M. le président. L’amendement n° 784 n’est pas soutenu.

Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Deroche, corapporteur. L’article 74 supprime les PUCE issus de la loi Mallié et autorise les commerces situés dans les « zones commerciales caractérisées par une offre commerciale et une demande particulièrement importantes » à ouvrir le dimanche. Créés pour répondre aux difficultés juridiques suscitées par des pratiques d'ouverture dominicale répandues mais illégales, les PUCE ont permis de satisfaire une demande réelle de la part des consommateurs et d'offrir aux salariés y travaillant des contreparties salariales et un repos compensateur, ce qui a représenté une avancée.

Toutefois, en reposant essentiellement sur des usages de consommation dominicale préexistants, les quarante et un PUCE qui avaient été créés, dont trente-huit en Île-de-France, sont à l'origine de distorsions de concurrence. Selon le rapport Bailly, ce dispositif « suscite l'incompréhension des acteurs et génère une conflictualité importante », car il favorise ceux qui ne respectaient pas la loi antérieurement sans récompenser les comportements vertueux et il exclut les nouvelles structures commerciales. La délimitation de ces zones donne en outre lieu à un dialogue territorial insuffisant.

La substitution des zones commerciales aux PUCE nous semble donc souhaitable. Je rappelle d’ailleurs que la définition de ces zones commerciales, comme celle des zones touristiques, sera demandée par le maire avec avis du préfet de région, qu’il y aura des contreparties obligatoires pour les salariés concernés et que le principe du volontariat demeure. Je sais que cela ne rassurera que partiellement Bruno Retailleau et ceux qui sont plutôt réservés au sujet de l’ouverture dominicale, mais le texte introduit des garde-fous assez solides dans la définition de ces zones commerciales pour ne pas aboutir à une banalisation à laquelle je suis pour ma part également opposée. Néanmoins, il existe des habitudes de consommation dont il faut tenir compte ; or les PUCE, s’ils avaient remédié à certaines difficultés, ont entraîné des effets pervers indéniables.

Je rappelle enfin que les rapporteurs de la commission spéciale de l’Assemblée nationale ont complété l'article afin qu'il soit tenu compte d'une éventuelle concurrence frontalière dans la délimitation des zones commerciales. La commission spéciale du Sénat, pour sa part, a adopté cet article sans modification. Elle est donc défavorable à sa suppression.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Emmanuel Macron, ministre. Ceux qui se sont opposés à la loi Mallié ont raison de soutenir le présent texte. (Marques d’ironie sur les travées du groupe CRC.) En effet, cette loi a créé des zones commerciales loin des centres-villes et a parfois validé des pratiques non conformes au droit en vigueur à l’époque qu’elle est venue valider et prolonger. Elle a également prévu de soumettre le travail dominical à un accord collectif ou à la règle du « payé double ». Or l’expérience a montré que cette dernière mesure a vidé les centres-villes. En outre, le texte a maintenu – sans compensation obligatoire – l’ouverture dominicale pour les commerces alimentaires jusqu’à treize heures, 640 zones touristiques et les jours du maire. Il en a résulté une profonde hétérogénéité. Oui, cette réforme a vidé les centres-villes et a créé de l’inégalité entre les territoires ! À certains endroits, on avait droit à une compensation et, à d’autres, on n’y avait pas droit !

Que prévoit le présent projet de loi ? Il homogénéise et simplifie tout cela, puisqu’il instaure partout des règles claires : pas d’ouverture sans accord, lequel prévoit la compensation. En effet, il n’est pas souhaitable de prévoir dans la loi une compensation uniforme, car le « payé double » tuerait les centres-villes – d’ailleurs, j’entends toujours avec étonnement ceux qui prétendent défendre le petit commerce de centre-ville réclamer en même temps le « payé double ». Le texte instaure aussi une vraie homogénéité sur le territoire puisque l’accord est partout un préalable à l’ouverture dominicale.

C’est cette philosophie qui distingue profondément ce texte de la loi Mallié. Avoir combattu cette loi et s’être engagé contre elle comme l’a rappelé M. Retailleau est donc complètement cohérent avec la défense aujourd’hui du projet de loi, qui est un texte de justice sociale, de soutien à l’économie et qui ne permet pas l’exception à tout-va au repos dominical.

L’article 74 supprime la notion et le terme de PUCE et renvoie la liste des critères des nouvelles zones au pouvoir réglementaire, ce qui est normal ; il n’y a pas à s’étonner que la loi ait un caractère général. Toutefois, l’article prévoit bien des restrictions puisqu’il fait mention d’une offre commerciale particulièrement importante. Il ne s’agit donc pas d’en créer partout. En outre, il s’inscrit dans la même logique que celui que vous venez de voter sur les zones touristiques.

M. Emmanuel Macron, ministre. Il y aura des accords collectifs, des compensations et, surtout, l’initiative en reviendra aux élus.

M. Roland Courteau. Absolument !

M. Emmanuel Macron, ministre. Sachons raison garder : il ne sera pas possible de créer partout et à l’initiative du secteur privé des zones commerciales ! Il existe une double restriction : la création de la zone commerciale aura lieu sur l’initiative des élus – si ceux-ci ne la proposent pas, aucune zone commerciale ne sera créée –, puis elle sera soumise au contrôle du préfet, qui pourra en limiter les contours.

Voilà pourquoi le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces amendements de suppression.

M. le président. La parole est à M. Roland Courteau, pour explication de vote.

M. Roland Courteau. Il faut rappeler, d’abord, que les zones commerciales seront créées sur l’initiative et à la demande des élus locaux. Là où il n’y a pas de potentiel d’activité, il pourrait y avoir un effet de transfert. Mais, sans création de valeur suffisante, l’ouverture ne se justifiera pas. Il est évident que les élus ne demanderont pas la création d’une zone commerciale à cinquante-deux dimanches si cela n’a pas de sens sur le plan économique et social dans la zone concernée, a fortiori s’ils peuvent accorder l’ouverture jusqu’à douze dimanches dans l’année.

Ce qu’on a appelé les « effets de bord », lorsque des demandes d’ouverture ont été formulées, par un effet de capillarité, à l’entour des PUCE devrait aussi être circonscrit. En effet, l’expérience a montré que ces ouvertures pouvaient avoir un effet négatif, en ce qu’elles n’apportent pas de nouvelle clientèle, tout en créant de nouvelles charges fixes. En outre, elles déséquilibrent certains territoires sur le plan économique et commercial.

En revanche, on a pu constater que, dans les PUCE où il y avait eu une réelle création d’activité, l’ouverture dominicale avait été décidée. L’ouverture et la création de valeur ont justifié l’obligation d’un accord ou d’une décision unilatérale, avec doublement du salaire.

La conclusion d'un accord d’entreprise, de branche ou territorial constituera un préalable, ce qui n’est pas le cas dans le cadre de la loi Mallié, encore en vigueur.

Le risque d’ouverture massive évoqué par certains de nos collègues n’est donc pas du tout avéré. Certaines grandes enseignes disent dès aujourd’hui que le dispositif ne les intéresse pas, parce qu’elles ne veulent pas accorder de compensations. On ne peut mieux démontrer à quel point le principe « pas d’accord, pas d’ouverture » est efficace pour réguler le dispositif, à la fois en matière sociale et sur un territoire.

Le projet de loi protège les salariés concernés, tout en créant les conditions d’un développement économique et de créations d’emplois. Apporter des garanties tout en faisant confiance aux élus, aux partenaires sociaux et à la dynamique économique des territoires est conforme aux évolutions de notre société.

C'est la raison pour laquelle nous ne voterons pas ces amendements.

Mme Nicole Bricq. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme Évelyne Didier, pour explication de vote.

Mme Évelyne Didier. Je veux réagir à ce qui a été dit sur le petit commerce qui a disparu avec le développement des zones périphériques. Je ne nie pas que cela soit vrai. Toutefois, on oublie qu’en réalité c’est l’évolution des loyers qui a eu l’une des plus grandes incidences sur les commerces de proximité de centre-ville. On le sait très bien ! C’est la rente du patrimoine qui a rendu leur situation difficile. À cela s’ajoute la massification du commerce, qui a entraîné un déséquilibre entre les producteurs et la distribution, au profit de cette dernière, avec, notamment, les grandes plateformes d’achats.

On est donc engagé dans un système où les prix baissent avec les salaires et où ceux-ci baissent avec les prix, au point qu’aujourd'hui la part consacrée à l’alimentation, par exemple, est très faible dans les revenus. Il vaudrait bien mieux payer convenablement les gens, qui pourraient ainsi acheter à leur juste prix les produits dont ils ont besoin, pour que les producteurs s’en sortent.

En tout cas, la disparition du commerce de proximité ne se résume pas à la loi Mallié. Au reste, je suis d’accord avec vous pour dire qu’elle ne comporte pas que des aspects positifs. C’est le moins que l’on puisse dire !

M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.

M. Jean Desessard. Je ne peux pas laisser dire qu’on préserve le repos dominical. En effet, dans les zones commerciales, les zones touristiques, les zones touristiques internationales, on va créer, un peu partout, de multiples zones frontalières et donc des appels d’air. Attendons-nous à ce que, côté des villes où il sera possible de travailler le dimanche, d’autres villes, qui verront que cette possibilité profite à leurs voisines – c’est en tout cas ce qui est visé –, souhaitent bénéficier de cette faculté, répondant ainsi à une demande de leur population.

On nous parle d’une contrepartie. Mais, si j’ai bien compris, la contrepartie pourra se faire au niveau de la branche – dans cette hypothèse, on peut encore discuter –, de l’entreprise, voire de l’établissement. Autrement dit, si une entreprise dit être en difficulté et appelle ses salariés à mettre le paquet, pour trouver, ensemble, les moyens de préserver son activité, il est évident que ces salariés suivront ! Qui dira qu’il ne se soucie pas de son entreprise, dans la situation économique actuelle ? De fait, cela entraînera, par effet boule de neige, un nivellement par le bas des contreparties.

Vous invoquez le volontariat, mais, dans la crise que nous connaissons aujourd'hui, avec la précarité qui s’installe, qui, aujourd'hui, aura les moyens de refuser ? Et, même si certains salariés refusent, il y en aura bien d’autres pour accepter !

Par conséquent, compte tenu de la situation actuelle, qui est défavorable au salariat, la contrepartie et le volontariat ne deviendront vite qu’un marché de dupes.

Aujourd'hui, on crée un appel d’air pour la banalisation du travail dominical. Je ne doute pas que, dans quelques mois ou dans quelques années, nous aurons à examiner un nouveau projet de loi qui élargira davantage le travail le dimanche, jusqu’à ce que le travail dominical devienne, progressivement, la norme.

Mme Annie David. Oui ! On le banalise !

M. Jean Desessard. Cela pose un problème de société, comme nous l’avons déjà dit ce matin. Il faudra que chacun prenne ses responsabilités !

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 68 et 476.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 163 rectifié n'est pas soutenu.

L'amendement n° 1216, présenté par Mmes Assassi et David, M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

I. - Alinéa 2

Remplacer les mots :

une offre commerciale et une demande potentielle particulièrement importantes

par les mots :

les critères définis au II

II. – Après l’alinéa 2

Insérer dix alinéas ainsi rédigés :

« II.- Les critères mentionnés au I sont :

« – une prédominance de commerce non alimentaire définie à partir du chiffre d’affaires et du nombre de salariés employés sur les établissements de commerce de détail ;

« – une population minimale de l’unité urbaine d’un million d’habitants ;

« – au moins trente millions de visiteurs par an ;

« – un éloignement de la clientèle ;

« – une offre commerciale importante ;

« – une demande potentielle particulièrement importante ;

« – la présence de services de restauration ;

« – une accessibilité routière et en transports collectifs importante ;

« – l’adhésion d’au moins la moitié des commerçants du périmètre. »

La parole est à Mme Annie David.

Mme Annie David. La définition des zones commerciales qui est proposée dans le texte semble bien floue. Notre amendement vise à en préciser le contour, afin d’en limiter la généralisation et, ainsi, celle du travail dominical. Ce dernier – nous en avons déjà discuté – est, selon nous, une profonde régression pour les droits des travailleurs, mais aussi pour l’économie de notre pays.

Quant à vous, monsieur le ministre, vous tentez de nous convaincre que la généralisation du travail dominical va permettre un bond de notre économie. Par quels moyens cela serait-il possible ? Comment l’ouverture des commerces le dimanche permettrait-elle un bond de la consommation, alors que nos concitoyennes et nos concitoyens faisant leurs courses le dimanche seraient minoritaires et consommeraient moins la semaine ? Comment l’emploi des commerces de proximité pourrait-il être maintenu, quand les mastodontes de la grande distribution pourront ouvrir le dimanche ? Comment assurer plus de consommation pour les ménages, alors même que rien ne garantit la hausse de leurs revenus ?

Je m’interroge également sur les compensations promises. Comment le rapport de force des salariés pourrait-il être accru si leur travail dominical est vu non plus comme une exception, mais comme une généralité ? En effet, c’est bien de la banalisation du travail le dimanche qu’il s’agit !

Toutes ces questions n’ont pas trouvé de réponses, malgré les discussions que nous avons eues. Après tout ce temps, ne restent que les inquiétudes et la colère.

Votre principal argument réside dans le volontariat. Mais comment des salariés ayant du mal à terminer leur mois pourront-ils refuser de travailler le dimanche ? Comment des chômeurs de longue durée pourront-ils refuser de travailler le dimanche ?

Pour finir, j’aimerais revenir sur les bienfaits pour l’emploi que vous avancez. La généralisation du dimanche ne semble pas aller dans ce sens. En effet, les commerces de proximité souffriront de l’ouverture de grandes chaînes de distribution et risquent donc de voir leurs effectifs fondre comme neige au soleil. En outre, les nouveaux commerces ouvrant le dimanche, à l’image des chaînes de grande distribution ouvertes le dimanche dans certaines zones, se dirigeront, à coup sûr, vers des emplois précaires et des temps partiels subis. Ainsi, en généralisant le travail dominical, vous allez créer une sous-catégorie de salariés, estampillés « week-ends et soirées ». Les étudiants, les plus précaires, viendront garnir les rangs des salariés à temps partiel subi.

Monsieur le ministre, allez donc faire des courses le dimanche dans un supermarché : vous n’y trouverez que des étudiants !

M. Roger Karoutchi. Ce n’est pas vrai ! Dans le Franprix de mon quartier, ce sont les salariés habituels qui travaillent le dimanche !

Mme Annie David. Que certains secteurs dont l’activité est nécessaire l’ensemble de la semaine ouvrent le dimanche, pourquoi pas, à la condition sine qua non que les salariés aient de vraies compensations ? Malheureusement, les zones que vous souhaitez définir à l’article 74 sont suffisamment floues pour douter de la nécessité de l’ouverture des établissements le dimanche. Voilà pourquoi notre amendement vise à préciser le contour de ces zones.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Deroche, corapporteur. Cet amendement vise à instituer des critères supplémentaires de définition des zones commerciales.

Parmi les critères proposés, l’éloignement de la clientèle ou encore une population minimale d’un million d’habitants viendraient, à notre sens, défavoriser les commerces de centre-ville, qui ne pourraient pas bénéficier de ce zonage et seraient désavantagés par rapport aux zones commerciales périurbaines, dont certaines bénéficiaient déjà du classement en PUCE. Je ne pense pas que l’intention des auteurs de l’amendement est de fragiliser davantage nos centres-villes, mais les critères qu’ils définissent font courir un risque en ce sens.

L’avis de la commission est donc défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Emmanuel Macron, ministre. Le Gouvernement est également défavorable à l’amendement, d'abord, parce que nombre des critères qu’il retient sont, en fait, d’ordre réglementaire, ensuite parce que ces critères viendraient plutôt compliquer la réforme proposée.

Je veux aussi apporter une clarification par rapport à votre dernière illustration, madame David. Comme à vous, il m’arrive de faire des courses le dimanche.

Mme Annie David. Cela ne m’arrive jamais, monsieur le ministre !

M. Emmanuel Macron, ministre. Le dimanche, les supermarchés sont généralement ouverts jusqu’à treize heures – hypothèse qui ne relève pas de cet article – et l’ouverture des magasins situés dans les zones commerciales est d'ores et déjà permise au-delà de treize heures.

M. Roger Karoutchi. Oui ! Il n’y a pas que les supermarchés !

M. Emmanuel Macron, ministre. Premièrement, je pense que vous serez sensible au fait que le Gouvernement, à l’Assemblée nationale, a soutenu l’introduction de la compensation salariale pour les salariés qui, dans les grandes surfaces, travaillent le dimanche, ce qui n’existe pas en droit aujourd'hui. J’aimerais vous entendre vous indigner aussi sur ce sujet ! (Protestations sur les travées du groupe CRC.)

Deuxièmement, les ouvertures prévues par le projet de loi renvoient précisément à des accords collectifs, et pas simplement à l’inégalité individuelle du rapport salarial. Je veux le répéter, c’est un accord collectif, et non le contrat de travail, qui est la condition même de l’ouverture dominicale et qui définira les compensations. C’est la profonde innovation de ce texte, et c’est la grande différence avec ce qui existait jusqu’alors.

M. le président. La parole est à M. Dominique Watrin, pour explication de vote.

M. Dominique Watrin. Monsieur le ministre, je veux réagir à vos propos.

Alors que le gouvernement auquel vous appartenez se fait fort de développer des propositions dites « de simplification » dans d’autres domaines, votre texte comporte des critères de délimitation des nouvelles zones commerciales qui sont particulièrement imprécis. Or, par définition, tout ce qui est imprécis entraîne du contentieux, et je ne pense pas, à l’instar des membres de mon groupe, que ce soit favorable à la bonne marche de l’activité économique. Par exemple, un PUCE ne pouvait être défini que si son périmètre réunissait un minimum d’un million d’habitants. Ce critère n’existe pas dans votre projet de loi.

Nous craignons aussi des conséquences potentiellement lourdes pour les acteurs économiques locaux, notamment les commerces, en particulier, les petits commerces, qui se verront en quelque sorte obligés d’ouvrir le dimanche pour s’aligner sur la concurrence, alors que, compte tenu de leurs conditions d’existence, les gains engrangés ne couvriront pas nécessairement les coûts occasionnés par leur ouverture le dimanche.

Toutes ces situations nous conduisent à proposer d’intégrer dans le texte un certain nombre de critères qui, eux, prennent en compte les attentes et les besoins des clients potentiels. Je vous fais grâce de l’énumération de ces critères, que vous retrouverez dans le texte de notre amendement. Cependant, il nous semble que le critère de l’unité urbaine d’au moins un million d’habitants est suffisamment précis pour éviter bien des contentieux. Les critères d’accessibilité routière et de proximité des transports collectifs, mais aussi ceux de l’adhésion d’au moins la moitié des commerçants du périmètre, pour évaluer si cela répond ou non à un besoin, et de l’éloignement de la clientèle justifiant un regroupement des propositions commerciales nous paraissent tous de bon sens.

Telle est la raison pour laquelle j’apporte mon soutien à cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1216.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 74.

(L'article 74 est adopté.)

Article 74 (priorité) (Texte non modifié par la commission)
Dossier législatif : projet de loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques
Article 76 (priorité)

Article 75 (priorité)

(Non modifié)

L’article L. 3132-25-2 du code du travail est ainsi rédigé :

« Art. L. 3132-25-2. – I. – La demande de délimitation ou de modification des zones définies aux articles L. 3132-25 et L. 3132-25-1 est faite par le maire ou, après consultation du maire, par le président de l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, lorsque celui-ci existe et que le périmètre de la zone concernée excède le territoire d’une seule commune.

« La demande de délimitation ou de modification de ces zones est transmise au représentant de l’État dans la région. Elle est motivée et comporte une étude d’impact justifiant notamment l’opportunité de la création ou de la modification de la zone.

« II. – Les zones mentionnées au I sont délimitées ou modifiées par le représentant de l’État dans la région après avis :

« 1° Du conseil municipal ;

« 2° Des organisations professionnelles d’employeurs et des organisations syndicales de salariés intéressées ;

« 3° De la communauté de communes, de la communauté d’agglomération, de la métropole ou de la communauté urbaine ;

« 4° Du conseil municipal des communes n’ayant pas formulé la demande mentionnée au I et n’appartenant pas à un établissement public de coopération intercommunale dont la consultation est requise en application du 3° du présent II, lorsque la zone sollicitée est située en tout ou partie sur leur territoire ;

« 5° Du comité départemental du tourisme, pour les zones touristiques mentionnées à l’article L. 3132-25 ;

« 6° De la chambre de commerce et d’industrie et de la chambre de métiers et de l’artisanat, pour les zones commerciales mentionnées à l’article L. 3132-25-1.

« III. – Le représentant de l’État dans la région statue dans un délai de six mois sur la demande de délimitation dont il est saisi. Il statue dans un délai de trois mois sur une demande de modification d’une zone. »

M. le président. La parole est à M. Dominique Watrin, sur l'article.

M. Dominique Watrin. La modification profonde des critères de détermination des zones dérogatoires au repos dominical prévue par cet article ne peut que nous inquiéter. Le schéma qui nous est ici présenté est marqué par un jacobinisme exacerbé : l’avis des élus territoriaux est demandé, mais seulement après coup, une fois que tout aura été globalement fixé par le préfet.

Le choix de se tourner vers le préfet de région s’inscrit dans la continuité de ce qui a été décidé dans le cadre des PUCE. Cependant, l’époque n’est plus la même : le projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, que vous avez réussi à faire passer au Parlement, a ajouté une distance nouvelle entre le représentant de l’État et la population. Dans ce cadre, l’expertise des élus territoriaux nous semblerait tout à fait nécessaire.

Par ailleurs, vous demandez à des préfets de région, relativement éloignés du terrain et de la population, de prendre position en amputant certains éléments essentiels à leur analyse. À l’Assemblée nationale, votre majorité avait ainsi déposé un amendement visant à préciser, dans l’étude, les conséquences pour les salariés. Cette revendication, somme toute légitime, a été balayée au motif que « l’impact sur les salariés ne peut être mesuré qu’a posteriori ».

Actuellement, la création de ces zones est motivée par la consommation attendue expressément le dimanche et une situation de concurrence particulière. Ce dernier critère concerne principalement les zones frontalières. Ces deux conditions, bien que largement insuffisantes, avaient le mérite d’exister et de permettre au travail dominical de demeurer une exception. Avec votre projet, nous courons le risque qu’il se généralise, sans effet réel sur la croissance, la consommation et le chômage.

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° 69 est présenté par Mmes Assassi et David, MM. Watrin, Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

L'amendement n° 783 est présenté par MM. Rachline et Ravier.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Évelyne Didier, pour présenter l’amendement n° 69.

Mme Évelyne Didier. Nous proposons de supprimer cet article, lequel, dans la droite ligne des articles précédents, développe et précise les modalités d’ouverture le dimanche. En l’occurrence, il vise à modifier les conditions de détermination des zones dérogatoires au repos dominical.

Selon la législation actuelle, la demande de délimitation ou de modification des zones se fait sur demande du conseil municipal et au vu de circonstances locales particulières. Les modifications prévues par l’article 75 tendent, d’une part, à réduire l’avis des élus territoriaux à un simple avis consultatif et, d’autre part, à supprimer les critères objectifs tels que l’usage de consommation dominicale.

Cette extension du travail dominical à l’ensemble du territoire national ne constitue aucunement à nos yeux une avancée. Bien au contraire, cela revient à ouvrir une brèche dans l’édifice de nos acquis sociaux, à remettre en cause ce qu’il y a de commun à nombre de familles, à savoir le repos dominical.

Bien entendu, le travail du dimanche ne touchera pas tout le monde de la même façon. Si l’on réalisait une étude sociologique du profil des travailleurs et travailleuses du dimanche, on s’apercevrait vite qu’il s’agit majoritairement de femmes, de mères célibataires et d’étudiants. Nous sommes loin du libre choix et du volontariat que vous vantez et qui nous semblent artificiels. Ces personnes ne souhaitent pas travailler le dimanche, elles cherchent seulement à gagner un peu plus d’argent chaque fois qu’elles en ont l’occasion, car leur salaire est trop faible. On prend donc le problème à l’envers !

Mes collègues l’ont déjà dit, nous n’adhérons pas à ce projet de société dans lequel la consommation est l’activité reine du dimanche. Quelle tristesse ! On est loin de la culture des loisirs et du sport qui épanouit l’homme dans toutes ses dimensions.

À travers cette série d’articles du titre III, vous reprenez les préconisations du rapport Bailly et souhaitez aller plus loin que la loi Mallié. Raison pour laquelle nous défendons cet amendement de suppression.