compte rendu intégral

Présidence de Mme Bariza Khiari

vice-présidente

Secrétaires :

M. Jean Desessard,

Mme Marie-Noëlle Lienemann.

Mme la présidente. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à seize heures cinq.)

1

Procès-verbal

Mme la présidente. Le compte rendu intégral de la séance du jeudi 19 juin 2014 a été publié sur le site internet du Sénat.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté.

2

Engagement de la procédure accélérée pour l'examen de trois propositions de loi

Mme la présidente. En application de l’article 45, alinéa 2, de la Constitution, le Gouvernement a engagé la procédure accélérée pour l’examen, d’une part, de la proposition de loi relative aux taxis et aux voitures de transport avec chauffeur et, d’autre part, des deux propositions de loi relatives à la sécurisation des transactions relatives à la zone d’aménagement concerté du quartier de Gerland (Lyon).

Ces trois propositions de loi ont été déposées sur le bureau de l’Assemblée nationale le lundi 23 juin 2014.

3

Dépôt d'un rapport

Mme la présidente. M. le président du Sénat a reçu le rapport annuel 2013 du fonds de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante.

Acte est donné du dépôt de ce rapport.

Il a été transmis à la commission des affaires sociales.

4

Communication du Conseil constitutionnel

Mme la présidente. M. le président du Conseil constitutionnel a informé le Sénat, le vendredi 20 juin 2014, qu’en application de l’article 61–1 de la Constitution la Cour de cassation a adressé au Conseil constitutionnel une décision de renvoi d’une question prioritaire de constitutionnalité portant sur les dispositions de l’article 226–19 du code pénal (Atteintes aux droits de la personne résultant des fichiers ou des traitements informatiques) combinées aux dispositions de l’article L. 1223–3 du code de la santé publique (Établissements de transfusion sanguine) (2014–412 QPC).

Le texte de cette décision de renvoi est disponible à la direction de la séance.

Acte est donné de cette communication.

5

Décisions du Conseil constitutionnel sur des questions prioritaires de constitutionnalité

Mme la présidente. M. le président du Conseil constitutionnel a communiqué au Sénat, par courriers en date du vendredi 20 juin 2014, deux décisions du Conseil relatives à des questions prioritaires de constitutionnalité portant sur :

- le 2° du 1 de l’article 109, le 6° de l’article 112, le 8 ter de l’article 150-0 D et le second alinéa de l’article 161 du code général des impôts (Régime fiscal applicable aux sommes ou valeurs reçues par l’actionnaire ou l’associé personne physique dont les titres sont rachetés par la société émettrice) (n° 2014–404 QPC) ;

- le deuxième alinéa du paragraphe I de l’article L. 5211–6–1 du code général des collectivités territoriales (Répartition des sièges de conseillers communautaires entre les communes membres d’une communauté de communes ou d’une communauté d’agglomération) (n° 2014–405 QPC).

Acte est donné de ces communications.

6

 
Dossier législatif : proposition de loi visant à répartir les responsabilités et les charges financières concernant les ouvrages d'art de rétablissement des voies
Discussion générale (suite)

Ouvrages d'art de rétablissement des voies

Adoption définitive en deuxième lecture d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Discussion générale (début)
Dossier législatif : proposition de loi visant à répartir les responsabilités et les charges financières concernant les ouvrages d'art de rétablissement des voies
Article 1er

Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la discussion en deuxième lecture de la proposition de loi, modifiée par l’Assemblée nationale, visant à répartir les responsabilités et les charges financières concernant les ouvrages d’art de rétablissement des voies (proposition n° 559, texte de la commission n° 640, rapport n° 639).

Dans la discussion générale, la parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Frédéric Cuvillier, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche. Madame la présidente, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, les infrastructures de transport sont essentielles pour répondre aux besoins de mobilité de nos concitoyens et renforcer la compétitivité de notre pays. Pourtant, leur gestion dans les territoires peut parfois être source de difficultés pour les collectivités locales.

Le texte qui est aujourd’hui examiné en deuxième lecture par la Haute Assemblée permettra de progresser dans ce domaine. Il s’agit de définir un cadre permettant de répondre aux difficultés nées des divergences de vues, sur l’entretien des franchissements d’infrastructures, entre l’État ou ses établissements publics, d’une part, et les collectivités territoriales, d’autre part.

Lorsqu’il y a franchissement d’une infrastructure par une autre, la jurisprudence est constante : elle impose au propriétaire de la voie rétablie d’entretenir à ses frais l’ouvrage d’art nécessaire au franchissement, sauf convention contraire.

Ce principe s’applique à toutes les infrastructures – routes, chemins de fer, canaux – quel que soit le schéma de superposition entre les deux voies et quels que soient les maîtres d’ouvrage de la nouvelle infrastructure qui justifie la réalisation de l’ouvrage d’art.

Cette situation est à l’origine de nombreuses difficultés sur les territoires. Le cas des petites communes rurales traversées par une autoroute ou par une ligne à grande vitesse et qui doivent supporter les charges liées à l’entretien du pont nécessaire pour maintenir une route communale est souvent cité en exemple. Il est évident que les montants en jeu et les capacités techniques nécessaires sont souvent hors de portée pour ces collectivités.

La représentation nationale a ainsi légitimement souhaité se saisir de ce sujet pour apporter des réponses concrètes à ces situations. Mme Évelyne Didier, qui avait évoqué ce sujet dès notre première rencontre, a ainsi déposé une proposition de loi en ce sens en juillet 2011, adoptée par le Sénat en janvier 2012. Le parcours parlementaire de cette proposition de loi s’étant poursuivi avec persévérance et opiniâtreté, celle-ci a ensuite été examinée par l’Assemblée nationale le 22 mai dernier.

Le Gouvernement sait l’attachement de l’ensemble des parlementaires à trouver une solution. Il souhaite lui aussi définir un cadre clair pour résoudre les situations problématiques pour les collectivités, notamment les plus fragiles. C’est le sens de l’action gouvernementale : apporter des réponses concrètes aux problèmes rencontrés par nos concitoyens et par leurs territoires. C’est la raison pour laquelle nous soutenons le principe de cette proposition de loi.

Lors de l’examen du texte à l’Assemblée nationale, il y a un mois, le Gouvernement a proposé plusieurs amendements permettant de faire évoluer le dispositif initial et d’atteindre aujourd’hui un point d’équilibre qui permet de répondre à l’ensemble des préoccupations. Je tiens à rappeler brièvement les principaux équilibres du texte qui va être examiné par la Haute Assemblée.

En premier lieu, la proposition de loi pose le principe de l’existence d’une convention de gestion pour toute nouvelle infrastructure de transport – alinéa 6. Elle définit également son contenu – alinéas 7 à 10.

Les travaux parlementaires ont été l’occasion de préciser ce point. Ils ont confirmé le principe de référence selon lequel le gestionnaire de la voie nouvelle prend en charge l’ensemble des dépenses liées à la structure de l’ouvrage d’art. Mais, si ce principe doit en effet guider la répartition des charges, il est nécessaire de laisser aux partenaires une certaine souplesse dans la conduite des discussions.

Personne ne doute que ce principe devra être appliqué tel quel pour les petites collectivités auxquelles j’ai fait référence précédemment et qui ont par conséquent un statut particulier tenant compte de leur surface financière, de leurs difficultés d’ingénierie. Toutefois, il ne faut pas exclure la possibilité d’adapter ce principe en fonction des spécificités propres des collectivités. Je pense à leur capacité financière, à leur capacité technique ou encore à l’intérêt qu’elles retirent de la réalisation de la nouvelle infrastructure de transport. Une petite commune rurale ne peut pas être traitée de la même manière qu’un conseil général : ce ne serait ni compréhensible ni juste.

Au-delà de la question des ouvrages neufs se pose bien entendu la question du traitement des ouvrages existants. Je tiens à rappeler qu’on dénombre environ 12 000 franchissements pour le réseau ferroviaire, 2 000 pour le réseau routier non concédé et encore 2 500 pour les voies navigables.

La généralisation immédiate aux ouvrages existants des dispositions applicables aux ouvrages neufs serait insoutenable pour l’État et ses opérateurs.

Elle serait insoutenable d’un point de vue budgétaire, dans le contexte de redressement des comptes publics que nous avons engagé : ce serait plusieurs dizaines, voire centaines de millions d’euros par an supplémentaires à prélever sur les budgets consacrés aux infrastructures de transport. Nous peinons déjà à trouver les ressources financières. Vous mesurez bien la nécessité que les règles soient applicables mais aussi soutenables financièrement. Pour ce faire, elles doivent prendre en compte la réalité budgétaire et laisser suffisamment de temps pour se préparer à la prise en compte de ces dispositifs nouveaux.

Elle serait en outre insoutenable d’un point de vue technique étant donné le nombre d’ouvrages concernés : il faut donc identifier les situations les plus urgentes qui devront être traitées.

Le texte qui va être examiné prévoit ainsi un recensement des ouvrages d’art de rétablissement des voies pour lesquels il n’existe aucune convention en vigueur. Le secrétaire d’État chargé des transports identifiera ceux des ouvrages recensés dont les caractéristiques, notamment techniques et de sécurité, justifient l’établissement d’une telle convention.

Enfin, les situations faisant l’objet d’un contentieux doivent également trouver une issue rapide. Des dispositions permettant le règlement prioritaire de ces situations ont été introduites dans le texte législatif.

Mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens à remercier tout particulièrement Mme Évelyne Didier et M. le rapporteur, Christian Favier, du travail constructif qu’ils ont mené et des échanges qu’ils ont eus avec le Gouvernement et ses services sur ce texte.

Je ne doute pas que l’examen qui va s’engager aboutira à l’adoption de ce texte de bon sens qui, en apportant une réponse rapide et efficace, permet de mettre fin à des situations difficiles sur le terrain, sources d’inquiétude pour les élus locaux, tout en s’inscrivant dans une démarche pragmatique et responsable. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC. – MM. Yvon Collin, Marc Laménie et Jean-Pierre Cantegrit applaudissent également.)

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.

M. Christian Favier, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des lois, mes chers collègues, le Sénat est appelé à examiner, en deuxième lecture, la proposition de loi visant à répartir les responsabilités et les charges financières concernant les ouvrages d’art de rétablissement des voies de notre collègue Mme Evelyne Didier, adoptée par l’Assemblée nationale le 22 mai dernier.

Le 17 janvier 2012, en première lecture, notre Haute Assemblée avait adopté à l’unanimité ce texte qui vise à répondre à la question de la répartition des charges de gestion d’un ouvrage de rétablissement d’une voie de communication coupée à l’occasion de la réalisation d’une infrastructure de transport.

Sans entrer dans les détails, je rappellerai seulement que les principes régissant cette question ont été définis par une jurisprudence ancienne et constante du Conseil d’État, selon laquelle les ouvrages d’art de rétablissement de voies interrompues par la construction d’une infrastructure de transport nouvelle sont incorporés à l’infrastructure dont ils relient les deux parties. Ainsi, il revient donc aux collectivités territoriales d’assurer l’entretien des ouvrages d’art de rétablissement des voies.

Pourtant, force est de constater que de nombreuses collectivités ignorent les obligations qui leur incombent. Et face aux contraintes que la gestion d’un ouvrage d’art de rétablissement des voies fait peser sur leur budget, elles peuvent être parfois amenées à réduire, voire à interdire, l’utilisation de leur voirie afin de préserver la sécurité des utilisateurs.

Rappelons également que les projets de réalisation d’une infrastructure de transport coupant une voirie déjà existante, comme ceux qui visent à effectuer des travaux de rétablissement, sont, la plupart du temps, imposés par l’État à la collectivité territoriale, laquelle ne dispose souvent d’aucun pouvoir de décision en la matière.

Pour répondre à cette injustice et aux lourdes difficultés rencontrées par nos collectivités, en particulier les plus petites d’entre elles, cette proposition de loi pose un nouveau principe général de répartition des responsabilités et des charges entre les collectivités territoriales et les gestionnaires des infrastructures de transport nouvelles, selon lequel les charges et responsabilités seraient réparties entre, d’une part, les collectivités territoriales à qui incomberaient la prise en charge et la gestion des trottoirs, du revêtement routier et des joints qui en assurent la continuité et, d’autre part, les gestionnaires de l’infrastructure de transport nouvelle pour la prise en charge de la surveillance, de l’entretien et de la reconstruction de la structure de l’ouvrage et de l’étanchéité de l’ensemble de ce dernier.

La prise en compte des particularités de chaque ouvrage d’art relèverait d’une convention entre les deux parties. Les conventions déjà signées continueraient de s’appliquer mais seraient, en cas de dénonciation, renégociées selon le principe général que je viens d’énoncer. S’agissant des situations de litige, en l’absence de convention, il reviendrait aux deux parties d’en conclure une dans un délai de trois ans.

En première lecture, il y a deux ans, nous avions, sur ma proposition, procédé à des améliorations rédactionnelles et à une réorganisation des dispositions de la proposition de loi, afin de conforter le cadre protecteur proposé pour les collectivités territoriales.

La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire de l’Assemblée nationale a adopté seize amendements rédactionnels ou de précision, afin de renforcer et de clarifier ce nouveau principe de répartition des charges.

En séance publique, l’Assemblée nationale a adopté – M. le secrétaire d’État vient de le rappeler – huit amendements du Gouvernement. L’un d’entre eux visait à préciser que la répartition des charges devrait tenir compte de plusieurs facteurs : la volonté du gestionnaire de la voie affectée de supporter seul les charges de surveillance, d’entretien et de réparation pour des motifs de sécurité de son infrastructure, la capacité contributive du gestionnaire de l’infrastructure de transport nouvelle, la capacité contributive de la collectivité dont la voie est affectée…

Il est également prévu que la médiation du préfet devrait être précédée, en cas de désaccord entre les deux parties sur la conclusion d’une convention de répartition des charges, d’un avis préalable de la chambre régionale des comptes.

Ces amendements visaient également à permettre aux collectivités territoriales ayant engagé une action contentieuse avant le 1er juin 2014 de trouver, via la conclusion d’une convention, une solution négociée avec l’État ou l’un de ses établissements publics, ainsi qu’à établir un recensement des ouvrages afin d’en connaître le nombre exact – le chiffre évoqué d’environ 17 000 ouvrages concernés mérite d’être affiné –, la répartition et l’état général.

Pour ne pas retarder la mise en œuvre de cette proposition de loi et malgré un certain nombre de restrictions apportées par l’Assemblée nationale, je vous propose d’accepter les modifications adoptées qui tendent à renforcer et à conforter le nouveau principe de répartition des charges liées aux ouvrages d’art de rétablissement des voies.

L’entrée en vigueur rapide de cette proposition de loi permettrait aux élus locaux de se saisir pleinement de ces nouvelles dispositions, ce qui les aiderait à mettre fin, pour certaines d’entre elles, à plusieurs années de conflits avec les opérateurs de l’État.

La commission des lois, qui a examiné cette proposition de loi le 18 juin dernier, l’a adoptée à l’unanimité et a donné un avis conforme que je vous invite à suivre. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste. – M. Yvon Collin applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à M. René Vandierendonck.

M. René Vandierendonck. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, chère Évelyne Didier, mes chers collègues, il est peu de dire que cette proposition de loi était attendue par les collectivités territoriales concernées.

Je suis heureux que cinq ans d’un combat opiniâtre et de négociations qui l’étaient tout autant soient aujourd’hui récompensés, puisque la question de la répartition des responsabilités et des charges financières entre, d’une part, les collectivités les territoriales et, d’autre part, l’État et ses opérateurs – Réseau ferré de France, ou RFF, Voies navigables de France, ou VNF, et SNCF – a alimenté nombre de débats localement.

Je rappelle, comme d’autres, que l’on dénombre aujourd’hui au moins 12 000 franchissements pour le réseau ferroviaire, 2 000 pour le réseau routier non concédé et encore 2 500 pour les voies navigables. Je n’ai même pas inclus à ce dernier chiffre les ouvrages de franchissement du canal Seine-Nord.

M. Frédéric Cuvillier, secrétaire d'État. Effectivement !

M. René Vandierendonck. Et pour une grande majorité d’entre eux, il n’existe pas de convention de gestion entre les collectivités et les gestionnaires de ces infrastructures.

L’enjeu est donc extrêmement important pour les collectivités territoriales, surtout à une époque de raréfaction de la ressource et de réforme territoriale. Il n’est pas neutre non plus pour les départements, puisque plusieurs milliers de ponts porteraient aujourd’hui des routes départementales au-dessus du réseau routier national – environ 1 000 –, au-dessus de voies ferrées – environ 2 500 – ou de canaux – environ 1 250.

À l’heure actuelle – nous l’avons tous rappelé –, une jurisprudence très ancienne, très protectrice des intérêts de l’État, prévaut et est appliquée ne varietur. Il s’agit du fameux arrêt du Conseil d’État de 1906 qui dispose que la collectivité propriétaire de la voie portée est entièrement responsable de l’ouvrage et doit en assurer l’entretien, la réfection, le renouvellement et garantir la sécurité des tiers.

Nous sommes là devant une situation quelque peu étonnante : un gestionnaire de transport, RFF ou VNF, par exemple, décide de créer une ligne qui vient couper des voies existantes et laisse ensuite les ouvrages de rétablissement à la charge des collectivités !

Or de nombreux ouvrages d’art reconstruits après la Seconde Guerre mondiale arrivent aujourd’hui en fin de course. Des ouvrages plus récents, réalisés pour les lignes à grande vitesse, commencent également à montrer des signes d’usure. Beaucoup de petites communes sont donc en danger pénalement et financièrement, puisqu’elles ne disposent pas des moyens nécessaires. Oserai-je le dire, dans un certain nombre de cas – il ne s’agit pas d’une hypothèse d’école – elles ne sont même pas au courant de l’étendue exacte de leurs responsabilités !

Mme Évelyne Didier. C’est tout à fait juste !

M. René Vandierendonck. La gestion de ces ouvrages est très lourde et les conséquences financières et pénales afférentes sont importantes. Il fallait y remédier. Cette proposition de loi apporte une solution pragmatique, issue d’une négociation au cours de laquelle Mme Didier a su faire preuve d’une opiniâtreté que je tiens une nouvelle fois à saluer.

Je tiens également à rappeler – la réalité est rarement hémiplégique (Sourires.) – que ce texte s’inscrit dans la continuité du groupe de travail lancé en 2009 par Dominique Bussereau, mais relayé immédiatement…

Mme Évelyne Didier. Je suis également à l’origine de ce groupe de travail !

M. René Vandierendonck. C’est vrai, madame Didier, c’est vous qui êtes à l’origine de la sensibilisation à cette question.

Je me souviens, monsieur le président de la commission des lois, que, dans un raccourci dont vous avez le secret, vous avez dit, lors d’un débat sur les normes, qu’une bonne manière de restreindre ces dernières serait de poser en principe que le prescripteur soit le payeur. Cette logique est en quelque sorte rétablie à travers ce texte, ce qui me paraît de bonne administration publique.

Les modifications apportées au texte sur proposition du Gouvernement ont le mérite de la franchise en cette période financièrement très contrainte. Elles permettent de sauvegarder l’essentiel.

S’agissant des nouvelles infrastructures, l’Assemblée nationale a maintenu les principes adoptés au Sénat : d’une part, le renvoi à une convention pour répartir les charges de surveillance, d’entretien, de réparation et de renouvellement des ouvrages – il s’agit d’un point très positif, surtout pour les communes dont j’ai parlé qui ignorent l’étendue et l’existence de leurs obligations – ; d’autre part, – nouvelle règle de référence – l’obligation, pour les gestionnaires de la nouvelle infrastructure, d’assumer l’ensemble des charges relatives à la structure de l’ouvrage d’art. À cet égard, vous avez négocié pied à pied sur les notions d’entretien, d’étanchéité. Reste à la charge des collectivités territoriales la chaussée et la voirie, c’est-à-dire le trottoir et le revêtement routier. Cette nouvelle règle de référence constitue, à mes yeux et aux yeux de beaucoup de collectivités territoriales, une disposition essentielle du texte.

Toutefois, le Gouvernement a tenu, dans la négociation, à apporter une certaine souplesse et a adapté ce principe en fonction des spécificités propres des parties à la convention, au regard notamment de leurs capacités financières – cela a été rappelé par M. le secrétaire d’État – ou encore de l’intérêt direct que peut retirer la collectivité concernée de la réalisation de la nouvelle infrastructure de transport.

Beaucoup de contentieux étant en cours et nombre de ces questions encore pendantes, il a également été prévu de recourir à la médiation en cas de désaccord sur l’élaboration de la convention avant saisine des juges compétents. Là encore, il me semble que procéder ainsi c’est faire preuve de sagesse.

Concernant les ouvrages de rétablissement déjà existants, largement majoritaires et auxquels s’attachent de nombreux enjeux financiers, l’Assemblée nationale a complété le dispositif. D’une part, pour les ouvrages ne faisant l’objet d’aucune convention – il y en a beaucoup –, a été prévu, sur la proposition du Gouvernement, un recensement – c’est une première –, qui doit être fait avant le 1er juin 2018. Ce recensement – qui nous offrira, à mon avis, son lot de découvertes et de surprises – permettra de hiérarchiser les urgences et donc d’établir un plan pluriannuel d’investissement permettant de dresser un calendrier d’intervention.

D’autre part, pour les situations litigieuses en cas de convention existante, les travaux de l’Assemblée nationale ont été guidés par la volonté de trouver une réponse dans des délais relativement rapides.

Merci, madame Didier, d’avoir tenu bon sur ce dernier point et d’avoir fait en sorte que l’existence de recours ne vienne pas endiguer la nécessité d’accorder de justes priorités, notamment l’existence d’une procédure transactionnelle pour désamorcer des contentieux, dont certains sont déjà anciens.

En conclusion, après l’adoption, il y a quelques jours, de la proposition de loi permettant la création de sociétés d’économie mixte à opération unique, voici un deuxième texte qui reconnaît les collectivités territoriales et assouplit très sérieusement leurs modalités d’intervention. Je tiens donc à remercier une nouvelle fois Évelyne Didier – j’ai déjà eu l’occasion de le faire en commission des lois –, ainsi que M. le secrétaire d’État. Ces dispositions étaient attendues depuis des décennies, notamment par votre serviteur ; je ne peux que vous dire bravo ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du RDSE.)

Mme la présidente. La parole est à M. Yvon Collin.

M. Yvon Collin. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, chère Évelyne Didier, comme l’ont montré les débats au Sénat puis à l’Assemblée nationale, la proposition de loi que nous examinons aujourd’hui en deuxième lecture fait l’objet d’un consensus, qui va de la majorité à l’opposition, en passant par l’Association des maires de France, chose assez rare pour être soulignée ! (Sourires.)

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. C’est vrai !