M. Yves Chastan. Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse qui a permis d’apporter un certain nombre d’éclaircissements.

Aujourd'hui, mon principal souci porte non pas sur le rôle que l’association Espoir assumait antérieurement et qu’elle ne peut plus jouer maintenant, mais sur les conditions d’accueil actuelles des demandeurs d’asile à Privas, nonobstant le fait – vous l’avez rappelé, mais j’en suis bien conscient – que leur nombre est globalement en baisse en Ardèche alors qu’il augmente au niveau régional. Nous recevons d’ailleurs des placements en provenance d’autres départements quand des places sont disponibles chez nous.

Je souhaitais surtout évoquer l’impact de cette situation sur les associations locales que j’ai citées. En l’état actuel des choses, elles sont obligées d’intervenir bien plus qu’auparavant. Vous avez partiellement répondu à ma préoccupation concernant le nécessaire renforcement des places en CADA. Des projets ont bien été déposés dans le cadre d’un appel à projets lancé par le ministère de l’intérieur. Je souhaite que, dans ce cadre, des places supplémentaires, y compris dans le bassin de vie de Privas, puissent être envisagées. C'est, me semble-t-il, l’une des solutions qui permettraient d’améliorer le dispositif actuel de placement dans des formules hôtelières, formules qui sont onéreuses et qui posent des problèmes en termes de transports collectifs.

Monsieur le ministre, je souhaitais, par votre intermédiaire, attirer l’attention de M. le ministre de l’intérieur sur cette situation, afin que des solutions soient trouvées pour améliorer le dispositif.

(M. Jean-Patrick Courtois remplace Mme Bariza Khiari au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE DE M. Jean-Patrick Courtois

vice-président

aire d'accueil pour les gens du voyage dans le bois de vincennes

M. le président. La parole est à M. Christian Cambon, auteur de la question n° 411, adressée à M. le ministre de l'intérieur.

M. Christian Cambon. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’intérieur. Je conteste la légalité d’une décision prise en février dernier par le Conseil de Paris selon laquelle une aire d’accueil des gens du voyage sera installée à l’extrémité est du bois de Vincennes.

Sans mettre en question la nécessité républicaine qu’ont l’ensemble des maires d’organiser l’accueil des gens du voyage, nous estimons que les conditions posées par la loi du 5 juillet 2000 ne sont absolument pas remplies.

En effet, la loi prévoit que les aires d’accueil doivent être installées de façon à faciliter la scolarisation des enfants des gens du voyage, à permettre l’accès aux soins, notamment à un hôpital, et à des centres économiques, afin d’intégrer cette population au développement de la vie économique et sociale de notre pays.

Or le site qui a été choisi à l’extrémité du bois de Vincennes se trouve à plus de cinq kilomètres de la première école, qui est située rue de Charenton, dans le XIIe arrondissement de Paris. Pour scolariser les enfants dans cette école, il faudra donc les transporter par navettes, matin et soir, à travers les très nombreux embouteillages qui bloquent malheureusement l’entrée de Paris depuis la banlieue est.

Par ailleurs, aucune installation hospitalière – ou centre de soins – n’est installée dans le bois de Vincennes. La plus proche installation se trouve à l’hôpital Rothschild, distant de plusieurs kilomètres. L’ensemble des communes riveraines du bois de Vincennes sont mobilisées. Nous avions signé avec la Ville de Paris, la main sur le cœur, une charte de protection du bois de Vincennes, qui n’a jamais eu grand effet. Son comité de direction ne s’est d’ailleurs pas réuni depuis plus de dix ans !

On le voit bien, cela témoigne d’une volonté de reporter sur les communes riveraines du bois de Vincennes une obligation qui incombe à la Ville de Paris. Je le rappelle, cette dernière possède sur son territoire des dizaines, pour ne pas dire des centaines, d’hectares disponibles ; je pense notamment aux Batignolles, où plus de 77 hectares sont déjà disponibles. La Ville de Paris aurait pu procéder différemment.

Monsieur le ministre, le bois de Vincennes, comme le bois de Boulogne d’ailleurs, doit être intégralement réservé aux sports de plein air et aux activités de loisirs.

Une pétition lancée il y a quelques semaines a déjà réuni plus de 10 000 signatures de personnes de toutes sensibilités, qui veulent qu’on cesse de transférer au bois de Vincennes les activités dont la Ville de Paris ne veut pas. Par ailleurs, y sont notamment d’ores et déjà installés la Foire du Trône, qui occupe 15 hectares, le centre de rétention des personnes immigrées en situation irrégulière et des constructions pour accueillir des salons professionnels.

La majorité qui dirige la Ville de Paris et le ministère de l’intérieur devraient revoir la décision que j’ai évoquée puisqu’elle ne respecte pas les conditions posées par la loi. Quelles solutions préconisez-vous, monsieur le ministre, pour que la Ville de Paris respecte ses obligations légales, à savoir que la réalisation de l’aire des gens du voyage permette de favoriser l’insertion scolaire, sanitaire et économique de ces populations ? Nous comptons sur les éléments que vous allez nous communiquer pour appuyer le recours que nous avons formé, au nom de toutes les communes riveraines, contre cette décision devant le tribunal administratif de Paris !

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Benoît Hamon, ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé de l'économie sociale et solidaire et de la consommation. Monsieur le sénateur, comme vous l’avez indiqué, la loi du 5 juillet 2000 relative à l’accueil et à l’habitat des gens du voyage fixe les dispositions applicables en matière de stationnement des gens du voyage, dont l’habitat traditionnel est constitué de résidences mobiles.

Vous le savez, l’objectif de ce texte est d’établir un équilibre entre, d’une part, la liberté d’aller et venir et l’aspiration des gens du voyage à pouvoir stationner dans des conditions décentes, et d’autre part, le souci des élus locaux d’éviter des installations illicites susceptibles de porter atteinte au droit de propriété et de troubler l’ordre public.

Il appartient aux collectivités locales de réaliser des aires d’accueil, obligation légale formalisée dans le schéma départemental d’accueil des gens du voyage, qui constitue le pivot du dispositif.

À cet égard, la création par la commune de Paris d’une aire d’accueil pour les gens du voyage dans le bois de Vincennes s’inscrit dans le cadre de cette obligation pesant sur les communes.

Monsieur le sénateur, la délibération que vous avez évoquée, adoptée par le Conseil de Paris lors de sa séance des 11 et 12 février 2013, a été contrôlée par les services de la préfecture de Paris. Elle n’a donné lieu à aucune observation au titre de sa légalité. Cette délibération a été adoptée dans la forme requise, et les textes visés, dont la loi du 5 juillet 2000, ont à nos yeux été correctement appliqués.

La question centrale de votre intervention concerne la localisation d’une aire d’accueil dans le bois de Vincennes et les gênes que cette dernière pourrait occasionner. Il s’agit toutefois d’une question d’opportunité, qui ne relève pas du contrôle de légalité.

Le bois de Vincennes, qui fait partie du territoire parisien, figure dans le schéma départemental d’accueil des gens du voyage. La mairie de Paris a prévu un investissement important – 4,8 millions d’euros – pour l’aménager.

L’aire d’accueil du bois de Vincennes, située dans l’Est parisien, permettrait un accès aisé aux services urbains, notamment les équipements scolaires, éducatifs, sanitaires, sociaux et culturels ainsi qu’aux différents services spécialisés. Un réseau de transports en commun – bus, métro et RER – permettra aux enfants de rejoindre les écoles de la ville de Paris dans lesquelles ils seront scolarisés.

Pour ce qui concerne les prestations sociales, celles-ci seront versées soit par la commune de rattachement, en application des articles 7 et suivants de la loi du 3 janvier 1969 relative à l’exercice des activités ambulantes et au régime applicable aux personnes circulant en France sans domicile ni résidence fixe, soit par le centre communal d’action sociale dans le ressort territorial duquel sont installés les demandeurs.

Les communes riveraines ne seront donc pas concernées par le versement de ce type de prestations.

M. le président. La parole est à M. Christian Cambon.

M. Christian Cambon. Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse, tout à fait administrative et factuelle. Cependant, je suis désolé que l’on vous ait fait tenir un certain nombre de propos inexacts…

Vous évoquez la régularité de la procédure. Je vous rappelle quand même que la Commission supérieure des sites, perspectives et paysages a rendu un avis défavorable, à l’unanimité ! Mais, si l’avis de cette institution nationale convoquée par le ministre – nous demandons, du reste, une nouvelle convocation de cette commission par Mme Batho – ne compte pour rien, c’est une autre histoire…

Par ailleurs, vous évoquez la proximité de transports en commun. Monsieur le ministre, je vous invite à participer à un voyage d’études sur cette question : sans vous amener très loin, il vous permettra de constater qu’il n’existe strictement aucun transport en commun à proximité ! Il faudra donc prévoir un système de navettes pour transporter les enfants matin et soir entre l’aire d’accueil et l’école.

Il me semble que vous n’avez jamais été maire. Sachez que, si vous l’aviez été, vous auriez eu beaucoup de difficultés à expliquer à vos administrés que vous envoyez les enfants à plus de cinq kilomètres, en région parisienne, le matin et le soir, à l’heure des embouteillages…

Il s’agit véritablement de faire une action sociale à peu de frais, aux dépens des autres, pour se donner bonne conscience ! Mais M. le maire de Paris ne s’en sortira pas ainsi ! Puisque le ministère de l’intérieur semble considérer la décision du Conseil de Paris comme légale, nous allons continuer à contester cette dernière et à mobiliser l’opinion, qui, dans toute la France, constate massivement que l’on touche une nouvelle fois à ses bois et que l’on y installe tout ce dont on ne veut pas dans le cœur de la ville.

Alors que Paris manque singulièrement d’espaces verts, nous allons nous battre, à l’image de ce que font les grandes capitales, comme Londres ou New York, pour rendre les espaces verts aux Parisiens !

création d'un congé de reconversion pour les agents territoriaux en congé longue maladie

M. le président. La parole est à Mme Catherine Deroche, auteur de la question n° 391, adressée à Mme la ministre de la réforme de l'État, de la décentralisation et de la fonction publique.

Mme Catherine Deroche. Madame la ministre, en cas d’accident de travail ou de maladie professionnelle, dans certaines circonstances, des agents territoriaux, sans être inaptes à toute fonction, ne peuvent être reclassés au sein de leur propre collectivité. Ils sont alors soit indéfiniment maintenus en arrêt de maladie, soit admis à la retraite après la procédure mise en œuvre par la collectivité.

Or les agents placés dans cette situation ne peuvent pas bénéficier d’actions de formation, réservées aux seules personnes en situation de travail, puisque le cadre statutaire actuel les en empêche.

Dès lors, ne peut-on pas créer une position statutaire nouvelle, du type du congé de reconversion, afin de permettre aux agents maintenus en congé de longue maladie d’être placés en position d’activité et de reconversion et de leur donner ainsi accès à des démarches de formations qualifiantes et professionnalisantes susceptibles de favoriser leur reclassement ?

Madame la ministre, je souhaite avoir votre avis sur cette proposition et, le cas échéant, savoir dans quel délai elle pourrait être mise en œuvre.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Marylise Lebranchu, ministre de la réforme de l'État, de la décentralisation et de la fonction publique. Madame la sénatrice, votre question est extrêmement intéressante parce que les modalités de reclassement des fonctionnaires devenus inaptes à exercer leurs fonctions du fait d’une invalidité sont aujourd'hui insuffisamment adaptées pour permettre aux employeurs publics, comme d'ailleurs aux fonctionnaires, de dérouler une seconde carrière.

Un vrai problème se pose à ce sujet, les procédures actuelles mettant en jeu des instances au fonctionnement lourd ainsi que des cadres statutaires qui n’offrent que peu d’alternatives aux employeurs publics. Votre préoccupation est pleinement justifiée puisque tout cela conduit souvent à une désinsertion professionnelle des fonctionnaires ayant eu un accident de la vie, quelle qu’en soit la nature.

Vous l’avez rappelé, le reclassement des fonctionnaires territoriaux est régi par les articles 81 et suivants de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et par le décret du 30 septembre 1985.

En droit, un fonctionnaire territorial peut, à l’issue d’un congé de maladie, n’être plus physiquement apte à exercer ses fonctions. Cette inaptitude est constatée par le comité médical, qui est souverain en la matière.

L’autorité territoriale a alors une obligation de moyens pour reclasser cet agent, conformément à ce qu’a indiqué le Conseil d’État dans un arrêt du 2 octobre 2002 condamnant la chambre de commerce et d’industrie de Meurthe-et-Moselle. Le fonctionnaire peut se voir proposer par l’autorité territoriale, si cela se révèle possible, un changement d’emploi ou même, s’il n’est plus apte à exercer l’ensemble des emplois de son grade, un changement de cadre d’emplois. Dans le cadre de cette reconversion, une formation peut s’avérer nécessaire.

Toutefois, les textes ne prévoient pas de formation spécifique liée, par exemple, à une reconversion pour raison de santé.

Par conséquent, dans un contexte d’allongement des carrières, du fait notamment du recul de l’âge de départ à la retraite, il est nécessaire d’ouvrir une vraie réflexion non seulement sur la prévention, mais aussi sur la prise en charge de l’invalidité dans la fonction publique.

C’est la raison pour laquelle, dans le cadre de la négociation sur l’amélioration des conditions de vie au travail, que j’ai ouverte avec les organisations syndicales représentatives de la fonction publique, je souhaite aborder l’ensemble des aspects que recouvrent ces questions.

La prévention des risques professionnels fera l’objet de plusieurs groupes de travail, concernant en particulier la prévention des risques psychosociaux, que l’on a sous-estimés dans la fonction publique, des risques liés à la pénibilité physique ainsi que de tous les troubles musculo-squelettiques, malheureusement connus de tous aujourd'hui.

L’amélioration du fonctionnement des instances médicales participant aux procédures de reclassement fera également l’objet de discussions, sans doute longues mais absolument nécessaires.

Enfin, sur la base d’un rapport de l’Inspection générale des affaires sociales, l’IGAS, j’examinerai avec les organisations syndicales les conditions dans lesquelles une reconversion professionnelle peut être mise en place.

J’ai organisé cette négociation de manière que des groupes soient constitués sur les sujets importants que sont les parcours professionnels, la formation professionnelle, le changement d’affectation, le passage d’une administration à une autre, d’une collectivité locale à l’État, de l’État aux collectivités locales ou à la fonction publique hospitalière… Aujourd'hui, nos pratiques ne sont pas les bonnes.

Madame la sénatrice, je m’engage à trouver une réponse à votre question avec les organisations syndicales.

M. le président. La parole est à Mme Catherine Deroche.

Mme Catherine Deroche. Madame la ministre, je vous remercie de la réflexion que vous avez lancée, même si l’échéancier n’est pour le moment pas précisément établi.

Pour avoir organisé une table ronde avec le centre de gestion et l’association des maires de mon département, je me suis aperçue que de réels problèmes existent, notamment pour les petites collectivités : difficultés financières, manque de postes, blocages statutaires. D’autres problèmes concernent les avis des commissions de réforme.

Dans ces conditions, le chantier que vous lancez est très attendu, notamment par les maires et par les présidents de communautés de communes.

renouvellement du contrat d'un agent non titulaire de catégorie b

M. le président. La parole est à M. Rachel Mazuir, auteur de la question n° 354, adressée à Mme la ministre de la réforme de l'État, de la décentralisation et de la fonction publique.

M. Rachel Mazuir. Madame la ministre, j’ai souhaité attirer votre attention et celle du Gouvernement sur l’application aux agents de catégorie B du nouvel article 3-2 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, tel qu’il résulte du I de l’article 41 de la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012.

Vous le savez, le principe général de recrutement dans la fonction publique territoriale figure dans le dernier alinéa de l’article 41 de la loi de 1984 précitée : un agent de la fonction publique peut être recruté s’il a réussi un concours administratif et été inscrit à cette fin sur une liste d’aptitude, ou par voie de promotion interne ou d’avancement de grade.

Par dérogation, une collectivité pouvait, sous certaines conditions, recruter un agent non titulaire pour une durée maximale d’un an. La loi de 2012 a porté ce délai à deux ans : un contrat ne pourra désormais être conclu que pour une durée déterminée d’un an, renouvelable une seule fois.

Cette dérogation, si elle se veut moins restrictive que la précédente, n’en demeure pas moins très pénalisante pour les agents recrutés sur des emplois de catégorie B.

Une instruction du 2 mars 2012 du ministère de l’intérieur a par ailleurs rappelé aux préfectures, en charge du contrôle de la légalité, de veiller particulièrement aux recrutements abusifs de contractuels et au renouvellement successif de leurs contrats, ce que l’on peut comprendre. Dans ces conditions, les collectivités ne pourront plus déroger à ce délai.

Madame la ministre, le recrutement sur certains emplois de catégorie B pose problème, plus particulièrement dans le département de l’Ain, limitrophe de la Suisse et du Rhône, deux gisements importants d’emplois prisés. C’est surtout vrai de la Suisse, et particulièrement du canton de Genève, qui procède à des recrutements massifs, dans des conditions avantageuses par rapport à celles de nos propres emplois.

Aujourd’hui, dans notre département de l’Ain, une quarantaine d’agents de cette catégorie, essentiellement des techniciens et des assistants sociaux éducatifs, sont contractuels. Dans certains cantons, des postes ne peuvent être pourvus par des titulaires soit en raison du coût de la vie – je pense au pays de Gex, où le coût de la vie est 30 % plus élevé que dans le reste du département –, soit en raison de l’absence de concours.

L’Ain se trouve aujourd’hui dans une situation délicate : par manque de candidats lauréats d’un concours ou examen, il se voit obligé de recruter sous contrat de jeunes agents en quête d’expérience. Ces personnes seront formées mais savent dès le départ qu’elles ne pourront rester au-delà de deux années, à moins qu’un concours ne soit ouvert d’ici là et qu’elles le réussissent, ce qui est un autre problème.

Cette situation est pénalisante non seulement pour les agents, qui, faute de garantie d’emploi, rencontrent des difficultés pour bénéficier de prêts bancaires, mais aussi pour les chefs de service, qui les formeront pour une courte durée et devront malheureusement les voir partir.

Il n’en est pas de même pour les agents de catégorie A, qui, vous le savez, peuvent voir leur contrat à durée déterminée se transformer en contrat à durée indéterminée au bout de six ans, ni pour les agents de catégorie C, qui peuvent être titularisés sans concours.

Lors de l’examen, au Sénat, du texte qui est devenu la loi du 12 mars 2012, deux amendements identiques avaient été adoptés, contre l’avis du Gouvernement, pour porter la durée de cette dérogation de deux à quatre ans. Selon nous, cette extension permettait aux collectivités territoriales de recruter un titulaire et offrait également de meilleures garanties aux contractuels qui n’avaient pas pu se présenter ou avaient échoué à un concours.

Malheureusement, cet aménagement a été supprimé à l’Assemblée nationale, lors de l’examen du texte en commission, et les sénateurs n’ont pu le rétablir en commission mixte paritaire.

Pour toutes ces raisons, je souhaite savoir si le Gouvernement entend revenir sur l’article 3-2 de la loi de 1984, tel qu’il résulte du I de l’article 41 de la loi de mars 2012, ou prévoir une règle spécifique pour le renouvellement du contrat des agents de catégorie B.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Marylise Lebranchu, ministre de la réforme de l'État, de la décentralisation et de la fonction publique. Monsieur le sénateur, votre question renvoie à des préoccupations qui ont souvent conduit à la préparation de décrets, sans d'ailleurs que cette démarche ait jamais abouti.

À l’instar de ce qui est prévu pour les deux autres fonctions publiques, l’article 3-2 de la loi portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale prévoit explicitement que le recrutement d’agents contractuels vise à « faire face à une vacance temporaire d’emploi dans l’attente du recrutement d’un fonctionnaire ». Vous l’avez rappelé, ces contrats sont conclus pour une durée qui ne peut excéder un an.

L’article dispose désormais que le contrat peut être prolongé « dans la limite d’une durée totale de deux ans » – c’est très précis – lorsque « la procédure de recrutement pour pourvoir l’emploi par un fonctionnaire n’a pu aboutir » avant le terme de la première année.

On a donc essayé de donner un peu plus de souplesse aux collectivités territoriales tout en limitant les recours. En effet, si, sous le gouvernement précédent, une instruction en date du 2 mars 2012 a été adressée aux préfets pour bien vérifier le respect de cette procédure, c’est parce que plusieurs questions avaient été posées par les organisations syndicales…

En particulier, il est arrivé que certains emplois aient été annoncés vacants, qu’un centre de gestion ait en conséquence organisé des concours, puis que la procédure ait été dite infructueuse. On s’est alors retrouvé avec les fameux « reçus-collés » qui posent problème pour l’organisation des concours mais aussi, surtout, pour les personnes concernées.

Faut-il aller au-delà ? Faut-il permettre de prolonger la durée de ces contrats jusqu’à trois ans ? Je ne peux vous répondre aujourd'hui parce qu’il me faudrait conduire une analyse plus précise de la situation de tous les départements de France.

Vous avez axé votre question non sur le cas général, mais sur le cas particulier du département de l’Ain. Je demanderai aux services préfectoraux et au centre de gestion de regarder avec vous ce qui s’est passé dans ce département. Mais je ne peux pas ouvrir une dérogation dans un département – fût-il un très beau département ! – pour des raisons de concurrence d’emploi sans l’appliquer à d’autres…

Mon souci, monsieur le sénateur, est de bien conforter la fonction publique territoriale dans le statut de la fonction publique. Faire aboutir cette revendication a été long – il a fallu attendre 1984, soit plus de deux ans après les premières lois de décentralisation – et il a été difficile de faire fonctionner cette machine-là jusqu’à nos jours, avec le Centre national de la fonction publique territoriale, les centres de gestion, bref, avec tout ce que l’on a pu mettre en place à l’attention de nos personnels.

Je pense comme vous que, concernant la catégorie C, pour laquelle il n’existe pas de concours, il n’y a pas de problème ; mais je conçois mal, pour la catégorie B, que l’on aille aussi loin que pour la catégorie A concernant certaines professions, c'est-à-dire une titularisation qui survient après un certain nombre d’années : cela donnerait lieu à une levée de bouclier syndicale.

Je m’engage donc à faire procéder à cette étude particulière sur votre département – et je vous en rendrai compte –, mais je ne m’engage pas à toucher à ce statut en dehors du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale. Cette étude pourra porter sur deux, voire trois départements où des problèmes difficiles à régler sont rencontrés.

M. le président. La parole est à M. Rachel Mazuir.

M. Rachel Mazuir. Madame la ministre, je crois que vous avez tout à fait compris l’objet de ma question. Il y a en effet quelques départements dans cette situation. Il s’agit des départements frontaliers, notamment proches de la Suisse. Mais les emplois territoriaux ne sont pas les seuls emplois concernés : ainsi, les infirmières et les aides-soignantes que nous formons en France vont systématiquement travailler à Genève. Il y a donc là un problème majeur.

Votre réponse me satisfait complètement. Je comprends bien qu’on ne puisse étendre les dérogations à l’ensemble des départements, mais je tenais cependant à vous informer de la situation.

constitution d’un guichet unique en guyane

M. le président. La parole est à M. Jacques Cornano, en remplacement de M. Georges Patient, auteur de la question n° 362, adressée à Mme la ministre de l'égalité des territoires et du logement.

M. Georges Patient. Madame la ministre, je souhaite attirer l’attention du Gouvernement sur les conséquences de l’absence de guichet unique en Guyane. En effet, depuis la disparition de Guyane Habitat, association créée en Guyane pour assurer les missions d’interface sociale et financière dans le cadre du montage des dossiers de logements évolutifs sociaux, il n’y a eu aucune opération nouvelle alors que les besoins sont énormes.

Pourtant, le fonds de garantie habitat Guyane existe depuis plus de dix ans. Mais, en l’absence de guichet unique, il n’est pas utilisé. Les fonds sont disponibles pour couvrir le risque que représentent plus de 400 logements, et des collecteurs nationaux seraient prêts à monter un guichet unique en Guyane ; mais rien n’est opérationnel, et les collecteurs nationaux susceptibles d’être intéressés ne sont pas en mesure de délivrer des prêts du 1 % logement aux bénéficiaires de logements évolutifs sociaux.

Il en résulte que beaucoup d’opérations sont arrêtées, causant ainsi des problèmes financiers aux opérateurs, et que d’autres ne peuvent être réalisées.

Je tiens à souligner que la Guyane est le seul département d'outre-mer à ne pas disposer de guichet unique.

Aussi, madame la ministre, j’aimerais savoir ce que le Gouvernement compte faire pour mettre en place un guichet unique en Guyane.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.