagne, par exemple, la présence des bureaux de poste est essentielle, car elle permet de renforcer le lien social qui unit les individus.

Cet amendement est non pas un simple affichage, ou une tentative d’obstruction, comme vous le pensez peut-être, mais une véritable proposition, au plus près de la réalité, destinée à répondre aux besoins de nos concitoyens.

M. le président. L'amendement n° 490, présenté par MM. Teston, Botrel, Bourquin, Chastan, Courteau, Daunis et Guillaume, Mmes Herviaux et Khiari, MM. Mirassou et Navarro, Mme Nicoux, MM. Patient, Patriat, Raoul, Raoult, Repentin, Collombat, Bérit-Débat, Berthou et Daudigny, Mme Bourzai, M. Rebsamen et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Au début de cet article, ajouter un paragraphe ainsi rédigé :

... - Le I de l'article 6 de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 précitée est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Le maillage territorial tient compte de la densité de population. Un décret fixe un plafond maximal d'habitants par bureau de poste de plein exercice. »

La parole est à Mme Bariza Khiari.

Mme Bariza Khiari. Cet amendement vise à garantir qu’un nombre suffisant de bureaux de poste de plein exercice soit accessible aux usagers dans de bonnes conditions.

Si le problème de la présence postale est aigu dans les zones rurales, la question du service rendu au public se pose également en milieu urbain.

Lors de la discussion générale, j’avais insisté sur la présence postale à Paris et dans les zones urbaines sensibles, rappelant que, en 1998, dans un rapport intitulé Demain, la ville, notre collègue Jean-Pierre Sueur lançait déjà un cri d’alarme, rappelant que 40 % des zones urbaines sensibles ne comportaient aucun bureau de poste, alors qu’elles regroupaient une population de plus de 4 millions de personnes.

Aujourd’hui, on compte un bureau de poste pour 15 000 habitants en Seine-Saint-Denis. Je veux rappeler, monsieur le ministre, que, à deux kilomètres du Sénat, le XXe arrondissement de Paris compte un bureau de poste de plein exercice pour 21 614 habitants et que Nice, ville à laquelle vous êtes très attaché, compte un bureau de poste de plein exercice pour 9 640 habitants !

M. David Assouline. Voilà la différence entre vous et moi, monsieur le ministre !

Mme Bariza Khiari. Nous estimons qu’il faut tenir compte non seulement du nombre d’habitants dans une zone déterminée, mais aussi de ceux qui y occupent un emploi.

En effet, nombreux sont ceux qui n’ont pas la possibilité matérielle, notamment pour des raisons liées aux horaires, de se rendre dans le bureau de poste de leur lieu d’habitation. Des personnes qui viennent de la périphérie de Paris où la présence postale est insuffisante utilisent le bureau de poste à proximité du lieu où elles travaillent, le plus souvent entre midi et quatorze heures, ou à l’occasion d’une pause. À Paris, dans le Ier arrondissement, par exemple, où est implantée la Poste centrale, la population résidente est de quelque 16 000 personnes, mais environ 80 000 personnes viennent y travailler quotidiennement ! C’est ce qui explique d’ailleurs la forte mobilisation qui a eu lieu pour la sauvegarde du bureau de la rue Saint-Denis, qui a failli fermer voilà deux ans.

C’est la raison pour laquelle, afin de garantir l’égalité territoriale, d’éviter les engorgements et d’assurer au personnel de La Poste de bonnes conditions de travail, nous proposons que soit prise en compte la densité du nombre d’usagers potentiels dans le maillage territorial des bureaux de plein exercice.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Pierre Hérisson, rapporteur. L’amendement n° 223 de M. Danglot prévoit de ramener de 10 % à 5 % le seuil de la population d’un département se trouvant éloignée de plus de cinq kilomètres et de plus de vingt minutes de trajet automobile d’un point de contact de La Poste.

Un tel amendement n’a pas sa place ici. Il faut en rester aux bases établies par la loi de 2005, qui est de disposition générale, et au contrat entre l’État, La Poste et les collectivités locales.

Ces précisions pourront être étudiées lors de la renégociation du contrat, au printemps 2010. Mais on ne peut tout faire figurer dans la loi, et notamment pas la façon dont les commissions départementales de présence postale doivent fonctionner et ce qu’elles doivent dire !

Il n’est pas question de se substituer, par la loi, à l’organisation territoriale, qui relève de l’initiative des dirigeants de La Poste.

La commission a donc émis un avis défavorable.

Concernant l’amendement n° 490, le titre Ier de l’article 6 de la loi du 2 juillet 1990 prévoit déjà que les règles d’accessibilité au réseau de La Poste prennent en compte « les caractéristiques démographiques […] des zones concernées ». Il n’y a donc pas lieu de le rappeler à nouveau dans cette loi. C’est pourquoi je vous invite à retirer votre amendement, madame Khiari.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Christian Estrosi, ministre. Je ne peux pas résister à la tentation que m’offre Mme Khiari, qui aime beaucoup Nice, qui m’y rend visite, qui répond à mes invitations pour partager certaines de mes initiatives (Exclamations amusées.)…

Mme Isabelle Debré. On va tout savoir !

M. Christian Estrosi, ministre. … et qui, par ailleurs, vient de rendre hommage au maire de Nice !

Pour les mêmes raisons que M. le rapporteur, je suis tout à fait défavorable à ces deux amendements ; mais je le dis à tous les élus locaux que vous représentez : le volontarisme de l’élu local compte beaucoup…