compte rendu intégral

Présidence de M. Jean-Patrick Courtois

vice-président

Secrétaires :

M. Jean Boyer,

M. Marc Daunis.

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente.)

1

Procès-verbal

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

2

Questions orales

M. le président. L’ordre du jour appelle les réponses à des questions orales.

chefs-lieux de canton et dotation de solidarité rurale

M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, auteur de la question n° 752, transmise à Mme la ministre de la décentralisation, de la réforme de l'État et de la fonction publique.

M. Pierre-Yves Collombat. Madame la ministre, comme vous le savez, le mode de scrutin adopté le 17 mai 2013 – voilà donc juste un an – pour l’élection des conseillers départementaux soulève des questions de fond, notamment celles de la représentation des territoires ruraux et de l’articulation entre les métropoles et le reste du département. Je passerai sur ces questions, même si elles ne disparaîtront pas avec le département, dont l’évaporation est, paraît-il, programmée à l’horizon 2021. Nous aurons largement le temps d’y revenir.

Ma question porte sur un point annexe, mais très important : les effets financiers collatéraux du redécoupage cantonal tel qu’il a été réalisé, sur les communes percevant jusque-là la fraction « bourg-centre » de la dotation de solidarité rurale, la DSR. Cela concerne les chefs-lieux, classés d’office dans la catégorie « bourg-centre », et les communes pouvant se prévaloir d’au moins 15 % de la population du canton.

Or la loi relative à l’élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des conseillers communautaires, et modifiant le calendrier électoral prévoit non seulement la division par deux du nombre de cantons, mais entraînera, du fait de la primauté de la règle démographique, la disparition en nombre des cantons ruraux.

En conséquence, les chefs-lieux qui seront supprimés ainsi que les communes n’atteignant plus le seuil de 15 % de la population de leurs nouveaux cantons, considérablement agrandis pour certains d’entre eux, perdront la fraction « bourg-centre » de la DSR.

Pour ces communes, la perte de cette dotation, alors même que la dotation globale de fonctionnement, la DGF, régresse, donnera nécessairement lieu à des difficultés de fonctionnement et de financement.

Ma question est donc simple : dans la situation mouvante que nous connaissons, que comptez-vous faire, en vue des échéances prochaines, pour éviter à ces communes de se trouver dans une telle situation, qui risque d’avoir des retombées quelque peu explosives ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Marylise Lebranchu, ministre de la décentralisation, de la réforme de l'État et de la fonction publique. Monsieur le sénateur, vous m’interrogez à juste titre sur les conséquences du redécoupage de la carte cantonale sur la répartition de la première fraction dite « bourg-centre » de la DSR. Cette part de la dotation est notamment, vous l’avez rappelé, attribuée aux communes chefs-lieux de canton, ainsi qu’aux communes regroupant au moins 15 % de la population totale du canton.

Je vous confirme, comme j’ai pu le constater lors de mes déplacements, que cette question taraude légitimement un certain nombre d’élus.

La réforme de la carte cantonale n’aura pas, en l’état actuel – vous avez évoqué certaines perspectives –, d’incidence avant l’année 2017 sur la répartition de la DSR « bourg-centre ». En effet, la loi du 17 mai 2013 précise ceci : « La qualité de chef-lieu de canton est maintenue aux communes qui la perdent dans le cadre d’une modification des limites territoriales des cantons […] jusqu’au prochain renouvellement général des conseils départementaux. »

Ainsi, les décrets de remodelage de la carte cantonale ne devraient s’appliquer qu’en mars 2015 au plus tôt, à l’occasion du renouvellement des conseils départementaux. Encore faudrait-il que celui-ci ait lieu, et vous avez vous-même parlé de perspectives différentes ; mais, pour faire court, je confirme que, pour 2015, il n’y a pas de souci.

En tout état de cause, l’éligibilité aux trois fractions de la dotation de solidarité rurale est appréciée sur la base des données connues au 1er janvier de l’année précédant celle de la répartition. Ce n’est donc qu’à partir de 2017 que sera prise en compte la situation des communes au 1er janvier 2016.

Le Gouvernement est pleinement conscient de l’importance que revêt la DSR « bourg-centre », qui aide les communes bénéficiaires à remplir une fonction essentielle de structuration de leur territoire. Il est aussi sensible que vous à l’enjeu de solidarité financière, sur lequel vous vous interrogez en réalité ; la DSR aura progressé de 110 millions d’euros entre 2012 et 2014 pour atteindre 954 millions d’euros.

Le précédent Premier ministre avait rappelé, lors de son intervention devant le 96e congrès des maires et des présidents de communautés de France, le 19 novembre 2013, que l’évolution de la carte cantonale n’aurait aucune incidence sur des éléments liés à la qualité de chef-lieu de canton.

Les décisions correspondantes et leur traduction législative seront donc appréhendées dès cette année 2014, en concertation avec les élus locaux au sein du comité des finances locales, dans un contexte plus global de réforme de la dotation globale de fonctionnement, dont fait partie la DSR. Ce sujet viendra à l’ordre du jour vers la fin du mois de juin, puisque le comité des finances locales se réunira officiellement le 17 juin.

En amont de cette organisation institutionnelle qui doit se réinstaller compte tenu des élections municipales, c’est à l’aune de tous les projets structurels à réexaminer avec attention que nous voulons étudier précisément le devenir des territoires ruraux. Le Premier ministre, Manuel Valls, s’est engagé à ce que les territoires ruraux soient dotés et pris en compte de manière aussi précise que possible. Par conséquent, à court terme et pour les prochaines dotations, les chefs-lieux de canton restent chefs-lieux de canton même si, sur la carte cantonale, ils ne le sont plus. C’était la meilleure des assurances qu’on pouvait leur donner.

Je vous remercie d’avoir posé cette question qui intéresse tous les maires et élus de ces bourgs-centres et bourgs chefs-lieux de canton.

M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat.

M. Pierre-Yves Collombat. Madame la ministre, je sens que cette question vous préoccupe, mais je ferai deux remarques.

D’abord, vous le savez, je me méfie toujours des pourcentages : 110 % de pas grand-chose, cela reste tout de même pas grand-chose !

Ensuite, je souligne que, si vous m’avez bien répondu sur les bourgs-centres, vous ne l’avez pas fait s’agissant des communes représentant plus de 15 % de la population totale du canton. Or ces communes sont très nombreuses puisque les cantons ont été considérablement agrandis ; je pense particulièrement au mien, qui est quatre ou cinq fois plus grand qu’auparavant. Je le répète, pour toutes ces communes qui sont peut-être aussi plus importantes que les bourgs-centres, vous ne m’avez pas répondu. Et je crains que personne, pour l’instant, n’ait encore répondu.

Vu la situation mouvante dans laquelle nous sommes, la solution la plus raisonnable serait, selon moi, en attendant de trouver une nouvelle assise à la fois territoriale et financière, une solution acceptable par tout le monde, de procéder en quelque sorte comme on l’avait fait par le passé pour la DGF, en se contentant de « coefficienter » d’une année sur l’autre.

Donc, sur ce plan-là, une incertitude demeure.

conséquences financières induites en matière patrimoniale par la fusion des établissements publics de coopération intercommunale

M. le président. La parole est à M. Bernard Fournier, auteur de la question n° 760, adressée à Mme la ministre de la décentralisation, de la réforme de l'État et de la fonction publique.

M. Bernard Fournier. Madame la ministre, je souhaite appeler votre attention, et celle du Gouvernement, sur les conséquences financières induites en matière patrimoniale par la fusion des établissements publics de coopération intercommunale

Comme vous le savez, la loi du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales a simplifié le cadre juridique de la fusion des EPCI. Certaines de ces dispositions ont été modifiées par la loi du 29 février 2012 visant à assouplir les règles relatives à la refonte de la carte intercommunale.

Deux des objectifs principaux de cette réforme étaient la rationalisation des périmètres des EPCI à fiscalité propre et la réduction du nombre de syndicats intercommunaux. Le but sous-jacent était de réaliser, par la fusion d’EPCI, la mutualisation des moyens pour aboutir in fine à des économies d’échelle.

Cependant, aujourd’hui, dans les faits, les nouvelles intercommunalités se voient refuser l’enregistrement, par les services des hypothèques, de toute vente de parcelles ou de crédits-baux immobiliers si n’est pas établi au préalable, par acte en la forme administrative ou par acte notarié, un transfert des biens entre les anciens EPCI fusionnés et la nouvelle entité.

Cette procédure, que les élus critiquent, ne peut que tendre à alourdir considérablement l’exercice effectif des compétences du nouvel EPCI issu de la fusion.

En outre, elle est contre-productive et va à l’encontre de l’esprit même de la réforme, puisqu’elle constitue une charge financière supplémentaire et parfaitement inutile pour nos collectivités.

Pourtant, la loi du 16 décembre 2010 est suffisamment claire en la matière puisqu’elle indique ceci : « L’ensemble des biens, droits et obligations des établissements publics fusionnés est transféré au syndicat issu de la fusion. »

Enfin, cette loi précise également très clairement : « La fusion de syndicats est effectuée à titre gratuit et ne donne lieu au paiement d’aucune indemnité, droit, taxe, salaire ou honoraires. » Quelle simplicité ! Le transfert est donc automatique et gratuit !

Madame le ministre, à l’heure où les budgets locaux sont plus que resserrés, il n’est pas acceptable, après des fusions impulsées, parfois contraintes par les services de l’État, comme cela a largement été le cas dans mon département, il n’est pas acceptable, disais-je, que les nouvelles intercommunalités subissent une fois encore les conséquences financières en matière patrimoniale.

Je crois, pour ma part, qu’il n’est pas souhaitable d’alourdir l’exercice effectif de l’action communautaire.

En conséquence, je souhaite connaître votre position sur ce sujet et vous demande solennellement de bien vouloir remédier à cette situation, que je trouve quelque peu injuste.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Marylise Lebranchu, ministre de la décentralisation, de la réforme de l'État et de la fonction publique. Monsieur le sénateur, vous appelez à juste titre mon attention sur les conséquences financières et patrimoniales des fusions d’établissements publics de coopération intercommunale.

Je partage pleinement le souhait que vous avez formulé d’une simplification des démarches liées à la refonte de la carte intercommunale.

Je suis particulièrement sensible à la préoccupation que vous avez exprimée au sujet du coût que représente, par exemple, l’enregistrement d’actes auprès des services de la publicité foncière à la suite des fusions d’EPCI.

Ces formalités constituent une démarche indispensable pour garantir la consistance des droits patrimoniaux détenus par les EPCI issus de fusions. En soi, il serait déraisonnable de faire disparaître purement et simplement cette procédure.

En revanche, les transferts de biens à l’EPCI issu de la fusion étant effectués à titre gratuit, dans un but d’intérêt général, ils ne sauraient donner lieu au paiement de taxes ou de droits.

Tel est le sens de l’exonération générale qui a été prévue par les articles L.5211-41-3 du code général des collectivités territoriales et 1042 A du code général des impôts, que vous signalez à juste titre.

Les textes applicables sont clairs. Tout transfert à titre gratuit de biens et droits immobiliers ou mobiliers opéré à la faveur d’une fusion d’EPCI échappe de plein droit aux droits d’enregistrement et à la taxe de publicité foncière, à la taxe additionnelle aux droits d’enregistrement, à la contribution de sécurité immobilière prévue à l’article 879 du code général des impôts, ainsi qu’à tout autre droit accessoire.

Il en va désormais de même pour les communes nouvelles – M. Pélissard avait beaucoup insisté sur ce point –, à la suite de l’adoption de l’article 46 de la loi de finances rectificative pour 2013.

En tout état de cause, le rappel de ces règles a été diffusé à l’ensemble des acteurs administratifs, qui ne manqueront pas de faire diligence pour donner leur plein effet à ces mesures d’assouplissement.

Je vous remercie, monsieur le sénateur, d’avoir rouvert ce dossier très important, d’autant que d’autres EPCI pourraient fusionner. Nous devons tous ensemble être vigilants. Votre question, que je considère comme une alerte, me donne l’occasion de vérifier l’ensemble du dossier.

M. le président. La parole est à M. Bernard Fournier.

M. Bernard Fournier. Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse. Je vois que nous partageons la même analyse, ce dont je me réjouis.

métropoles

M. le président. La parole est à M. Michel Savin, auteur de la question n° 781, adressée à Mme la ministre de la décentralisation, de la réforme de l'État et de la fonction publique.

M. Michel Savin. Je souhaite attirer votre attention, madame la ministre, sur les difficultés que peuvent rencontrer certains EPCI, établissements publics de coopération intercommunale, dans leur transformation en métropole, prévue au 1er janvier prochain en application de la loi de modernisation de l’action publique territoriale du 27 janvier 2014.

Ces nouvelles collectivités seront compétentes de plein droit, en lieu et place des communes membres, dans des domaines structurants – l’urbanisme, la politique locale de l’habitat, le développement et l’aménagement économiques, l’aménagement de l’espace métropolitain – ou dans des domaines ayant un impact sur la vie quotidienne des usagers – je pense notamment à la gestion du service de l’eau potable et des réseaux énergétiques.

Ces transferts de compétences sont donc lourds de conséquences à trois points de vue au moins : en matière financière, avec l’évaluation des coûts de chacune d’elles dans les budgets communaux et l’estimation de leurs coûts dans les futurs budgets communautaires ; en matière de ressources humaines, avec le transfert des personnels et la recherche de mutualisation pour un fonctionnement raisonné à l’échelle du territoire métropolitain ; enfin, au niveau de la qualité du service public, qui ne devra pas faire les frais d’une quelconque dégradation à l’occasion de ces processus de métropolisation.

En outre, la rédaction de cette loi laisse aux exécutifs locaux la possibilité de définir le contour précis de ces transferts quand seront parus les décrets, circulaires et autres mesures transitoires annoncés pour la mise en œuvre des plans locaux d’urbanisme intercommunaux.

Comme vous le constatez, le travail restant à accomplir pour la transformation en métropole est très important à quelques mois de l’échéance du 1er janvier 2015.

Si je prends pour exemple le cas de l’agglomération de Grenoble, le dossier est au stade du diagnostic, dont l’élaboration a suscité plusieurs questions et a mis en évidence des impacts collatéraux directs ou indirects sur des syndicats de communes, dont l’existence peut être remise en cause. Ces effets en cascade dépassent très largement le territoire et la gouvernance de l’agglomération.

De plus, le calendrier électoral de 2014 a entraîné une suspension plus ou moins longue des exécutifs locaux le temps des scrutins municipaux, puis communautaires, et de l’installation des nouvelles équipes.

Enfin, le volume des transferts à opérer peut être différent d’une communauté urbaine ou d’une communauté d’agglomération à une autre en fonction de son niveau d’intégration avant le passage en métropole.

Pour l’agglomération grenobloise, le nouvel exécutif présentera prochainement les orientations qui présideront au projet de territoire de sa mandature.

Aussi, vous l’aurez compris, madame la ministre, les six mois qui restent avant le 1er janvier 2015 semblent bien insuffisants pour organiser, dans des conditions acceptables, les transferts de compétences des communes à la future métropole.

Au regard de cette situation, de ses enjeux et des conséquences que pourraient avoir des transferts précipités sur la continuité du service public, les personnels et les finances des collectivités, je souhaiterais savoir, madame la ministre, si le Gouvernement accepterait de repousser d’un an le passage en métropole pour les EPCI qui le jugeraient opportun et en feraient la demande.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Marylise Lebranchu, ministre de la décentralisation, de la réforme de l'État et de la fonction publique. Monsieur le sénateur, vous demandez qu’il soit possible de repousser d’un an, au 1er janvier 2016, la transformation des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre en métropoles, tout du moins pour ceux qui le jugeraient opportun et en feraient la demande.

L’article 43 de la loi du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles prévoit en effet que sont transformés en métropoles par décret, au 1er janvier 2015, les EPCI de plus de 400 000 habitants situés dans une aire urbaine de plus de 650 000 habitants.

Sont ainsi concernées cinq communautés urbaines – Bordeaux, Lille, Nantes, Toulouse et Strasbourg – et trois communautés d’agglomération – Grenoble, ville que vous avez citée, Rennes et Rouen –, auxquelles s’ajoute Nice, dont le statut s’alignera sur le statut de droit commun.

À l’heure où le Gouvernement s’engage dans une réforme territoriale prévoyant un renforcement du cadre intercommunal, il paraît souhaitable de conserver la date du 1er janvier 2015 pour la création de ces métropoles et la rénovation du régime juridique métropolitain. Ce nouveau statut constitue en effet un progrès pour faire émerger les initiatives économiques, sociales, environnementales et culturelles. C’est ce que nous ont demandé les métropoles et, en particulier, les anciennes communautés d’agglomération.

Repousser cette date nuirait sans doute au processus d’intégration de l’exercice des politiques publiques locales à l’échelon des grands bassins de vie de nos capitales régionales, donc au redressement de nos territoires.

J’ajoute, enfin, que ce choix d’une transformation rapide est véritablement conforme à la volonté du législateur, puisque l’introduction de la date du 1er janvier 2015 s’est matérialisée par un amendement introduit lors de l’examen du projet de loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles.

Je me sens liée par le fait que c’est le Parlement qui a demandé que nous allions assez vite. Mais, vous avez raison, monsieur le sénateur, il restera des problèmes à régler. Nous avons évoqué les syndicats locaux et certaines coopérations entreprises par l’ancien EPCI qui devront être reprises par la métropole.

La direction générale des collectivités locales, ou DGCL, est à la disposition des élus et des services administratifs de l’EPCI concerné pour essayer de trouver des solutions. Engager la réforme territoriale en laissant les métropoles au bord du chemin risquerait d’être quelque peu compliqué ! Il faut aussi faire attention à la durée des mandats et avoir de véritables discussions sur les transferts de patrimoine notamment.

C’est la raison pour laquelle je préfère, à ce stade, maintenir la date du 1er janvier 2015 et me mettre à la disposition des services des collectivités concernées et de vous-même, monsieur le sénateur.

M. le président. La parole est à M. Michel Savin.

M. Michel Savin. Madame la ministre, j’entends bien votre réponse. Cette évolution est bien évidemment un progrès, et tous les élus locaux estiment que c’est une bonne démarche.

Encore une fois, le problème vient du fait que toutes les intercommunalités concernées par cette transformation en métropole ne sont pas au même niveau. Autant les communautés urbaines et certaines communautés d’agglomération ont déjà intégré de nombreuses compétences liées au passage au statut de métropole, autant d’autres n’en sont qu’au tout début. Pour certaines, les discussions n’ont pas encore commencé, alors qu’il ne reste qu’un peu plus de six mois. Agir dans la précipitation est, me semble-t-il, un très mauvais signal envoyé à ces collectivités.

Si je prends l’exemple de la collectivité dans laquelle je suis élu, aucune réunion n’a encore eu lieu sur les questions d’organisation ou sur les choix qui seront faits en termes de compétences – j’ai évoqué dans mon intervention liminaire l’urbanisme, le logement, la politique économique ou encore la politique de l’eau, qui a un impact direct tant sur le service fourni et son coût que sur les personnels.

Mon intervention n’a pas pour objet de remettre en cause la transformation en métropole. Je souhaite que soit donnée la possibilité aux intercommunalités qui le désirent – une ou deux d’entre elles seulement seront concernées – de travailler de façon sereine à cette évolution, en leur donnant un an pour la préparer, l’organiser et en débattre avec les personnels. Comment peut-on réussir ce passage, certes souhaité mais important, en six mois lorsque rien n’a encore été fait ?

Encore une fois, cette loi est soutenue par tous, mais toutes les intercommunalités ne sont pas au même niveau d’intégration. La réforme risque donc d’être imposée à certains et d’être réalisée dans la précipitation. Je le redis, c’est un très mauvais signal envoyé aux collectivités.

Je vous demande, madame la ministre, s’il n’est pas possible, à titre tout à fait exceptionnel, et sans remettre en cause le passage au statut de métropole, de donner aux élus l’opportunité de préparer les choses dans de meilleures conditions. Ceux-ci se posent de nombreuses questions, car ils ne disposent aujourd'hui que d’un court délai : six mois, cela passe vite.

accueil d'enfants handicapés dans les institutions spécialisées en france et en belgique

M. le président. La parole est à M. Daniel Reiner, auteur de la question n° 722, adressée à Mme la secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l’exclusion.

M. Daniel Reiner. Madame la secrétaire d’État, ma question a été déposée au mois de février dernier. Depuis, le Gouvernement n’est pas resté sans rien faire sur ce sujet, ce qui m’a conduit à actualiser certains points de mon propos.

Vous le savez, de 6 000 à 8 000 Français handicapés, enfants et adultes, sont aujourd’hui accueillis dans des structures d’hébergement en Belgique. En effet, devant l’insuffisance de places dans des institutions spécialisées, un grand nombre de familles françaises n’ont d’autre recours que de faire appel à ces lieux d’accueil, souvent éloignés de leur domicile.

Dans mon département de Meurthe-et-Moselle, frontalier avec la Belgique, les familles concernées demandent la construction d’un foyer de vie à Jarny. On rencontre des demandes similaires dans la plupart des départements frontaliers.

Par ailleurs, de nombreuses associations, au premier rang desquelles l’UNAPEI, l’Union nationale des associations de parents d’enfants inadaptés, ont alerté les pouvoirs publics sur les conditions de prise en charge des personnes dans certains établissements belges. Régulièrement, la presse se fait l’écho de ces problèmes. Ainsi, un grand journal du matin a publié, voilà moins d’un mois, un long article sur « le scandale des handicapés ».

Il faut rappeler que l’assurance maladie et les conseils généraux financent une grande part de cet accueil, dont le coût s’élève à plus de 300 millions d’euros, et qu’il est donc normal que nous disposions de moyens pour en garantir la qualité. J’ai noté d’ailleurs avec satisfaction que l’accord-cadre signé entre la France et la Wallonie, ratifié récemment par le Parlement, permet aujourd’hui d’envisager au moins un échange d’informations.

Début mai, Mme Ségolène Neuville, secrétaire d’État chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l’exclusion, s’est rendue à Namur où elle a fait le point sur la situation avec sa collègue wallonne, Mme Tillieux, puis à Lille où elle a rencontré des élus locaux.

Madame la secrétaire d’État, ma question est donc en réalité double.

J’aimerais que vous m’indiquiez les modalités de mise en œuvre de la décision du Gouvernement d’augmenter le nombre de places d’accueil et les mesures de soutien aux associations et collectivités territoriales qui s’engagent pour une meilleure prise en charge des handicapés mentaux et physiques en France.

Je souhaiterais également que vous puissiez me dire, notamment après ce déplacement de Mme Neuville en Belgique, quelles actions le Gouvernement met en œuvre pour assurer une meilleure coopération avec l’État belge, et ce afin de rassurer les familles, qui ont légitimement besoin d’un soutien appuyé des pouvoirs publics.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée de la famille, des personnes âgées et de l'autonomie. Monsieur le sénateur, vous l’avez dit, la secrétaire d’État chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l’exclusion, Mme Ségolène Neuville, s’est entretenue au début du mois de mai sur ce sujet avec Mme Tillieux, ministre wallonne de la santé, de l’action sociale et de l’égalité des chances, afin d’engager une phase active de collaboration entre nos deux pays.

D’abord, vous avez raison de le souligner, le Gouvernement poursuit la création de places : ce sont de 3 000 à 4 000 places qui sont ouvertes chaque année. Ainsi, en 2014, plus de 1 000 places devraient être créées en Île-de-France, région où les besoins sont encore énormes.

Mais ces mesures ne répondent pas totalement aux besoins : la création de places n’exonère en rien les structures existantes d’accueillir les personnes les plus lourdement handicapées, les plus difficiles à accompagner. C’est pourquoi Mmes Touraine et Neuville ont demandé à un conseiller d’État, M. Piveteau, de leur formuler des préconisations cohérentes avec la politique du Gouvernement afin de développer une « réponse accompagnée », une médecine de parcours, qui visent à favoriser un parcours sans rupture de prise en charge pour les personnes handicapées. Ce rapport devrait leur être adressé au tout début du mois de juin.

Par ailleurs, le Gouvernement met en place, depuis le mois de mars 2014, l’accord franco-wallon, ratifié par le Parlement en novembre dernier.

Je tiens à rappeler que si l’accueil des personnes handicapées en Wallonie est une réponse limitée à des situations bien précises, elle est majoritairement de qualité.

Les autorités wallonnes et la France ont engagé un travail qui vise à s’assurer de cette qualité. Des conventions de financement plus rigoureuses s’appliqueront prochainement entre les établissements wallons et la sécurité sociale française ; l’Agence régionale de santé du Nord-Pas-de-Calais y travaille actuellement. Certains conseils généraux ont engagé, aux côtés des autorités belges, un travail en direct avec les centres belges avec lesquels ils collaborent. Des travaux d’élaboration d’un référentiel qualité commune France-Wallonie vont s’engager, conjointement avec l’Agence wallonne pour l’intégration des personnes handicapées, l’AWIPH, qui en est d’accord.

En ce qui concerne le calendrier, sachez que la prochaine commission mixte franco-wallonne se tiendra effectivement à la fin du mois de juin en Wallonie.