M. Roger Karoutchi. Je ne m’exprimerai pas sur le football, mes connaissances en la matière étant assez faibles…

M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Mais il y a de grands spécialistes ici !

M. Roger Karoutchi. En revanche, j’entends bien l’aspect symbolique, émotionnel de cette taxe. On en appelle à l’opinion publique, qui suit forcément : comment pourrait-on défendre des gens qui gagnent plus de 1 million d’euros ? C’est beaucoup trop !

Cependant, monsieur le ministre, la région d’Île-de-France n’arrive plus à attirer les grandes sociétés financières chinoises, indiennes, américaines, japonaises, qui préfèrent aujourd’hui s’installer à Londres, à Berlin ou à Barcelone. En effet, si ces sociétés comptent peu de salariés gagnant plus de 1 million d’euros, ce sont justement eux qui décident ! À cela s’ajoute le fait que les compagnies étrangères sont rebutées par l’instabilité de notre fiscalité. Nous sommes en train d’anéantir la capacité d’attraction de la région d’Île-de-France, au profit des autres capitales européennes, en particulier Londres.

J’ignore si cette mesure rapportera vraiment 200 millions d’euros par an, mais je sais que les investisseurs étrangers ne veulent plus venir chez nous. Il faudrait réaliser une étude d’impact pour évaluer ce que nous perdrons en termes de ressources budgétaires et d’activité économique à la suite de l’instauration de cette taxe.

Tout cela relève en fait du symbole. Personnellement, je ne m’intéresse guère au football, mais je m’inquiète de l’image de la France à l’international. Nos voisins se réjouissent de l’évolution de notre fiscalité, car elle réduit l’attractivité de notre territoire, à leur bénéfice.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Benoît Hamon, ministre délégué. Nous aurions pu utiliser vos arguments, monsieur Karoutchi, quand la majorité précédente a mis en place la taxe – bienvenue – de 50 % sur les bonus des traders, voilà trois ou quatre ans.

M. Roger Karoutchi. Les traders… Il y en a de moins en moins chez nous ! Ils sont tous à Londres !

M. Benoît Hamon, ministre délégué. Vous ne sembliez pas alors vous inquiéter de la fuite des sociétés financières hors de la région d’Île-de-France, fuite que vous êtes d’ailleurs incapable de démontrer.

M. Roger Karoutchi. Si ! Paris Europlace a donné des chiffres catastrophiques pour 2012 et 2013 !

M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Il n’y a plus que des activités résiduelles, à Paris !

M. Benoît Hamon, ministre délégué. Elle aura sans doute débuté en 2009, avec l’instauration de la taxe sur les bonus des traders que vous avez votée ! Pour une fois, c’était une très bonne initiative !

M. Philippe Marini, président de la commission des finances. C’est curieux, vous êtes dans la continuité ! Nous n’avions pas bien compris cela !

M. Benoît Hamon, ministre délégué. Tout cela est parfaitement réversible. Permettez-moi de préférer la perspective solide d’un rendement de 420 millions d’euros à vos estimations au doigt mouillé !

M. Jacky Le Menn. Très bien !

M. Roger Karoutchi. Ce n’est pas avec des raisonnements économiques pareils que l’on va avancer…

Mme la présidente. La parole est à M. Francis Delattre, pour explication de vote.

M. Francis Delattre. Je m’étonne d’entendre M. le ministre défendre les traders ! Nous allons de surprise en surprise, ce matin !

M. Benoît Hamon, ministre délégué. J’ai dit le contraire, monsieur Delattre ! Vous m’avez mal écouté !

M. Francis Delattre. Il est toujours valorisant de dire que l’on tient un engagement, mais nous savons tous ici pourquoi vous l’aviez pris : il s’agissait de courir après M. Mélenchon !

Mme Michèle André. Vous lisez trop la presse !

M. Francis Delattre. Quand vous brandissez l’étendard du socialisme à la française, cela réjouit M. Cameron, qui déclarait récemment vouloir dérouler le tapis rouge aux entreprises françaises !

M. Francis Delattre. Cela réjouit également Mme Merkel, qui appelle nos entrepreneurs à franchir le Rhin. Et je ne parle pas des dégâts psychologiques que provoquent vos décisions…

On assiste à une petite manœuvre consistant à mettre en avant le cas des footballeurs. Mais le football, ce n’est que l’écume de la vague des délocalisations ! Notre pays a besoin de cadres supérieurs, de chefs d’entreprise. Même si ses motivations sont le plus souvent d’ordre psychologique, la fuite des talents français vers Londres est une réalité. Par exemple, depuis deux ans, j’essaie d’intégrer des jeunes cadres au sein de mon conseil municipal, mais ils partent tous !

M. Benoît Hamon, ministre délégué. C’est une caricature !

M. Francis Delattre. Non, c’est une réalité ! Pensez-vous vraiment retenir nos diplômés en prenant de telles mesures ? Au fond, le vrai problème de ce gouvernement, c’est le décalage entre ses rêves programmatiques et la réalité.

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Ne rêvez pas trop vous-même !

M. Francis Delattre. Hier, vous essayiez d’attirer l’extrême gauche dans le giron de la majorité présidentielle, mais, aujourd'hui, vous avez la responsabilité de conduire le pays. Vous auriez dû profiter de la décision du Conseil constitutionnel pour oublier ce projet de taxe !

Mme la présidente. La parole est à M. Vincent Delahaye, pour explication de vote.

M. Vincent Delahaye. Le ras-le-bol fiscal concerne à la fois les Français et les entreprises. Entre 2011 et 2013, la ponction fiscale a été alourdie de 60 milliards d’euros. Cette année, la combinaison des mesures nouvelles et des dispositions prises antérieurement entraîne une nouvelle hausse de 12 milliards d’euros.

Les 210 millions d’euros de rendement annuel évoqués par M. le ministre ne sont, certes, pas tout à fait négligeables, mais M. Karoutchi a raison de souligner les pertes de recettes fiscales induites par les délocalisations et l’affaiblissement de l’attractivité de notre pays. Elles sont peut-être un peu difficiles à chiffrer, mais il faut tout de même en tenir compte.

La rétroactivité de la mesure pose également problème. Elle est difficile à accepter pour les entreprises. Il faudrait à mon sens revenir sur cette disposition, qui ne me paraît pas judicieuse…

Par ailleurs, bien qu’étant amateur de football, je ne vois pas pourquoi les clubs de football devraient être privilégiés en la matière. Il en va de même, d’ailleurs, pour les artistes.

N’ayant pas obtenu de réponse à ma question, je vous la repose, monsieur le ministre : quid des négociations en cours avec les clubs de football ? Les dispositions spécifiques dont ils bénéficieront, en particulier le plafonnement de la taxe à 5 % du chiffre d’affaires, qui devrait surtout concerner un club détenu par le Qatar, profiteront-t-elles à d’autres entreprises ?

Mme la présidente. La parole est à M. Éric Doligé, pour explication de vote.

M. Éric Doligé. Je souscris pleinement aux propos tenus tout à l’heure par notre collègue Roger Karoutchi, mais le problème qu’il a décrit n’est pas uniquement francilien. (M. Roger Karoutchi acquiesce.) On constate le même phénomène de délocalisations ou de refus d’implantation dans nos territoires.

En outre, quand des personnes aisées s’installent en France, elles investissent, par exemple en achetant des propriétés, et font ainsi vivre de nombreuses entreprises artisanales. C’est un apport considérable pour nos territoires ! Or, aujourd'hui, il est en train de se tarir.

J’ai été choqué, monsieur le ministre, de vous entendre déclarer en substance que l’on peut taper sur certaines catégories, parce qu’on n’en parlera pas !

M. Benoît Hamon, ministre délégué. Je n’ai jamais dit cela !

M. Éric Doligé. C’était à propos des footballeurs.

Quand les gens font du bruit et défilent dans la rue, vous reculez presque systématiquement.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Vous parlez des « pigeons » ?

M. Éric Doligé. Les autres, on leur tape dessus, on continue à les ponctionner ! On a l’impression que, en fait, la politique du Gouvernement est dictée par la rue.

Mme la présidente. La parole est à M. Éric Bocquet, pour explication de vote.

M. Éric Bocquet. Au fond, nous poursuivons notre intéressant débat de la semaine dernière sur le sens de l’impôt.

Il faut arrêter de dire que seul le critère fiscal détermine les choix des entreprises en matière d’implantation.

M. Vincent Delahaye. Ce n’est pas le seul critère, mais c’en est un !

M. Éric Bocquet. Il y a beaucoup de contre-exemples à cet égard. Ainsi, dans ma région, le constructeur automobile japonais Toyota a choisi de s’installer à Onnaing, dans le Valenciennois. À l’époque, il y avait encore la taxe professionnelle. Nous étions bien sûr en concurrence avec des territoires plus accueillants sur le plan fiscal. Ce qui a motivé le choix de cet industriel, c’est l’existence d’infrastructures routières et ferroviaires,…

M. Roger Karoutchi. Parce qu’à Londres, il n’y en a pas ?

M. Éric Bocquet. … la présence d’une main-d’œuvre qualifiée, dotée de savoir-faire, la qualité du cadre de vie,…

M. Éric Doligé. On lui a aussi donné beaucoup d’argent…

M. Éric Bocquet. … l’accès au haut débit, qui est aujourd'hui le quatrième critère de choix. Voilà à quoi sert l’impôt !

Autre exemple, l’entreprise GSK, qui produit notamment le vaccin contre le cancer de l’utérus, est venue s’installer à Saint-Amand-les-Eaux plutôt qu’à Singapour, dont on connaît pourtant le régime fiscal, ou en Hongrie. Il faut cesser de parler à perte de vue de « fiscalité confiscatoire » ou de « matraquage » et d’opposer systématiquement activité économique et fiscalité !

Enfin, j’indique à M. Delattre que nous n’appartenons pas à l’extrême gauche. Je rejette catégoriquement cette assimilation, qui permet à certains de nous mettre dans le même sac que l’extrême de l’autre bord. Nous sommes le Front de gauche : un point, c’est tout.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Benoît Hamon, ministre délégué. Je souhaite dissiper quelques malentendus.

Le plafonnement de la taxe à 5 % du chiffre d’affaires ne concerne pas spécifiquement les clubs de football. Il vaut pour toutes les entreprises. (Marques d’approbation sur les travées de l’UMP.)

Monsieur Doligé, les présidents des clubs de football ont fait du bruit. Ils ont même annoncé une journée de « retrait », c'est-à-dire de grève : les abonnés aux chaînes payantes, lesquelles versent des droits de retransmission considérables à ces clubs, auraient certainement apprécié qu’ils mettent leur menace à exécution… Cette journée de retrait a apparemment été annulée pour laisser place à une médiation, conduite par Jean Glavany et dont j’attends les conclusions avec intérêt. À ma connaissance, aucune disposition particulière n’est prévue s’agissant du plafonnement à 5 % du chiffre d’affaires. Pour ce qui concerne le football, ce plafonnement entraînera pour l’État un manque à gagner de 45 millions d’euros. Je suppose que la mesure concernera surtout les clubs les plus riches.

Quoi qu’il en soit, la taxe va rapporter 420 millions d’euros à l’État sur deux ans : ce n’est pas rien ! Vous n’arriverez pas à me faire croire qu’elle fera fuir les grands groupes, car les entreprises ne délocalisent tout de même pas parce qu’elles comptent beaucoup de salariés gagnant plus de 1 million d’euros par an ! Un tel argument me paraît assez peu recevable.

Monsieur Delattre, vous m’avez mal compris tout à l’heure : je félicitais la précédente majorité d’avoir mis en place une taxe sur les bonus des traders au-delà de 27 500 euros. C’était en 2010, et la taxe s’appliquait aux bonus de 2009 : en matière d’insécurité juridique, vous n’avez donc guère de leçons à nous donner !

La mesure que nous proposons est d’une grande clarté ; il n’y a aucune insécurité juridique. L’objectif est de faire participer ceux qui ont les facultés contributives les plus élevées à l’effort de redressement des comptes publics. Il s’agit d’un dispositif à la fois symbolique politiquement et utile financièrement, puisqu’un rendement de 420 millions d’euros sur deux ans est attendu.

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Marini, pour explication de vote.

M. Philippe Marini. Je souhaite exposer les raisons pour lesquelles, à mon avis, on ne peut que voter contre cette disposition.

Le rendement dépend de l’assiette. Le chiffre de 420 millions d’euros n’est que prévisionnel. Je me permets tout simplement de donner rendez-vous au Gouvernement pour apprécier, année après année, le rendement effectif de la mesure. J’ai connu, dans le passé, de très nombreux exemples d’une estimation flatteuse des services de Bercy, qui raisonnent en fonction d’un état des bases fiscales à un moment donné, mais peinent à se projeter dans une dynamique. L’assiette évoluera en fonction de facteurs économiques difficiles à prévoir. Vous nous donnez une estimation : dont acte ; rendez-vous aux résultats !

Par ailleurs, cette mesure est bien l’enfant de l’engagement pris par François Hollande au Bourget, lorsqu’il déclarait en substance – je n’ai plus les termes exacts en tête – que la finance était son meilleur ennemi.

M. Benoît Hamon, ministre délégué. Ce n’est pas exactement cela !

M. Philippe Dallier. Il voulait faire la guerre à la finance mondiale !

M. Philippe Marini. Or si nous bénéficions pourtant aujourd'hui d’une certaine bienveillance des milieux internationaux pour préparer ce budget, c’est parce que nos emprunts sont contractés à un taux extrêmement bas. Cela signifie donc que les marchés financiers font toujours confiance à ce gouvernement. Cela me permet de dire que, plutôt que le meilleur ennemi, la finance est peut-être le meilleur ami : c’est elle qui insensibilise à la réalité du poids de la dette, laquelle se paiera malgré tout probablement plus cher un jour ou l’autre, sans doute proche.

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. La dette, c’est vous !

M. Philippe Marini. La dette, c’est nous tous, monsieur le rapporteur général ! La dette, c’est notre passif, c’est le passif du pays !

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. C’est le passif de Sarkozy !

M. Roger Karoutchi. Elle a augmenté de 200 milliards d’euros depuis dix-huit mois !

M. Philippe Marini. La dette, ce n’est pas comme l’enfer : ce n’est pas les autres !

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. L’enfer, ça n’existe pas !

M. Philippe Marini. La dette, c’est nous tous qui devrons l’assumer dans la durée.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Elle a explosé sous votre règne !

M. Philippe Marini. Or, dans la durée, une chose est sûre : nous devons être attractifs.

Monsieur le ministre, vous prenez l’exemple de la taxe sur les bonus des traders. À l’époque, nous étions au sortir de la crise ; les abus étaient manifestes, et des problèmes systémiques en résultaient pour les grandes banques, car les risques qu’elles prenaient étaient devenus absolument excessifs.

On l’a vu concrètement aux États-Unis, en Grande-Bretagne, en Allemagne et en France. Ces dispositions de circonstance étaient sans doute nécessaires.

M. Benoît Hamon, ministre délégué. Absolument !

M. Philippe Marini. Pour autant, cela ne signifie pas que vous puissiez vous en inspirer pour en faire un article de doctrine !

En ce qui concerne la taxe exceptionnelle sur les hautes rémunérations, je persiste à penser, comme mes amis Roger Karoutchi, Éric Doligé et Francis Delattre, que c’est un très mauvais signal donné à notre environnement international. En effet, que nous le voulions ou non, nous vivons dans un monde où les investisseurs arbitrent entre les territoires. Certes, il existe des facteurs fondamentaux guidant les choix d’implantation : Éric Bocquet a raison, les décisions économiques ne sont pas prises seulement en fonction de la fiscalité. Néanmoins, elles tiennent compte de l’existence ou non d’une certaine ambiance business friendly. Or votre action va à rebours de la dynamique d’implantation et de développement des entreprises.

Pour toutes ces raisons, mes chers collègues, il convient de s’opposer avec détermination à ce mauvais dispositif, même s’il a été quelque peu bonifié après que les clubs de football se furent mobilisés. Merci donc au secteur du football, qui a su faire reculer le Gouvernement, car il disposait de moyens que d’autres n’avaient pas nécessairement ! (M. le ministre délégué et M. le rapporteur général de la commission des finances protestent.)

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Benoît Hamon, ministre délégué. Monsieur Marini, vous devriez apprécier que, pour une fois, je salue une mesure prise à l’époque de Nicolas Sarkozy ! Au lieu de cela, vous rejetez mon compliment sur la taxation des bonus des traders en répondant que cet élan de lucidité n’était justifié que pour une courte période, le temps de passer le pic de la crise…

En ce qui concerne les clubs de football, contrairement à ce que vous venez d’affirmer, la réponse du Président de la République a été extrêmement claire : ils ne bénéficieront d’aucun régime particulier les exemptant de l’impôt exceptionnel sur les revenus supérieurs à 1 million d’euros. Une médiation a été confiée à Jean Glavany, rien de plus ; je n’en connais pas, bien sûr, les conclusions, mais en tout cas elle n’aboutira pas à une telle exemption des clubs de football.

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Très bien !

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos I-367 et I-457.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. L'amendement n° I-3, présenté par M. Marc, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

I. - Alinéa 1

Après les mots :

personnes morales

insérer les mots :

, les groupes de sociétés au sens de l'article 223 A du code général des impôts

II. - Après l'alinéa 21

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

D. - Lorsque le total des rémunérations individuelles mentionnées au A versées par les sociétés membres d'un groupe au sens de l'article 223 A du code général des impôts excède un million d'euros sans que les rémunérations individuelles de la filiale ou les rémunérations individuelles de la société mère de ce groupe excèdent ce montant, la taxe est acquittée par la société mère de ce groupe.

La parole est à M. le rapporteur général.

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. L’article 9 ayant été maintenu, la commission des finances propose de l’enrichir ! (Exclamations ironiques sur les travées de l'UMP.)

Les deux amendements que je présenterai à cet article ont pour objet d’éviter que certains puissent échapper au paiement de la taxe exceptionnelle de solidarité sur les très hauts revenus.

L’amendement n° I-3 vise à prévenir une possibilité de contournement de la taxe à 75 % par les grands groupes. Due par les entreprises, cette taxe sera donc acquittée entreprise par entreprise. Or que se passera-t-il dans le cas où un dirigeant d’un grand groupe serait à la fois directeur général d’une filiale et membre du conseil d’administration de la société mère ? Si la filiale lui verse 800 000 euros de salaire et la société mère lui attribue 700 000 euros de jetons de présence et d’actions gratuites, sa rémunération s’élèvera au total à 1,5 million d’euros, mais aucune des deux entreprises ne lui aura versé plus de 1 million d’euros. Par conséquent, elles ne seront pas assujetties à la taxe à 75 %.

L’amendement vise à combler cette lacune et à empêcher tout contournement du dispositif par les grands groupes. Il reviendrait, dans un cas comme celui que je viens de citer, à la société mère de payer la taxe pour l’ensemble des rémunérations ayant été versées au salarié par des entreprises du groupe.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Benoît Hamon, ministre délégué. Le Gouvernement est plutôt défavorable à cet amendement et en sollicite le retrait, car il n’est pas certain que son dispositif produise l’effet attendu.

Le périmètre des groupements d’intégration fiscale est librement défini chaque année par les contribuables. Un groupe organisant le morcèlement de rémunérations recourrait à des sociétés n’appartenant pas à un même périmètre d’intégration fiscale tout en étant membres du groupe économique. À cet égard, je rappelle que les montages consistant à morceler les rémunérations entre diverses entités afin d’échapper à la taxation pourront être remis en cause en cas de contrôle sur le fondement de l’acte normal de gestion s’il s’avérait que la partie versante supporte indument une partie des rémunérations en cause.

Enfin, le présent article comporte d’ores et déjà une disposition anti-contournement, consistant à soumettre à la taxe les sommes correspondant à des remboursements de rémunérations supportées par d’autres entreprises.

C’est la raison pour laquelle, monsieur le rapporteur général, je vous demande de bien vouloir retirer cet amendement. Sinon, l’avis sera défavorable.

Mme la présidente. Monsieur le rapporteur général, l'amendement n° I-3 est-il maintenu ?

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Puisque le Gouvernement nous assure que des dispositions anti-contournement efficaces sont déjà prévues, je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L'amendement n° I-3 est retiré.

Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° I-370, présenté par MM. Carle et Humbert, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 1

Remplacer les millésimes :

2013 et 2014

par les millésimes :

2014 et 2015

II. – Alinéa 2

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Elle ne porte que sur les contrats de travail signés à compter de la promulgation de la présente loi.

III. – Alinéa 24

Remplacer le millésime :

2013

par le millésime :

2014

et le millésime :

2014

par le millésime :

2015

IV. – Alinéa 25

Remplacer le millésime :

2014

par le millésime :

2015

et le millésime :

2015

par le millésime :

2016

Cet amendement n'est pas soutenu.

L'amendement n° I-485, présenté par M. Delahaye et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 1

Supprimer les mots :

2013 et

II. – En conséquence, alinéa 24

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. Vincent Delahaye.

M. Vincent Delahaye. Il s’agit d’un amendement de repli par rapport à celui qui tendait à supprimer l’article, visant à ce que la taxe à 75 % ne s’applique qu’aux revenus de 2014, et pas à ceux de 2013.

Il convient en effet de supprimer le caractère rétroactif de la mesure. La loi ne doit disposer que pour l’avenir et les dispositions rétroactives sont toujours mauvaises.

Certes, monsieur Bocquet, la fiscalité n’est pas le seul critère qui guide les choix d’implantation des entreprises, mais ce paramètre compte néanmoins. Pour rencontrer beaucoup de responsables d’entreprises sur le terrain, je puis vous assurer que l’aspect fiscal n’est pas négligeable. En particulier, la stabilité et la prévisibilité de la fiscalité importent beaucoup. On ne peut pas annoncer aux entreprises à la fin du mois de novembre qu’elles vont payer des charges supplémentaires sur les salaires versés en 2013 !

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Nous avons déjà eu un long débat sur le principe de cette taxe. Les raisons que j’ai invoquées pour m’opposer à la suppression de l’article valent aussi pour cet amendement. L’avis est défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Benoît Hamon, ministre délégué. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° I-485.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° I-371, présenté par M. de Montgolfier et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :

Alinéa 22

Remplacer le taux :

50 %

par le taux :

25 %

L'amendement n° I-372, présenté par M. de Montgolfier et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :

Alinéa 22

Remplacer le taux :

50 %

par le taux :

40 %

La parole est à M. Philippe Dallier, pour défendre ces deux amendements.

M. Philippe Dallier. Avec votre permission, madame la présidente, je présenterai également l’amendement n° I-373.

Mme la présidente. J’appelle donc en discussion l'amendement n° I-373, présenté par MM. Carle, de Montgolfier et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, et ainsi libellé :

Alinéa 23

Remplacer le taux :

5 %

par le taux :

3 %

Veuillez poursuivre, mon cher collègue.

M. Philippe Dallier. Il s’agit de trois amendements de repli. Nous avons déjà développé notre argumentation en défendant notre amendement visant à la suppression de l’article.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Avis défavorable sur les trois amendements, pour les motifs déjà exposés.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Benoît Hamon, ministre délégué. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° I-371.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° I-372.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° I-373.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° I-4, présenté par M. Marc, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

VIII. – L’affiliation à une fédération sportive mentionnée à l’article L. 131-1 du code du sport donne lieu à une taxe exceptionnelle sur les hautes rémunérations sportives attribuées en 2013 et 2014.

A. – La taxe est assise sur la part des rémunérations individuelles qui excède un million d’euros dans les conditions définies au II du présent article.

B. – Le taux de la taxe est de 50 %.

C. – Le montant de la taxe est plafonné à hauteur de 5 % du chiffre d’affaires réalisé l’année au titre de laquelle la taxe est due.

D. – Pour les rémunérations prises en compte dans l’assiette de la taxe pour 2013, la taxe est exigible au 1er février 2014.

Pour les rémunérations prises en compte dans l’assiette de la taxe pour 2014, la taxe est exigible au 1er février 2015.

E. – La taxe est liquidée et due par l’association ou la société sportive exploitant un club sportif professionnel affilié à une fédération sportive française, quel que soit le lieu d’établissement de son siège social, auprès de la ligue professionnelle compétente mentionnée à l’article L. 132-1 du code du sport, au plus tard le 30 mars de l’année de son exigibilité. Le contribuable qui apporte à la ligue professionnelle la preuve qu'il a acquitté auprès du Trésor public la taxe exceptionnelle de solidarité sur les hautes rémunérations mentionnée au I est réputé avoir acquitté la présente taxe.

F. – La ligue professionnelle déclare à l'administration fiscale, selon le modèle que cette dernière a fixé, centralise et reverse au Trésor la taxe avant le 30 avril de l’année de son exigibilité.

G. – La ligue professionnelle tient une comptabilité séparée pour l'enregistrement des opérations liées à la collecte de la taxe. Elle assure un contrôle de cohérence entre les déclarations qu'elle reçoit et les informations en sa possession en application de l’article L. 132-2 du code du sport. Les informations recueillies par la ligue professionnelle en application du présent VIII sont tenues à la disposition de l'administration sur simple requête. Un rapport annuel est remis à l'administration sur la nature et l'ampleur des contrôles mis en œuvre.

H. – En cas de manquement, de son fait, aux obligations de paiement prévues au G, la ligue professionnelle acquitte l'intérêt de retard prévu par l’article 1727.

En cas de manquement aux obligations de paiement prévues au E, le redevable est radié de la fédération sportive et de la ligue professionnelle auxquelles il est affilié à compter du 1er août de l'année d'exigibilité de la taxe.

I. – La taxe est recouvrée et contrôlée selon les procédures et sous les mêmes sanctions, garanties et privilèges que la taxe sur la valeur ajoutée. Les réclamations sont présentées, instruites et jugées selon les règles applicables à cette même taxe.

La parole est à M. le rapporteur général.