M. Ronan Dantec. Ma question s'adresse à M. le ministre des affaires étrangères et du développement international.

Monsieur le ministre, le typhon, d’une violence inconnue jusqu’à présent, qui a dévasté l’archipel de Vanuatu a rappelé que le dérèglement climatique était non pas une menace lointaine et théorique, agitée par quelques écologistes catastrophistes, mais bien, déjà, une réalité dramatique pour nombre d’habitants de cette planète, en particulier dans des pays en développement aux ressources déjà fragiles.

Ce désastre, qui appelle une réponse solidaire de la communauté internationale, aura paradoxalement presque éclipsé les résultats de la Conférence mondiale des Nations unies sur la réduction des risques de catastrophe, qui se tenait au même moment à Sendai, dans une région japonaise particulièrement affectée par le tremblement de terre du mois de mars 2011.

Cette négociation présente un bilan, semble-t-il, mitigé. Elle a même dû être prolongée – cela devient une tradition des négociations internationales –, avant d’aboutir à l’adoption du cadre d’action de Sendai pour la période 2015-2030. La négociation a en effet bloqué sur le financement de la protection des populations les plus vulnérables, un sujet qui sera sur la table des négociations de la Conférence Paris Climat, la COP 21, au travers du chapitre assez complexe des « pertes et dommages ».

Monsieur le ministre, ma question s’articulera autour de deux axes.

D’une part, je souhaite avoir votre sentiment sur le bilan de la conférence de Sendai, étape importante sur la route de la COP 21. À lire les premières réactions publiées, ce rendez-vous n’a pas levé les incertitudes sur un engagement résolu des gouvernements nationaux pour un accord ambitieux à Paris. Or celui-ci passe aussi par le renforcement du chapitre « adaptation », c'est-à-dire des solidarités financières mondiales.

D’autre part, la France a, par votre voix, monsieur le ministre, formulé à Sendai des propositions sur le renforcement d’un réseau de surveillance météorologique mondial. Représentant du Sénat à l’Observatoire national sur les effets du réchauffement climatique, l’ONERC, je puis témoigner de la mobilisation de Météo-France sur les questions climatiques.

Monsieur le ministre, pouvez-vous nous en dire un peu plus sur cette proposition, qui a le mérite d’être concrète, alors que les discours sur la lutte contre le dérèglement climatique ont souvent tendance à préférer l’emphase et les généralités aux propositions précises ? (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste.)

M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires étrangères et du développement international.

M. Laurent Fabius, ministre des affaires étrangères et du développement international. Monsieur le sénateur, vous évoquez un sujet que vous connaissez très bien, et j’en profite pour vous remercier de l’aide que, avec de nombreux autres sénateurs, vous nous apportez dans la préparation de la COP 21.

Dimanche dernier, dans l’archipel de Vanuatu, une véritable catastrophe s’est produite, puisque les vents ont soufflé à plus de 300 kilomètres à l’heure. Si le bilan est lourd, il l’est moins que ce que nous aurions pu craindre, notamment parce qu’un travail de prévention avait été accompli. Bien sûr, la France a immédiatement apporté son appui à la population, notamment à ses ressortissants.

Hasard tragique, il se trouve qu’au même moment nous nous trouvions à Sendai pour la Conférence mondiale des Nations unies sur la réduction des risques de catastrophe. Monsieur le sénateur, s'agissant du bilan de ce rendez-vous, vous avez utilisé le bon adjectif : « Mitigé ».

D’un côté, un cadre d’action a été défini, ce qui est une bonne chose ; de l’autre, quand elles examinent précisément les termes, y compris sur le plan financier, de nombreuses délégations ont été déçues. Il nous faudra bien sûr en tirer les leçons pour la préparation de la COP 21, à laquelle nous nous attelons les uns les autres avec beaucoup de flamme et d’énergie. Néanmoins, les objectifs sont très difficiles à atteindre.

Lors de cette conférence, j’ai formulé une proposition qui a été jugée intéressante par beaucoup et que nous allons maintenant mettre en œuvre. Il faut savoir que les catastrophes que l’on appelle « naturelles » n’ont de naturel que le nom. En effet, quelque 70 % d’entre elles sont liées au dérèglement climatique. Il y a donc évidemment une connexion entre les deux phénomènes.

Quand les vents soufflent à 350 kilomètres à l’heure, on comprend bien qu’ils provoquent de lourds dégâts. Toutefois, si les populations sont prévenues, elles peuvent prendre un certain nombre de mesures de précaution.

Telle est la proposition française. Nous comptons de nombreuses actions à travers le monde – peut-être y en a-t-il trop –, mais il n’existe aucune coordination. Or nous pourrions, sans coût excessif – on parle de 100 millions d’euros sur cinq ans, une somme qui reste comprise dans un ordre de grandeur raisonnable –, connecter tous ces systèmes, fournir un certain nombre d’outils et permettre que chaque habitant concerné puisse savoir s’il y a un risque et en être averti en temps et en heure. Nous obtiendrions ainsi des effets très positifs.

Les participants à cette conférence ont bien voulu reconnaître l’intérêt de cette mise en réseau. Nous allons y travailler, et Mme Girardin se penchera plus particulièrement sur le sujet dans les semaines qui viennent, en liaison avec les organismes concernés, en particulier Météo-France.

Tel est le bilan que nous pouvons dresser de cette conférence. Il faudra en tirer les leçons pour la COP 21. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste.)

régime des retraites - caisse d’assurance retraite et de la santé au travail – carsat

M. le président. La parole est à Mme Michelle Demessine, pour le groupe CRC.

Mme Michelle Demessine. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, je tiens à mon tour, avec une grande émotion, à rendre hommage aux victimes de Tunis et à apporter notre soutien au grand peuple tunisien, qui lutte pour la démocratie.

Ma question s'adresse à Mme la secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée de la famille, des personnes âgées et de l'autonomie.

Simone de Beauvoir déclarait : « On reconnaît le degré de civilisation d’une société à la place qu’elle accorde à ses personnes âgées ». Pour notre part, où en sommes-nous ? Mardi dernier, dans toute la France, des milliers de retraités lançaient un cri d’alarme dans la rue à l’appel de leurs organisations syndicales.

Les réformes successives et les dernières mesures fiscales ont eu pour conséquence une chute vertigineuse du montant des pensions. Plus de 10 % des retraités sont descendus sous le seuil de pauvreté. Dans ma région, quelque 90 % des retraités doivent vivre avec moins de 1 100 euros par mois. Ils sont amers, en colère, et le font savoir. Après une vie de travail, beaucoup se sentent atteints dans leur dignité. La revalorisation du minimum vieillesse à 800 euros et la prime de 40 euros pour les petites retraites, disent-ils, « ça ne fait pas le compte ».

Dans l’immédiat, il faudrait mettre fin au gel des pensions, les indexer sur l’évolution des salaires et porter le minimum des retraites au niveau du SMIC pour les carrières complètes.

Et comme si tout cela ne suffisait pas, des milliers de futurs retraités sont en train de vivre une véritable tragédie, car le service public de gestion des retraites, les CARSAT – les caisses d’assurance retraite et de la santé au travail –, est incapable de remplir sa mission et de verser les pensions des nouveaux retraités.

Depuis septembre dernier, de mesure en mesure, d’annonce en annonce, les retards perdurent. Certes, des situations sont régularisées, mais de nouvelles difficultés se créent chaque jour.

Pour répondre à cette détresse, vous avez pris la décision d’accorder une prime exceptionnelle de 800 euros non remboursables. Toutefois, on ne peut pas vivre avec 800 euros pendant plusieurs mois. Le loyer, les factures de gaz ou d’électricité, c’est tous les mois qu’il faut les payer !

M. le président. Veuillez poser votre question, ma chère collègue.

Mme Michelle Demessine. Madame la secrétaire d’État, prenez des décisions justes et conformes au droit : chaque mois de retard devrait donner lieu à une avance proche du montant évalué de la retraite.

Enfin, et surtout, il faut revenir sur les mesures d’économie des organismes de sécurité sociale prises dans le cadre des lois de financement de la sécurité sociale, qui ont eu pour conséquences des suppressions de postes et des fermetures d’agence. Il manque ainsi cent postes dans le Nord et en Picardie !

M. le président. Il faut vraiment poser votre question !

Mme Michelle Demessine. Madame la secrétaire d’État, quand les critères de gestion informatisés, inventés loin du terrain et de la réalité (Exclamations sur les travées de l'UMP), conduisent à des situations inextricables dont je n’évoquerai pas le coût financier et politique, n’y a-t-il pas lieu de s’interroger ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de la famille, des personnes âgées et de l’autonomie. Je lui demande d'ailleurs de bien vouloir contracter son propos, afin que l’ensemble de nos collègues puissent avoir le temps de s’exprimer.

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée de la famille, des personnes âgées et de l'autonomie. Madame la sénatrice, je vous prie tout d’abord d’excuser l’absence de Marisol Touraine, qui est en ce moment à l’Assemblée nationale pour l’examen du projet de loi relatif à la santé.

Comme vous, nous sommes scandalisés et émus par ce qui se passe dans la CARSAT compétente pour la Picardie – c’est ma région – et le Nord-Pas-de-Calais – c’est la vôtre –, ainsi que par les retards qui ont été pris à Lille. Marisol Touraine a déjà déclaré à plusieurs occasions que cette situation n’était pas digne du service public et qu’elle avait des conséquences dramatiques pour des milliers de retraités. Certains de ces derniers ne peuvent pas bénéficier de la pension qui leur est due au terme de leur carrière et se retrouvent de ce fait sans ressources, le risque étant élevé pour eux de basculer dans la pauvreté.

Dès que le Gouvernement a été alerté sur cette situation et sur sa gravité, il a pris des mesures exceptionnelles. Il a envoyé des moyens humains supplémentaires, afin de traiter les dossiers, mis en œuvre un mécanisme d’entraide entre les caisses régionales, afin de réduire le stock des dossiers en retard, et mis en place, vous l’avez dit, une aide financière de 800 euros par mois, qui ne sera pas récupérée sur les versements de retraite payés en retard.

Ces décisions ont d’ores et déjà permis de réduire fortement le nombre des dossiers en retard : de 7 000 dossiers en retard dans le Nord-Pas-de-Calais et en Picardie, nous devrions passer en dessous de 2 000 à la fin du mois. La sortie de crise est donc proche, et Marisol Touraine la suit personnellement de très près.

Cela dit, cette situation est absolument insupportable, et il faut comprendre les mécanismes qui nous y ont conduits.

Cette crise a été accentuée par le grand nombre de départs anticipés de nos compatriotes des régions Nord-Pas-de-Calais et Picardie, qui, ayant commencé à travailler jeunes, ont fait valoir leurs droits à la retraite anticipée pour carrière longue. Depuis le 1er novembre 2012, quelque 320 000 retraités ont pu partir à la retraite avant l’âge légal. Cette charge de gestion n’avait pas été totalement anticipée, et nous le regrettons, mais il s’agit d’un droit nouveau, dont nous pouvons être fiers. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

organisation de l’exposition universelle en 2025 à paris

M. le président. La parole est à M. Luc Carvounas, pour le groupe socialiste.

M. Luc Carvounas. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, avant de poser ma question, je souhaite, au nom du groupe socialiste, témoigner de notre profonde solidarité envers le peuple tunisien et toutes les victimes de l’attaque barbare survenue hier à Tunis. Nos pensées les plus sincères vont aux victimes, à leurs familles et à leurs proches, et plus particulièrement à nos deux compatriotes tués ou blessés et à leurs familles.

Ma question s'adresse à M. le ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique.

Monsieur le ministre, la France est un vieux et grand pays. Fière de son histoire, de ses lumières et de ses grandes figures, elle a toujours eu de l’ambition pour elle-même, mais aussi pour le monde.

Visant cet objectif, l’exposition universelle de 2025 apparaît comme une formidable carte de visite pour notre pays. Le 13 octobre dernier, à Créteil, dans mon département, lors de ses annonces relatives au Grand Paris, le Premier ministre Manuel Valls a affirmé le soutien de l’État à cette candidature.

Lors de son allocution télévisée du 6 novembre 2014, le Président de la République l’a lui-même officialisée. Il a d’ailleurs réaffirmé son soutien hier, lors de la présentation du pavillon de la France pour l’Exposition universelle de Milan en 2015, à laquelle j’assistais à l’Élysée. (Exclamations ironiques sur les travées de l'UMP.)

M. Luc Carvounas. Le 5 mars dernier, en votre présence, monsieur le ministre, en tant que représentant du Gouvernement, Jean-Christophe Fromantin et moi-même avons présenté, au nom d’Expo France 2025, le détail de notre projet de candidature œcuménique. Il rassemble d’ores et déjà plus de 2 000 collectivités territoriales, des grandes écoles et des universités, des entreprises privées et publiques, du CAC 40 comme des PME, ainsi que nos trois porte-parole, Anne-Sophie Pic, Maud Fontenoy et Cédric Vilani, qui sont autant de symboles de l’excellence française.

Selon les expertises, pas moins de 80 millions de visiteurs et un bénéfice net de 200 millions d’euros seraient attendus de cet événement. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)

M. Philippe Dallier. J’attends de voir !

M. Pierre-Yves Collombat. Avant impôts ! (Sourires.)

M. Luc Carvounas. Monsieur le ministre, une exposition universelle en France nous conduirait à recevoir le monde pendant six mois. Cela signifierait la création de dizaines de milliers d’emplois, un aménagement du territoire renforcé, ou encore de l’innovation industrielle et technologique pour nos entreprises.

Dans un an, le Président de la République déposera auprès du Bureau international des expositions la candidature de la France à l’organisation de l’exposition universelle de 2025. (Exclamations ironiques sur les mêmes travées.) Quelle fougue sur les travées de nos collègues de l’UMP ! (Rires sur les mêmes travées.) Nous aurons alors deux ans pour convaincre 168 pays.

Ma question est simple, monsieur le ministre : pouvez-vous nous présenter le plan d’action du Gouvernement pour mener la France, notre beau pays, vers ce grand rendez-vous ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’économie, de l’industrie et du numérique.

M. Emmanuel Macron, ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique. Monsieur le sénateur, j’étais en effet à vos côtés le 5 mars dernier lors du lancement de la candidature de la France à l’exposition universelle de 2025. (Exclamations et rires sur les travées de l'UMP.)

M. Francis Delattre. Nous en sommes ravis !

M. Emmanuel Macron, ministre. Je veux ici saluer le travail que vous avez réalisé dans le cadre de cette candidature, aux côtés en particulier de MM. Leroux et Fromantin. Vous avez eu raison de le rappeler, ce travail remarquable a été conduit de manière transpartisane et volontariste.

Le plan d’action du Gouvernement s’inscrit dans la philosophie de l’événement que MM. Leroux et Fromantin et vous-même avez présenté.

L’originalité de ce projet est qu’il n’est pas uniquement parisien, ce qui constitue à la fois une grande force et, il faut le dire, une difficulté réelle pour les organisateurs de ce type d’événements. C’est le Grand Paris tout entier qui est retenu dans ce projet et, autour de lui, les grandes capitales métropolitaines. C’est la première fois qu’un projet de cette ampleur est présenté.

Le plan d’action du Gouvernement est aussi celui du Grand Paris et de ses infrastructures, en particulier de transport. À cet égard, le Premier ministre, tout particulièrement depuis l’automne dernier, a non seulement réaffirmé les engagements du Gouvernement, mais également présenté un calendrier de financement et de projet pour avancer.

Le texte dont nous aurons le plaisir de discuter dans quelques semaines, et qu’examine d’ores et déjà une commission spéciale du Sénat, prévoit en particulier une société de projet pour la réalisation du Charles-de-Gaulle Express. Il contribuera à ce chantier et aux aménagements qui lui sont nécessaires.

L’autre originalité du projet proposé, c’est sa réelle ambition numérique. Non seulement les métropoles seront reliées entre elles, mais un véritable village numérique sera au cœur du projet que vous portez.

M. Francis Delattre. Formidable ! (Sourires sur les travées de l'UMP.)

M. Emmanuel Macron, ministre. Il faut saluer cette originalité. Elle est parfaitement cohérente avec le plan d’investissement du Gouvernement et avec les engagements qui ont été pris, en particulier en termes d’infrastructures numériques, par nos opérateurs.

La nature de votre projet permet un plan d’action efficace. Il s’agit d’un projet de coopération entre les différentes collectivités territoriales et le Gouvernement, entre les pouvoirs publics et le secteur privé. Vous avez déjà réussi, monsieur le sénateur, à organiser un tour de table et à associer les grandes entreprises, ce qui est particulièrement louable.

Enfin, la coordination entre cet événement et les jeux Olympiques de 2024 est un élément clef. Le Premier ministre livrera au mois d’avril prochain les détails de la coordination entre ces deux événements. Quand on a de l’ambition pour son pays, on peut en avoir au carré. Nous nous porterons donc candidats à l’organisation à la fois des jeux Olympiques de 2024 et de l’exposition universelle de 2025. Seuls ceux qui manquent d’ambition peuvent en douter ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du RDSE.)

finances des collectivités territoriales

M. le président. La parole est à Mme Anne-Catherine Loisier, pour le groupe UDI-UC.

Mme Anne-Catherine Loisier. Ma question s'adresse à M. le secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget.

Monsieur le secrétaire d’État, votre gouvernement a décidé de diminuer de 11 milliards d’euros les concours financiers aux collectivités territoriales d’ici à 2017. Le bloc communal subira l’essentiel de ce prélèvement, alors qu’il réalise quelque 63 % des investissements publics locaux et qu’il ne représente que 4,1 % de la dette nationale. Sur les 3,6 milliards d’euros qui seront prélevés sur les collectivités en 2015, quelque 2 milliards d’euros seront pris sur le bloc communal, soit plus de 56 % de l’effort total.

Monsieur le secrétaire d’État, à la veille du vote des budgets des communes, cet effort sans précédent est insoutenable et injustement réparti.

Il est insoutenable, car il s’est accompagné de transferts et de charges nouvelles – réforme des rythmes scolaires, urbanisme ou revalorisation des traitements –, auxquels s’ajoutent les baisses concomitantes des aides des cofinanceurs habituels des collectivités.

L’effet de ciseau qui asphyxie aujourd’hui les collectivités risque également de produire un effet domino désastreux sur l’économie locale : les collectivités vont moins investir, elles vont même emprunter, freinant ainsi une croissance tant attendue. À titre d’exemple, alors que la dotation globale de fonctionnement d’une communauté de communes rurales de 6 000 habitants en Côte-d’Or s’élevait à 112 000 euros en 2012, elle ne sera plus que de 6 800 euros en 2017.

L’effort est également injuste, car il se traduit par une baisse de 94 % des dotations en cinq exercices budgétaires. J’aimerais savoir, monsieur le secrétaire d’État, si vous demandez de tels efforts à vos administrations !

Comme il n’est pas concevable d’augmenter les impôts locaux en proportion, il sera impossible, dès 2016, d’assurer le fonctionnement de nombreux services de proximité nécessaires aux habitants, qu’il s’agisse des crèches, des centres sociaux ou des bibliothèques.

Que doit-on fermer en votre nom et en celui de votre gouvernement, monsieur le secrétaire d’État ? (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et de l'UMP.)

À ce rythme, quel sera le visage des campagnes françaises d’ici à 2017, alors que les routes et les bâtiments ne seront plus entretenus, que les entreprises et les artisans verront leurs carnets de commandes se vider et qu’ils devront licencier, ce qu’ils font d’ailleurs déjà ?

L’avenir de la France doit se construire sur un équilibre entre les villes et les campagnes. Nos concitoyens y sont attachés. Vos décisions suscitent des interrogations sur votre vision de la France de demain.

Monsieur le secrétaire d’État, allez-vous revoir cette baisse des dotations brutale, injuste et dangereuse ? Allez-vous accompagner les communes et les intercommunalités et leur permettre d’effectuer des économies de gestion réalistes, progressives et, finalement, plus vertueuses, car elles donneront aux collectivités le temps de se réorganiser ?

Enfin, monsieur le secrétaire d’État, allez-vous abandonner la France rurale ? Et allez-vous montrer l’exemple aux Français en réformant l’État ? (Bravo ! et vifs applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État chargé du budget.

M. Christian Eckert, secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget. Madame la sénatrice, le Gouvernement est engagé dans une démarche de baisse de la dépense publique, à hauteur de 50 milliards d’euros ; Michel Sapin l’a rappelé à l’instant. Toutes les administrations publiques doivent prendre leur part dans cet effort.

Mme Annie David. Que vous avez voté, chers collègues de la majorité sénatoriale !

M. Christian Eckert, secrétaire d'État. La dépense publique locale est de 21 % de l’ensemble de la dépense publique. C’est donc un effort de réduction de 11 milliards d’euros que le Parlement, madame la sénatrice, a décidé de mettre en œuvre.

M. Alain Gournac. Pas le Sénat !

M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Cette contribution est loin d’être insoutenable pour les collectivités, puisqu’elle ne représente que 1,9 % de leurs recettes de fonctionnement et qu’elle ne porte que sur les concours financiers de l’État. Ceux-ci représentent quelque 28 % des recettes des collectivités locales, alors que la fiscalité, qui conserve son dynamisme, en représente 60 %.

À titre d’exemple, je relève d’ailleurs que la revalorisation forfaitaire des bases votées en loi de finances initiale pour 2015 à hauteur de 0,9 % apportera quelque 520 millions d’euros de ressources fiscales supplémentaires, alors même que l’inflation sera proche de zéro cette année.

S’agissant de l’effet de la baisse des dotations sur l’investissement, nous ferons le bilan en cours d’année.

M. Philippe Dallier. Il sera alors trop tard !

M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Néanmoins, je souligne que l’investissement public en France s’élève à 3,2 % du PIB, alors qu’en l’Allemagne, un pays souvent cité en exemple, il représente 1,6 % du PIB, soit exactement la moitié. Dans ce contexte, il y a peu de risques que cette baisse des concours de l’État remette en cause la croissance française. (Protestations sur les travées de l'UMP.)

M. Jean-Claude Lenoir. Vous vous payez de mots !

M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Enfin, madame la sénatrice, M. le Premier ministre a rencontré récemment le vice-président, ainsi que le président de l’Association des maires de France.

M. Bruno Retailleau. Excellent président ! (Sourires sur les travées de l'UMP.)

M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Le Gouvernement s’est montré ouvert et il a été décidé, pour lever toute ambiguïté, de se donner deux mois pour dresser ensemble un constat, si possible partagé, de l’état de l’évolution des finances locales, à l’issue duquel nous tirerons des conclusions. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)

Je le répète, des décisions ont été prises pour l’année 2015. Et pour atteindre les objectifs de diminution de la dépense publique, c’est bien la quote-part qui s’impose.

Pour conclure, vous vous demandiez si l’État s’était infligé le même traitement. Permettez-moi d’observer que, de 2013 à 2014, d’exécution à exécution, les dépenses de l’État ont baissé de 3,3 milliards d’euros. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

modalités de recouvrement des franchises médicales

M. le président. La parole est à M. Jean-Noël Cardoux, pour le groupe UMP. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. Jean-Noël Cardoux. Ma question s’adresse à Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes.

Jeudi dernier, alors que nous examinions la proposition loi visant à supprimer les franchises médicales, j’ai interrogé Mme la secrétaire d’État chargée des personnes handicapées sur le maintien du principe de ces franchises dans le processus de généralisation du tiers payant envisagé par le Gouvernement. Elle a répondu que ce dernier envisageait de mettre en place un recouvrement par prélèvement bancaire après autorisation de l’assuré, qui conditionnera l’accès au tiers payant à la fin de 2017.

Dans son rapport de 2013, l’Inspection générale des affaires sociales, l’IGAS, recommandait ce mode de prélèvement en s’appuyant sur l’exemple néerlandais, appliqué pour 16 millions d’assurés et pour, a priori, une seule opération annuelle. Pour la France, c’est auprès de 58 millions de personnes que chaque caisse d’assurance-maladie devra demander une autorisation de prélèvements multiples sur leur compte bancaire, afin de recouvrer ces franchises représentant quelque 800 millions d’euros.

Les principaux syndicats de médecins se sont étonnés de cette annonce. Quelques heures plus tard, le ministère de la santé assurait à l’AFP, l’Agence France-Presse, que « rien n’était arrêté » et que plusieurs options allaient être examinées. Le prélèvement bancaire ne serait qu’une éventualité parmi d’autres – alors qu’un amendement a été déposé en ce sens à l’Assemblée nationale !

Les médecins ont réaffirmé, le 15 mars dernier, leur opposition à la généralisation du tiers payant, car ils craignent de devoir subir un parcours du combattant pour obtenir leurs remboursements. L’annonce de cette mesure ne les rassure pas.

Comment la caisse de sécurité sociale sera-t-elle en mesure de récupérer une autorisation de prélèvement automatique sur les comptes bancaires de chaque Français ? Les médecins devront-ils jouer un rôle administratif dans ce processus ? Qu’adviendra-t-il pour ceux qui n’ont pas de compte bancaire, pour ceux qui sont interdits bancaires ou pour ceux qui changent régulièrement de compte ?

Disposez-vous d’une étude, que vous pourriez nous communiquer, sur la faisabilité de ce mode de prélèvement et sur son coût, comparativement au produit de 800 millions d’euros que j’ai cité ?

Enfin, pouvez-vous nous donner des précisions sur les différentes modalités de perception des franchises médicales et participations forfaitaires envisagées après la généralisation du tiers payant et nous dire si, oui ou non, la possibilité d’un recouvrement par prélèvement bancaire reste d’actualité ? (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée des familles, des personnes âgées et de l’autonomie.

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée de la famille, des personnes âgées et de l'autonomie. Monsieur le sénateur, je renouvelle à la Haute Assemblée les excuses de Marisol Touraine, actuellement présente à l’Assemblée pour l’examen du projet de loi relatif à la santé.

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État. Oui ! Elle y était il y a un quart d’heure ; elle y est toujours ! (Sourires.)

J’aurai l’occasion de revenir, en réponse à une prochaine question, sur les inquiétudes des médecins et les améliorations apportées au texte par le Gouvernement pour y répondre.

Toutefois, je vais tout d’abord vous répondre directement. Si j’ai bien compris votre question, l’UMP demande le retrait du projet.

Mme Catherine Procaccia. Ce n’est pas la question qui vous a été posée !

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État. Ce texte porte pourtant une ambition forte : celle de faire reculer les inégalités en matière de santé. C’est notre objectif, mais nous comprenons que vous ne le partagiez pas. La variable d’ajustement de votre politique de santé, nous la connaissons : ce sont les franchises médicales et les déremboursements. Ce n’est pas notre choix !

Mme Catherine Procaccia. Nous ne parlons pas des franchises, à présent !

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État. Nous venons de prouver que l’on peut réduire le déficit de la sécurité sociale et de l’assurance maladie, qui est revenu à son seuil de 2008 – donc, en deçà de 10 milliards –, tout en ne réduisant pas les droits des assurés sociaux.

Oui, nous favorisons l’accès aux soins, en étendant le tiers payant à tous les Français à l’horizon 2017 et en pratiquant des tarifs sociaux en matière d’optique et de dentaire pour les Français en difficulté.