Mme la présidente. La parole est à Mme Dominique Gillot, pour explication de vote.

Mme Dominique Gillot. J’entends bien votre argumentation, madame la secrétaire d’État. Toutefois, pourquoi attendre que les discussions à Bruxelles soient achevées, alors que nous sommes d’accord pour avancer sur ce sujet ?

Nous percevons la nécessité d’apporter une réponse à un besoin de nos concitoyens, mais nous nous laissons paralyser par des calendriers que nous ne maîtrisons pas. Nous pourrions très bien anticiper la directive européenne : on ne nous sanctionnerait pas pour cela. Au contraire, nous montrerions la voie, sachant que, de toute façon, nous devrons sous peu traduire ces grands principes dans notre droit.

Voilà pourquoi je préconise que l’on ne se soumette pas au calendrier de la Commission européenne. L’article 44 nous permet d’introduire dès aujourd’hui des dispositions en matière d’accessibilité universelle et d’envoyer un message fort à des millions de citoyens en situation de handicap.

Je préside le Conseil national consultatif des personnes handicapées depuis six mois. Il compte une commission qui suit l’élaboration des textes européens : ses membres ne comprennent pas que l’on n’avance pas et que les textes français ne soient pas déjà en accord avec ce qui est entériné à l’échelon européen. Certes, la directive en question n’a pas encore été adoptée, mais inscrire dans la loi une telle mesure permettrait d’adresser un signal fort à nos concitoyens handicapés, qui attendent de pouvoir accéder eux aussi aux services bancaires en ligne.

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d’État. Le Gouvernement, j’y insiste, a vraiment la volonté d’avancer sur ce sujet, mais imposer de telles obligations en matière d’accessibilité aux seules entreprises françaises placerait celles-ci en situation de concurrence inégale avec les entreprises des autres pays européens. Aujourd’hui, vingt-quatre pays de l’Union européenne n’appliquent pas de telles dispositions au secteur privé.

Vous me direz que ce n’est pas parce que ces pays montrent le mauvais exemple qu’il faut les suivre, mais il y a un engagement très fort du Gouvernement français pour avancer rapidement sur ce sujet. Cela doit permettre de renforcer nos capacités de négociation avec le secteur privé pour parvenir à imposer le même niveau d’exigence à l’ensemble des pays européens.

Je comprends tout à fait l’impatience des personnes concernées, mais je vous prie de croire que la France est en première ligne sur cette question à Bruxelles : il vaut mieux entraîner tous nos partenaires européens dans cette voie.

Mme la présidente. Madame Gillot, l’amendement n° 256 est-il maintenu ?

Mme Dominique Gillot. Non, je le retire, madame la présidente, de même que l’amendement n° 259, par anticipation.

Mme la présidente. L’amendement n° 256 est retiré.

Intitulé de la section 2
Dossier législatif : projet de loi pour une République numérique
Article additionnel après l'article 44 (priorité)

Article 44 (priorité)

I. – L’article 47 de la loi n° 2005-102 du 11 février 2005 précitée est ainsi rédigé :

« Art. 47. – I. – Les services de communication au public en ligne des services de l’État, des collectivités territoriales et des établissements publics qui en dépendent ainsi que ceux des organismes délégataires d’une mission de service public doivent être accessibles aux personnes handicapées.

« L’accessibilité des services de communication au public en ligne concerne l’accès à tout type d’information sous forme numérique, quels que soient le moyen d’accès, les contenus et le mode de consultation. Les recommandations internationales pour l’accessibilité de l’internet doivent être appliquées pour les services de communication publique en ligne.

« Les personnes mentionnées au premier alinéa élaborent un schéma pluriannuel de mise en accessibilité de leurs services de communication au public en ligne, qui est rendu public et décliné en plans d’actions annuels.

« II. – La page d’accueil de tout service de communication au public en ligne comporte une mention clairement visible précisant s’il est ou non conforme aux règles relatives à l’accessibilité ainsi qu’un lien renvoyant à une page indiquant notamment l’état de mise en œuvre du schéma pluriannuel de mise en accessibilité et du plan d’actions de l’année en cours mentionnés au I et permettant aux usagers de signaler les manquements aux règles d’accessibilité de ce service.

« III. – Le défaut de mise en conformité d’un service de communication au public en ligne avec les obligations prévues au II fait l’objet d’une sanction administrative dont le montant, qui ne peut excéder 5 000 €, est fixé par le décret en Conseil d’État mentionné au IV. Une nouvelle sanction est prononcée chaque année lorsque le manquement à ces dispositions perdure.

« IV. – Un décret en Conseil d’État fixe les règles relatives à l’accessibilité et précise, par référence aux recommandations établies par l’autorité administrative compétente, la nature des adaptations à mettre en œuvre ainsi que les délais de mise en conformité des services de communication au public en ligne existants, qui ne peuvent excéder trois ans, et les conditions dans lesquelles des sanctions sont imposées et recouvrées en cas de non-respect des obligations prévues au II. »

II (Non modifié). – L’article L. 111-7-12 du code de la construction et de l’habitation est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Ce fonds peut également participer au financement des prestations destinées à assurer le respect de l’obligation d’accessibilité des services de communication au public en ligne, prévue à l’article 47 de la loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées. » ;

2° L’avant-dernier alinéa est complété par les mots : « ainsi qu’à l’article 47 de la loi n° 2005-102 du 11 février 2005 précitée ».

Mme la présidente. La parole est à Mme Dominique Gillot, sur l'article.

Mme Dominique Gillot. Le sujet est important, et nous vivons un moment historique : le Sénat consacre un long débat à la prise en compte des besoins et des attentes des personnes handicapées.

L’accessibilité numérique est un défi majeur pour les personnes en situation de handicap. Elle suppose le développement de moyens de communication dans tous les domaines de la vie : éducation, vie professionnelle, loisirs ou culture. Lutter pour réduire toutes les sources de l’exclusion numérique est un combat politique juste : l’illettrisme, la dyslexie, la complexité des informations numériques, les déficits sensoriels ou cognitifs excluent les personnes concernées de l’accès au numérique.

Bien que l’article 47 de la loi du 11 février 2005 prévoie une réglementation destinée à favoriser l’accès des personnes handicapées aux contenus numériques, la grande majorité des sites web du secteur public, de l’État ou des collectivités territoriales demeurent en pratique inaccessibles pour bien des personnes en situation de handicap.

Pourtant, en 2015, 12 millions de Français ont des besoins spécifiques en matière d’accessibilité. Parmi eux, 1,5 million sont atteints d’une déficience visuelle. Une part importante de nos concitoyens n’a donc pas accès aux services et aux contenus numériques, ce qui représente pourtant un droit fondamental au titre du droit à l’information.

La transversalité des usages et des pratiques digitaux transforme la vie de tous, en particulier celle des personnes handicapées, qui expriment une forte attente. Il en va de même des personnes qui vieillissent et qui, confrontées chaque jour à la diminution de leurs aptitudes, se retrouvent handicapées, sinon privées de l’accès au web.

L’article 44 du présent projet de loi précise les conditions d’accès des personnes avec handicap aux sites internet des organismes publics, en renforçant tant le contrôle du respect des obligations faites aux organismes concernés que les sanctions susceptibles d’être prononcées à leur encontre en cas de manquement.

Cet article s’inscrit dans le prolongement de la démarche pragmatique et incitative engagée depuis 2012 par le Gouvernement, qui nous propose aujourd’hui d’actualiser les grandes lois relatives au handicap en les mettant en phase avec les évolutions technologiques, notamment numériques.

Mme la présidente. L’amendement n° 355, présenté par M. Assouline, Mme D. Gillot, MM. Sueur, Leconte, Rome, Camani, F. Marc et Guillaume, Mmes Campion, Schillinger, Meunier et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

I. – L’article 47 de la loi n° 2005-102 du 11 février 2005 précitée est ainsi rédigé :

« Art. 47. – L’accessibilité des contenus et services numériques concerne l’accès à toute forme de contenus et de services numériques mis à disposition du public, des agents de la fonction publique et des salariés quels que soient le type de dispositif de diffusion utilisé et le handicap. Elle concerne tout spécialement les outils et supports pédagogiques virtuels utilisés dans le domaine de l’éducation scolaire et des études supérieures. Les recommandations internationales pour l’accessibilité des contenus et services numériques doivent être appliquées.

« Les contenus et services numériques, notamment les sites internet, intranet, extranet, applications mobiles, progiciels, objets connectés et mobilier urbain numérique des personnes chargées d’une mission de service public administratif, à caractère industriel et commercial, d’intérêt général et d’intérêt économique général, ainsi que ceux utilisés par les entreprises privées pour délivrer un service ou une information, doivent être accessibles aux personnes en situation de handicap.

« Un décret en Conseil d’État fixe les règles relatives à l’accessibilité des services et contenus numériques gérés par les personnes mentionnées au deuxième alinéa et gérant une mission de service public. Il précise, par référence au référentiel général d'accessibilité pour les administrations, et notamment la nature des adaptations à mettre en œuvre, les modalités de formation des personnels intervenant sur la conception, la production, la gestion et la mise à jour des contenus et services numériques.

« Les personnes privées souhaitant délivrer un service ou une information doivent se conformer aux standards internationaux en matière d’accessibilité.

« Les personnes mentionnées au deuxième alinéa élaborent un schéma d'accessibilité des services et contenus numériques. Ce schéma, dont la durée ne peut être supérieure à trois ans, est mis à disposition dans une page “accessibilité publique permettant aux usagers de signaler tout manquement à l’accessibilité”.

« Un décret en Conseil d’État fixe les règles relatives aux contenus, aux délais, aux modalités de suivi, de publication sur le service, de mise à jour et de contrôle de ce schéma et précise les montants et les modalités des sanctions pécuniaires imposées en cas de non-publication et de non-respect de ce schéma. Le produit issu de ces sanctions pécuniaires est recouvré comme les créances de l’État étrangères à l’impôt et au domaine et est versé au fonds d’accompagnement de l’accessibilité universelle prévu à l’article L. 111-7-12 du code de la construction et de l’habitation.

« Ce décret définit également l’autorité compétente de l’État à laquelle sont déférées les difficultés d’accessibilité des usagers en situation de handicap.

« La page d'accueil de tout service de communication au public en ligne comporte une mention clairement visible précisant s'il est ou non conforme aux règles relatives à l’accessibilité ainsi qu’un lien renvoyant à une page indiquant notamment l’état de mise en œuvre du schéma pluriannuel de mise en accessibilité. »

II. – L’article 6 sexies de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Ces aménagements incluent notamment celui de tous les outils numériques concourant à l'accomplissement de la mission des agents, notamment les logiciels métiers et de bureautique ainsi que les appareils mobiles. Ils concernent tout agent de la fonction publique, quels que soient sa position et son statut. »

III. – L’article L. 5213-6 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Ces aménagements incluent notamment celui de tous les outils numériques concourant à l'accomplissement de la mission des salariés, notamment les logiciels métiers et de bureautique ainsi que les appareils mobiles. Ils concernent tout salarié en situation de handicap quel que soit son statut dans l'entreprise. »

IV. – L’article L. 111-7-12 du code de la construction et de l’habitation est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, il est ajouté une phrase ainsi rédigée :

« Le fonds peut également participer au financement des prestations destinées à assurer le respect de l’obligation d’accessibilité des services de communication au public en ligne des autorités administratives, prévue par l’article 47 de la loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées. » ;

2° Le quatrième alinéa est complété par les mots : « et à l’article 47 de la loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées. » ;

V. – Le dernier alinéa de l’article 225-2 du code pénal est complété par une phrase ainsi rédigée :

« L’inaccessibilité technique des informations et services fournis par des outils de communication au public en ligne constitue un refus discriminatoire à partir du constat de l’absence de schéma de mise en accessibilité, ou du non-respect de ce schéma. »

La parole est à M. David Assouline.

M. David Assouline. Je crois, moi aussi, que nous vivons un moment très important. Je ne doute pas de l’engagement du Gouvernement sur cette question, mais je souhaite, par ce qui est presque un amendement d’appel, proposer une rédaction idéale de l’article… En effet, s’agissant des handicapés, il faut toujours étudier les problèmes jusqu’au bout et ne pas se contenter de faire preuve de pragmatisme.

Nous allons entériner l’avancée majeure proposée par le Gouvernement, mais je veux souligner qu’il faudra mener une concertation avec l’ensemble des entreprises du secteur privé, pour accompagner ce qui est prévu pour les administrations publiques.

Il faut dépasser le cadre restreint de l’information délivrée par les administrations publiques sur le web et favoriser l’accès de tous à l’éducation scolaire et aux études supérieures par le biais des supports pédagogiques virtuels. Il faut faciliter l’emploi des déficients visuels en exigeant l’accessibilité des logiciels métiers dans les secteurs public et privé, encourager la mise en accessibilité des outils de vente et des services en ligne, tels que les systèmes de facturation et de paiement, garantir l’accessibilité des objets connectés et des nouveaux mobiliers urbains dans les lieux recevant du public, tels les guichets automatiques, promouvoir l’accessibilité systématique ou des solutions alternatives pour les nouveaux produits de consommation numérique à destination du grand public, comme les smartphones et leurs applications.

Accéder à l’ensemble des services que je viens d’évoquer, qui relèvent très souvent du secteur privé, fait partie d’un exercice normal de la citoyenneté. Certains d’entre eux n’existent d’ailleurs plus que sous forme virtuelle, et l’on oublie que certaines personnes handicapées ne peuvent en bénéficier.

Je suis prêt à retirer cet amendement d’appel, car je sais bien qu’il ne faut pas adopter des dispositions qui ne seront pas applicables. C’est une erreur que nous avions faite en 2005. Cela étant, fixer alors un cap avait aussi permis de faire bouger beaucoup de choses.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe-André Frassa, rapporteur. Plusieurs amendements visent à étendre le champ de cet article relatif à l’accessibilité des sites internet publics pour les handicapés, que ceux-ci souffrent d’un handicap visuel ou fonctionnel, ainsi que pour la population vieillissante de notre pays.

Pour la clarté des débats, j’indique d’ores et déjà que la commission des lois est favorable aux amendements identiques nos 379 rectifié bis et 619.

La commission souhaite le retrait de l’amendement n° 355.

M. Loïc Hervé. C’est comme si c’était fait !

M. Christophe-André Frassa, rapporteur. Si l’extension du champ d’application de l’exigence d’accessibilité des services de l’État, des collectivités territoriales, des établissements publics et des établissements délégataires d’une mission de service public aux applications numériques et progiciels est une bonne chose, son extension aux entreprises privées sans distinction ne paraît pas judicieuse à ce stade.

La démarche européenne pour l’élaboration de la directive européenne relative au rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres en ce qui concerne les exigences en matière d’accessibilité applicables aux produits et services permettra une évolution ciblée et efficace de la législation. Seront ainsi rendus accessibles les produits et services vraiment utiles aux personnes handicapées dans leur vie quotidienne. Il convient donc d’attendre l’adoption de cette directive.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État. Le Gouvernement demande également le retrait de cet amendement, au profit de l’amendement n° 619 du Gouvernement.

Mme la présidente. Monsieur Assouline, l'amendement n° 355 est-il maintenu ?

M. David Assouline. Je le retire comme annoncé, madame la présidente, au profit de l’amendement n° 619, qui constitue déjà une avancée significative qu’il convient d’entériner.

Mme la présidente. L'amendement n° 355 est retiré.

Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 257, présenté par Mme D. Gillot, MM. Sueur, Leconte, Rome, Camani, F. Marc, Assouline et Guillaume, Mmes Campion, Schillinger, Meunier et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

I.- Alinéa 2

Après les mots :

communication au public en ligne

insérer les mots :

, les applications numériques et les progiciels

II.- Alinéa 3, première phrase

Après les mots :

communication au public en ligne

insérer les mots :

, des applications numériques et des progiciels

III.- Alinéa 3, seconde phrase

Après les mots :

communication publique en ligne

insérer les mots :

, les applications numériques et les progiciels

IV.- Alinéas 5, 6, 7 et 10

Après les mots :

communication au public en ligne

insérer les mots :

, des applications numériques et des progiciels

La parole est à Mme Dominique Gillot.

Mme Dominique Gillot. Aujourd’hui, les applications destinées au grand public ont des fonctionnalités très diversifiées et une utilité appréciable pour les personnes handicapées qui ont su s’en emparer. Un aveugle peut désormais obtenir sur son téléphone portable des informations sur l’approche d’un bus, sur un parcours sportif, un guidage vers une adresse, la gestion de ses rendez-vous, l’oralisation d’informations sollicitées vocalement. Ces nouvelles applications permettent à des millions de personnes d’être plus autonomes dans leur vie quotidienne.

Malgré ces évolutions, pour de nombreux citoyens handicapés, les nouveaux logiciels ou applications numériques restent encore, et pour longtemps, réservés aux valides, par manque d’information, de moyens d’acquisition, par autocensure aussi, par méconnaissance des outils et de leur utilisation, voire par manque d’accompagnement adapté.

On constate que la plupart des nouveaux produits numériques ne sont pas utilisables par les personnes handicapées, notamment aveugles et malvoyantes. D’autres peuvent se faire arnaquer – j’emploie ce terme sciemment – par des vendeurs d’applications peu scrupuleux ou peu avertis des réelles aptitudes ou des besoins d’accompagnement du client.

Des salariés éprouvent également des difficultés dans le cadre de leurs pratiques professionnelles, lorsque les outils numériques mis à leur disposition ne sont pas accessibles ou, s’ils l’ont été, deviennent obsolètes et ne sont plus compatibles. C’est fréquemment le cas avec les progiciels, applications complètes permettant d’effectuer plusieurs tâches spécifiques à un domaine d’activité.

Il s’agit donc d’imposer aux éditeurs de progiciels et applications numériques de prévoir systématiquement les développements permettant leur mise en accessibilité pour les personnes avec handicap et, ce faisant, de se conformer aux recommandations internationales. L’application des standards de l’accessibilité numérique dès la conception des produits et des services permet d’en améliorer l’usage bien au-delà des personnes handicapées.

Je rappelle qu’un quart de la population européenne aura plus de soixante-cinq ans à l’horizon 2020. Or les personnes âgées peuvent éprouver des difficultés à utiliser internet, notamment lorsqu’elles sont confrontées à des problèmes de vue ou qu’elles n’y ont pas été habituées plus jeunes.

Mme la présidente. L'amendement n° 481, présenté par Mmes David et Assassi, MM. Bosino, Abate et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 2

Après les mots :

en ligne

insérer les mots :

, les applications numériques et les logiciels professionnels

II. – Alinéa 3, première phrase

Après les mots :

en ligne

insérer les mots :

, des applications numériques et des logiciels professionnels

III. – Alinéa 3, seconde phrase

Après les mots :

en ligne

insérer les mots :

, les applications numériques et les logiciels professionnels

IV. – Alinéa 5

Après les mots :

en ligne

insérer les mots :

, des applications numériques et des logiciels professionnels

La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Cet article est important, puisqu’il vise à rendre accessibles les services en ligne de l’État et de l’administration. Ce pas est pour le moins nécessaire, au regard du principe d’égalité de traitement par le service public et d’accès universel et gratuit à ce dernier.

En effet, il est inconcevable qu’une partie non négligeable de la population soit exclue de ces sources d’information et de services que sont les sites internet de l’administration.

Pour autant, d’autres injustices perdurent, en matière d’accessibilité des logiciels professionnels ou d’utilisation d’intranet et d’extranet. En effet, la loi de 2005 prévoit l’inclusion des personnes en situation de handicap à l’école ou dans la sphère professionnelle. Or, ces principes, pour ne pas rester incantatoires, doivent être mis en œuvre sur le plan opérationnel. Cela passe notamment par la mise en accessibilité des outils de travail, notamment les logiciels.

Une directive européenne devrait bientôt imposer la mise en accessibilité des produits et services. En attendant, nous considérons qu’il serait opportun de prendre l’initiative à l’occasion de l’examen de ce projet de loi. La mise en accessibilité des applications mobiles serait à cet égard un premier pas. En effet, ces applications, qui se développent et deviennent un pan important de l’économie, ne doivent pas d’emblée exclure les personnes en situation de handicap. Il n’est pas logique que l’article 44 prévoie de rendre accessible le site internet des impôts, mais pas l’application impots.gouv.

Nous proposons, par cet amendement, de mieux prendre en compte l’évolution des techniques et des pratiques en rendant accessibles les logiciels professionnels et les applications numériques, à tout le moins ceux des administrations publiques. Il est à noter que cela devra nécessairement s’accompagner d’une meilleure prise en compte de l’accessibilité dans la formation des développeurs de sites, logiciels et applications.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe-André Frassa, rapporteur. La commission considère que ces deux amendements, qui visent à étendre l’obligation d’accessibilité numérique aux applications et progiciels, sont en partie satisfaits par les amendements identiques nos 379 rectifié bis et 619. Elle en demande donc le retrait.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État. Le Gouvernement demande également le retrait de ces amendements, puisque l’amendement n° 619 a pour objet l’extension de l’obligation d’accessibilité aux applications mobiles et aux progiciels.

J’ai souhaité imposer l’accessibilité de tout type d’information sous forme numérique, quels que soient les moyens d’accès, les contenus et le mode de consultation. J’ajoute qu’il est très important de travailler sur les normes pour les adapter aux dispositifs mobiles ; c’est ce que fait actuellement la Direction interministérielle des systèmes d’information et de communication de l’État.

On dit nos téléphones intelligents. Certains le sont : la fonction « paramètres » peut permettre d’accéder à une vocalisation du contenu. Cependant, il faut maintenant travailler sur les normes, pour que les contenus issus d’applications tierces soient interopérables et largement accessibles.

Mme la présidente. Madame Gillot, l'amendement n° 257 est-il maintenu ?

Mme Dominique Gillot. Non, je vais le retirer, madame la présidente. L’amendement n° 619 est très complet et reprend beaucoup des dispositions que nous souhaitons introduire.

Cela étant, il faut bien avoir conscience de l’importance de cette adaptation. Nous discuterons prochainement du projet de loi sur le travail. Le travail des personnes handicapées est une question essentielle. Certaines personnes deviennent handicapées et sont alors déclarées inaptes au travail. Or, si une attention particulière était portée à l’adaptation de leur poste de travail, avec le recours à des applications spécifiques, elles pourraient rester dans la vie active. Ainsi, ces personnes conserveraient leur dignité et les entreprises éviteraient la perte de compétences.

C’est pourquoi ces amendements ont une portée sociétale et économique, au-delà du seul cas des personnes handicapées. La société inclusive que nous appelons de nos vœux doit être bâtie chaque jour.

Je retire l’amendement.

Mme la présidente. L'amendement n° 257 est retiré.

Madame Gonthier-Maurin, l'amendement n° 481 est-il maintenu ?

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Non, je le retire, madame la présidente, en appuyant résolument l’argumentation de Dominique Gillot.

Mme la présidente. L'amendement n° 481 est retiré.

Mes chers collègues, je tiens à appeler votre attention sur le fait qu’il reste 341 amendements à examiner. Le sujet est certes important, mais peut-être faudrait-il faire un effort de synthèse…

M. Bruno Sido. Ce n’est pas nous qui rallongeons les débats !

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L'amendement n° 379 rectifié bis est présenté par Mme D. Gillot, M. Assouline et les membres du groupe socialiste et républicain.

L'amendement n° 619 est présenté par le Gouvernement.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

I. – Alinéa 3, première phrase

Compléter cette phrase par les mots :

et vise notamment les sites internet, intranet, extranet, applications mobiles, progiciels et mobilier urbain numérique

II.- Alinéa 4

Compléter cette phrase par les mots :

et dont la durée ne peut être supérieure à trois ans

III. - Alinéa 7

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Ce décret définit les modalités de formation des personnels intervenant sur les services de communication publique en ligne.

IV. – Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… – L’article 6 sexies de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Ces aménagements incluent notamment celui de tous les outils numériques concourant à l’accomplissement de la mission des agents, notamment les logiciels métiers et de bureautique ainsi que les appareils mobiles. Ils concernent tout agent de la fonction publique, quels que soient sa position et son statut. »

La parole est à Mme Dominique Gillot, pour présenter l’amendement n° 379 rectifié bis.