Mme la présidente. L’amendement n° 517, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Alinéa 222

Supprimer cet alinéa.

La parole est à Mme Christine Prunaud.

Mme Christine Prunaud. Actuellement, la durée quotidienne du travail ne peut excéder dix heures.

Toutefois, sur autorisation de l’inspecteur du travail et après avis des institutions représentatives du personnel, cette durée peut être dépassée en cas de surcroît temporaire d’activité.

Un accord de branche étendu ou un accord d’entreprise peut fixer une durée quotidienne maximale de travail comprise entre dix et douze heures.

Le projet de loi ne retouche ce cadre qu’à la marge et il clarifie les possibilités de déroger au plafond de la durée quotidienne du travail. Tout cela sera pourtant en grande partie bouleversé avec la primauté donnée aux accords d’entreprise.

Ainsi, le droit au repos de onze heures est remis en cause, à l’alinéa 222 de l’article 2, par la possibilité de conclure une convention individuelle de forfait en jours. Cela signifie très concrètement, pour un salarié, que son droit au repos pourrait être fractionné, avec les conséquences que nous connaissons : vie sociale modifiée, rythme de vie haché, voire souffrance au travail.

Le groupe CRC ne souhaite pas que notre société évolue de plus en plus vers une soumission aveugle à l’obsession de rentabilité maximale imposée par certaines directions d’entreprise. C’est la raison de fond qui nous amène à proposer la suppression de l’alinéa 222.

Mme la présidente. L’amendement n° 518, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Alinéa 225

Supprimer cet alinéa.

La parole est à Mme Laurence Cohen.

Mme Laurence Cohen. Le projet initial du Gouvernement prévoyait la possibilité, pour les entreprises de moins de 50 salariés, de conclure des conventions de forfait en jours et en heures sur l’année. Cette disposition a été reprise par la majorité sénatoriale et votée par la commission des affaires sociales.

Comme nous l’avons précisé en défendant un amendement précédent, les forfaits jours font l’objet de nombreux contentieux, en raison des abus commis par certains employeurs. Près de 50 % des cadres et 13,5 % des salariés sont déjà soumis à ce forfait, qui les conduit à travailler 46 h 30 en moyenne, au mépris de leur santé et de leur vie personnelle, comme l’a rappelé mon collègue Michel Le Scouarnec.

Dès lors, élargir ce dispositif ne risque que de dégrader encore un peu plus les conditions de travail des salariés. En effet, pour le salarié, l’absence d’accord collectif entraînerait la perte d’un garde-fou. L’employeur organiserait un entretien annuel, s’assurant que « la charge de travail du salarié est raisonnable et permet une bonne répartition dans le temps de son travail », mais le texte ne précise pas comment cette charge serait mesurée. Or, dans toutes les auditions que nous avons menées, cette question de la charge de travail est revenue de manière très fréquente !

De plus, le texte opère un renversement de la charge de la preuve, qui pèsera désormais sur le salarié. En effet, l’obligation de résultat de l’employeur en matière de santé et de sécurité est remise en cause : il ne pourra plus être tenu pour responsable si un salarié ne prend pas ses heures de repos ou ses jours de congé. Comme si les cadres travaillaient pendant leurs congés par choix personnel… Quand la charge de travail est trop importante, il faut malgré tout s’en acquitter, quitte à sacrifier son repos et ses week-ends.

Pour toutes ces raisons, nous proposons la suppression de cette disposition.

Mme la présidente. L’amendement n° 1006, présenté par MM. Lemoyne, Gabouty et Forissier, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Alinéa 230, seconde phrase

Supprimer cette phrase.

La parole est à M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. (Marques de satisfaction sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur de la commission des affaires sociales. Il s’agit d’un amendement de mise en cohérence de l’article 2 avec la suppression, en commission, à l’article 25, de la charte d’entreprise sur la déconnexion. (Bravo ! et applaudissements sur les mêmes travées.)

Mme la présidente. L’amendement n° 87 rectifié, présenté par MM. Cabanel, Durain, Godefroy et Labazée, Mme Lienemann, M. Montaugé, Mmes Guillemot et Lepage, M. Néri, Mme Ghali et M. Karam, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 231

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Art. L. 3121-64-… – Lorsqu’un salarié ayant conclu une convention de forfait en jours perçoit une rémunération manifestement sans rapport avec les sujétions qui lui sont imposées, il peut, nonobstant toute clause contraire, conventionnelle ou contractuelle, saisir le juge judiciaire afin que lui soit allouée une indemnité calculée en fonction du préjudice subi, eu égard notamment au niveau du salaire pratiqué dans l’entreprise, et correspondant à sa qualification.

La parole est à M. Henri Cabanel.

M. Henri Cabanel. Les conventions de forfait, particulièrement le forfait en jours, excluent leurs titulaires du respect de la durée quotidienne maximale de travail, de la durée hebdomadaire maximale et de la durée hebdomadaire légale.

L’article 2 opère en la matière un changement notable, puisque l’employeur doit s’assurer que la charge de travail du salarié est « raisonnable » et que son travail peut être réparti de manière équilibrée dans le temps. Il est donc fait appel à la responsabilité de l’employeur.

Si l’on a fait en sorte que le droit du salarié au repos quotidien et hebdomadaire, ainsi qu’aux congés payés, soit respecté, en contrepartie, l’employeur ne saurait être tenu pour responsable du fait que le salarié n’en a pas, de sa propre initiative, bénéficié.

Là encore, c’est méconnaître les rapports de forces à l’œuvre au sein de l’entreprise. Ainsi, il est fait comme si le salarié pouvait réellement négocier avec son employeur dans une période de fort taux de chômage comme nous en connaissons aujourd’hui. Surtout, cet article compte sur la bonne volonté de l’employeur pour s’assurer du respect de la vie et de la santé du salarié.

Le présent amendement a donc pour objet de renforcer les garanties proposées par le texte dans le cas d’un recours à un forfait jours. Un entretien annuel et un contrôle de la charge de travail par l’employeur ne semblent pas suffisants pour éviter les dérives. En ces matières, comme dans les autres, on ne peut être juge et partie.

Dans ces conditions, cet amendement tend à reprendre les dispositions d’un article du code du travail actuellement en vigueur, afin d’ouvrir le droit à une indemnité pour le salarié en cas d’utilisation abusive du forfait jours.

Il vise à permettre au salarié ayant conclu une convention de forfait jours qui perçoit une rémunération manifestement sans rapport avec les sujétions qui lui sont imposées de saisir le juge judiciaire, afin que lui soit allouée une indemnité calculée en fonction du préjudice subi, eu égard notamment au niveau du salaire correspondant à sa qualification pratiqué dans l’entreprise.

Mme la présidente. L’amendement n° 519, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Alinéas 232 à 244

Supprimer ces alinéas.

La parole est à Mme Laurence Cohen.

Mme Laurence Cohen. Il s’agit d’un amendement de coordination visant à supprimer des dispositions d’application.

Mme la présidente. L’amendement n° 520, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Alinéas 245 à 303

Supprimer ces alinéas.

La parole est à Mme Cécile Cukierman.

Mme Cécile Cukierman. En apparence, dans le cadre de la nouvelle articulation du droit du travail mise en place au sein de l’article 2, tout ce qui touche à l’encadrement du travail de nuit ne semble pas avoir été modifié. Il en va ainsi principalement des motifs de recours au travail de nuit, de la définition de celui-ci dans un créneau temporel quotidien et hebdomadaire précis et de l’obligation, pour l’employeur, d’offrir un repos ou une compensation salariale.

Malgré tout, c’est oublier un peu vite le risque que cette belle architecture puisse, à l’avenir, être remise en cause sur certains aspects.

Quelles garanties les salariés peuvent-ils avoir que ne soit pas conclu, dans leur entreprise, un accord moins favorable que la loi ou un accord de branche, alors que cette possibilité constitue le socle même de cet article 2 ?

Ce risque existe déjà, puisqu’il est explicitement précisé que c’est à défaut d’accord collectif que le travail de nuit reste celui qui est effectué entre 21 heures et 6 heures et que la mise en place unilatérale du travail de nuit dans l’entreprise est limitée au cas où ont été engagées des négociations dites « loyales et sérieuses ».

L’inversion de la hiérarchie des normes, actée par la loi, ne pourrait que favoriser le développement de modifications de l’encadrement du travail de nuit.

C’est en fait par le biais, qui peut paraître anodin, de la surveillance médicale des travailleurs de nuit que cette tendance est à l’œuvre. En effet, le texte qui nous est proposé fait disparaître la mention d’un intervalle maximal de six mois entre les visites de suivi, par un médecin du travail, d’un salarié travaillant la nuit.

Pour ne pas mettre le doigt dans l’engrenage d’un assouplissement de l’encadrement du travail de nuit, nous vous proposons donc, mes chers collègues, de supprimer les alinéas 245 à 303, qui ont trait à cette question.

Nous demanderons un scrutin public sur cet amendement.

Mme la présidente. L’amendement n° 127 rectifié, présenté par MM. P. Dominati, Commeinhes, Magras, Houel, Cambon, Vasselle, Longuet et Doligé, Mme Duranton, MM. Laménie et Gilles, Mme Deromedi, M. Husson et Mme Primas, est ainsi libellé :

Alinéa 249, première phrase

Remplacer les mots :

au travail

par les mots :

aux travailleurs

La parole est à M. Philippe Dominati.

M. Philippe Dominati. Si vous me le permettez, madame la présidente, je présenterai également les amendements nos 126 rectifié et 122 rectifié.

Mme la présidente. J’appelle donc en discussion les amendements nos 126 rectifié et 122 rectifié.

L’amendement n° 126 rectifié, présenté par MM. P. Dominati, Commeinhes, Magras, Houel, Cambon, Vasselle, Longuet et Doligé, Mme Duranton, MM. Laménie et Gilles, Mme Deromedi, MM. G. Bailly et Rapin et Mme Primas, est ainsi libellé :

Alinéa 249

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

L’existence d’un accord collectif atteste de cette nécessité

L’amendement n° 122 rectifié, présenté par MM. P. Dominati, Commeinhes, Magras, Houel, Cambon, Vasselle, Longuet et Doligé, Mme Duranton, MM. Laménie et Gilles, Mme Deromedi et MM. Bouchet, G. Bailly, Husson et Rapin, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 249

Insérer dix alinéas ainsi rédigés :

« Compte tenu des impératifs liés à leur activité, sont présumées remplir la condition de nécessité d’assurer la continuité de l’activité économique des services d’utilité sociale, les entreprises appartenant aux secteurs d’activité suivants :

« – transport et logistique ;

« – activités liées au commerce numérique ;

« – commerce de détail non-alimentaire ;

« – vente à distance ;

« – restauration ;

« – hôpitaux ;

« – casinos ;

« – discothèques ;

« – production automobile.

Veuillez poursuivre, mon cher collègue.

M. Philippe Dominati. Mes chers collègues, les amendements nos 127 rectifié et 126 rectifié concernent le travail de nuit. Je rappelle que le code du travail opère une distinction, sur la plage de 21 heures à 6 heures, entre les travailleurs de nuit et le travail de nuit.

La chambre sociale de la Cour de cassation, dans un arrêt récent, a estimé que l’activité de parfumerie exercée par un magasin sur les Champs-Élysées ne justifiait pas le recours au travail de nuit. Il appartient donc au législateur de reprendre la main pour définir les conditions permettant aux entreprises d’exercer une activité la nuit. Tel est l’objet de ces deux premiers amendements.

L’amendement n° 122 rectifié concerne le développement récent des plateformes de e-commerce, compte tenu notamment de ce qui se passe chez nos voisins immédiats que sont l’Allemagne, l’Espagne, l’Italie et l’Angleterre. Dans tous ces pays, le commerce en ligne est en plein essor et, avec lui, les plateformes logistiques et un certain nombre de nouveaux métiers se développent aisément.

Ce n’est pas le cas sur le territoire national, moyennant quoi des entreprises françaises sont régulièrement incitées à installer des plateformes logistiques dans ces pays pour répondre à certains besoins de leurs clients. Tel est le sens de cet amendement, qui vise à acter une progression.

Cette évolution de la législation est d’autant plus nécessaire que les dispositions de la loi Macron concernant le travail de nuit se révèlent en grande partie inefficaces, notamment dans les grandes métropoles.

Mme la présidente. L’amendement n° 98 rectifié, présenté par MM. Adnot, Türk, Lefèvre, Vial et Doligé et Mme Deromedi, n’est pas soutenu.

L’amendement n° 239 rectifié ter, présenté par MM. Cadic et Canevet, Mme Billon et MM. Bockel, Delahaye, Guerriau, Longeot et Pozzo di Borgo, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 249

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Un décret fixe les secteurs d’activité qui sont présumés remplir la condition de nécessité d’assurer la continuité de l’activité économique ou des services d’utilité sociale.

La parole est à M. Michel Canevet.

M. Michel Canevet. Cet amendement tend à parfaire encore le texte qui a déjà été bien amélioré par la commission des affaires sociales.

Il faut tout simplement que nous adaptions aujourd’hui notre droit à l’évolution de la société, qui est demandeuse de plus de services. Il faut que ces services puissent être apportés à l’ensemble de nos concitoyens.

Il est bien évident que, si l’on reste sur des positions telles que celles qui ont été longuement développées dans l’hémicycle depuis tout à l’heure, nous n’évoluerons pas et notre économie ne s’adaptera pas.

Il importe que nous puissions nous adapter en permanence. Tel est le sens de cet amendement.

Mme Évelyne Didier. Les travailleurs sont une variable d’ajustement !

Mme la présidente. L’amendement n° 274 rectifié ter, présenté par MM. Cadic et Canevet, Mme Billon et MM. Bockel, Delahaye, Guerriau, Longeot et Pozzo di Borgo, est ainsi libellé :

I. – Alinéas 251, 254, première, deuxième, troisième et dernière phrases, 255, 256, 257 et 295

Remplacer le nombre :

21

par le nombre :

22

II. – Alinéas 251, 253 et 295

Remplacer le chiffre :

7

par le chiffre :

6

La parole est à Mme Annick Billon.

Mme Annick Billon. Cet amendement vise à clarifier la règle applicable dans le domaine de l’aviation civile concernant l’encadrement des périodes dites « de réserve » du personnel navigant.

En effet, si les dispositions du code du travail relatives à l’astreinte s’appliquent aujourd’hui à celui-ci, elles ont été rendues obsolètes par les règles communautaires visant à protéger les équipages de la fatigue.

Désormais, ces périodes passées au domicile, à proximité ou dans un lieu approprié – choisi par le personnel –, pendant lesquelles un employeur demande à un personnel navigant de rester disponible pour effectuer un service sont, dans leur totalité, des périodes de service donnant lieu obligatoirement à des repos afférents, contrairement à ce que prévoit le code du travail pour les astreintes.

Dès lors, il convient de compléter l’article L. 6525-1 du code des transports, relatif à certaines dispositions du code du travail concernant le personnel navigant, afin de prendre en compte ces règles communautaires et de lever, ainsi, toute ambiguïté dans la législation et son interprétation.

Mme la présidente. L’amendement n° 203 rectifié, présenté par MM. Labazée, Durain et Godefroy, Mme Bonnefoy, MM. Cabanel et Duran, Mme Ghali, M. Gorce, Mmes Jourda et Lienemann, MM. Marie et Montaugé, Mmes Yonnet, Tocqueville, Monier et Lepage, MM. Karam, Courteau et Néri et Mme Guillemot, est ainsi libellé :

Alinéa 261

Remplacer les mots :

est fait application des articles L. 3132-16 à L. 3132-19

par les mots et une phrase ainsi rédigée :

a travaillé, sous forme de repos compensateur et de la majoration des heures travaillées de nuit. Le taux de majoration ne peut être inférieur à 25 %.

La parole est à M. Georges Labazée.

M. Georges Labazée. Le travail de nuit, auquel le recours doit être exceptionnel, représente une contrainte importante pour la vie des salariés. Il convient donc de prendre en compte ce facteur de contrainte et de rendre obligatoire l’instauration d’une majoration des heures travaillées de nuit. Une majoration du salaire de 25 % permettrait une réelle reconnaissance de la valeur du travail de nuit et de son impact sur les conditions de vie et de santé des salariés.

Chacun connaît peu ou prou la manière dont le travail de nuit est encadré. La majoration de 25 % que nous proposons permettrait la reconnaissance de ce travail, souvent compliqué pour les salariés.

Mme la présidente. L’amendement n° 509 rectifié, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Alinéa 262

Supprimer cet alinéa.

La parole est à Mme Christine Prunaud.

Mme Christine Prunaud. Nous souhaitons, par cet amendement de suppression, limiter l’extension du travail quotidien au-delà de huit heures pour les travailleurs de nuit. Nous considérons en effet que les possibilités d’extension du travail prévues par les nouveaux articles L. 3122-16 à L. 3222-19 offrent déjà largement une telle possibilité.

Si les dispositions prévues tiennent compte de la particularité du travail de nuit, en limitant la durée maximale quotidienne à huit heures et non à dix, elles offrent les moyens de contourner cette limite.

Si nous nous interrogeons sur les conditions dans lesquelles il peut être dérogé à cette durée maximale par l’intermédiaire de l’accord d’entreprise, supérieur à l’accord de branche, nous sommes totalement opposés à la disposition de l’alinéa 262. Telle qu’elle est rédigée, la mesure qu’il introduit permet de dépasser la durée maximale de travail quotidien pour des « circonstances exceptionnelles » définies par décret. Le rôle de l’inspection du travail est certes capital, mais la simple mention de cette possibilité fait peser des risques importants sur les travailleurs de nuit.

Notre volonté est de conserver un cadre protecteur pour les salariés, et particulièrement les salariés fragiles. La spécificité du travail de nuit est évidente, d’autant que sont souvent concernés des métiers difficiles.

En France, près d’une salariée sur dix et un salarié sur cinq travaillent régulièrement la nuit.

Mme la présidente. Les amendements nos 522 et 887 rectifié sont identiques.

L’amendement n° 522 est présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

L’amendement n° 887 rectifié est présenté par MM. Collombat, Amiel, Bertrand et Guérini et Mmes Jouve et Malherbe.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéas 263 et 287

Remplacer le mot :

seize

par le mot :

douze

La parole est à M. Michel Le Scouarnec, pour présenter l’amendement n° 522.

M. Michel Le Scouarnec. En matière de travail de nuit, la durée hebdomadaire de travail est calculée actuellement sur une période de douze semaines consécutives.

La commission des affaires sociales du Sénat a allongé cette période en la faisant passer à seize semaines. Nous considérons pour notre part qu’une telle augmentation n’est pas légitime.

Augmenter cette période conduit à cumuler les risques en matière de fatigue, de santé au travail, de sécurité. Nous proposons par cet amendement de revenir au texte initial du projet de loi, qui constitue déjà un recul.

Mme la présidente. L’amendement n° 887 rectifié n’est pas soutenu.

L’amendement n° 521, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Alinéa 263

Remplacer le mot :

quarante

par le mot :

trente-deux

La parole est à Mme Laurence Cohen.

Mme Laurence Cohen. Cet amendement a pour objet la réduction du temps de travail pour les travailleurs de nuit. Nous souhaitons que, pour ces salariés, la durée maximale du temps de travail passe de 40 heures à 32 heures hebdomadaires.

En France, 3,5 millions de salariés travaillent de nuit et la réduction de leur temps de travail est une nécessité absolue, afin de protéger leur santé. Nous ne pouvons en effet ignorer les effets extrêmement nocifs du travail de nuit.

Les conclusions d’une étude menée à Harvard ont mis en avant que des travailleurs ayant travaillé de nuit pendant cinq ans présentent une surmortalité de 11 %.

Les horaires décalés provoqueraient des troubles digestifs, du stress, des syndromes dépressifs, des maladies cardiovasculaires et le travail de nuit a même été classé dans le groupe des cancérogènes probables par le Centre international de recherche pour le cancer en 2007.

De plus, les risques d’accident du travail sont accrus la nuit et, d’après le Bureau international du travail, le BIT, le coût des accidents du travail et des maladies professionnelles dans le monde représente 4 % du PIB mondial, ce qui est énorme.

La réduction du temps de travail serait doublement bénéfique, de nombreux économistes s’accordent à le dire. D’une part, elle permettrait de réduire les risques professionnels et d’avoir des salariés en meilleure santé, donc plus productifs. D’autre part, c’est en réduisant le temps de travail que nous arriverons à combattre le chômage.

En 2016, avec les progrès technologiques, et notamment le développement du numérique, la réduction du temps de travail sans perte de salaire pour toutes et tous appartient au domaine du possible ; elle ouvre une grande voie pour l’avenir. Je ne doute pas que notre amendement trouvera un écho favorable au-delà de nos rangs, notamment auprès des sénatrices et sénateurs ayant signé avec Pierre Laurent, Caroline De Haas et Michel Rocard, au début du mois de mai, un manifeste appelant à la réduction du temps de travail dans la revue Alternatives économiques.

Mme la présidente. L’amendement n° 529, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Alinéa 264

Après le mot :

il

rédiger ainsi la fin de cet alinéa :

a travaillé, sous forme de repos compensateur et de la majoration des heures travaillées de nuit. Le taux de majoration ne peut être inférieur à 25 %.

La parole est à Mme Cécile Cukierman.

Mme Cécile Cukierman. Cet amendement a pour objet d’imposer une majoration de la rémunération des heures travaillées en horaires de nuit à hauteur de 25 % minimum.

Le code du travail reconnaît aujourd’hui la difficulté de ce type de travail en prévoyant un congé compensatoire et, le cas échéant, une compensation salariale négociée dans le cadre d’un accord collectif ou, à défaut, imposée par l’employeur.

Les conséquences délétères du travail de nuit sur la santé des salariés, soulignées par toutes les études consacrées à cette question, ont pour conséquence que 43 % des travailleurs de nuit admettent qu’ils ne « tiendront » pas jusqu’à l’âge de la retraite.

Devant l’usure manifeste que cause le travail de nuit, qui concerne 18 % des salariés de notre pays, les repos compensatoires représentent une nécessité absolue, mais ils ne sont pas suffisants. La seule raison pour laquelle des salariés acceptent de sacrifier leur vie sociale et leur santé à leur travail est la maigre compensation financière qu’ils peuvent en tirer.

Cependant, cette dernière n’est pas systématique. Par ailleurs, elle est souvent insuffisante, notamment pour compenser les coûts supplémentaires que ce type de travail engendre : frais de transport importants et problématiques liées à la garde des enfants.

Nous proposons donc de garantir par la loi le droit à compensation financière. Il s’agit à la fois d’assurer aux salariés les moyens d’assumer les dépenses personnelles que ce type de travail implique et de leur garantir une ressource financière à même de compenser réellement les sacrifices qu’ils sont contraints d’accepter dans leur vie familiale, sociale et même au regard de leur santé.

Mme la présidente. Les amendements nos 88 rectifié et 867 sont identiques.

L’amendement n° 88 rectifié est présenté par MM. Cabanel, Durain, Godefroy, Montaugé et Labazée, Mmes Lienemann, Guillemot et Lepage, M. Néri, Mme Ghali, M. Karam et Mme Monier.

L’amendement n° 867 est présenté par M. Desessard, Mmes Archimbaud, Benbassa, Blandin et Bouchoux et MM. Dantec, Gattolin, Labbé et Poher.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 267

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Art. L. 3122–11 – Tout travailleur de nuit bénéficie, avant son affectation sur un poste de nuit et à intervalles réguliers d’une durée ne pouvant excéder six mois par la suite, d’une surveillance médicale particulière dont les conditions d’application sont déterminées par décret en Conseil d’État.

La parole est à M. Henri Cabanel, pour présenter l’amendement n° 88 rectifié.

M. Henri Cabanel. Le travail de nuit comporte un danger réel pour la santé de ceux qui le pratiquent au quotidien, de nombreuses études l’ont démontré.

En 2010, une étude du Conseil économique, social et environnemental, le CESE, soulignait les conséquences de ce rythme de vie décalé : si « les salariés d’une entreprise de produits dangereux ont conscience des risques auxquels ils s’exposent », les travailleurs de nuit, eux, ne le savent pas ! Le travail de nuit favoriserait notamment l’apparition de certains cancers, causés par la perturbation du rythme biologique et l’affaiblissement des défenses immunitaires.

Ainsi, en 2015, une étude américaine a révélé qu’un impact important sur le système cardio-vasculaire apparaît après cinq années de rythmes décalés. Les femmes qui travaillent de nuit depuis plus de cinq années font l’objet d’une surmortalité de 11 % et celles qui ont travaillé de nuit plus de quinze ans accroissent de 25 % leur risque d’avoir un cancer du poumon.

Par ailleurs, le travail de nuit n’est pas sans conséquence sur la vie privée des travailleurs. Outre la fatigue chronique, les travailleurs de nuit se sentent isolés au sein de leur entreprise et de leur famille, situation qui s’avère souvent pesante à long terme.

Pour toutes ces raisons, les travailleurs de nuit bénéficient actuellement d’une surveillance médicale renforcée. Le médecin du travail est consulté préalablement à la mise en place ou à la modification de l’organisation du travail de nuit et tout salarié appelé à travailler la nuit doit bénéficier d’une visite médicale, renouvelée ensuite au moins tous les six mois.

Le projet de loi tend à supprimer la périodicité semestrielle du suivi des travailleurs de nuit. Il nie la spécificité de ce travail et renvoie aux dispositions générales relatives à la médecine du travail, ce qui est inacceptable.

C’est la raison pour laquelle les signataires de cet amendement souhaitent revenir au droit actuellement en vigueur, plus protecteur des travailleurs.