M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. Vraiment ? 120 000 logements, c’est quoi ?

M. Yannick Vaugrenard. Au vu de ce constat particulièrement alarmant et des conséquences humaines insupportables qu’il entraîne, je souhaite, tout comme les associations venant en aide aux plus démunis, que soit mis en place un plan structurel, hors saison, qui apporte des réponses concrètes pour les personnes sans logement ou mal logées : la création immédiate de places d’hébergement pérennes et dignes, mais également la construction de logements accessibles aux revenus les plus modestes.

La situation est d’autant plus préoccupante que les sans-abri ne sont plus ce qu’ils étaient traditionnellement. Elle est loin de la réalité, désormais, l’image du sans-abri seul, d’une quarantaine ou d’une cinquantaine d’années. Selon le bilan d’activité du SAMU social de Paris, le nombre de familles à la rue a explosé de plus de 400 % en dix ans et dépasse aujourd’hui celui des solitaires traditionnels.

La crise aidant, les populations les plus fragiles de notre pays ne cessent d’augmenter : depuis 2002 – puisqu’il a été fait référence à cette date –, le nombre des personnes pauvres s’est accru de 20 %.

Pourtant, le 20 juillet dernier, vous déclariez, monsieur le secrétaire d'État : « Il est hors de question qu’une seule famille se retrouve à la rue. Un enfant ne dort pas dehors, en France, en 2011 ». Voilà au moins un point sur lequel nous ne serons pas en désaccord !

Toutefois le travail à accomplir pour éviter cette situation est considérable, notamment concernant les 18-25 ans, qui sont aujourd’hui les plus touchés par la pauvreté.

Plus d’un tiers de ces jeunes – 36,1 % – vit dans des « substituts de logement » – hôtel, centre d’hébergement, abri de fortune et même, parfois, caravane. Peu d’entre eux accèdent à des logements sociaux et l’hébergement d’urgence concerne dans 35 % des cas des personnes de moins de 25 ans, ce qui est dramatique.

La situation de notre jeunesse est donc un enjeu majeur pour notre société. Seule la mise en œuvre sans délai d’un véritable plan Marshall pour le logement des jeunes permettrait d’endiguer la situation actuelle.

À ceux qui nous opposent la crise et la nécessité de diminuer les dépenses budgétaires pour cause de déficit, je répondrai très simplement que les plus pauvres de notre société, les plus marginalisés de notre système, les oubliés du logement ne sont en rien responsables des dévoiements de la finance internationale ou des spéculateurs de l’économie virtuelle. Faire de la politique, c’est faire des choix. Aussi parlerai-je des exonérations fiscales concernant le logement dans ce budget 2012, puisqu’elles coûtent 13,5 milliards d’euros à l’État, un montant en hausse de près de 4 %.

Elles sont multiples et concernent, en particulier, le crédit d’impôt sur les intérêts d’emprunt, le prêt à taux zéro plus et les aides à l’investissement locatif privé. Ainsi, le prêt à taux zéro coûte 1,3 milliard d’euros et n’a même plus de vocation sociale puisqu’il a été ouvert, l’année dernière, à tous les primo-accédants sans conditions de ressources.

Le dispositif Scellier, qui a déjà été évoqué, coûtera 650 millions d’euros en 2012, et même s’il est appelé à disparaître en 2013, il pèsera sur les finances de l’État pendant neuf ans après son arrêt, soit jusqu’en 2022.

Ce n’est pas en diminuant nos recettes fiscales et en privilégiant ceux qui ont plus que l’on se donnera les moyens supplémentaires pour aider la politique du logement social dans notre pays.

Depuis dix ans, la politique fiscale du Gouvernement a profité essentiellement aux 10 % les plus riches et l’absence de financement en matière de logement est due aux mauvais choix politiques de la majorité actuelle.

Vous nous présentez donc un budget du logement de 7,7 milliards d’euros, dont la seule augmentation est due aux aides à la personne, ce qui est loin d’être une bonne nouvelle, puisqu’elles révèlent, en fait, la baisse des revenus des ménages et la montée en puissance de la précarité.

Ce budget est en décalage avec la réalité. Selon un sondage récent réalisé en octobre dernier, le logement arrive en troisième position dans les préoccupations des Français, derrière le travail et la santé. À la question : « Considérez-vous que la charge représentée par votre logement vous conduit à revoir à la baisse certains autres budgets ? », les Français ont répondu « oui » à 69 %. Cela doit nous donner la mesure de notre responsabilité.

Responsabilité sociale, responsabilité sociétale, lorsque l’on sait que l’abstention aux dernières élections, dans les quartiers difficiles – cela a été rappelé par Claude Dilain dernièrement – peut atteindre les 70 %. C’est donc aussi un enjeu pour notre démocratie.

Offrir un logement décent à tous doit être une obligation pour notre société. Nous avons besoin d’une solidarité réelle, organisée, planifiée.

Le combat pour le logement est indissociable de la lutte pour la dignité. Ce projet de loi de finances ne prend pas le chemin de la dignité partagée. De ce fait, le logement aujourd’hui est une tâche noire de notre démocratie. C’est pourquoi il est indispensable de revoir ce budget pour 2012.

Dans une République comme la nôtre, considérons que celles et ceux qui attendent un logement pour eux-mêmes ou pour les leurs sont non pas les assistés de demain, mais les ayants droit d’aujourd’hui : les ayants droit d’une République digne de ce nom, les ayants droit d’une indispensable solidarité humaine qui doit s’imposer à tous ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV.)

M. le président. La parole est à M. François Calvet. (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

M. François Calvet. Monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, en période de crise, vous revalorisez les aides personnelles au logement, au bénéfice de 6 millions de ménages, et je me réjouis de cette proposition.

Il faut également saluer votre programme très ambitieux de construction de 120 000 logements sociaux supplémentaires en 2012, car le logement de tous doit rester une priorité.

C’est la première fois qu’un Gouvernement mobilise autant de moyens dans la durée en faveur du logement social.

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. Merci !

M. François Calvet. Je demeure toutefois inquiet pour le respect de cet objectif. L’augmentation de 5,5 % à 7 % de la TVA sur les programmes de construction de logements sociaux, qui ont déjà reçu les agréments nécessaires, retardera considérablement leur mise en chantier. Cette hausse de TVA va nécessiter le refinancement de ces programmes, qui prendront des mois de retard.

Je reviens sur les nouvelles mesures prises par le Gouvernement en matière d’aide fiscale au logement.

Je rappellerai, tout d’abord, les remarques formulées par le Fonds monétaire international, le FMI, dans son rapport de juillet 2011 concernant la France. Si cette organisation se montre globalement rassurante concernant le marché immobilier français, elle évoque deux faiblesses structurelles : d’une part, l’insuffisance de l’offre de logements, d’autre part, l’existence de politiques publiques d’aide à l’accession à la propriété dont l’effet pervers peut être d’accroître la demande. Ces deux facteurs conjugués peuvent conduire à la formation d’une bulle immobilière aux conséquences néfastes pour toute notre économie.

C’est ainsi que le FMI rappelle que les achats immobiliers ont marqué un rebond en 2010 et au début de 2011. Les prix des logements ont donc augmenté de 8,5 %, retrouvant leur niveau maximum d’avant la crise.

D’après les estimations des services du FMI, à la fin de 2010, « les prix immobiliers étaient surévalués de 10 % à 25 %, et un atterrissage en douceur serait souhaitable ».

Si les risques liés au regain d’exubérance du marché immobilier français sont atténués par la prudence des banques dans l’octroi des prêts et par un endettement des ménages modéré, le FMI souligne la nécessité de limiter les risques pour le secteur financier. Aussi, afin d’éviter la persistance ou l’accroissement d’une bulle, il recommande, d’une part, de réévaluer les politiques publiques d’aide à l’accession à la propriété, en raison de la pression qu’elles exercent sur des prix déjà élevés, et, d’autre part, de lever les obstacles réglementaires et les autres freins à la construction de nouveaux logements.

Dans le contexte de ce rapport, c’est avec raison que le Gouvernement s’interroge sur l’impact des mesures Scellier et leurs conséquences éventuelles sur l’inflation qui touche depuis plusieurs années le prix des logements, en particulier dans les zones tendues.

Pour bénéficier d’une niche fiscale, les Français sont prêts à acheter des logements leur assurant une déduction d’impôt sans souvent étudier le prix au mètre carré sur le marché, sans penser au prix de revente et sans s’assurer de l’existence d’une demande locative.

Or les promoteurs de ces produits Scellier ont tous intégré dans leur prix de vente la réduction fiscale, contribuant ainsi au renchérissement du prix au mètre carré.

Encourager les bulles immobilières peut avoir des effets dévastateurs, comme nous le voyons aujourd’hui en Espagne. La prospérité de ce pays s’est beaucoup appuyée sur le boom de l’immobilier avec des prêts à taux variables à cinquante ans, interdisant tout aménagement de la dette.

M. Daniel Raoul, président de la commission de l’économie. Oui, mais ils sont dopés ! (Sourires.)

M. François Calvet. L’implosion de l’économie du bâtiment met aujourd’hui l’Espagne dans une situation très difficile et a déjà jeté plus de 200 000 familles à la rue.

Je comprends aussi la remise en cause de la loi Bouvard-Censi sur les résidences de tourisme, même si cette économie de la résidence de tourisme existe dans les départements attractifs comme celui dont je suis l’élu.

Je comprends moins la remise en cause du prêt à taux zéro, désormais recentré sur le logement neuf et l’ancien éco-performant. En effet, le nombre de logements neufs construits en France demeure très insuffisant et l’accession à la propriété dépend souvent de prêts aidés.

Les jeunes ne peuvent plus aujourd’hui acheter un logement avec le seul fruit de leur salaire, et la puissance publique a une vraie légitimité à les aider.

Nos voisins allemands, qui deviennent désormais une référence en matière d’orthodoxie budgétaire, se gardent bien d’encourager les niches fiscales. En revanche, ils proposent des aides à l’accession à la propriété, telles que des prêts bonifiés très intéressants.

Les dispositifs d’incitation à la construction et à l’accession à la propriété ont toujours existé, et il est évident que de nouvelles mesures devront être prises. Néanmoins, on pourrait utilement repenser à une rationalisation des dispositifs prévus dans les quatre programmes proposés dans le projet de loi de finances.

Chargé de l’habitat au sein de la communauté d’agglomération de Perpignan Méditerranée, je peux témoigner que la complexité des règles, l’empilement des lois, des schémas et des contraintes, la segmentation des aides publiques et du marché de l’immobilier, ne facilitent pas le dynamisme de la construction dont nous avons pourtant cruellement besoin. J’espère que nous saurons faire de cette période de remise en cause une occasion de redynamiser la politique du logement.

Sous le bénéfice de ces observations, c’est sans réserve que je voterai ce budget. (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. Merci !

M. le président. La parole est à M. le ministre. (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

M. Maurice Leroy, ministre de la ville. Monsieur le président, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, j’aimerais, tout d’abord, rappeler un constat que tous les Français partagent : notre pays et l’Europe traversent des difficultés économiques et financières. Dans ces conditions, il est vrai que notre équation budgétaire n’est pas simple ! Je me dois, et nous nous devons collectivement, de concilier respect des engagements pris, responsabilité et maîtrise des dépenses publiques.

Sur une mer agitée, il faut tenir ferme le gouvernail pour garder le cap. C’est précisément ce que nous faisons en gardant le cap sur nos objectifs. Les navigateurs le savent bien, « le pessimiste se plaint du vent, l’optimiste espère qu’il change et le réaliste ajuste les voiles ». (Marques d’admiration sur les travées de lUMP.)

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. Jolie formule !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Parfois, ils font du surplace !

M. Maurice Leroy, ministre. Pour ma part, je suis réaliste, et ce budget l’est également.

L’effort supplémentaire demandé à la Nation par le Gouvernement concerne tous les ministères. La maîtrise des dépenses publiques n’est pas uniquement une responsabilité politique. Elle est une exigence morale, à l’endroit de chacun de nos concitoyens, comme des générations futures.

M. Alain Néri. L’effort doit être partagé !

M. Maurice Leroy, ministre. La contribution de la politique de la ville à la maîtrise des dépenses publiques s’élève à 9 millions d’euros, prélevés sur le programme 147.

Ce faisant, nous préservons la politique de la ville, en ciblant davantage l’exercice de ses missions, et je remercie Jean Germain, Claude Dilain et Luc Carvounas de l’avoir reconnu dans leurs rapports écrits.

Le contexte actuel nous oblige à davantage d’efficacité.

Ma méthode est simple : rompre avec la politique de saupoudrage qui a tant marqué l’intervention publique dans nos quartiers populaires, pour renouer avec la cohérence territoriale.

L’ONZUS, l’Observatoire national des zones urbaines sensibles, l’a souligné dans son rapport 2011 – et les rapporteurs l’ont évoqué tant dans leurs rapports respectifs que lors de leurs interventions liminaires –, ce sont les habitants des quartiers des zones urbaines sensibles qui sont frappés de plein fouet par la hausse du chômage, dont le taux est de 20 %.

C’est la raison pour laquelle nous avons décidé, Xavier Bertrand et moi-même, de renforcer la lutte contre le chômage dans ces quartiers, en préservant d’abord les dispositifs pour l’emploi, qui sont financés dans ce budget à hauteur de 45 millions d’euros.

M. Alain Néri. Et les 34 000 chômeurs de plus en octobre !

M. Maurice Leroy, ministre. Je suis très heureux de vous retrouver dans cette enceinte, monsieur Néri ! Je constate que vous êtes aussi en forme qu’à l'Assemblée nationale ! (Sourires.)

M. Alain Néri. Il n’y a pas de raison qu’il en soit autrement !

M. François Calvet. Il ne l’est pas autant que le ministre ! (Nouveaux sourires.)

M. Maurice Leroy, ministre. Pour lutter contre le chômage, 15 000 contrats d’autonomie supplémentaires sont prévus en 2011 et 2012. Les services publics de l’emploi seront également mobilisés pour favoriser les contrats aidés et l’apprentissage.

De même, nous renforçons le soutien à la création d’entreprise, en développant le microcrédit et les Cordées de l’entreprenariat !

Par ailleurs, j’ai décidé de prolonger de trois ans le dispositif des exonérations fiscales et sociales accordées aux employeurs dans les zones franches urbaines, les ZFU, que je considère comme indispensable en raison de ses résultats. Tel est d’ailleurs l’objet de l’article 64 du projet de loi de finances pour 2012.

À cet égard, je remercie Philippe Dallier de son intervention. Ainsi que le soulignent Jean Germain et Claude Dilain dans leurs rapports respectifs, ces ZFU totalisaient, en 2010, 307 000 salariés et 61 558 établissements.

De même, j’ai souhaité que les entreprises qui s’installent dans ces zones embauchent au moins un salarié sur deux issu de ces quartiers.

Je veux le dire très clairement, ce dispositif a été créé dans le cadre du Pacte de relance pour la ville, qui prévoyait précisément des mesures en faveur de ces quartiers. Tous les maires, de toutes les sensibilités politiques, qui ont une zone franche urbaine dans leur ville ont demandé – et le rapport d’Éric Raoult en fait état –, la prorogation de ces mesures. Je me suis battu pour qu’il en soit ainsi. Soyons clairs, tous ont dénoncé les effets d’aubaine, les effets « boîte aux lettres » de ce dispositif. Néanmoins, il ne faut pas se plaindre que le Gouvernement propose de le renforcer.

M. Claude Dilain, rapporteur pour avis. Tout à fait !

M. Maurice Leroy, ministre. Je l’ai musclé, en prévoyant qu’un salarié sur deux soit issu de ces quartiers sensibles. Je peux comprendre les divergences de points de vue en la matière, mais il me semble que ce dispositif devrait recueillir l’unanimité des membres de la représentation nationale.

Concernant l’éducation, l’école est le creuset de la République et le lieu par excellence de la mixité sociale. Aussi doit-elle offrir partout les mêmes chances de réussite.

À cet égard, j’ai obtenu la pérennisation du programme de réussite éducative, qui concernera 135 000 enfants pour les années 2011 et 2012, et son expérimentation sur les 16-18 ans, ainsi que le maintien des Cordées de la réussite.

Là encore, tous les élus que j’ai rencontrés au cours de mes nombreux déplacements, toutes sensibilités politiques confondues, m’ont demandé de pérenniser ces deux dispositifs. C’est ce que fait le Gouvernement avec les crédits du programme 147.

À la rentrée 2011, ce sont trente académies qui ont offert 10 300 places en internats d’excellence !

Il nous faut cibler davantage les moyens de droit commun. J’ai beaucoup travaillé avec Claude Dilain lorsqu’il présidait l’Association des maires ville et banlieue de France et, même s’il ne l’a pas évoqué à la tribune, faute de temps – mais il en a fait état dans son rapport écrit, que j’ai lu intégralement –, je puis vous dire, sincèrement, que nous nous accordons sur la nécessité de retrouver le droit commun. Nous n’avons pas de divergence de vues sur ce sujet.

M. Claude Dilain, rapporteur pour avis. Je confirme vos propos !

M. Maurice Leroy, ministre. C’est pourquoi j’ai volontairement mis en œuvre des expérimentations sur les contrats urbains de cohésion sociale, les CUCS, que Jean Germain a saluées dans son rapport écrit, ce dont je le remercie. Je le dis très clairement ici, on n’expérimente pas assez en France !

Cette expérimentation est menée sur les 33 sites les plus représentatifs ; nous avons pris cette décision en liaison avec l’Agence nationale pour la rénovation urbaine. Cela concerne l’emploi et le développement économique, l’éducation et la sécurité et la prévention de la délinquance.

Cette expérimentation va nous permettre collectivement de préparer la future génération des contrats urbains de cohésion sociale annoncée par le Premier ministre et actée par le Comité interministériel des villes du 18 février 2011.

Mesdames, messieurs les sénateurs, cette expérimentation donnera un nouveau souffle à la politique de la ville. Je n’ai pas choisi par hasard la date de 2014 : elle correspond aux élections municipales. C’est respecter la démocratie locale que de prévoir cette expérimentation jusqu’en 2014 !

Les maires et les élus locaux trouveront là de nouveaux moyens d’action et de nouveaux outils de nature à réduire les écarts territoriaux pour ce qui concerne l’emploi des jeunes et des moins jeunes – on parle toujours des jeunes, mais j’estime que les moins jeunes, chargés de famille, sont tout aussi importants pour la structuration de ces quartiers –, ainsi que le retour au droit commun et le désenclavement.

On le voit bien, dans les situations de crise, chacun se tourne légitimement vers l’État, parce qu’il est le seul à pouvoir agir et coordonner. Néanmoins, vous êtes bien placés, mesdames, messieurs les sénateurs, pour savoir que la mobilisation du droit commun passe aussi par la recherche d’une solidarité plus efficace en faveur des villes. Vous le savez – ce n’est pas Claude Dilain qui me démentira, et pour cause ! –, la péréquation est un enjeu vital.

M. Claude Dilain, rapporteur pour avis. On verra demain !

M. Maurice Leroy, ministre. Philippe Dallier l’a souligné, la solidarité financière est un impératif vital pour la politique de la ville et pour le pacte républicain.

En 2012, le montant de la dotation de solidarité urbaine s’élèvera à 1,370 milliard d’euros, soit 60 millions d’euros de plus qu’en 2011, alors que l’État a vu ses recettes diminuer de 20 %. (Mme Natacha Bouchart applaudit.) Je note d’ailleurs, messieurs les rapporteurs, que, curieusement, vous n’en avez pas beaucoup parlé dans vos rapports respectifs, citant tout juste ce chiffre. Permettez-moi de remercier Philippe Dallier de l’avoir relevé à juste titre.

Mesdames, messieurs les sénateurs, connaissez-vous un seul pays européen qui augmente la DSU de 60 millions d’euros alors que ses recettes fiscales diminuent de 20 % ? Il s’agit d’une augmentation de 130 % depuis 2004 !

Concernant la péréquation horizontale, le Fonds de solidarité des communes de la région d’Île-de-France augmentera de 20 millions d’euros, pour atteindre 210 millions d’euros en 2012.

Mesdames, messieurs les sénateurs, le budget de la politique de la ville tire les conséquences du passé ; il prépare l’avenir et traduit une recherche systématique d’efficacité.

J’en viens à l’ANRU et je veux confirmer à Philippe Dallier notamment – d’autres orateurs se sont aussi interrogés sur cette question – que les financements sont totalement sécurisés – je dis bien « totalement » – pour les années 2012 et 2013.

À cet égard, je tiens à remercier Claude Dilain, qui a eu l’honnêteté de relever à la tribune l’amélioration du mode de subventionnement des associations, ce qui n’était pas une mince affaire. Il le sait, nous en avons souvent parlé ensemble, je me suis battu pour cela. D’ailleurs, Marie-Noëlle Lienemann avait présenté un excellent rapport en la matière – cela ne m’effraie pas de le dire ici, à la tribune ! – au Conseil économique, social et environnemental, le CESE ; nous avions d’ailleurs eu de très bons échanges ensemble à ce propos.

Je l’avais dit à l’époque devant le CESE, il était inadmissible que les subventions de l’ACSE, l’Agence nationale pour la cohésion sociale et l’égalité des chances, servent avant tout à payer les agios de la subvention de l’année n-1. Excusez-moi de le souligner, mais, pour la première fois depuis vingt ans, ce ne sera plus le cas ! Il était essentiel que nous intervenions.

Nous avons fait un choix courageux, celui de nous tourner vers un avenir où la solidarité a toute sa place dans nos quartiers en difficulté, comme lien social et pour renforcer le dynamisme économique et l’attractivité de nos territoires ; bref, pour être la clef de la sortie de crise.

Comme Pierre Mendès-France, dont je suis un admirateur, j’ai la conviction profonde que nous ne devons pas sacrifier l’avenir au présent. (Applaudissements sur les travées de lUCR et de lUMP.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État. (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement, chargé du logement. Monsieur le président, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, je commencerai par citer quelques chiffres, en réponse notamment à Mme Lienemann, qui trouvait scandaleux que l’effort, en pourcentage du PIB, de l’État et des pouvoirs publics en faveur du logement soit en baisse.

Je rappelle que les derniers chiffres disponibles montrent que cet effort s’est élevé, en 2010, à plus de 40 milliards d’euros, soit 2,1 % du PIB, ce qui représente un record depuis trente ans ! (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

M. Pierre Hérisson. Très bien !

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. C’est 0,2 point de PIB de plus que lorsque vous étiez vous-même ministre du logement, madame Lienemann !

Les aides personnalisées au logement représenteront 5,5 milliards d’euros dans le budget de l’État et sont revalorisées de 1 %. Les APL seront effectivement désormais indexées sur la croissance, et non plus sur l’indice de référence des loyers, l’IRL. La raison de ce changement est très simple : comme l’a dit le Premier ministre à plusieurs reprises, nous ne pouvons pas distribuer l’argent que nous n’avons pas ! Les recettes de l’État augmenteront selon le taux de croissance, et non pas selon l’inflation.

Les aides à la pierre s’élèveront à 450 millions d’euros, l’objectif de construction étant toujours fixé à 120 000 logements sociaux. Certains d’entre vous contestent ces chiffres, mais il est indéniable que, depuis 2007, nous avons financé la construction de 600 000 logements sociaux ! (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

M. Pierre Hérisson. Très bien !

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. Depuis 2004, grâce au plan de cohésion sociale, ce sont, en moyenne, 100 000 logements sociaux qui sont financés chaque année, avec un record de 131 508 en 2010. Lorsque vous étiez au gouvernement, madame Lienemann, cet effort de construction s’établissait à 40 000 logements sociaux par an en moyenne ! (Protestations sur les travées du groupe socialiste-EELV.)

M. Alain Néri. Parlez-nous plutôt du budget pour 2012 !

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. Vous recalculez le nombre de logements sociaux sans tenir compte des prêts locatifs sociaux, mais c’est le gouvernement Jospin, et non pas nous, qui a créé ce dispositif et l’a intégré dans le champ du logement social.

M. Alain Néri. Parlez-nous donc du budget pour 2012 !

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. Souffrez donc maintenant que nous prenions en compte les PLS dans nos calculs. Cela est naturel, car ils servent à financer le secteur du logement intermédiaire.

Je rappelle donc les chiffres : 40 000 logements sociaux par an lorsque vous étiez au gouvernement, 100 000 par an depuis que nous y sommes ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées de lUMP.)

Mme Marie-Noëlle Lienemann. Non, c’était 58 000 !

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. Nous avons fait, voilà quelques jours, le bilan de dix ans d’application de la loi SRU. Vous ne cessez de dire que cette loi n’est pas appliquée et que c’est un scandale. Or, alors que, suivant les modalités de calcul prévues dans le texte que vous avez élaboré, nous aurions dû réaliser 200 000 logements sociaux dans les communes qui en comptent moins de 20 %, nous en avons construit 300 000 !

M. Alain Néri. Et combien à Neuilly-sur-Seine ?

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. La ville de Neuilly-sur-Seine, comme Paris d’ailleurs, est soumise à amende parce que le seuil de 20 % de logements sociaux n’est pas atteint. Mais, comme ces communes font des efforts en la matière,…

Mme Marie-Noëlle Lienemann. À Paris, ça se voit, mais à Neuilly-sur-Seine…

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. … elles en sont exonérées, après défalcation des investissements qu’elles réalisent de leurs obligations légales.

J’en viens au fameux programme 177, « Prévention de l’exclusion et insertion des personnes vulnérables ». L’effort d’investissement de l’État est là encore très important, puisqu’il s’élève à 1,2 milliard d’euros.

Le Premier ministre a récemment annoncé aux associations 75 millions d’euros supplémentaires pour les années 2011 et 2012. Vous voterez ces crédits dans quelques jours ; c’est la raison pour laquelle vous ne les retrouvez pas dans le projet de budget aujourd’hui soumis à votre examen. Ils permettront de maintenir les moyens alloués aux associations pour 2011 et 2012 au niveau de 2010, ce qui est normal en période de crise.

Pour la première fois depuis vingt ans, monsieur Dallier, nous commencerons l’année avec des crédits équivalant au budget exécuté de l’année précédente. Nombre d’entre vous l’ont souligné, ce budget était insincère depuis deux décennies : chaque année, des sommes sont ajoutées en loi de finances rectificative et un certain nombre de décrets d’avance sont publiés. Cela est malheureusement encore vrai pour l’année 2011, puisque les 75 millions d’euros que j’ai évoqués à l’instant seront inscrits en loi de finances rectificative, mais nous aborderons l’année 2012 avec un budget exécuté reconduit, ce qui nous permettra de donner de la visibilité aux acteurs du monde associatif.

La réforme de certains dispositifs de la politique du logement est en cours : je pense aux aides à la performance énergétique, avec une réforme du crédit d’impôt développement durable, le CIDD, et de l’éco-prêt à taux zéro, au dispositif d’aide à l’investissement locatif et, enfin, aux aides à l’accession à la propriété, avec un recentrage sur le secteur du logement neuf du PTZ+.

En ce qui concerne le logement locatif social, M. Repentin a affirmé que l’État ne finançait les opérations qu’à hauteur de 2,7 %, la part des collectivités territoriales s’élevant à 8 %.