M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, sur l’article.

M. Fabien Gay. Cet article ajoute la quantification des gisements d’énergies renouvelables, ou ENR, aux volets abordés dans la programmation pluriannuelle de l’énergie.

Connaître les possibilités du territoire en matière d’ENR est, en effet, absolument fondamental pour prévoir le développement de celles-ci.

Nous souhaitons cependant soulever quelques interrogations, sur ce qui sera pris en compte pour cette quantification, sur la manière dont elle sera effectuée, sur les moyens qu’elle mobilisera et sur les acteurs qui la mèneront.

Elle pose, notamment à propos de la biomasse, la question des forêts, puisque le bois est considéré comme une ressource renouvelable.

Est-il nécessaire de rappeler, toutefois, qu’il est essentiel de limiter la déforestation ? Nos forêts font partie des puits de carbone nécessaires à la réalisation de l’objectif de neutralité carbone inscrit à l’article 1er du présent projet de loi.

Ce n’est pas tout : ces puits de carbone doivent être non seulement en nombre suffisant, mais également en bon état. Ainsi, outre les arbres, le volume de bois mort en forêt est nécessaire pour la biodiversité, elle-même nécessaire à leur conservation.

En France, environ 40 millions de tonnes de CO2 par an sont absorbées par nos puits de carbone naturels, contre environ 450 millions de tonnes équivalent CO2 émises. Respecter l’objectif de neutralité carbone et répondre à l’urgence implique donc d’entretenir ces puits, alors que l’on assiste, au contraire, à leur dégradation.

En incluant les forêts dans les gisements que l’on se propose de quantifier, ne les expose-t-on pas au risque d’une surexploitation à terme ?

Nous entendons seulement attirer l’attention sur le danger qu’il y a à ne considérer les ressources naturelles que comme des marchandises exploitables, des ressources à valoriser absolument pour augmenter rendement et profits. Sur ce point, comme sur d’autres, nous plaidons pour une maîtrise publique qui nous semble absolument nécessaire.

Nous ne sommes évidemment pas opposés au développement des ENR, bien au contraire, mais le climat et l’énergie ne peuvent être envisagés indépendamment de tout contexte et, notamment, des nécessités propres à la biodiversité.

M. le président. L’amendement n° 230, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 1

Supprimer les mots :

et par zone géographique

La parole est à Mme la ministre.

Mme Élisabeth Borne, ministre. Il est important que la programmation pluriannuelle de l’énergie précise les gisements disponibles pour les énergies renouvelables, afin de clarifier la définition des objectifs et des mesures à mettre en œuvre, et que cette caractérisation soit la plus précise possible.

Cependant, le concept de « zone géographique » est flou et n’apporte pas de précision utile à l’élaboration de la PPE.

Il pourrait, en revanche, être source de contentieux et de fragilité si des informations géographiques ne figuraient pas sur une seule filière.

C’est pourquoi cet amendement vise à supprimer cette précision.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Daniel Gremillet, rapporteur. La réalisation de la quantification par zone géographique est tout à fait nécessaire.

Cette notion n’est ni floue ni fragile ; au contraire, elle existe d’ores et déjà dans l’article L. 141-3 du code de l’énergie, qui prévoit que la PPE fixe des objectifs « par zone géographique ».

L’avis de la commission est donc défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 230.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 1er ter.

(Larticle 1er ter est adopté.)

Article 1er ter
Dossier législatif : projet de loi relatif à l'énergie et au climat
Article additionnel après l'article 1er - Amendement n° 89 rectifié

Article additionnel après l’article 1er ter

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 85 rectifié ter, présenté par M. Henno, Mmes C. Fournier et de la Provôté, MM. Cigolotti, Longeot, Delahaye, Détraigne et Prince, Mmes Vullien, Férat, Doineau et Guidez et MM. Bockel, Mizzon et Louault, est ainsi libellé :

Après l’article 1er ter

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article L. 100-4 du code de l’énergie est complété par un paragraphe ainsi rédigé :

« …. – Aucune fermeture de centrale nucléaire en état de fonctionnement ne peut être prononcée avant l’arrêt définitif de toutes les centrales à charbon présentes sur le territoire national. »

La parole est à M. Jean-François Longeot.

M. Jean-François Longeot. La lutte contre le réchauffement climatique est une priorité qui exige pragmatisme et méthode.

En 2018, les émissions de CO2 ont connu une hausse de 2 %, la plus forte depuis sept ans à l’échelle du globe ; aussi, il est urgent de concentrer nos efforts sur les émissions issues des énergies fossiles. Face à l’intermittence des énergies renouvelables et à leurs coûts de système, soulignés par l’OCDE, la France ne saurait sacrifier son énergie nucléaire pilotable, propre et compétitive, au profit du maintien des énergies fossiles carbonées.

Alors que le nucléaire est une source d’énergie bas-carbone utile pour tendre vers un mix énergétique décarboné, il n’est pas concevable de réduire nos capacités de production nucléaire avant que ne soient mises à l’arrêt toutes nos centrales à charbon, lourdement émettrices de gaz à effet de serre.

Le présent amendement, déposé par mon collègue Olivier Henno, tend à inscrire ce principe de bon sens dans la loi.

Article additionnel après l'article 1er ter -Amendement n° 85 rectifié ter
Dossier législatif : projet de loi relatif à l'énergie et au climat
Article 1er quater

M. le président. L’amendement n° 89 rectifié, présenté par MM. Dantec, Cabanel, Corbisez, Gold, Jeansannetas, Labbé, Roux et Vall, est ainsi libellé :

Après l’article 1er ter

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le premier alinéa de l’article L. 311-5-5 du code de l’énergie est complété par deux phrases ainsi rédigées : « La capacité totale autorisée est limitée à 57,8 gigawatts en 2030. À compter de 2035, la capacité totale autorisée est limitée à 52,2 gigawatts. »

La parole est à M. Ronan Dantec.

M. Ronan Dantec. Il ne vous aura pas échappé, mes chers collègues, que Jean-François Longeot et moi-même nous mobilisons conjointement sur les questions climatiques ; en revanche, sur la partie nucléaire, nos deux amendements sont légèrement divergents. (Sourires.)

Maintenant qu’il est clair que nous parviendrons à 50 % de nucléaire en 2035, il nous semble en effet important de fixer des paliers intermédiaires.

Cet amendement a donc pour objet de prévoir une capacité totale nucléaire limitée à 57,8 gigawatts en 2030 et à 52,2 gigawatts en 2035. Cela va mieux en le précisant !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Daniel Gremillet, rapporteur. L’amendement n° 85 rectifié ter vise à introduire le principe selon lequel aucune fermeture de centrale nucléaire ne peut intervenir avant celle de l’ensemble des centrales à charbon.

Il a le mérite de rappeler que la transition énergétique ne peut se réaliser sans le recours à l’énergie nucléaire, qui constitue une source d’énergie largement décarbonée.

Pour autant, l’élaboration d’une stratégie de démantèlement des installations relève de la responsabilité de l’exploitant, sous le contrôle de son autorité de régulation.

Par ailleurs, le dispositif serait peu applicable, puisque la fermeture des quatorze réacteurs envisagée d’ici à 2035 ne doit pas conduire à la fermeture complète de centrales.

Enfin, il est pour partie satisfait, puisque la commission a adopté le principe d’un ordre de sortie des énergies fossiles en précisant qu’« il est mis fin en priorité à l’usage des énergies fossiles les plus émettrices de gaz à effet de serre », au premier rang desquelles figure le charbon.

L’amendement n° 89 rectifié tend à abaisser le plafond de capacité totale autorisée pour l’énergie nucléaire, ce qui nous semble poser deux difficultés.

Tout d’abord, une telle mesure est superfétatoire, puisque l’exploitant est déjà soumis à des obligations assez exigeantes : il doit présenter un plan pour atteindre les objectifs fixés par la PPE dans un délai maximal de six mois après l’approbation de celle-ci. L’article 1er quater du présent projet de loi prévoit d’ailleurs de renforcer ce dispositif, notamment en donnant la possibilité à l’autorité administrative de prononcer une mise en demeure, voire des sanctions, en cas d’incompatibilité.

Dans le même ordre d’idées, sur l’initiative de la commission, l’article 1er a été complété par une « feuille de route relative aux opérations de démantèlement des installations nucléaires » annexée à la PPE qui contribuera, elle aussi, à mieux piloter les engagements pris.

En outre, le plafond ainsi fixé est excessivement rigide, alors que le projet de PPE intègre plusieurs scénarios en termes de part de l’énergie nucléaire dans le mix électrique en 2028 et que le plafond actuel, plus élevé, avait été retenu de telle sorte qu’il permette la mise en service de l’EPR de Flamanville.

L’avis de la commission est donc défavorable sur ces deux amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Élisabeth Borne, ministre. Je comprends l’objectif des auteurs de l’amendement n° 85 rectifié ter, qui tend à donner la priorité à la lutte contre le réchauffement climatique et donc contre les émissions de gaz à effet de serre, mais cet amendement me semble satisfait.

Comme vous le savez, le Gouvernement s’est engagé à fermer l’ensemble des centrales à charbon d’ici à la fin du quinquennat, conformément aux orientations du Président de la République.

Je demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, l’avis du Gouvernement serait défavorable.

L’adoption de l’amendement n° 89 rectifié entraînerait la fermeture de huit réacteurs en 2030, si l’on tient compte de l’ouverture de l’EPR, un plafond qui pourrait ne pas être compatible avec les objectifs de sécurité d’approvisionnement en électricité dans certains scénarios.

L’avis du Gouvernement est donc défavorable.

M. le président. Monsieur Longeot, l’amendement n° 85 rectifié ter est-il maintenu ?

M. Jean-François Longeot. J’ai pris bonne note de votre réponse, madame la ministre, mais, défendant cet amendement au nom de mon collègue Henno, je ne peux le retirer.

En outre, je préfère que ce principe soit inscrit dans la loi, parce que je crains que, si nous n’adoptions pas cet amendement, nous ne finissions par faire comme l’Allemagne et par utiliser des centrales à charbon.

M. le président. La parole est à M. Roland Courteau, pour explication de vote.

M. Roland Courteau. Je souhaite poser une question : si nous adoptons l’amendement n° 85 rectifié ter, ne risquons-nous pas d’empêcher la fermeture de la centrale de Fessenheim en 2020 ?

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Daniel Gremillet, rapporteur. En effet, l’adoption de cet amendement emporterait cette conséquence directe.

M. le président. La parole est à M. André Reichardt, pour explication de vote.

M. André Reichardt. Je m’apprêtais précisément à voter cet amendement parce qu’il empêche la fermeture de la centrale de Fessenheim en 2020.

Nous avons bien entendu vos propos, madame la ministre, selon lesquels la fermeture de cette centrale serait combinée avec l’ouverture de celle de Flamanville, mais, encore une fois, cela va mieux en le disant, et encore mieux en l’inscrivant dans la loi.

Cet amendement convient donc tout à fait à l’Alsacien de service (Sourires.), qui est très attentif à cela !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 85 rectifié ter.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Monsieur Dantec, l’amendement n° 89 rectifié est-il maintenu ?

M. Ronan Dantec. Soulagé par le rejet de l’amendement précédent, je retire le mien, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 89 rectifié est retiré.

Article additionnel après l'article 1er - Amendement n° 89 rectifié
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Article 1er quinquies

Article 1er quater

L’article L. 311-5-7 du code de l’énergie est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, les mots : « la première période » sont supprimés ;

2° La première phrase du deuxième alinéa est ainsi modifiée :

a) Les mots : « d’origine nucléaire » sont remplacés par les mots : « d’origines nucléaire et thermique à flamme » et les mots : « de la première période » sont supprimés ;

b) Sont ajoutés les mots : « et présente, le cas échéant, les dispositifs d’accompagnement mis en place pour les salariés des installations de production d’électricité dont l’emploi serait supprimé du fait de la fermeture de ces installations résultant du 5° du I de l’article L. 100-4 ou du II de l’article L. 311-5-3 » ;

3° La seconde phrase du quatrième alinéa est remplacée par deux phrases ainsi rédigées : « En cas d’incompatibilité, l’autorité administrative met l’exploitant en demeure d’élaborer un nouveau plan stratégique compatible avec la programmation pluriannuelle de l’énergie dans un délai n’excédant pas trois mois. Lorsque l’exploitant ne se conforme pas à cette mise en demeure, le ministre chargé de l’énergie peut prononcer les sanctions prévues à l’article L. 142-31. » ;

3° bis (nouveau) Après le même quatrième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Dans les deux mois suivant l’approbation mentionnée à l’alinéa précédent, le plan stratégique est publié à l’exclusion des informations relevant du secret industriel et commercial qu’il comporte. » ;

4° Après le mot : « durable », la fin du cinquième alinéa est ainsi rédigée : « , des affaires sociales et des finances, de la mise en œuvre de son plan stratégique, de la façon dont il contribue aux objectifs fixés dans la programmation pluriannuelle de l’énergie ainsi que, le cas échéant, des dispositifs d’accompagnement mis en place pour les salariés des installations de production d’électricité dont l’emploi serait supprimé du fait de la fermeture de ces installations résultant du 5° du I de l’article L. 100-4 ou du II de l’article L. 311-5-3. »

M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, sur l’article.

M. Fabien Gay. Nous sommes favorables à cet article, introduit à l’Assemblée nationale, qui renforce la transparence relative au plan stratégique de l’entreprise EDF.

Nous avons même déposé un amendement à propos des postes qui pourraient être éventuellement supprimés et des conséquences que cela emporterait sur les sous-traitants.

Il nous semble toutefois inconcevable de débattre ainsi du climat et de l’énergie sans évoquer l’avenir d’EDF.

Madame la ministre, vous n’étiez pas là hier, mais nous avons appris par voie de presse, comme les salariés et leurs syndicats, l’existence du plan Hercule visant à scinder l’entreprise en deux, la filière nucléaire restant publique à 100 % alors que la filière distribution et énergies renouvelables serait livrée aux appétits financiers.

Comment débattre aujourd’hui sans évoquer le destin de cette grande entreprise publique qu’est EDF ? Les Français, je vous le rappelle, en ont assez de voir leur patrimoine national bradé et le fait de livrer la dernière entreprise publique du secteur de l’énergie aux appétits financiers suscitera un vaste débat dans le pays.

Vous avez terminé le travail à propos d’Engie avec la loi Pacte, et nous avons vu le résultat : 70 % de plus sur la facture d’électricité et des salariés qui servent de variable d’ajustement.

Nous demandons que se tienne un débat ici à ce sujet : maintenant que Jean-Bernard Lévy s’est vu confier un deuxième mandat par M. Macron et qu’il a affiché sa volonté, préparez-vous le démantèlement ? Est-ce la mission que vous avez reçue comme ministre de la transition écologique et solidaire ?

Je suis désolé de devoir le relever, mais dans votre bilan de ministre des transports figure déjà la préparation de la future privatisation de la SNCF et l’ouverture à la concurrence de la RATP. Devez-vous désormais entamer le démantèlement d’EDF ? Quelles conséquences une telle mesure emportera-t-elle sur les salariés, sur la distribution de l’électricité en France et sur notre souveraineté ?

Les questions sont posées et nous attendons des réponses. Le cas échéant, vous devrez passer par la loi et je vous garantis que nous serons mobilisés.

M. le président. L’amendement n° 478, présenté par M. Gremillet, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Après le mot :

période

insérer le mot :

de

La parole est à M. le rapporteur.

M. Daniel Gremillet, rapporteur. Il s’agit d’un amendement rédactionnel.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Élisabeth Borne, ministre. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 478.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

Les deux premiers sont identiques.

L’amendement n° 358 rectifié bis est présenté par MM. Decool, Menonville, Chasseing, A. Marc, Wattebled et Lagourgue, Mme Mélot, MM. Fouché et Guerriau, Mmes Vullien et Noël, MM. Pellevat, Canevet, Daubresse, Rapin, Longeot, Moga et Malhuret et Mme C. Fournier.

L’amendement n° 401 rectifié ter est présenté par M. Bignon.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 5

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Le Gouvernement, en lien avec l’exploitant, présente dans un délai de douze mois à compter de l’adoption de la loi n° … du … relative à l’énergie et au climat un état des lieux détaillé mis en place pour les installations de production d’électricité, en particulier d’origine nucléaire, et les salariés de l’ensemble de la chaîne de sous-traitance, dont l’emploi serait supprimé du fait de la fermeture de ces installations.

La parole est à M. Jean-Pierre Decool, pour présenter l’amendement n° 358 rectifié bis.

M. Jean-Pierre Decool. L’article 1er quater améliore la gestion prévisionnelle des emplois sur les sites nucléaires amenés à être fermés dans les prochaines années.

Le présent amendement vise à mieux anticiper ces fermetures en identifiant et en quantifiant les emplois directs et indirects qui pourraient être supprimés ou menacés, grâce à la réalisation d’un rapport dans les douze mois à compter de l’adoption de la présente loi.

Il ne s’agit pas de demander un rapport pour le plaisir ; il est question, ici, d’êtres humains qui perdraient leur emploi.

M. le président. L’amendement n° 401 rectifié ter n’est pas soutenu.

L’amendement n° 264, présenté par M. Gay, Mmes Cukierman, Lienemann et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Alinéa 9

Après les mots :

programmation pluriannuelle de l’énergie ainsi

rédiger ainsi la fin de cet alinéa :

qu’une évaluation des salariés des installations de production d’électricité, en particulier nucléaire, dont l’emploi serait supprimé du fait de la fermeture des sites et des dispositifs d’accompagnement mis en place à cet effet. Il établit un état des lieux détaillé de l’ensemble de la chaîne de sous-traitance, en particulier nucléaire, permettant d’évaluer le nombre d’emplois indirects supprimés du fait de la fermeture de ces installations. »

La parole est à M. Pierre Laurent.

M. Pierre Laurent. Cet amendement vise à renforcer l’article 1er quater en imposant une évaluation de l’évolution des salariés des installations de production d’électricité, employés directement ou par des sous-traitants.

La modification du mix énergétique et la réduction de la part du nucléaire vont conduire à des évolutions extrêmement importantes de la structure des emplois.

L’industrie nucléaire représente à peu près 220 000 emplois directs et indirects, selon une étude du comité stratégique de la filière nucléaire, et d’autres sources estiment qu’elle serait globalement source de 2 % de l’emploi en France, soit 410 000 emplois.

Comme le souligne très justement le rapport, nous ne disposons d’aucun élément substantiel sur les effets économiques et sociaux induits par l’arrêt envisagé de quatorze réacteurs d’ici à 2035. Il faut donc traiter ce problème, qui est non seulement social, mais aussi stratégique, car il y va de la maîtrise de l’évolution de notre mix énergétique. Ce qui est en jeu, c’est également la perte éventuelle des compétences considérable des salariés énergéticiens de toute la filière.

C’est pourquoi, à nos yeux, il est impératif que le Parlement soit informé, à travers le plan stratégique d’EDF, non seulement des dispositifs mis en place pour les salariés affectés par les fermetures, mais aussi du volume d’emplois possibles supprimés au sein de l’entreprise, des effets sur les salariés des sous-traitants, des dispositifs d’évolution, de formation, ainsi que de l’utilisation et de la valorisation des compétences dans les nouvelles filières.

Notre amendement vise donc à préparer ces échéances en inscrivant ces obligations dans la loi. La transition énergétique ne pourra pas être réussie dans de bonnes conditions si elle se fait sur le dos des salariés d’EDF, des sous-traitants et de leurs compétences.

M. le président. L’amendement n° 90 rectifié, présenté par MM. Dantec, Artano, A. Bertrand, Cabanel, Castelli, Collin et Corbisez, Mme Costes, M. Gold, Mme Guillotin et MM. Jeansannetas, Labbé, Requier et Roux, est ainsi libellé :

Compléter cet article par deux alinéas et un paragraphe ainsi rédigés :

5° Après le cinquième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« L’exploitant présente, chaque année, au ministre en charge de l’énergie et au ministre en charge du travail, un état des lieux détaillé de l’ensemble de la chaîne de sous-traitance pour chaque centrale nucléaire, visant à déterminer le nombre d’emplois qui seraient supprimés du fait de la fermeture de ces installations. »

.… – Le 5° du I entre en vigueur dans un délai de douze mois à compter de la promulgation de la présente loi.

La parole est à M. Ronan Dantec.

M. Ronan Dantec. Cet amendement va dans le même sens que le précédent. Nous insistons particulièrement sur la question des sous-traitants.

Les productions électriques relèvent évidemment des salariés sous statut, et leur avenir est un enjeu, mais aussi de très nombreux sous-traitants. C’est le cas pour le secteur nucléaire, mais nous aurions pu élargir cette approche aux centrales thermiques dont la fermeture est annoncée ; j’ai notamment à l’esprit celle de Cordemais, près de chez moi.

Mme Sophie Joissains. Ou celle de Gardanne !

M. Ronan Dantec. Tout à fait ! La répartition de l’emploi entre les salariés sous statut et les employés des sous-traitants indique bien que la situation des seconds, qui sont bien moins protégés, constitue un sujet central qu’il faut absolument intégrer.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Daniel Gremillet, rapporteur. La commission n’est, par principe, pas favorable aux demandes de rapport, sauf exception.

En l’espèce, dans le rapport visé dans l’amendement n° 358 rectifié bis seraient évaluées les conséquences sur l’emploi de fermetures dont les premières n’interviendront pas, en dehors du cas de Fessenheim qui est traité à part, avant 2029 ou 2030, pour la fermeture des douze réacteurs, en plus des deux de Fessenheim, décidée par le Gouvernement, ou, éventuellement, en 2025 et 2026 pour celle de deux réacteurs supplémentaires, si toute une série de conditions étaient réunies.

Compte tenu de ces délais, produire une évaluation aussi tôt ne serait pas très éclairant.

L’avis de la commission est donc défavorable

Concernant les amendements nos 264 et 90 rectifié, la commission a déjà inclus dans le plan stratégique d’EDF la présentation des dispositifs que l’entreprise peut mettre en place pour gérer les conséquences des fermetures des centrales au charbon ou des centrales nucléaires sur ses propres salariés.

Vouloir aller au-delà et exiger qu’EDF soit comptable des suppressions d’emplois directs comme indirects serait déraisonnable et renverrait la balle à l’exploitant, alors que cette évaluation ressortit clairement aux services de l’État, qui est à l’origine de ces décisions.

L’avis de la commission est donc également défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Élisabeth Borne, ministre. L’amendement n° 358 rectifié bis me semble déjà satisfait en partie par le rapport prévu au onzième alinéa de l’article 3 sur l’accompagnement des fermetures des centrales à charbon.

Comme l’a indiqué M. le rapporteur, à l’exception de la centrale de Fessenheim, qui fait l’objet d’un contrat de territoire intégrant un ensemble de mesures spécifiques, les fermetures des prochains réacteurs nucléaires ne sont pas prévues dans un délai compatible avec celui qui est fixé pour la remise du rapport visé par cet amendement.

J’en demande donc le retrait ; à défaut, l’avis du Gouvernement serait défavorable.

S’agissant de l’amendement n° 264, la reformulation qui vise à intégrer les sous-traitants pourrait apparaître comme une avancée, mais sa rédaction pose beaucoup de questions. C’est pourquoi le Gouvernement y est également défavorable.

Concernant l’amendement n° 90 rectifié, il ne semble pas nécessaire de mettre en place un tel rapport sur une base annuelle. Des rapports ont déjà été demandés sur le sujet par le Gouvernement et des données sont disponibles pour évaluer cet effet, produites, notamment, par l’Insee.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 358 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Pierre Laurent, pour explication de vote sur l’amendement n° 264.

M. Pierre Laurent. Je souhaite insister sur l’évolution des emplois dans le secteur, dans la mesure où des préoccupations convergentes sont exprimées sur les travées de trois groupes différents, qui n’ont pourtant pas toujours les mêmes positions sur le sujet, ce qui indique bien qu’il s’agit d’une vraie question.

Madame la ministre, vous nous dites que notre amendement est mal rédigé, mais vous ne répondez pas sur le fond.

La préoccupation est pourtant très importante, car il s’agit non seulement d’un problème social, mais aussi d’un problème stratégique concernant la manière dont on envisagera, demain, le mix énergétique : avec les salariés énergéticiens d’aujourd’hui, sans eux, voire contre eux.

Des exemples existent : la transition de la filière téléphonique s’est faite en massacrant les emplois existants pour aller vers une structure d’emploi totalement différente et précarisée, comme vient de le rappeler la tenue du procès de France Télécom. Est-ce cela que l’on veut pour le secteur de l’énergie, dans lequel, pourtant, la sécurité est un facteur décisif ?

Les enjeux sont donc très importants en matière d’évolution de l’emploi et si nous ne nous dotons pas de garanties fortes en la matière, nous manquerons d’outils pour conduire une bonne transition énergétique.