M. le président. La parole est à Mme Colette Mélot, sur l'article.

Mme Colette Mélot. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’article 1er de cette proposition de loi est, en quelque sorte, son socle puisqu’il crée le Haut conseil du patrimoine.

Cette création a pour objet d’assurer un cadre pérenne au transfert des monuments historiques appartenant à l’État. Elle participe également plus largement à la mise en œuvre d’un principe de précaution culturelle applicable aux règles de domanialité publique. Cela permettra d’éviter un certain nombre de dérives auxquelles nous avons pu assister par le passé.

Cette instance s’inscrit dans la logique de la commission Rémond.

De plus, nous avions déjà retenu l’idée de cette création lors des travaux de l’un des rapports d’information de notre commission, celui qui portait sur le Centre des monuments nationaux.

Aussi, la suppression de cet article était-elle totalement surprenante et injustifiée. Je me réjouis que le groupe majoritaire, sans doute influencé par l’opposition sénatoriale, se soit ravisé.

Je tiens cependant à rappeler les missions confiées au Haut conseil du patrimoine pour en souligner l’importance.

Le Haut conseil sera appelé à se prononcer sur tout projet de transfert d’un monument historique à une collectivité territoriale, mais aussi sur tout projet de cession par l’État à une personne publique ou privée. Il devra identifier, parmi les monuments historiques appartenant à l’État, ceux qui ont une vocation culturelle, et fixer, le cas échéant, les prescriptions permettant de la respecter. Il aura à se prononcer sur l’opportunité du déclassement du domaine public d’un monument appartenant à l’État en vue de sa vente, ou d’un monument transféré préalablement à une collectivité territoriale et susceptible d’être revendu.

Le Haut conseil devra émettre un avis consultatif avant tout projet de cession par l’État de l’un de ses monuments historiques, inscrit ou classé. Il sera informé de tout projet de bail emphytéotique administratif d’une durée supérieure ou égale à trente ans.

Vous conviendrez de l’intérêt que représente la création d’une telle structure au service de la préservation de notre patrimoine monumental. Aussi notre groupe s’opposera-t-il à la réécriture de l’article 1er. (Applaudissements sur les travées de lUMP. – Mme Catherine Morin-Desailly applaudit également.)

M. le président. Je suis saisi de onze amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 6, présenté par Mmes Cukierman et Gonthier-Maurin, M. Le Scouarnec et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

I. – Alinéas 2 à 8

Remplacer ces alinéas par deux alinéas ainsi rédigés : 

« Art. L. 611-2. – Il est créé un Haut conseil du patrimoine monumental chargé d’assurer l’inaliénabilité des monuments classés ou inscrits appartenant à l’État ou aux collectivités territoriales. 

« Il contrôle qu’ils ne fassent l’objet d’aucune procédure de déclassement ni d’un bail emphytéotique administratif au sens de l’article L. 2341-1 du code général de la propriété des personnes publiques.

II. – Alinéa 10 

Supprimer cet alinéa.

La parole est à Mme Cécile Cukierman.

Mme Cécile Cukierman. Nous retirons notre amendement, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 6 est retiré.

Dans ces conditions, il n’y a pas lieu de soumettre à discussion commune les dix autres amendements.

L’amendement n° 39, présenté par Mme Cartron, M. Eblé, Mme Lepage, M. Assouline et les membres du groupe socialiste, apparentés et groupe Europe Écologie Les Verts rattaché, est ainsi libellé :

I.- Alinéa 2, après la première phrase

Insérer une phrase ainsi rédigée :

La liste établie par le Haut conseil du patrimoine monumental ne comporte ni les cathédrales, leurs cloîtres et leurs palais épiscopaux attenants, ni les abbayes-mères.

II.- En conséquence, au début de la deuxième phrase du même alinéa

remplacer le mot :

Il

par les mots :

Le Haut conseil du patrimoine monumental

La parole est à Mme Françoise Cartron.

Mme Françoise Cartron. Cet amendement tend à préciser que la liste établie par le Haut conseil ne comporte « ni les cathédrales, leurs cloîtres et leurs palais épiscopaux attenants, ni les abbayes-mères ». Je vous renvoie également à la teneur de mon intervention au cours de la discussion générale : nous souhaitons que ces exclusions soient explicitement mentionnées.

M. le président. L’amendement n° 38, présenté par Mme Cartron, M. Eblé, Mme Lepage, M. Assouline et les membres du groupe Socialiste, Apparentés et groupe Europe Écologie Les Verts rattaché, est ainsi libellé :

I.- Alinéa 2, après la première phrase

Insérer une phrase ainsi rédigée :

La liste est établie par décret au plus tard un an après l’entrée en vigueur de la loi n ° … du … relative au patrimoine monumental et ouvre droit au transfert des monuments figurant sur la liste pour une durée d’un an à compter de sa publication.

II.- En conséquence, au début de la deuxième phrase du même alinéa

remplacer le mot :

Il

par les mots :

Le Haut conseil du patrimoine monumental

La parole est à M. Vincent Eblé.

M. Vincent Eblé. Cet amendement tend à introduire la notion de durée. Lors de la précédente vague de transferts, le délai avait été fixé à un an. Nous proposons donc de retenir une durée identique.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces deux amendements ?

Mme Marie-Christine Blandin, rapporteure. La commission a émis un avis favorable sur l’amendement n° 39, car le principe de précaution impose d’être exigeant et précis.

L’amendement n° 38 recueille également un avis favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Frédéric Mitterrand, ministre. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces deux amendements.

En ce qui concerne l’amendement n° 39, il nous semble qu’indiquer par avance les catégories de monuments non transférables revient à définir en creux ceux dont le transfert bénéficierait d’un a priori favorable. (M. David Assouline fait un signe de dénégation.) En d’autres termes, cette démarche reviendrait à définir des monuments historiques « de première classe » et des monuments historiques « de deuxième classe ». Je ne crois absolument pas qu’une telle hiérarchie soit nécessaire, il me semble même qu’elle est fondamentalement dangereuse : notre patrimoine forme un tout, riche de sa diversité.

S’agissant de l’amendement n° 38, je rappelle que la liste des monuments transférables sera établie chaque année, au fil des travaux du Haut conseil, car ce dernier ne peut procéder en un an à l’instruction des dossiers des 1 700 monuments protégés. L’évolution des structures administratives présentes sur le territoire est donc l’un des éléments essentiels susceptible de peser sur le périmètre des transferts envisageables dans les années à venir. La contrainte qu’imposerait l’adoption de cet amendement, en instaurant un délai d’un an, ne pourrait donc être respectée, sauf à légiférer sur le seul parc actuel des monuments protégés.

M. le président. La parole est à M. Jacques Legendre, pour explication de vote sur l’amendement n° 39.

M. Jacques Legendre. Mes chers collègues, il arrive parfois que des miracles se produisent dans cet hémicycle en fin d’après-midi… (Exclamations sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC.) Sur le précédent « dérouleur » figurait un amendement de notre collègue Françoise Cartron tendant à supprimer le Haut conseil du patrimoine. Cet amendement a disparu ; il a été remplacé par deux amendements, l’un présenté par Mme Cukierman…

Mme Cécile Cukierman. Nous l’avons retiré !

M. Jacques Legendre. … et l’autre par le groupe socialiste-EELV, qui reconnaissent, au contraire, l’existence d’un Haut conseil du patrimoine.

M. Jean-Jacques Mirassou. Pas dans les mêmes conditions !

M. Jacques Legendre. Vous me permettrez de saluer cette évolution positive. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC.)

J’ajouterai qu’il faut parfois se méfier de ce qui se cache derrière les mots. En effet, notre collègue Cécile Cukierman a retiré son amendement, mais la définition des missions du Haut conseil du patrimoine qui aurait résulté de son adoption me paraît curieuse (Mme Cécile Cukierman s’exclame.) et révèle quelles peuvent être les évolutions successives de la pensée (Exclamations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste-EELV.) : ce dernier était chargé non pas d’examiner quels pouvaient être les monuments susceptibles d’être confiés à une collectivité territoriale, mais de vérifier qu’en aucun on ne pourrait confier à une collectivité territoriale un monument historique appartenant actuellement à l’État. On peut alors se demander à quoi aurait servi ce Haut conseil !

Enfin, je me permets de signaler à nos collègues – mais peut-être M. le ministre pourra-t-il nous éclairer sur ce point – que, lorsque l’on indique que les cathédrales ne peuvent pas faire l’objet d’un transfert, une loi à laquelle la République est très attachée précise déjà que les cathédrales font effectivement partie du patrimoine de l’État. Je tenais à rappeler ce point pour montrer combien ces évolutions successives sont parfois bizarres.

Je crois qu’il vaut mieux affirmer clairement que le Haut conseil du patrimoine encadre les conditions dans lesquelles des monuments historiques peuvent être dévolus à des collectivités territoriales : c’est clair et c’est utile !

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Frédéric Mitterrand, ministre. Je suis très conscient de la qualité absolument remarquable des travaux qui ont conduit à l’élaboration de cette proposition de loi. J’exprime donc mon admiration pour le travail accompli par le président Legendre et Mme la sénatrice Françoise Férat.

Par ailleurs, la qualité du débat tel qu’il s’instaure et l’attention que la majorité sénatoriale porte à ces questions méritent également tout notre respect et toute notre estime.

Au-delà du chagrin légitime que certains peuvent ressentir en raison des aléas de la vie politique qui les privent en quelque sorte des résultats de leur travail, puisque celui-ci se trouve soumis à un nouvel examen et à de nouvelles critiques, je crois que nous pouvons nous réjouir de l’intérêt porté par la nouvelle majorité sénatoriale à ce texte et que nous pouvons prendre acte des décisions tendant à simplifier aujourd’hui le déroulement de la discussion.

Je vous propose donc de tourner la page de l’amertume et du chagrin…

Mme Nathalie Goulet. Très bien !

M. Frédéric Mitterrand, ministre. … et d’ouvrir davantage le débat ; cela n’enlève rien au profond respect que j’éprouve, en tant que ministre de la culture et de la communication, pour les personnalités éminentes qui ont travaillé précédemment sur ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV. – Mmes Nathalie Goulet et Françoise Férat ainsi que M. Robert Tropeano applaudissent également.)

M. le président. La parole est à M. Claude Domeizel, pour explication de vote.

M. Claude Domeizel. J’aimerais également clore définitivement la polémique : il y avait précédemment une majorité et une opposition, mais une majorité différente est sortie des élections.

Cette nouvelle majorité a tout à fait le droit de déposer à titre préventif des amendements de suppression et des amendements de repli : telle a toujours été notre position, je tiens à le dire au président Legendre. Nous avons finalement retiré nos amendements de suppression, mais sans que cela traduise en quoi que ce soit une évolution de notre part : au contraire, nous avons pris cette décision pour apporter notre contribution à la rédaction d’un texte aussi important.

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure.

Mme Marie-Christine Blandin, rapporteure. Afin de maintenir l’esprit constructif qui règne dans cet hémicycle, je suggère, dans un souci de lisibilité, de rectifier l’amendement n° 38 afin que l’amendement n° 39 puisse être retiré, en ajoutant après les mots « La liste est établie » les mots «, après avis du Haut conseil du patrimoine monumental, ».

M. le président. Madame Cartron, acceptez-vous de rectifier votre amendement dans le sens souhaité par Mme la rapporteure ?

Mme Françoise Cartron. Oui, monsieur le président, je rectifie l’amendement n° 38 et je retire l’amendement n° 39.

M. le président. Je suis donc saisi d’un amendement n° 38 rectifié, présenté par Mme Cartron, M. Eblé, Mme Lepage, M. Assouline et les membres du groupe socialiste, apparentés et groupe Europe Écologie Les Verts rattaché, et qui est ainsi libellé :

I.- Alinéa 2, après la première phrase

Insérer une phrase ainsi rédigée :

La liste est établie, après avis du Haut conseil du patrimoine monumental, par décret au plus tard un an après l’entrée en vigueur de la loi n° … du … relative au patrimoine monumental et ouvre droit au transfert des monuments figurant sur la liste pour une durée d’un an à compter de sa publication.

II.- En conséquence, au début de la deuxième phrase du même alinéa

remplacer le mot :

Il

par les mots :

Le Haut conseil du patrimoine monumental

Dans ces conditions, l’amendement n° 39 est retiré.

Je mets aux voix l’amendement n° 38 rectifié.

(L’amendement est adopté.)

M. le président. L’amendement n° 2 rectifié ter, présenté par Mme Férat, M. Legendre, Mme Morin-Desailly, M. Détraigne, Mme N. Goulet, M. Maurey, Mme Goy-Chavent, MM. Namy, Merceron, Tandonnet, Vanlerenberghe et Delahaye et Mme Létard, est ainsi libellé :

Alinéa 2, troisième phrase

Rédiger ainsi cette phrase :

Le caractère transférable est apprécié au regard de critères définis par le Haut conseil du patrimoine monumental, qui incluent les critères retenus pour établir la liste annexée au décret n° 2005–836 du 20 juillet 2005, relatif aux conditions de transfert de la propriété de monuments historiques aux collectivités territoriales et pris en application de l’article 97 de la loi n° 2004–809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales.

Cet amendement a été défendu.

Quel est l’avis de la commission ?

Mme Marie-Christine Blandin, rapporteure. La commission a émis un avis défavorable sur cet amendement, car il nous paraît assez dangereux : dans la rédaction qui résulterait de son adoption, l’article 1er ne garantirait aucunement un cadre susceptible de protéger les monuments historiques dont il convient de rappeler l’inaliénabilité et l’imprescriptibilité.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Frédéric Mitterrand, ministre. Le Gouvernement émet un avis favorable, car la référence aux critères de la commission Rémond lui paraît tout à fait opportune, ne serait-ce que pour ne pas remettre en question la liste établie sur la base de ses travaux en 2003–2004.

En revanche, il doit être bien clair que ces critères seront complétés par d’autres éléments d’appréciation qui se dégageront au fil des travaux du Haut conseil, en fonction des monuments très divers qu’il aura à examiner ainsi que des contraintes spécifiques que pose notamment leur conservation.

Il est important que chaque cas soit examiné de façon approfondie, sur un plan tant historique que technique, avant de déterminer si le monument peut être transféré. Cette démarche me semble tout à fait logique et conforme à l’esprit de protection que nous souhaitons tous voir prévaloir.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 2 rectifié ter.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 7, présenté par Mmes Cukierman et Gonthier-Maurin, M. Le Scouarnec et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Alinéa 2, quatrième phrase

Rédiger ainsi cette phrase :

Il se prononce sur le caractère transférable de tous les monuments concernés par une demande de transfert ou de cession.

La parole est à Mme Cécile Cukierman.

Mme Cécile Cukierman. Il s’agit de renforcer le rôle du Haut conseil du patrimoine en prévoyant sa consultation systématique.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Marie-Christine Blandin, rapporteure. Favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Frédéric Mitterrand, ministre. Je souhaite bien du plaisir aux membres du Haut conseil lorsqu’ils se trouveront confrontés à l’engorgement terrifiant qui s’annonce !

Il est important de garantir l’indépendance du Haut conseil en instaurant un double mode de saisine pour l’examen des monuments, auto-saisine ou saisine par le ministre de la culture, sans parler de la saisine obligatoire en cas de projet de vente.

Il s’agit également de lui permettre d’organiser ses travaux ponctuellement selon les besoins liés aux restructurations administratives ou, de façon plus méthodique, au long cours, pour l’établissement de la liste qui résultera de l’examen de l’ensemble du patrimoine monumental. Cet amendement lui retire cette faculté.

Par ailleurs, l’Assemblée nationale a précisé les textes votés en janvier pour soumettre au Haut conseil tout projet de cession, ce qui satisfait, me semble-t-il, votre préoccupation.

Le Gouvernement est donc défavorable à l’adoption d’un tel amendement, qui compliquerait considérablement des dispositions qui sont déjà assez lourdes à manier.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 7.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L'amendement n° 8, présenté par Mmes Cukierman et Gonthier-Maurin, M. Le Scouarnec et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Alinéa 2, dernière phrase

1° Remplacer les mots : 

sont informés de tout projet de bail emphytéotique administratif d’une durée supérieure ou égale à trente ans 

par les mots : 

doivent également se prononcer sur tout projet de bail emphytéotique administratif 

2° En conséquence, supprimer les mots : 

; ils peuvent rendre un avis lorsqu’un tiers au moins d’entre eux le demande

La parole est à Mme Cécile Cukierman.

Mme Cécile Cukierman. Il s’agit non pas d’engorger le Haut conseil, mais de lui permettre de jouer véritablement son rôle.

Nous souhaitons, comme je l’ai dit dans la discussion générale, que la question du bail emphytéotique administratif puisse être soumise au Haut conseil du patrimoine.

M. le président. L'amendement n° 41, présenté par Mme Cartron, M. Eblé, Mme Lepage, M. Assouline et les membres du groupe Socialiste, Apparentés et groupe Europe Écologie Les Verts rattaché, est ainsi libellé :

Alinéa 2, dernière phrase

I. – Remplacer les mots :

sont informés de

Par les mots :

se prononcent sur

II. – Supprimer les mots :

; ils peuvent rendre un avis lorsqu’un tiers au moins d’entre eux le demande

La parole est à Mme Françoise Cartron.

Mme Françoise Cartron. Je le retire, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 41 est retiré.

Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 8 ?

Mme Marie-Christine Blandin, rapporteure. Avis favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Frédéric Mitterrand, ministre. L’information obligatoire du Haut conseil lui permet de se saisir des baux emphytéotiques qui pourraient être consentis sur des biens particulièrement délicats.

Les amendements qui portent sur ce sujet visent tous à faciliter la saisine du Haut conseil et à réduire la durée des baux qui lui seraient soumis, au point de lui présenter des baux qui n’ont plus rien d’emphytéotiques. Cela créera un encombrement – j’y reviens – qui le gênera dans ses autres missions. Imposer un examen systématique, c’est dissuader de prendre des mesures de protection ultérieures pour des biens actuellement non protégés.

Enfin, il convient de rappeler le caractère très récent de la disposition législative autorisant l’État et ses établissements publics à conclure des baux emphytéotiques, au contraire de ce qui était possible pour les collectivités territoriales.

J’ajoute que le principe du bail emphytéotique, et c’est en cela qu’il est préférable à une vente, est précisément de permettre d’encadrer les conditions d’utilisation du monument et de dénoncer le bail en cas de manquement.

Au titre de la législation sur les monuments historiques, le ministère de la culture est consulté sur les utilisations possibles des monuments en cas de bail de longue durée. Il est à même de préciser les conditions de conservation et les précautions d’utilisation à respecter.

Telles sont les raisons pour lesquelles cet amendement ne me paraît pas utile : l’avis est défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 8.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 43 rectifié, présenté par Mme Cartron, M. Eblé, Mme Lepage, M. Assouline et les membres du groupe Socialiste, Apparentés et groupe Europe Écologie Les Verts rattaché, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Les projets de baux emphytéotiques ne peuvent porter ni sur les cathédrales, leurs cloîtres et leurs palais épiscopaux attenants, ni sur les abbayes-mères, ni sur les monuments d’intérêt national ou fortement symboliques au regard de la Nation.

La parole est à Mme Françoise Cartron.

Mme Françoise Cartron. Cet amendement de coordination avec un amendement précédent se justifie par son texte même.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Marie-Christine Blandin, rapporteure. Avis favorable, conformément à l’amendement précédent qui stipulait les mêmes types de monuments.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Frédéric Mitterrand, ministre. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement.

Le sujet, les cathédrales et leurs annexes, ne me semble pas pertinent, madame Cartron, compte tenu de leur régime spécifique issu de la loi concernant la séparation des Églises et de l’État de 1905. Si la loi de 1907 prévoit expressément une clause, c’est bien celle d’affectation obligatoire au culte pour ces édifices. Ils resteront donc, sauf dans les cas de désaffection cultuelle, à la disposition des fidèles et des ministres du culte pour la pratique de leur religion.

Il n’y a pas de raison de se priver, pour les autres bâtiments religieux qui ne sont pas affectés à l’exercice du culte, d’un mode de gestion qui permet de les conserver dans le patrimoine de l’État.

M. le président. La parole est à Mme Françoise Férat, pour explication de vote.

Mme Françoise Férat. J’ai l’intention de voter cet amendement.

En effet, si le cas des cathédrales a été évoqué, il ne faut pas oublier celui des abbayes. Je pense notamment à l’abbaye de Fontevraud, mais des cas similaires pourraient se présenter.

M. le président. La parole est à M. Jacques Legendre, pour explication de vote.

M. Jacques Legendre. Cet amendement ne paraît effectivement pas utile s’agissant des cathédrales, qui ne peuvent pas être cédées, conformément à la loi concernant la séparation des Églises et de l’État.

S'agissant des abbayes, l’amendement évoque spécifiquement les abbayes-mères. À ma connaissance, Cîteaux et Clairvaux sont des abbayes-mères, mais pas Fontevraud. Y en a-t-il d’autres ?

Avant de déterminer ma position, j’aimerais que M. le ministre nous apporte quelques précisions sur ce point.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Frédéric Mitterrand, ministre. Monsieur Legendre, je vous remercie de me faire passer un grand oral. (Rires.) Je pourrais vous dresser la liste complète des abbayes-mères, pères, oncles, tantes, enfants, orphelines, cousines, adoptées, recueillies, pacsées, mariées… bref, vous présenter une typologie de toutes les sortes d’abbayes, mais je ne le ferai pas ce soir. (Nouveaux rires.)

Je conçois que l’on puisse entrer dans une abbaye pour étudier cette question durant les quelques années qui viennent, mais je ne crois pas nécessaire, malheureusement, monsieur Legendre, d’aller plus loin ce soir dans la définition et la typologie des abbayes qui pourraient concerner la présente proposition de loi. Veuillez m’excuser de vous faire ainsi défaut.

M. François Rebsamen. C’est bien dit !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 43 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 13, présenté par Mmes Cukierman et Gonthier-Maurin, M. Le Scouarnec et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Après l'alinéa 2

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Le Haut conseil du patrimoine monumental est guidé dans ses décisions par le principe d’inaliénabilité des monuments inscrits ou classés. La cession et le bail emphytéotique ne sont consentis qu’à titre exceptionnel et ne peuvent en aucun cas constituer un mode de gestion global et pérenne du patrimoine monumental de l’État comme des collectivités territoriales.

La parole est à Mme Cécile Cukierman.

Mme Cécile Cukierman. Cet amendement vise à faire du bail emphytéotique une exception, un mode de gestion dérogatoire. Cela ira dans le sens de l’intérêt général et permettra d’éviter un engorgement trop important du Haut conseil. (Sourires.)

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Marie-Christine Blandin, rapporteure. Avis favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Frédéric Mitterrand, ministre. Je suis désolé d’avoir agacé Mme la sénatrice Cukierman en évoquant l’engorgement du Haut conseil…

L’avis du Gouvernement est défavorable. Il ne s’agit pas de faire de la cession et du bail emphytéotique le mode de gestion privilégié du patrimoine monumental de l’État ; il s’agit d’avoir à disposition les outils nécessaires à une gestion au plus près des bâtiments et de leur conservation, en lien avec les besoins de l’État et de ceux que les collectivités territoriales pourraient exprimer en souhaitant le transfert de tel ou tel monument.

Nous ne créons pas un système de priorité pour le bail emphytéotique : nous disons simplement que c’est une méthode extrêmement commode et qui est utilisée quand cela est possible, c’est tout !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 13.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 45, présenté par Mme Cartron, M. Eblé, Mme Lepage, M. Assouline et les membres du groupe Socialiste, Apparentés et groupe Europe Écologie Les Verts rattaché, est ainsi libellé :

Alinéa 6

Rédiger ainsi cet alinéa :

« 3° Se prononce sur l’opportunité de déclassement du domaine public de tout monument historique appartenant à l’État ;

La parole est à M. David Assouline.

M. David Assouline. Son objet suffit à défendre cet amendement. J’indique dès à présent qu’il en ira de même en ce qui concerne l’amendement n° 51.