M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur pour avis. Je crois profondément que le redressement de notre pays ne pourra se faire que dans le cadre de la justice sociale.

Mais la justice sociale, soyons clairs, ne passe pas forcément par la dépense publique. Il faut le dire à nos concitoyens, qui n’en sont pas tout à fait conscients.

Dans le domaine de la politique du logement et de la ville, comme ailleurs, la seule réponse crédible est l’innovation : inventer de nouveaux dispositifs, ingénieux, efficaces et moins coûteux, telle est sans doute la seule voie de modernisation que notre pays peut emprunter.

C’est dans cet esprit, mes chers collègues, que la commission des affaires sociales vous proposera cette année un amendement qu’elle a adopté à l’unanimité : il vise à promouvoir la garantie des risques locatifs.

Je tiens à le souligner dès à présent, la GRL est un dispositif innovant, inventé par les partenaires sociaux afin de faciliter l’accès au logement des personnes en situation de précarité en éliminant le risque financier encouru par le bailleur lorsqu’il loue son logement à ces personnes.

À ce jour, près de 200 000 ménages sont couverts par la GRL, dont 68 % peuvent être considérés comme « précaires » – titulaires d’un contrat à durée déterminée, chômeurs ou étudiants. Tous n’auraient donc pas trouvé de logement dans le parc privé sans la GRL. Encore faudrait-il que ce risque soit mutualisé et que tous les assureurs le proposent. (M. le secrétaire d’État opine.)

Avant de conclure, je citerai deux chiffres.

En tenant compte de la subvention budgétaire, des aides fiscales et des aides de taux ou de circuit, un logement HLM standard coûte aujourd’hui, en moyenne, 34 500 euros à l’État. La subvention d’équilibre par logement couvert par la GRL s’élève, elle, à 300 euros. Dans les deux cas, l’aide publique permet de loger une personne en situation de précarité ; mais vous apprécierez la différence…

J’évoquais tout à l’heure la nécessité de contenir les dépenses publiques sans renoncer à la justice sociale : je crois que la GRL et le dispositif prévu dans l’amendement n° II-149 de la commission des affaires sociales montrent que cela est possible. Nous avons les outils, à nous de prendre nos responsabilités !

Cela dit, la commission des affaires sociales est favorable à l’adoption des crédits pour 2011 de la mission « Ville et logement ». (Applaudissements sur les travées de l’Union centriste et sur plusieurs travées de l’UMP.)

Mme la présidente. Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps d’intervention générale et celui de l’explication de vote.

En outre, en application des décisions de la conférence des présidents, aucune intervention des orateurs des groupes ne doit dépasser dix minutes.

Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de vingt minutes pour intervenir.

La parole est à M. Jacques Mézard.

M. Jacques Mézard. Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, pour répondre à la recommandation de M. le président de la commission des finances, je me résous à réduire mon intervention à trois points.

Le premier, c’est la politique de la ville.

Les crédits y afférents sont en baisse de 13,4 % pour les autorisations d’engagement et de 12 % pour les crédits de paiement. Le Gouvernement diminue fortement la dotation versée à l’Agence nationale pour la cohésion sociale et l’égalité des chances. Si les CUCS sont prorogés jusqu’en 2013 – c’était le cadeau d’adieu de Mme Amara –, ils subissent une diminution annuelle des crédits d’État de 10 %. Traduction sur le terrain : les collectivités locales seront contraintes de compenser cette baisse pour pouvoir continuer à mener nombre d’actions dans les quartiers.

Le deuxième point de mon intervention concerne les aides à la pierre.

M. Repentin a relevé tout à l’heure leur baisse et l’injustice du nouveau système. Le Gouvernement remplace le Pass-foncier, usé avant d’avoir servi (M. le secrétaire d’État s’étonne.), le prêt à taux zéro et le crédit d’impôt sur les intérêts d’emprunts par un nouveau prêt à taux zéro, dont l’injustice vient d’être dénoncée ; c’est plus lisible, mais le nouveau système pénalise très fortement les accédants à la propriété en zone C, comme j’ai déjà eu l’occasion de le rappeler.

Le recentrage de la politique du logement sur les zones les plus tendues a des effets pervers. Sur nombre des territoires de la zone C, les revenus des ménages sont généralement plus bas que dans bien des agglomérations, car c’est l’adéquation entre prix et revenus qui est en réalité déterminante.

Le troisième point de mon intervention porte sur la nouvelle contribution proposée à l’article 99 du projet de loi de finances pour 2011. Comme l’indique le rapporteur spécial dans son rapport, celle-ci « ne peut être qualifiée d’instrument de péréquation ». Il ajoute : « En effet, dans la mesure où son assiette est constituée de la masse des loyers perçus, elle s’applique indifféremment et uniformément à tous les organismes, quelle que soit leur situation financière. »

Quand bien même ce dispositif serait revu par l’adoption de l’amendement n° II-27 rectifié de la commission des finances, sa mise en œuvre aura, sur le terrain, des conséquences catastrophiques pour nombre d’organismes d’HLM. Ce sera en particulier le cas dans nos petits départements, où ces organismes, qu’ils soient constitués sous la forme de sociétés anonymes ou d’offices, sont les moteurs de la construction de logements en l’absence quasi totale, faut-il le rappeler, de promoteurs privés.

J’ai fait un calcul pour un organisme que je connais. Sur un résultat annuel approchant 1,3 million d’euros, la ponction serait d’environ 1 million d’euros. Autrement dit, le dispositif détruirait toute possibilité d’action. (M. le secrétaire d’État se montre dubitatif.)

Telles sont les trois observations que je souhaitais formuler.

Monsieur le président de la commission, je me suis efforcé de suivre votre recommandation.

Pour conclure, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, il ne vous étonnera point que la majorité des membres de mon groupe ne vote pas les crédits de la mission « Ville et logement ». (Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste et du groupe du groupe CRC-SPG.)

Mme Nicole Bricq. Très bien !

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Bravo quand même !

Mme la présidente. La parole est à Mme Odette Terrade.

Mme Odette Terrade. Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, malgré une crise du logement sans précédent, force est de constater que le projet de loi de finances pour 2011 n’est pas à la hauteur des enjeux. Pis encore, il entérine le désengagement de l’État dans ce secteur, qui relève pourtant de l’intérêt général et de la solidarité nationale.

Monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, vous connaissez les chiffres aussi bien que moi : 3,5 millions de personnes, dont 600 000 enfants, sont aujourd’hui en situation de mal-logement ; 1,2 million de personnes attendent un logement social ; 100 000 personnes sont sans domicile fixe et 500 000 personnes sont privées de logement personnel. Parmi elles, 100 000 vivent à l’hôtel et 100 000 dans des campings.

Il s’agit là d’une situation dramatique qui heurte nos principes républicains et qui devrait susciter d’urgence un engagement national pour le logement. Mais cette prise de conscience n’est pas celle du Gouvernement, qui ne connaît d’autre politique publique que la rigueur !

À cet égard, la présentation du budget est assez claire : « Par les mesures financières en matière de dépenses budgétaires et fiscales qui sont mises en œuvre dans le cadre du projet de loi de finances pour 2011, la mission “Ville et logement” participe à l’objectif de réduction des déficits publics. »

Ainsi, tous les crédits de paiement des programmes de cette mission sont en régression, à l’exception du programme 177. Ces coupes atteignent même 18 % pour les aides à la pierre et 12 % pour la politique de la ville.

Cet « effort » s’inscrit dans une démarche pérenne puisque les crédits de la mission devraient diminuer de 48 millions d’euros en 2012 et de 61 millions d’euros en 2013.

Je commencerai cette intervention en confrontant deux chiffres qui, me semble-t-il, sont particulièrement révélateurs des priorités du Gouvernement.

Les aides directes à la pierre ne représentent plus, en crédits de paiement, que 469 millions d’euros. À l’inverse, les dispositifs fiscaux atteignent, eux, 12 milliards d’euros. Nous ne pouvons que constater un glissement des aides de l’État en faveur de la construction de logements sociaux vers un système de financement de la construction poussant à la création d’un marché du logement lucratif. (M. le secrétaire d’État s’étonne.)

Ainsi, 40 % des aides publiques de l’État vont au logement locatif privé, 30 % aux propriétaires et 30 % au logement social. En d’autres termes, 70 % des investissements d’État sont orientés vers le secteur privé !

Aujourd’hui, le Gouvernement annonce comme un progrès la mise en chantier de 120 000 logements, soit 10 000 de plus que l’année précédente, alors même que, selon les chiffres du rapport de la Fondation Abbé Pierre, il faudrait construire 900 000 logements pour répondre à la demande ! Ce projet de budget entérine donc la sous-production de logements. Nous ne pouvons l’admettre.

Si les crédits du programme 177, Prévention de l’exclusion et insertion des personnes vulnérables, sont globalement en augmentation, force est de constater que, comme le note très justement le rapporteur spécial de la commission des finances, « la trajectoire retenue pour les trois prochaines années est celle d’une réduction progressive des crédits budgétaires ».

Nous sommes donc agréablement surpris de l’amendement déposé par le Gouvernement, qui tend à remédier à la sous-dotation qui affectait les crédits de l’aide alimentaire, ainsi que ceux des organismes logeant les personnes défavorisées.

Le programme 109, quant à lui, est constitué par les aides au logement. Ce programme est très important puisqu’il a concerné plus de 6,3 millions de foyers en 2009 et qu’il représente 5,277 milliards d’euros. Ses crédits sont pourtant en baisse de 84 millions d’euros. Je rappelle que nous demandons régulièrement une revalorisation de 20 % de l’aide personnalisée au logement, l’APL, afin de rendre ce dispositif cohérent avec l’évolution du coût de la vie.

Par ailleurs, je ne peux passer sous silence le scandaleux mécanisme permettant la non-rétroactivité du versement des APL entre le moment où la demande est déposée et celui où l’APL est mise en œuvre par la caisse d’allocations familiales, mécanisme voté lors de l’examen du dernier projet de loi de financement de la sécurité sociale. Une telle mesure devrait permettre de réaliser une économie de 240 millions d’euros au détriment des plus fragiles.

Selon nous, cette décision est une honte, alors même que la crise sociale et économique jette dans la précarité un nombre de familles de plus en plus important.

Les crédits de paiement du programme 135, Développement et amélioration de l’offre de logement, sont en baisse de 18 %, cette baisse atteignant même 22 % pour la seule action Construction locative et amélioration du parc. Une telle diminution est réalisée grâce à un tour de passe-passe permettant un recours plus important aux fonds de concours, lesquels deviennent la clef de voûte de ce programme.

En réalité, cet apport extrabudgétaire est une ponction réalisée sur les HLM à hauteur de 340 millions d’euros par an sur trois ans. Je parle ici du fameux article 99 du présent projet de loi de finances, qui prévoit de ponctionner les ressources des offices d’HLM à la fois pour financer l’ANRU et pour compenser la baisse des aides à la pierre.

Nous réaffirmons notre indignation et notre colère. Cette mesure, présentée comme la suppression d’une niche fiscale, est un hold-up sur les moyens du logement social. L’Union sociale pour l’habitat, l’USH, estime que, en l’état, cette taxe ferait baisser de 20 000 le nombre de logements chaque année.

Ainsi, et ce malgré la nouvelle proposition du rapporteur spécial de limiter la recette attendue de cette ponction à 150 millions d’euros, le financement des aides à la pierre serait au final assuré non plus par la solidarité nationale, mais bien par les offices et les locataires. Nous proposerons donc tout simplement la suppression de l’article 99.

Que dire également des perspectives financières pour les trois années à venir, alors que vous proposez de faire passer les crédits des aides à la pierre de 790 millions d’euros en 2008 à seulement 400 millions d’euros en 2013 ?

Ce programme se caractérise également par une diminution sévère de la subvention moyenne par logement financé par un prêt locatif à usage social – les logements PLUS –, laquelle passe de 1 000 euros à 800 euros, et par logement financé par un prêt locatif aidé d’intégration – les logements PLAI –, laquelle passe de 12 000 euros à 10 760 euros.

Ainsi, la participation de l’État aux nouvelles constructions de logements sociaux aura diminué de moitié au cours des dernières années alors que l’effort des offices d’HLM est passé, lui, de 2,5 % à 12 %.

En poursuivant la baisse des crédits, l’État entend continuer de reporter les besoins en financements des opérations sur les autres intervenants : collectivités locales, Action Logement, organismes d’HLM. Pourtant, les collectivités sont en grande difficulté du fait de la suppression de la taxe professionnelle. Il leur sera donc difficile de maintenir un tel niveau d’effort. Et je ne parlerai même pas de l’ANRU, qui est au bord de la cessation de paiement !

La conclusion est donc sans appel : on construira moins avec moins d’argent.

Parallèlement, nous ne disposons pas d’éléments nous permettant d’apprécier l’efficacité de la dépense fiscale, qui est exorbitante, plus importante même que les crédits de la mission ! Ces exonérations atteignent 12 milliards d’euros cette année, soit une progression de 5,8 %.

C’est dans ce contexte que Nicolas Sarkozy reformule son espoir d’une « France de propriétaires », notamment grâce à l’instauration d’un nouveau prêt à taux zéro, le PTZ +, prévue à l’article 56 du projet de loi de finances, lequel se substituera à trois outils – le PTZ, le Pass-foncier et la déduction des intérêts d’emprunt.

Ce PTZ + devrait permettre de réaliser une économie de 2,5 milliards d’euros en 2018. Pour les membres de la majorité, c’est donc une bonne disposition. Or comment favoriser l’accession à la propriété alors que le niveau de vie est en baisse constante, que la précarité dans le travail se généralise, que l’État renonce à la maîtrise foncière afin de limiter la spéculation qui se développe ?

À qui profitera donc ce PTZ +, si ce n’est aux banques, qui se sont déjà honteusement gavées durant la crise ? (M. Jean Desessard rit.) Qui, aujourd’hui, peut devenir propriétaire sans s’endetter sur plusieurs générations ?

Nous vous l’avons dit et nous le répétons : ce laïus n’a d’autre objet que de justifier le désengagement de l’État dans le logement social.

Non seulement ce budget est peu ambitieux, mais le Gouvernement met en œuvre tout un arsenal législatif afin de réformer les prescriptions appliquées au logement et de dévoyer cette mission.

Ainsi, derrière les annonces sur les aides à l’accession à la propriété, sur la suppression de la rétroactivité du versement des APL, sur l’application du surloyer, sur les nouveaux risques pesant sur la part du livret A revenant à la Caisse des dépôts et consignations, c’est bien la casse du logement social qui se profile !

Parce que ce projet de loi de finances ne laisse pas entrevoir ce que pourrait être un grand service public de l’habitat, nous voterons contre les crédits de cette mission pour 2011. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG.)

M. Jean Desessard. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à M. Alain Fouché.

M. Alain Fouché. Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je parlerai à la fois de finances et de justice sociale.

Je vous ferai part, tout d’abord, des inquiétudes que je nourris en raison de la taxation des offices d’HLM, sujet sur lequel je souhaite obtenir quelques précisions. Cette taxation sur fonds propres s’élèverait à 150 millions d’euros, mais quels sont, monsieur le secrétaire d’État, les critères retenus ? Prendrez-vous en compte les conventions ANRU et les fonds propres que les organismes investissent à long terme ?

Prendrez-vous également en compte les nouvelles normes imposées par le Grenelle de l’environnement aux acteurs du logement social concernant le traitement des épaves thermiques ?

Que des offices d’HLM constituant d’importantes réserves de crédits soient taxés, nous le comprenons, compte tenu de la crise du logement. En revanche, ceux qui mènent une véritable politique d’investissement ne doivent pas être pénalisés dans leurs efforts de construction, car la dynamique du mouvement HLM serait alors stoppée.

Mme Nicole Bricq. Exactement !

M. Alain Fouché. J’aborderai maintenant un second point, qui préoccupe nombre d’élus, à savoir l’article 55 de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains, dite « loi SRU ». Cet article impose aux communes de plus de 3 500 habitants intégrées dans une agglomération d’au moins 50 000 habitants d’atteindre en cinq ans le quota de 20 % de logements sociaux.

Toutefois, certains maires de différents horizons politiques s’opposent à cette règle. Ils ont peur, disent-ils, de récupérer toute la misère du monde. D’autres, pour des raisons électoralistes aberrantes, font le choix de payer l’amende. Selon ces élus, la clientèle aisée est préférée aux personnes à faibles ressources, ces dernières pouvant avoir besoin d’un plus grand soutien social et éducatif. Pourtant, elles apportent cette richesse populaire qui est l’essence de notre pacte républicain.

Nous sommes tous, sur ces travées, convaincus du besoin en logements et de la nécessité d’en construire pour tous. C’est pourquoi il faut inciter, voire obliger, les centaines de communes qui n’atteignent pas ce taux à engager un plan de rattrapage.

À cet effet, monsieur le secrétaire d’État, ne pensez-vous pas qu’il faudrait envisager un relèvement du montant de la contribution de solidarité due par les communes récalcitrantes ?

Actuellement, le montant de cette contribution reste inférieur au coût de construction de logements sociaux. Certaines équipes municipales préfèrent donc payer plutôt que de construire des logements. C’est tout à fait scandaleux. Que pouvez-vous nous dire sur ce sujet, monsieur le secrétaire d’État ? (Applaudissements sur les travées de lUMP et de lUnion centriste.)

M. Thierry Repentin, rapporteur pour avis. Très bien !

M. Jean Desessard. C’était court ! (Sourires.)

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Jarlier.

M. Pierre Jarlier. Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, malgré les efforts collectifs réalisés ces dernières années, notamment au travers du plan de cohésion sociale, auxquels ont été fortement associées toutes les collectivités, la crise du logement est de plus en plus préoccupante.

La France compte aujourd'hui 3,3 millions de mal-logés. Alors que les besoins en logements sont évalués à 950 000, l’offre de logements est en rétractation, seules 305 000 mises en chantier ayant été comptabilisées en 2009, soit un recul de 17 % par rapport à 2008.

Or le logement est un bien de première nécessité auquel chacun a droit. Selon les dernières données du comité de suivi de la mise en œuvre du droit au logement opposable, le nombre de recours est en très forte progression ces derniers mois.

Dans ce contexte, le projet de budget présenté par le Gouvernement doit résoudre une équation difficile : préserver la vitalité de la politique du logement tout en respectant l’impératif de réduction de notre déficit public.

L’État a donc été conduit à revoir ses priorités pour répondre d’abord aux attentes dans les secteurs les plus tendus. Si, sur le principe, ce ciblage est justifié, il doit aussi être pertinent et équilibré.

Dans le domaine du logement social, le Gouvernement a annoncé la réorientation des aides à la pierre vers les territoires en tension afin de mieux ajuster la production à la demande effective des ménages. Cette nouvelle priorité suscite de nombreuses inquiétudes, notamment en zone C, comme l’ont déjà dit plusieurs de mes collègues.

À titre d’exemple, les territoires les plus défavorisés, ceux dont la richesse produite est donc peu élevée, comptent une importante population à faibles revenus, laquelle vit très souvent en HLM. C’est le cas de certaines villes situées en zone rurale, qui ne sont pourtant pas considérées comme des zones tendues.

Le soutien à la construction de logements sociaux doit donc être adapté à la réalité et à la diversité des territoires.

Plutôt que de se référer à un zonage défini de façon centralisée, il serait plus pertinent de s’appuyer sur les comités régionaux de l’habitat – j’ai déjà eu l’occasion de vous le dire à plusieurs reprises, monsieur le secrétaire d’État, lors d’autres débats –, en lien avec les acteurs locaux, pour définir au plus près du territoire les besoins en logements.

Cette démarche serait d’autant plus légitime que les programmes locaux de l’habitat se généralisent peu à peu et que les informations issues du terrain sont de plus en plus précises.

Cette remarque vaut aussi pour les aides au logement en direction du parc privé, qui privilégient, là encore, la construction en zone tendue et favorisent davantage dans les autres territoires la réhabilitation et la rénovation.

Quant à la réforme des aides de l’ANAH, elle tend à renforcer le soutien à la rénovation des propriétaires occupants à faibles revenus. Nous devons encourager cet effort.

En revanche, pour les propriétaires bailleurs, la prime « réduction du loyer en zone tendue » de l’ANAH risque, là encore, d’entraîner une diminution du nombre de conventions de catégorie sociale ou très sociale dans les zones rurales non tendues. De ce fait, les propriétaires bailleurs risquent de ne plus intervenir pour réhabiliter leur parc locatif en direction du logement social, faute d’encouragement au conventionnement.

Comme cela a été évoqué lors du conseil d’administration de l’ANAH, le nouveau dispositif méritera d’être évalué rapidement afin d’être adapté, si nécessaire, à la diversité des territoires.

Le dernier point que je souhaite évoquer rapidement porte sur l’article 99 du projet de loi de finances.

Pour compenser la baisse des aides à la pierre, le présent texte prévoit un recours aux fonds de concours, à hauteur de 93 millions d’euros. Parmi ces sources de financement, 80 millions d’euros devaient provenir de la mise en place d’une contribution sur les revenus locatifs, prélevée sur les organismes d’HLM, et dont le montant total s’élevait à 340 millions d’euros.

Répondant aux inquiétudes des organismes d’HLM et des élus, la commission des finances du Sénat a, dans un premier temps, légitimement supprimé cette disposition. Parallèlement, un nouveau dispositif était proposé par l’Assemblée nationale. C’est une nouvelle version de la taxe sur les « dodus-dormants », instituée en 2009, qui a été adoptée. Mais il est utile de rappeler, pour la suite de nos débats, que cette taxe qui porte sur les réserves financières non utilisées des bailleurs sociaux, a été un échec. Pour y échapper, les organismes d’HLM ont réduit leur potentiel financier, notamment en remboursant leur dette.

La commission des finances, sur la proposition de son rapporteur général, Philippe Marini, et de son rapporteur spécial, Philippe Dallier, nous propose la réduction du prélèvement sur les organismes d’HLM de 340 millions d’euros à 150 millions d’euros. Cette somme, ramenée à un niveau acceptable,…

Mme Nicole Bricq. Non ! Ce niveau n’est pas acceptable !

M. Pierre Jarlier. … sera consacrée exclusivement au développement et à l’amélioration du parc de logements sociaux. C’est une avancée significative que je tiens à saluer.

Cette proposition fait également évoluer la définition du potentiel financier pour en écarter les subventions versées par les collectivités. Les efforts consentis par celles-ci en faveur du logement social seront donc préservés. Toutefois, il faut aussi veiller à ce que le critère retenu du potentiel financier ne pénalise pas les organismes d’HLM les plus fragiles.

M. Pierre Jarlier. En effet, certains d’entre eux ont un potentiel financier élevé alors qu’ils sont très endettés et qu’ils ont un autofinancement également très faible.

Cette remarque a suscité plusieurs sous-amendements, qui, je l’espère, seront pris en compte.

Je ne développerai pas plus avant mes observations, afin de ne pas retarder les débats. (Applaudissements sur les travées de lUnion centriste et de lUMP.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Bariza Khiari.