M. le président. J’indique au Sénat que la conférence des présidents a fixé pour cette discussion à cinq minutes le temps de parole dont chaque groupe dispose et à trois minutes celui dont dispose la réunion des sénateurs n’appartenant à aucun groupe.

Je vous rappelle également que l’intervention générale vaut explication de vote pour cette mission.

Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de vingt minutes pour intervenir.

Dans la suite de la discussion, la parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.

Mme Josiane Mathon-Poinat. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la mission « Administration générale et territoriale de l’État » connaît une stabilité budgétaire, par rapport à 2009, de 2,6 milliards d’euros de crédits de paiement.

Ce projet de budget est conforme aux dispositions de la RGPP, et confirme les profondes modifications architecturales des services déconcentrés de l’État dans le but d’améliorer « les gains de productivité ».

La RGPP réduit la présence de l’État par l’amoindrissement des services départementaux pour les reconcentrer sur la région, ce qui n’est guère innocent au regard de la réforme à venir des collectivités territoriales.

Ce budget confirme la tendance observée l’année dernière, avec 800 emplois supprimés, dont 736 pour le seul programme 307 « Administration générale ».

On parle d’ailleurs ici de trois départs en retraite sur quatre non remplacés. Que de zèle au regard de votre politique, déjà très contestable, qui vise le non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite !

Réduire les effectifs au seul motif de maîtriser la masse salariale n’est guère valable, surtout en s’appuyant de manière équivoque sur l’amélioration de la qualité des services.

Il est d’ailleurs à craindre que cette réduction ne se poursuive l’année prochaine lorsque vous faites remarquer que la masse salariale augmente « encore » de 1,7 %. La création de l’Agence nationale des titres sécurisés et ses 128 postes est ainsi emblématique de votre politique, car cela s’est accompagné d’une réduction drastique des effectifs des agents de préfecture qui étaient chargés de la délivrance des titres.

On évoque 681 postes supprimés, ce qui fait donc 533 emplois détruits, alors même que cette agence doit faire face à la réforme du passeport biométrique et à l’immatriculation à vie des véhicules.

La nouvelle organisation des préfectures centralise le contrôle de légalité, mais celui-ci sera sélectif, privilégiant les actes les plus importants, en vertu de la loi du 12 mai 2009, qui vous permet de restreindre par voie d’ordonnance le champ des actes soumis à l’obligation de transmission aux préfets. On peut donc craindre une rupture d’égalité quant au service rendu dans les préfectures.

Mais ce sont surtout les sous-préfectures qui vont voir leur rôle axé sur celui de conseil aux collectivités territoriales, et ce dans le but, dites-vous, « d’optimiser l’efficacité des services présents aux niveaux régional et départemental ».

Or, bien que vous mettiez en avant le maintien des sous-préfectures, car elles sont l’incarnation de la proximité de l’État avec les citoyens, nous ne sommes pas dupes de vos ambitions, lorsque vous modifiez, par l’intermédiaire du préfet de région, qui voit ses prérogatives largement augmentées, les périmètres de quarante et un arrondissements dans dix-sept départements ; lorsque vous lancez des pistes quant au possible jumelage de deux sous-préfectures voisines ; ou encore lorsque vous transformez une sous-préfecture en « Maison de l’État », comme à Boulogne-Billancourt, au simple motif que la présence d’un haut fonctionnaire n’est pas indispensable, car les services d’accueil au public sont suffisamment importants.

À terme, il y a bel et bien le risque de voir disparaître de nombreuses sous-préfectures et donc, encore une fois, une présence amoindrie de l’État.

De fait, les personnels s’inquiètent de ces modifications, car ils sont dans le flou quant à leurs futures missions. Dans ma permanence départementale, j’ai mesuré réellement leur désarroi.

C’est pourquoi nous voulons un engagement ferme de votre part concernant la conservation de nos 250 sous-préfectures et la prise en compte des demandes du personnel.

Dans le même ordre d’idées, les conseillers d’administration créés pour remplacer les sous-préfets qui sont surtout concentrés, selon vous, dans des « territoires relativement peu peuplés et où les enjeux socio-économiques sont considérés plus faibles que ceux posés dans les départements urbains », ne seraient pas astreints à une obligation de permanence, ce qui est problématique, car la continuité de l’État doit être assurée par son représentant.

De même, ils n’auront pas l’autorité du corps préfectoral, ce qui peut, là encore, être dommageable dans leurs rapports avec les élus locaux, élus ruraux pour la plupart, qui s’inquiètent, eux aussi, de la nature de leurs relations.

Il est d’ailleurs étrange que l’un des objectifs de la création de ces conseillers d’administration soit d’offrir aux attachés principaux du ministère de l’intérieur « des perspectives élargies de promotion professionnelle et d’accès à des postes de responsabilité supérieure ».

Cette création se veut-elle donc comme une gratification offerte à des hauts fonctionnaires, les citoyens n’y gagnant rien, ni les élus locaux, d’ailleurs, quant aux services publics qu’ils sont en droit d’attendre de la part de l’État ?

Enfin, il m’apparaît important de suivre et d’appuyer les recommandations du rapporteur pour avis de la commission des lois, M. Anziani, en matière de lutte contre les dérives sectaires. Les observations faites l’an dernier n’ont pas été entendues, mais j’ose espérer que les cinq recommandations seront suivies d’effet cette année.

En conclusion, le budget concernant cette mission est évidemment à mettre en relation avec la réforme des collectivités territoriales, qui va bientôt venir en examen devant notre assemblée.

La modification architecturale de l’État anticipe la réforme des collectivités territoriales. Nous nous dirigeons vers une régionalisation de l’administration déconcentrée, qui va voir les services de l’État s’éloigner des besoins de nos concitoyens et défigurer le maillage territorial, votre réforme se faisant donc au détriment des usagers. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à Mme Anne-Marie Escoffier.

Mme Anne-Marie Escoffier. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, le budget de la mission « Administration générale et territoriale de l’État » s’inscrit très rigoureusement dans l’application de la RGPP. Il en a la rigueur – le budget est presque stable – et la logique, c'est-à-dire la reconcentration de la gouvernance.

Je m’appliquerai à n’évoquer que le programme 307 « Administration territoriale », un programme qui, au demeurant, consomme 66,7 % des crédits de paiement de la mission tout entière.

Le premier constat est celui de la baisse d’un peu plus de 2 % du budget, tant en autorisations d’engagement qu’en crédits de paiement.

La première réaction est, à l’évidence, celle de l’insatisfaction, non pas une insatisfaction de principe, simplement parce qu’il y a baisse du budget, mais le dépit de constater que les faits ne corroborent pas les engagements pris.

Chacun sur ces travées, comme au sein du Gouvernement, dit avec conviction et insistance l’absolue nécessité de défendre le principe de proximité, un principe fragilisé par l’évolution même de notre société, la concentration urbaine, la désertification en cours du monde rural, la montée de l’individualisme, l’isolement des plus défavorisés, le vieillissement de la population, l’invasion de l’informatique dans notre quotidien nous obligeant à réfléchir en termes « d’e-inclusion ».

Au regard de ce constat, nous avons une administration qui se met en marche, brandissant le drapeau de la performance, de l’efficience, des paramètres quantitatifs. Les mots eux-mêmes sont la négation du principe défendu quelques secondes plus tôt.

Non pas que je fasse partie des détracteurs systématiques du quantitatif, mais il est vrai que je donne la priorité au qualitatif.

Monsieur le ministre, les préfectures et sous-préfectures sont entrées dans la phase de reconstruction d’un système qui, je vous l’accorde, avait vieilli et méritait d’être repensé. A-t-on assez dit que la logique de la LOLF, depuis près de dix ans qu’elle se met en place, entraînait de facto une reconcentration au niveau régional de la gouvernance étatique ?

Avec ses budgets opérationnels de programme en tuyaux d’orgue, les BOP, elle obligeait les administrations de l’État à se regrouper en administrations de mission et de gestion auprès du préfet de région, laissant au préfet de département la part congrue de la sécurité et de la gestion de crise. Fi de la proximité, tant à l’échelon départemental que dans les arrondissements des sous-préfectures !

Ce constat est partagé par une grande partie de la population, exaspérée au surplus par tous les « on-dit », relatifs au désengagement de l’État, à la disparition des services publics, à la désertification rurale. Le projet de loi que vous portez, relatif à la réforme des collectivités territoriales, conforte ce constat, monsieur le secrétaire d’État.

Il est alors difficile d’expliquer aux personnels des préfectures, qui voient leurs effectifs réduits de 759 équivalents temps plein, que leurs missions continueront d’être assumées avec la même efficacité, la même compétence, dans le même objectif de servir au plus près nos concitoyens.

Le récent dysfonctionnement constaté au service des cartes grises n’a pas seulement ému les clients et utilisateurs ; il a révélé un véritable mal-être parmi les agents du cadre national des préfectures.

À cela s’ajoute l’inquiétude, assez légitime, de tous ces fonctionnaires de l’État qui voient, dans des danses chaotiques, des services se séparer, certains se rattacher les uns aux autres, d’autres quasiment disparaître. Les sous-préfectures se sentent, de ce point de vue, très fragilisées.

Il faut bien admettre que l’annonce de la liste des sous-préfectures susceptibles d’accueillir non plus un membre du corps préfectoral, mais un personnel administratif du corps des conseillers, a jeté le trouble et inquiété les citoyens habitués à se rendre dans les sous-préfectures.

Si j’entends bien les raisons qui militent pour une rationalisation des compétences, notamment le contrôle de légalité et la délivrance des passeports biométriques, je n’en demeure pas moins persuadée que l’État se prive, et prive les collectivités territoriales comme les citoyens eux-mêmes, de relais de proximité indispensables.

Sur ce point, je souhaite interroger, de nouveau, le Gouvernement sur la possibilité de reprendre, en l’améliorant certainement, le projet de « maisons de service public » ou « relais de service public », projet auquel avaient réfléchi plusieurs services de l’État, dont la direction générale de la modernisation de l’État, la DGME, la délégation interministérielle à l'aménagement et à la compétitivité des territoires, la DIACT, et le ministère de l’intérieur.

Tandis que des dispositifs de cette nature se sont largement diffusés en Europe et au Canada en particulier, la France reste curieusement muette. Et pourtant, ces relais services publics étaient l’outil pertinent, combinant les avantages de la proximité et de la mutualisation des moyens.

Cet argument économique devrait être de nature à faire réfléchir !

Monsieur le secrétaire d’État, confrontés à un budget de la mission « Administration générale et territoriale de l’État » fragilisé par son amaigrissement, les membres du RDSE ne pourront, pour leur plus grand nombre, que voter contre ce budget. (Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.

M. Jean-Pierre Sueur. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, le temps imparti est court mais ma tâche est facilitée. Je partage en effet les propos excellents et les critiques très judicieuses et pertinentes exprimées par les deux rapporteurs, Mme Michèle André et M. Alain Anziani.

Je m’écarterai de leurs propos sur un seul point : la conclusion. En effet, ils ont fourni, de même d’ailleurs que Mmes Mathon-Poinat et Escoffier, des raisons substantielles pour voter contre le budget. Nous disposons ainsi de bons arguments qu’il me suffira d’évoquer très succinctement au nom de notre groupe.

Il y a, monsieur le secrétaire d’État, des limites à la diminution des effectifs ! Nous connaissons tous les fonctionnaires des préfectures et des sous-préfectures. Ils travaillent avec beaucoup de conviction, de compétences et un sens aigu du service public.

Mais il n’est pas possible de continuer à ne pas remplacer trois départs à la retraite sur quatre ! C’est impossible ! On atteint des limites.

Je vous invite à vous rendre – sans doute le faites-vous d’ailleurs, monsieur le secrétaire d’État – dans certains services de nos préfectures dédiés aux étrangers. Vous verrez dans quelles conditions travaillent les personnels et comment les usagers sont accueillis. Cela ne peut pas continuer ainsi !

Il en est de même dans bien d’autres services. Je pense notamment à ceux qui se consacrent aux contentieux. Dans son rapport, page 27, Mme Michèle André indique à juste titre que les crédits seront sans doute tout à fait insuffisants par rapport à la masse du contentieux. (Mme le rapporteur spécial acquiesce.) Nous devons travailler sur ce sujet et trouver des solutions pour réduire l’appel au contentieux. Pour cela, il faudra des êtres humains compétents.

M. Anziani a très justement mis l’accent sur le mauvais état d’un certain nombre de locaux de garde à vue, qui sont indignes de la République. Cela doit changer ! Des moyens seront donc nécessaires.

Enfin, j’insisterai sur deux points.

D’une part, comme l’ont fait plusieurs de mes collègues, je reviendrai sur la question des sous-préfectures. Annoncer à un certain nombre de nos villes moyennes, qui sont aujourd’hui sous-préfectures, la disparition de ces dernières au profit de maisons de l’État, dirigées par un conseiller d’administration au lieu d’un sous-préfet, entraînera une frustration : cela leur donnera le sentiment d’être considérées autrement par les autorités de l’État ou par la République. Et cela, pour réaliser des économies de bouts de chandelles ! Laissons à ces services publics, avec leur force et leur notoriété, la considération qui leur est attachée !

J’en viens à la réorganisation des préfectures due à l’application de la fameuse RGPP, déjà évoquée dans d’autres débats !

Dans la préfecture que je connais le mieux, trois directions seront créées. Mais, dans la plupart des préfectures, les directions seront au nombre de deux, l’une s’occupant des populations, et l’autre, des territoires. Je suis cependant bien incapable d’indiquer la dénomination de chaque direction, tant le titre est long, abstrait et totalement incompréhensible ! Nos concitoyens avaient l’habitude d’une direction de la jeunesse et des sports, des anciens combattants, ou de l’équipement.

Mme Michèle André, rapporteur spécial. Ou des droits des femmes !

M. Jean-Pierre Sueur. Ils s’y retrouvaient !

Je ne dis pas qu’il faut rester statique, mais méfions-nous de ces vues de l’esprit. Dans ces conditions, pourquoi ne pas faire une seule direction rassemblant des personnes chargées des sports, des équipements ou des anciens combattants ? Ce serait plus simple !

Ne cédons pas à des abstractions ; pensons au service public et à sa bonne compréhension par ceux qui en sont les usagers, ceux au service desquels nous travaillons, à savoir les citoyens de ce pays.

Telles sont les raisons pour lesquelles, monsieur le secrétaire d’État, le groupe socialiste ne pourra malheureusement pas voter les crédits de cette mission. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Alain Marleix, secrétaire d'État à l'intérieur et aux collectivités territoriales. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens à remercier l’ensemble des intervenants pour leurs observations et leurs questions s’agissant des objectifs et des crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l’État ».

À travers les trois programmes qui la composent, cette mission regroupe trois champs d’intervention complémentaires : tout d’abord, le programme « Administration territoriale » rassemble la totalité des moyens mis à la disposition des préfectures et des sous-préfectures, pour un total de 1,7 milliard d’euros ; ensuite, le programme « Vie politique, culturelle et associative », doté de 270 millions d’euros, concentre les crédits liés à l’organisation des élections et au financement de la vie politique ; enfin, le programme « Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur » constitue le programme soutien de l’administration centrale du ministère pour 595 millions d’euros.

Par le biais de ces programmes, ce sont en réalité deux responsabilités fondamentales du ministère de l’intérieur qui trouvent à s’exercer : d’une part, la permanence et la continuité de l’État sur l’ensemble du territoire de la République, en métropole et en outre-mer ; d’autre part, la mise en œuvre locale, sous l’autorité des préfets, de l’ensemble de nos politiques publiques.

Je voudrais vous faire partager ma conviction : chacune de ces responsabilités fondamentales est convenablement prise en compte dans le projet de budget qui est soumis à votre appréciation.

Les préfectures et les sous-préfectures vont poursuivre résolument leur modernisation. La permanence et la continuité de l’État doivent être assurées de façon dynamique, en s’adaptant sans cesse aux besoins de nos concitoyens.

Comme vous le savez, les réformes emblématiques ne manquent pas dans les préfectures et les sous-préfectures. Je rappelle, pour mémoire, les principales, sur lesquelles la Haute Assemblée a eu l’occasion de se prononcer ces dernières années.

Je citerai d’abord le nouveau système d’immatriculation des véhicules, ou SIV, qui a été étendu aux véhicules d’occasion le 15 octobre dernier.

Vient ensuite le passeport biométrique. D’ailleurs, madame le rapporteur spécial, je précise que le Gouvernement tient ses engagements : une mission de l’Inspection générale de l’administration, réalisée en étroite liaison avec l’Association des maires de France, l’AMF, se prononcera en janvier sur l’indemnisation des communes.

Mme Michèle André, rapporteur spécial. Oui !

M. Alain Marleix, secrétaire d'État. Je citerai, en outre, la concentration du contrôle de légalité, qui s’applique aux actes les plus stratégiques et s’exercera progressivement en préfecture.

Comme vous, je me réjouis de constater que cette évolution s’effectue sans remettre en cause le rôle de conseil et de dialogue du sous-préfet, qui demeure l’interlocuteur privilégié de nos élus locaux.

Enfin, au 1er juillet 2010, les décisions de naturalisation seront prises à titre principal par les préfectures, ce qui supprimera les doublons existant jusqu’ici avec le niveau central. Cela permettra sans doute aussi un meilleur accueil des demandeurs, point évoqué par plusieurs sénateurs.

J’ai conscience que certaines de ces réformes, qui, pour la plupart, sont entrées en vigueur en 2009, se sont traduites dans les premiers temps par des désagréments pour les usagers ou les élus. Je pense par exemple au délai excessif, cet été, pour la délivrance des passeports biométriques, notamment dans certains départements de la région parisienne, ou même aux difficultés techniques rencontrées récemment par l’application du SIV.

Toutes ces difficultés ont été identifiées et sont en passe d’être résolues. Surtout, elles ne doivent pas conduire à occulter globalement les progrès, pour la grande majorité de nos concitoyens, de procédures désormais plus fiables, plus rapides et surtout moins coûteuses pour les finances publiques, grâce en particulier aux bénéfices de la dématérialisation et de l’automatisation.

Pour chacune de ces réformes, 2010 sera l’année de la montée en puissance, et leurs effets positifs se feront pleinement sentir.

L’application volontariste de ces réformes de modernisation permet de faire face dans de bonnes conditions à la baisse des effectifs, décidée conformément au principe de non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux, applicable à tous les ministères.

Mais les réductions d’effectifs – cela doit vous rassurer, madame le rapporteur spécial – sont adossées à des réformes structurelles, qui permettent de les assumer sans doute dans les meilleures conditions possible.

Ce sont ainsi près de 800 emplois qui vont être supprimés en 2010, ce qui représente, par rapport aux 34 904 emplois équivalent temps plein travaillé de la mission, un taux d’effort assez important, soit 2,3 % des effectifs.

Cela permet, dans le même temps, une stabilité remarquable des crédits alloués à la mission, qui n’augmentent pas dans leur globalité, alors même que le poste « Élections » connaît une hausse de 32 millions d’euros en raison de l’organisation des élections régionales, structurellement plus coûteuses que les élections organisées en 2009.

Un certain nombre de mesures nouvelles sont prévues pour accompagner les réformes.

Ainsi, par exemple, 13,5 millions d’euros supplémentaires sont consacrés à la politique indemnitaire, en lien direct avec la fusion des corps administratifs du ministère qui sera achevée au 1er janvier 2010. Cet effort se justifie également par la nécessité de rattraper la moyenne interministérielle estimée et de mieux prendre en compte dans la rémunération la manière de servir. Sur ce dernier point, le ministère envisage d’ailleurs de mettre en œuvre la prime de fonctions et de résultats, ou PFR, dès 2010, alors que la date-butoir applicable aux ministères devait être fixée à la fin 2011.

Parallèlement à la modernisation des préfectures et des sous-préfectures, c’est l’ensemble de l’État local qui se réorganise avec l’objectif d’optimiser l’efficacité des services présents aux niveaux régional et départemental.

Je ne m’étendrai pas longuement sur la réforme territoriale de l’État, dont vous connaissez les grandes lignes. Elle se traduira, au 1er janvier 2010, par un resserrement du nombre des directions de l’État présentes au niveau régional et au niveau départemental.

Cette réforme est fondamentale et sans doute inédite dans son ambition. Avec un maximum de huit directions régionales, regroupées autour du préfet de région, et deux ou trois directions départementales interministérielles, ou DDI, placées sous l’autorité du préfet de département, les conditions sont réunies pour une cohérence et une unité de la parole et de l’action de l’État, que les Français et leurs élus ont toujours appelées de leurs vœux.

Je le précise tout de suite, il s’agit non pas de « moins d’État » local mais au contraire de « plus », voire de « mieux d’État ».

Pour cette raison, ni Brice Hortefeux ni moi-même ne sommes favorables à une remise en cause quelconque du maillage territorial dense constitué par les 240 sous-préfectures d’arrondissement. Sans exclure des ajustements ponctuels, notamment en milieu très urbain, ce maillage mérite d’être conservé, en particulier dans les zones où la sous-préfecture constitue la seule présence de l’État.

Cela ne signifie d’ailleurs pas l’immobilisme ; les missions des sous-préfets et des sous-préfectures doivent continuer à évoluer. La sous-préfecture deviendra progressivement une administration de mission, tournée vers le développement local et venant en appui de l’action de proximité menée par le sous-préfet. Le sous-préfet développera ses interventions en matière d’ingénierie territoriale et donnera la priorité, dans sa relation avec les élus, à leur demande de conseil et à leur exigence accrue de fiabilité et de réactivité.

Dans la même optique, nous serons particulièrement vigilants afin que le niveau départemental, dont le caractère interministériel est très affirmé, ne soit pas pénalisé par des logiques ministérielles qui voudraient privilégier de façon excessive les mutualisations au niveau régional. S’il est souhaitable que le niveau régional continue à s’affirmer, avec, notamment, la reconnaissance de la possibilité pour le préfet de région de donner des « instructions » aux préfets de département, le niveau départemental doit conserver des effectifs en rapport avec les missions qui restent de sa compétence.

Nous veillerons également à ce que les conditions concrètes de la réforme favorisent, en matière de ressources humaines, de budget ou encore d’immobilier, les souplesses de gestion permettant à la réforme de produire tous les effets attendus, notamment en termes de mutualisations.

En définitive, mesdames, messieurs les sénateurs, le projet de budget soumis à votre appréciation est cohérent. En effet, il reflète le processus de modernisation à l’œuvre dans les préfectures et les sous-préfectures, avec la conviction que la permanence et la continuité de l’État trouvent leur sens profond dans une adaptation permanente aux attentes des Français et de leurs élus. Il contribue au renforcement autour du préfet de région et du préfet de département d’un État territorial fort, et resserré.

Je répondrai maintenant brièvement à certaines questions précises. Madame le rapporteur spécial, monsieur le rapporteur pour avis, madame Escoffier, s’agissant de l’aménagement des préfectures et des sous-préfectures, le ministère de l’intérieur y a consacré près de 48  millions d’euros en 2009. Je citerai, entre autres réalisations, la restructuration de l’accueil des étrangers à Nanterre, pour 2,5  millions d’euros, ou celle de la préfecture de Nancy dans son ensemble, pour près de 7 millions d’euros. Outre la mise aux normes – sécurité, incendie, accessibilité aux personnes handicapées –, il s’agit d’améliorer les conditions d’accueil des usagers.

L’effort sera poursuivi avec une hausse prévue de 4,5 % des sommes consacrées à l’immobilier des préfectures sur les deux prochains exercices budgétaires.

S’agissant du maillage du territoire en préfectures et sous-préfectures, spécificité française que nous entendons bien garder et développer, je peux vous dire que, au 3 décembre 2009, les 240 sous-préfectures sont pourvues, ce qui ne s’était pas vu depuis très longtemps. Il fut en effet une époque où une trentaine ne l’était pas ! Aucune sous-préfecture n’a été supprimée depuis deux ans. Nous en avons même rouvert un certain nombre – je pense notamment à celle de Blaye, chère à M. Anziani et au député M. Plisson. Cette sous-préfecture, la seule qui était effectivement fermée, a fait l’objet d’une enquête, au terme de laquelle il a été procédé à une réouverture très rapide.

Trois conseillers d’administration exercent à ce jour des fonctions de sous-préfets, respectivement à Montdidier, à Boulay-Moselle et à Saint-Pierre, en Martinique. Il s’agit d’un moyen de promotion comme un autre pour ces fonctionnaires, sans doute appelés à devenir des sous-préfets à part entière. En tout cas, nombre de fonctionnaires sont intéressés par l’exercice de telles fonctions. Mais il s’agit de 3 cas sur 240 arrondissements.

Je voudrais aussi répondre à M. Anziani au sujet de la MIVILUDES. Le ministère de l’intérieur poursuit son action de vigilance contre les dérives sectaires en partenariat avec cette mission. Dans ce cadre, les représentants de plusieurs directions ministérielles participent régulièrement aux réunions du comité exécutif de pilotage opérationnel de cette instance. L’information réciproque s’effectue au cas pas cas. Les résultats sont là, et, chaque fois que cela est pertinent, les notes et documents des services de renseignements font l’objet d’une communication au président de la MIVILUDES.

Á titre d’exemple, une note sur les nouvelles thérapies établie par la direction centrale de la sécurité publique a été récemment communiquée à la MIVILUDES. Je précise, enfin, qu’une circulaire du 9 septembre dernier rappelle l’existence d’un référent sectes au sein des services départementaux d’informations générales et des directions départementales de la sécurité publique.

Madame André, monsieur Sueur, vos questions sur la sous-évaluation des crédits de contentieux dans le programme CCPI identifient un problème réel et constaté depuis plusieurs années. J’ajoute que les crédits manquants sont votés par le Parlement à l’occasion du collectif de l’année en cours. L’État fait toujours face à ses engagements en matière de contentieux. Tous les efforts sont faits pour diminuer au maximum la facture de l’État, laquelle est alourdie notamment par l’indemnisation des refus de concours de la force publique.

Monsieur Sueur, madame Escoffier, nous partageons un attachement profond aux territoires ruraux. Les relais services publics offrent la possibilité d’être accueilli par un même agent pour effectuer des démarches relevant de plusieurs administrations ou organismes publics. De nombreuses initiatives ont été menées. Le ministre de l’espace rural et de l’aménagement du territoire a récemment réuni les opérateurs signataires de la charte 2006 pour en faire un bilan. Désormais, il est encore plus juste de parler de « service au public ».

Les besoins des habitants portent aussi sur l’accès au service de santé, public ou privé, et aux commerces. Sans définir un modèle unique, des solutions innovantes peuvent émerger sur la base d’approches transversales qui prennent en compte, sur un territoire donné, toutes les attentes des usagers. Les assises des territoires ruraux vont permettre de faire un point précis et d’apporter des réponses à l’attractivité des territoires ruraux.

En créant pour la première fois un ministère de plein exercice consacré à l’espace rural et à l’aménagement du territoire, le Président de la République a souhaité donner une nouvelle impulsion à la politique menée en la matière. (Applaudissements sur les travées de lUMP.)