M. le président. La parole est à Mme Éliane Assassi, pour la réplique.

Mme Éliane Assassi. Monsieur le secrétaire d’État, oui, l’avenir d’Air France est en jeu et c’est d’autant plus vrai quand cette entreprise contribue pour 1,4 % au PIB français. L’État, qui en est actionnaire à hauteur de 17 %, ne peut laisser mourir cette grande entreprise et, de facto, faire perdre leur emploi à des milliers de salariés.

Oui, le dialogue doit exister. Encore faut-il qu’il s’agisse d’un vrai dialogue social et non d’un dialogue à sens unique. Comme le disait Jaurès, « le patronat n’a pas besoin, lui, pour exercer une action violente, de gestes désordonnés et de paroles tumultueuses ». (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre. (Marques d’étonnement et protestations sur les travées du groupe Les Républicains.) Je rappelle que le Premier ministre a droit à une horloge spéciale… (Sourires.)

M. Manuel Valls, Premier ministre. Monsieur le président, puisque nous sommes dans un…

Mme Éliane Assassi. … dialogue !

M. Manuel Valls, Premier ministre. … exercice nouveau, je me permets de m’exprimer de nouveau sur ce sujet et je vous remercie de m’en donner la possibilité.

Madame la sénatrice, nous appelons au dialogue social. Nous l’avons rappelé chaque fois et à tous les salariés. (M. Pierre Laurent s’exclame.) Il faut à tout prix que les pilotes entament ce dialogue, monsieur Laurent. Sinon, ce sont tous les autres salariés qui seront pénalisés. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe Les Républicains, ainsi que sur plusieurs travées du groupe écologiste.)

Ce matin, j’ai rencontré trois organisations syndicales. Elles disent exactement la même chose.

M. Pierre Laurent. C’est la direction qui doit dialoguer !

M. Manuel Valls, Premier ministre. Nous avons demandé et nous continuerons à demander à chacun d’avancer.

Toutefois, parce que nous partageons le même but, au moment où ces images choquent le monde, choquent les Français et choquent d’abord tous les salariés d’Air France, je ne confonds pas les violences. S’attaquer ainsi à la dignité de ces hommes, comme vous l’avez dit, madame la sénatrice, est intolérable. Il ne peut pas y avoir de confusion dans les propos. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe Les Républicains, ainsi que sur plusieurs travées du groupe écologiste.)

intempéries dans les alpes-maritimes

M. le président. La parole est à M. Marc Daunis, pour le groupe socialiste et républicain.

M. Marc Daunis. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'intérieur.

Dans la nuit de samedi à dimanche, nous avons vécu dans les Alpes-Maritimes un véritable déluge, et ce n’était pas un mythe : plus de vingt morts, des écoles et des entreprises saccagées, des routes broyées, des ponts emportés, des habitations lourdement endommagées, mais surtout des hommes et des femmes traumatisés.

En tant que maire de Valbonne Sophia Antipolis, j’ai vécu ces pluies diluviennes sur le terrain. Élus, personnels municipaux et territoriaux, policiers, pompiers, citoyens : la solidarité s’exprime. Elle est remarquable, chaleureuse et réconfortante. Elle tranche d’ailleurs fort heureusement avec la teneur de certaines déclarations, y compris aujourd'hui dans cet hémicycle. (Mme Marie-Noëlle Lienemann applaudit.)

M. Roland Courteau. Très bien !

M. Marc Daunis. Face à de tels événements, la retenue s’impose. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

Ayons la décence de ne pas nous laisser aller à des polémiques stériles – qui, parfois, fleurent bon la politique politicienne – sur la couleur de l’alerte, gardons-nous de tirer des conclusions hâtives sous le coup d’une légitime émotion concernant des sujets aussi complexes que l’urbanisme, la prévention des risques ou encore l’application de la loi ALUR. Du reste, au jeu des responsabilités, il ne faut pas exclure le risque de voir l’arroseur arrosé…

Dès dimanche midi, le Président de la République et vous-même, monsieur le ministre de l’intérieur, vous vous êtes rendus sur place – de même que, lundi, Mme Rossignol – et vous avez constaté l’ampleur de la catastrophe. Des mesures d’urgence ont été prises ; je m’en félicite. Néanmoins, l’inquiétude est vive pour aujourd'hui et pour demain.

Monsieur le ministre, comment comptez-vous procéder pour que les engagements pris soient efficaces le plus rapidement possible et pour qu’ils soient scrupuleusement tenus à moyen et à plus long termes ?

Je le répète, l’inquiétude est très grande chez les élus locaux et dans la population. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’intérieur.

M. Bernard Cazeneuve, ministre de l'intérieur. Monsieur le sénateur, vous étiez présent, comme les élus de toutes sensibilités, qu’ils soient maires ou parlementaires, lors de la visite du Président de la République. Comme vous, j’ai pu constater sur le terrain la belle unité des élus, qui manifestaient bien légitimement leurs préoccupations face au drame terrible qui venait de se produire. Tous ceux qui étaient présents, quel que soit leur niveau de responsabilité, ont fait part de leur compassion.

Nous y avons également vu les pompiers des services départementaux d’incendie et de secours, valeureux, courageux, qui avaient travaillé toute la nuit pour sauver des vies, et qui en ont sauvé en nombre, les marins-pompiers de Marseille, les sapeurs-sauveteurs des formations militaires de la sécurité civile, les FORMISC, 300 policiers et gendarmes qui ont, eux aussi, apporté leur concours.

Nous le constatons tous, lorsque des épreuves terribles, qui sont de véritables tragédies, surviennent dans notre pays, des hommes et des femmes représentant le service public s’unissent et donnent le meilleur d’eux-mêmes. Cela justifie que, dans cette enceinte, nous leur adressions nos remerciements, nous leur faisions part de toute notre reconnaissance et de notre profonde gratitude.

M. Bernard Cazeneuve, ministre. Aujourd'hui, nous nous mobilisons pour que les réparations interviennent très vite. L’état de catastrophe naturelle sera déclaré demain en conseil des ministres ; l’arrêté sera publié dès jeudi. Un fonds de calamité nationale sera débloqué dans la foulée. La durée des inspections sera réduite le plus possible de manière que les fonds soient versés dans les meilleurs délais.

Je réunis les compagnies d’assurance tout à l’heure pour examiner les conditions dans lesquelles il sera possible de procéder au versement des avances dans un laps de temps extrêmement court.

La mobilisation est donc générale afin que les indemnisations soient rapidement versées, que les réparations puissent intervenir, que les collectivités locales et les particuliers puissent être aidés. C’est ainsi que nous honorerons les engagements qui ont été pris dimanche dans le département des Alpes-Maritimes. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du RDSE, ainsi que sur quelques travées du groupe écologiste.)

policier blessé en seine-saint-denis par un multirécidiviste

M. le président. La parole est à M. François Baroin, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. François Baroin. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.

À l’heure de cette séance de questions d’actualité au Gouvernement, un policier de trente-six ans se trouve entre la vie et la mort. Cet homme a déjà payé un lourd tribut, les médecins évoquant un cas de détresse vitale. Qu’il me soit permis, au nom du groupe au nom duquel je m’exprime, Les Républicains, mais aussi de la représentation nationale, d’adresser nos pensées les plus émues à sa famille, à ses proches, à ses collègues de la brigade anti-criminalité, ainsi qu’à l’ensemble des forces de l’ordre – policiers et gendarmes – de notre territoire qui, dans un contexte de terrorisme développé, s’efforcent, vingt-quatre heures sur vingt-quatre, de garantir la sécurité de nos compatriotes.

Nous avons appris que le meurtrier faisait l’objet d’une surveillance, d’une fiche S, cette classification n’étant pas anodine puisqu’elle renvoie à la sûreté de l’État. Nous avons également appris qu’il avait obtenu une permission de sortie le 27 mai, mais qu’il n’avait pas réintégré sa prison. Plusieurs mois se sont écoulés depuis.

Monsieur le Premier ministre, pourriez-vous nous confirmer que cet individu, dont le casier judiciaire était long comme le bras, faisait bien l’objet d’une fiche S en raison de ses relations avec une mouvance islamiste ?

Par ailleurs, pourriez-vous nous indiquer comment travaillent les services de la Direction générale de la sécurité intérieure, la DGSI, avec les juges d’application des peines ? Comment se fait-il qu’un individu de cette nature, surveillé à ce titre, ait pu bénéficier d’une permission ?

Enfin, quelles mesures comptez-vous prendre pour lever l’incompréhension qu’a suscitée cette affaire dans le pays et apaiser la colère qui gronde ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’intérieur.

M. Bernard Cazeneuve, ministre de l'intérieur. Monsieur Baroin, je me suis rendu hier après-midi auprès des policiers de Seine-Saint-Denis pour leur faire part de ma solidarité et de ma tristesse et pour être auprès d’eux, comme le Premier ministre et moi avons été à leurs côtés lorsque des policiers du service de protection des hautes personnalités sont tombés au mois de janvier et lorsqu’un policier, Ahmed Merabet, a trouvé la mort, froidement abattu par des barbares. Cette solidarité est normale : elle est un devoir d’État.

Que s’est-il passé précisément ? Dans les conditions qu’a précisées la garde des sceaux tout à l’heure…

M. Alain Fouché. On ne nous a rien dit, à nous !

M. Bernard Cazeneuve, ministre. … et conformément aux dispositions législatives en vigueur, un détenu a bénéficié d’une permission (Vives exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) pour accomplir des formalités après le décès de son père. Moi, je n’ai pas à me prononcer sur une décision ayant été prise par un juge, parce que la séparation des pouvoirs existe. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.) Les principes de droit doivent être appliqués, y compris lorsque surviennent des drames suscitant une légitime émotion.

M. François Grosdidier. Le procureur a-t-il fait appel ?

M. Bernard Cazeneuve, ministre. Après son évasion, cet individu a été signalé comme s’étant radicalisé. C’est à ce moment-là qu’une fiche S a été établie le concernant, donc seulement après qu’il n’eut pas regagné son lieu de détention, non pas avant. Il était normal que cet individu soit inscrit au fichier des personnes recherchées et qu’une fiche S soit établie, car c’était la seule manière de pouvoir le récupérer dans le cas où il aurait tenté de quitter le territoire national.

L’ensemble des services de l’État se sont ensuite mobilisés pour procéder à la récupération de cet individu.

M. le président. Veuillez conclure, monsieur le ministre.

M. Bernard Cazeneuve, ministre. Hier, les services de police ont payé un lourd tribut lorsqu’ils ont procédé à la neutralisation de cet individu, qui était extrêmement dangereux.

Je veux rendre hommage aux policiers, car, dans ces circonstances (Brouhaha sur les travées du groupe Les Républicains.),

M. Christian Cambon. Ce n’est pas la question !

M. Jérôme Bignon. Pourquoi était-il dehors ?

M. Bernard Cazeneuve, ministre. … ils ont effectué un travail absolument remarquable, qui mérite toute notre considération. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

rentrée universitaire

M. le président. La parole est à Mme Corinne Féret, pour le groupe socialiste et républicain.

Mme Corinne Féret. Ma question s'adresse à M. le secrétaire d'État chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche.

La rentrée universitaire confirme l’attractivité croissante de nos établissements d’enseignement supérieur : alors que le nombre d’étudiants qu’ils accueillent avait augmenté de 30 000 par an en 2013 et 2014, il a crû de 65 000 en 2015.

Ces chiffres sont la manifestation tangible du succès de nos universités et de nos écoles. Plus généralement, ils attestent que le double mouvement de démocratisation de notre enseignement supérieur et d’élévation des qualifications et des diplômes est désormais engagé. Cette évolution s’est accompagnée d’efforts renforcés et continus depuis trois ans en matière de qualité des enseignements, de soutien à la vie étudiante et d’amélioration des conditions matérielles et humaines d’accueil des étudiants.

Néanmoins, certaines inquiétudes demeurent. À la fin du mois de septembre, des étudiants manifestaient pour réclamer une meilleure lisibilité des formations dans le domaine du sport et la fin du tirage au sort instauré à l’entrée dans les études, faute de places suffisantes. Une journée de mobilisation de tous les acteurs de l’enseignement supérieur et de la recherche est prévue le 16 octobre prochain.

Monsieur le secrétaire d’État, le comité d’expertise chargé de définir la stratégie nationale pour l’enseignement supérieur propose d’accroître le niveau général de qualification dans notre pays en fixant à l’horizon de dix ans un objectif de 60 % d’une classe d’âge diplômée de l’enseignement supérieur. Cette ambition soulève une double question : comment et avec quels moyens ? Elle est centrale et suscite des controverses dans un contexte marqué par une baisse des investissements destinés à l’enseignement supérieur et à la recherche dans les contrats de plan État-région pour les années 2015-2020.

La semaine dernière, lors d’un déplacement à Avignon, M. le Premier ministre a annoncé qu’il n’y aurait pas de ponction des fonds de roulement des universités, comme cela avait été le cas dans le budget de 2015. Il a pris l’engagement qu’un « effort exceptionnel » de 100 millions d’euros supplémentaires serait fait pour le budget de l’enseignement supérieur et de la recherche pour 2016.

M. le président. Veuillez poser votre question.

Mme Corinne Féret. Ma question est donc la suivante : les 100 millions d’euros annoncés par M. le Premier ministre sont-ils des crédits nouveaux ou sont-ils le résultat de la « non-ponction » sur les fonds de roulement des universités ? Ces 100 millions d’euros seront-ils affectés uniquement au programme 150, donc aux universités, ou concerneront-ils l’éducation nationale dans son ensemble ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement.

M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement. Madame la sénatrice Corinne Féret, la rentrée 2015 confirme et amplifie la tendance enregistrée depuis 2012, c'est-à-dire un accroissement sans précédent du nombre d’étudiants inscrits. C’est une chance pour notre pays, le diplôme restant l’une des meilleures protections contre le chômage.

L’année 2015-2016 marque une nouvelle étape dans l’amélioration de la situation sociale des étudiants. Après la mobilisation de près de 500 millions d’euros en faveur des bourses sur critères sociaux depuis 2012, le Président de la République a présenté la semaine dernière un plan national de la vie étudiante visant à simplifier les démarches, à renforcer la vie du campus et à permettre l’accès au droit à la santé pour tous les étudiants. Nous poursuivons également l’effort de construction de 40 000 nouveaux logements d’ici à la fin de l’année 2017. Ces mesures illustrent bien notre volonté de renforcer les moyens.

Je vous confirme que les dotations des établissements d’enseignement supérieur progresseront de 165 millions d’euros en 2016. Cet investissement permettra notamment de financer une nouvelle vague de 1 000 créations d’emplois, d’accompagner les établissements qui doivent faire face à une augmentation du nombre d’étudiants et de favoriser la réussite en premier cycle.

Grâce à ces moyens, nous serons en mesure de prendre dans les prochaines semaines des décisions tendant à développer la formation professionnelle continue à l’université. Nous apporterons également des réponses concrètes aux difficultés d’orientation des jeunes.

C’est à ces conditions que nous pourrons parvenir à l’objectif fixé par le Président de la République (M. Francis Delattre s’exclame.), qui est d’atteindre le taux de 60 % de diplômés de l’enseignement supérieur dans une classe d’âge. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

situation des migrants

M. le président. La parole est à Mme Natacha Bouchart, pour le groupe Les Républicains.

Mme Natacha Bouchart. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre et porte sur le problème des migrations.

Monsieur le Premier ministre, la justice vient de nous infliger un nouveau camouflet. Ce week-end, pour la énième fois, des migrants se sont rués sur le site d’Eurotunnel, provoquant des dégâts très importants. Seuls vingt-trois des cent treize migrants qui se sont introduits par effraction dans le tunnel ont pu être interpellés par la police et placés en garde à vue.

Or, à la surprise générale, le procureur a décidé de ne pas engager de poursuites pour ces faits graves, survenus sur un site aussi sensible que le tunnel sous la Manche. Selon le procureur, ces vingt-trois personnes ne peuvent être considérées comme les instigateurs de cette action ni être légitimement poursuivies dès lors qu’une majeure partie des coupables n’a pas été interpellée.

Monsieur le Premier ministre, de qui se moque-t-on ?

Quand la justice prendra-t-elle enfin au sérieux les troubles à l’ordre public que cause le phénomène migratoire à Calais ?

En refusant de sanctionner ces personnes, en renonçant à leur faire quitter le territoire français, l’État donne le sentiment d’abandonner le Calaisis. Car cette situation a des effets catastrophiques pour l’économie locale : chute de la fréquentation touristique, délocalisations, découragement des investisseurs.

On n’admet plus le laxisme de l’autorité judiciaire !

Monsieur le Premier ministre, quand la justice et l’État vont-ils enfin se décider à faire respecter l’ordre public à Calais ? Les Calaisiens, comme tous les Français, y ont droit ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’intérieur.

M. Bernard Cazeneuve, ministre de l’intérieur. Madame la sénatrice, vous évoquez la justice et l’État. Je ne veux pas vous compromettre, mais je vous rappelle que nous discutons vous et moi très régulièrement des questions de sécurité à Calais. Comme vous le savez, j’ai délégué à Calais près de 550 personnels à titre de forces supplémentaires. En outre, alors que Calais compte 7,5 unités de forces mobiles, j’ai décidé ce week-end d’accroître le nombre de ces forces compte tenu des intrusions auxquelles vous faites référence. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. François Grosdidier. C’est encore à Mme Taubira de répondre ! La question porte sur la justice !

M. Bernard Cazeneuve, ministre. Si j’ai pris cette décision, c’est parce qu’il y a des violences, des migrants qui perdent la vie, qu’il y a des risques pour les infrastructures de transport, mais surtout parce qu’il y a des risques pour les migrants eux-mêmes – c’est ce qui me préoccupe le plus – et un trafic organisé par des passeurs, que nous démantelons.

M. François Grosdidier. Y a-t-il un garde des sceaux ?

M. Bernard Cazeneuve, ministre. Vous demandez ce que fait l’État pour ce qui concerne le démantèlement des réseaux de passeurs, mais vous le savez parfaitement : nous avons démantelé en France 190 réseaux de passeurs représentant près de 3 300 personnes. Une trentaine de ces 190 réseaux opèrent à Calais et à Dunkerque et représentent 800 personnes.

Donc, nous agissons. (Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.)

M. François Grosdidier. Pourquoi n’y a-t-il pas de poursuites ?

M. Bernard Cazeneuve, ministre. Vous m’interrogez sur la décision prise par le procureur concernant les vingt-trois migrants qui ont été récupérés dans le tunnel et qui n’ont pas fait l’objet de poursuites judiciaires. Je vous le redis, même si cela doit susciter les hauts cris sur vos travées : en tant que ministre de l’intérieur, par respect pour l’État de droit et pour les principes constitutionnels, je ne commente pas les décisions de justice. (Exclamations renouvelées sur les travées du groupe Les Républicains. – Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Où est Mme Taubira ?

M. François Grosdidier. Il n’y a pas d’État de droit sans garde des sceaux !

M. Bernard Cazeneuve, ministre. Cela étant, j’ai pris des dispositions ce week-end, dont je vous ai fait part, madame Bouchart, en demandant à la préfète du Pas-de-Calais de se mettre en contact, dans le respect de l’indépendance de la justice, avec le procureur de la République, de manière que nous puissions judiciariser avec beaucoup de fermeté le comportement de ceux qui font usage de violences à Calais et dans les infrastructures de transports. Cette réunion a eu lieu ce matin, précisément, et je suis convaincu que la fermeté dont fait preuve le ministère de l’intérieur sur ces sujets sera suivie d’effet. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

M. François Grosdidier. Ce n’est pas la position du parquet !

M. le président. La parole est à Mme Natacha Bouchart, pour la réplique.

Mme Natacha Bouchart. Monsieur le ministre, vous avez bien compris ma question. Les officiers de police judiciaire, les forces de l’ordre font un travail remarquable, et je tiens à les saluer. Il n’empêche qu’ils sont épuisés parce que le représentant de la justice porte des jugements subjectifs. (Marques d’approbation sur les travées du groupe Les Républicains.)

Par conséquent, ne pourrait-on pas saisir, dans ce type de situation, une instance qui reste à définir,…

M. le président. Veuillez conclure.

Mme Natacha Bouchart. … premièrement, quand on relâche des personnes prises en flagrant délit, deuxièmement, quand on convoque des personnes en situation irrégulière non identifiées deux ou trois mois après, sachant que, entre-temps, elles se seront évaporées dans la nature ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur quelques travées de l'UDI-UC.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre. (Vives exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Manuel Valls, Premier ministre. Un mot, et je pense que le message sera entendu : dans le strict respect de l’indépendance de la justice, chacun doit se comporter avec une totale responsabilité dans cette affaire, et donc assumer ses responsabilités. (Exclamations sur les mêmes travées. – Mme Françoise Laborde, M. Michel Mercier et Mme Valérie Létard applaudissent.)

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Y compris la garde des sceaux !

M. François Grosdidier. Il n’y a plus de politique pénale !

les soixante-dix ans de la sécurité sociale

M. le président. La parole est à M. Yves Daudigny, pour le groupe socialiste et républicain.

M. Yves Daudigny. Ma question s'adressait à Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes (Elle n’est pas là ! sur les plusieurs travées du groupe Les Républicains.), mais je sais qu’elle est absente parce qu’elle célèbre actuellement un formidable anniversaire.

Oui, mes chers collègues, notre sécurité sociale fête soixante-dix ans d’existence. Cet anniversaire confirme la justesse de la vision de ses pères fondateurs. Depuis soixante-dix ans, elle assure, comme nulle part ailleurs, la meilleure couverture des risques, de la manière la plus juste, au plus grand nombre et au moindre coût.

La gestion du régime général représente moins de 4 % des prestations versées : c’est presque trois fois moins que toute autre assurance. Le reste à charge est parmi le plus faible de l’OCDE et il s’est encore réduit cette année.

Cela mérite d’être dit et répété parce que, comme en chaque période difficile, les voix conservatrices de l’ancien système, celles qui avaient baissé le ton en 1945, se font de nouveau entendre, jusqu’à susciter des désaffiliations. Il est donc d’autant plus important de marquer avec solennité ce jour anniversaire.

À cette occasion, seront récompensés les lauréats du concours « Les jeunes et la sécurité sociale ». L’un des groupes de lycéens a écrit : « L’absence d’une véritable sécurité sociale lors de la grande dépression d’avant-guerre a probablement été un facteur aggravant parmi toutes les causes qui ont conduit à l’horreur. »

La sécurité sociale constitue un filet de sécurité sans lequel l’affaiblissement du lien social et l’exclusion seraient bien pires.

Afin que vive la sécurité sociale, notre gouvernement en a proposé une nouvelle approche de long terme à travers la stratégie nationale de santé.

Merci de nous rappeler les réformes déjà mises en œuvre et celles qui sont programmées au service de ce projet d’avenir…

M. le président. Il faut conclure !

M. Yves Daudigny. … par ceux qui entendent la modernité comme l’expression de la solidarité, de la justice et de la responsabilité. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

M. Alain Gournac. Question téléguidée !

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement.

M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement. Monsieur le sénateur, nous célébrons effectivement aujourd'hui le soixante-dixième anniversaire de la sécurité sociale. Nous faisons partie de ceux qui veulent non seulement la célébrer, mais aussi la défendre et la promouvoir (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. –M. Alain Bertrand applaudit également.) Nous savons en effet que c’est une des valeurs fondamentales de notre société, un capital essentiel pour l’ensemble de nos concitoyens.

Monsieur Daudigny, ainsi que vous l’avez rappelé, depuis 2012, nous avons agi, et d’abord pour défendre les prestations sociales, faire en sorte qu’elles cessent de reculer et que nos compatriotes puissent enfin bénéficier, dans tous les domaines, d’une égale qualité d’accès aux soins et aux prestations.

Nous avons aussi avancé sur de nouveaux droits. Nous avons réformé, qu’il s’agisse des retraites (Mme Catherine Deroche s’exclame.), avec le compte personnel de prévention de la pénibilité, qu’il s’agisse de la modernisation de nos prestations familiales, qu’il s’agisse du domaine de la santé. Ainsi, dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016, nous allons développer la « protection universelle maladie », qui permettra effectivement, avec la complémentaire, dans le prolongement de l’accord national interprofessionnel, l’ANI, une véritable prise en charge de l’ensemble de nos concitoyens.

Mais nous n’avons pas fait que défendre et améliorer les droits, moderniser la gestion. Nous avons aussi réduit les déficits. Depuis 2012, plus de 40 % des déficits ont diminué grâce à la gestion de la majorité (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains. – Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe CRC.), qui a fait en sorte que l’avenir de notre protection sociale, de notre sécurité sociale soit assuré par des financements et une gestion qui le garantissent.

Voilà comment et pourquoi nous sommes les défenseurs de cette sécurité sociale : parce que nous la construisons, nous la modernisons et nous la défendons en lui donnant une bonne gestion. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du RDSE.)