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Création d’une commission spéciale

Mme la présidente. L’ordre du jour appelle, en application de l’article 16 bis, alinéa 2, du règlement, la proposition de création d’une commission spéciale chargée d’examiner le projet de loi relatif à la bioéthique, sous réserve de sa transmission.

Je soumets donc cette proposition au Sénat.

Il n’y a pas d’opposition ?…

Il en est ainsi décidé.

Conformément à la décision de la conférence des présidents, la désignation des trente-sept membres de cette commission spéciale aura lieu en séance publique, demain, à seize heures trente.

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Article 11 quinquies (nouveau) (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi relatif à l'engagement dans la vie locale et à la proximité de l'action publique
Article additionnel après l'article 11 quinquies - Amendement n° 247 rectifié

Engagement dans la vie locale et proximité de l’action publique

Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission

Mme la présidente. Nous reprenons la discussion du projet de loi relatif à l’engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique.

Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus aux articles additionnels après l’article 11 quinquies.

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi relatif à l'engagement dans la vie locale et à la proximité de l'action publique
Article additionnel après l'article 11 quinquies - Amendement n° 907 rectifié bis

Articles additionnels après l’article 11 quinquies

Mme la présidente. L’amendement n° 247 rectifié, présenté par MM. A. Bertrand, Artano et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Castelli, Collin et Corbisez, Mmes Costes et N. Delattre, MM. Gold et Guérini, Mme Guillotin, M. Jeansannetas, Mmes Jouve et Laborde et MM. Requier, Roux et Vall, est ainsi libellé :

Après l’article 11 quinquies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le code électoral est ainsi modifié :

1° Après le premier alinéa de l’article L. 264, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Dans les communes nouvelles régies par le chapitre III du titre Ier du livre Ier de la deuxième partie du code général des collectivités territoriales, la liste est composée de candidats résidant dans chacune des communes déléguées selon des modalités fixées par décret en Conseil d’État. » ;

2° Après le premier alinéa de l’article L. 270, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Dans les communes nouvelles régies par le chapitre III du titre Ier du livre Ier de la deuxième partie du code général des collectivités territoriales, le candidat ainsi appelé à remplacer le conseiller municipal réside dans la même commune déléguée que ce dernier. La résidence s’apprécie au moment de l’élection. »

II. – Après le deuxième alinéa de l’article L. 2113-12-2 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« En outre, dans les communes nouvelles de plus de 1 000 habitants, le maire délégué est élu par le conseil municipal de la commune nouvelle parmi ses membres résidant dans la commune déléguée ou, à défaut, parmi ses membres. »

La parole est à M. Éric Gold.

M. Éric Gold. Cet amendement de notre collègue Bertrand a pour objet de mieux représenter les communes déléguées au sein des communes nouvelles.

Au sein des communes nouvelles, la représentation à long terme des communes déléguées n’est pas assurée. En effet, dans une commune nouvelle de plus de 1 000 habitants, où le mode de scrutin pour les élections municipales est un scrutin de liste, rien n’oblige les candidats têtes de liste à placer des représentants de toutes les communes déléguées en position éligible.

Le vœu d’assurer la représentation des communes déléguées au sein des communes nouvelles est souvent exprimé dans les chartes des communes nouvelles, sans avoir un quelconque caractère obligatoire. Or, la représentation des communes déléguées au sein des communes nouvelles est un point de blocage pour beaucoup de petites communes dans leur démarche visant à la création d’une commune nouvelle.

Cette proposition tendant à garantir la représentation des communes déléguées au sein des communes nouvelles introduirait plusieurs changements dans les communes nouvelles de plus de 1 000 habitants : la liste des candidats devrait être composée de candidats résidant dans chaque commune déléguée ; le maire délégué devrait être choisi parmi les conseillers municipaux résidant dans la commune déléguée ; enfin, un conseiller municipal ne pourrait être remplacé que par un candidat résidant dans la même commune déléguée que lui.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Françoise Gatel, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et dadministration générale. Cher collègue, votre amendement traite de la question de l’organisation d’une liste de candidats aux municipales dans les communes nouvelles où il existe des communes déléguées. Vous proposez que la loi organise la représentation de chacune des communes déléguées, pour veiller à ce que l’ensemble des territoires soient bien représentés.

Nous avons déjà eu l’occasion d’évoquer le sujet avec Alain Bertrand à l’occasion de l’examen d’une proposition de loi qu’il avait déposée. Je comprends tout à fait l’objet de cette préoccupation et je n’imagine pas qu’un candidat à l’élection municipale dans une commune nouvelle écarte de la liste des communes déléguées.

Votre proposition peut poser un problème. Imaginons une commune nouvelle composée de deux communes. La loi organise la représentation de chacune d’elles. Un candidat résidant dans la commune A se présente au titre de cette commune au moment des élections municipales. Il sera donc considéré comme appartenant au quota des candidats de la commune A. Six mois plus tard, il déménage dans la commune B, mais toujours au sein de la commune nouvelle : perd-il son siège parce qu’il a été élu au titre de la commune A qu’il vient de quitter ? Nous sommes dans l’impossibilité d’organiser les choses.

Toutefois, la commune nouvelle doit s’organiser par paliers pour réussir un vrai projet de territoire. Les chartes qui existent actuellement n’ont pas de valeur légale, vous avez raison, mais elles font partie du consensus sur lequel repose un projet de territoire et engagent chacun des conseillers municipaux, tout particulièrement les maires. Je suis assez confiante quant au fait que, dans la plupart des communes nouvelles, les choses s’organisent favorablement sans créer ces difficultés. C’est la raison pour laquelle je demande le retrait de l’amendement. Sinon, l’avis serait défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Sébastien Lecornu, ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé des collectivités territoriales. Même avis, madame la présidente.

Mme la présidente. Monsieur Gold, l’amendement n° 247 rectifié est-il maintenu ?

M. Éric Gold. Non, je le retire, madame la présidente.

Article additionnel après l'article 11 quinquies - Amendement n° 247 rectifié
Dossier législatif : projet de loi relatif à l'engagement dans la vie locale et à la proximité de l'action publique
Article additionnel après l'article 11 quinquies - Amendement n° 721 rectifié ter

Mme la présidente. L’amendement n° 247 rectifié est retiré.

Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 907 rectifié bis, présenté par M. Jacquin, Mmes Jasmin et Conway-Mouret et MM. Vaugrenard, Tissot et Daudigny, est ainsi libellé :

Après l’article 11 quinquies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :

1° Après l’article L. 2121-5, sont insérés deux articles ainsi rédigés :

« Art. L. 2121-5-1. – Tout membre du conseil municipal qui, sans excuse, a manqué cinq séances consécutives cesse d’être membre du conseil municipal. Le fait qu’un membre a manqué sans excuse cinq séances consécutives est constaté par une mention sur le registre destiné à recevoir les procès-verbaux du conseil municipal.

« Art. L. 2121-5-2. – L’opposition contre la décision du conseil municipal mentionnée à l’article L. 2121-5-1 est portée devant le tribunal administratif dans les dix jours de la date à laquelle la décision attaquée a été prise ou la constatation consignée au procès-verbal.

« L’opposition ne peut être formée que par les conseillers municipaux directement intéressés.

« Elle est jugée par la voie de la pleine juridiction.

« Le jugement du tribunal administratif est définitif, sous réserve du recours en cassation. » ;

2° Après l’article 2511-9, sont insérés deux articles ainsi rédigés :

« Art. L. 2511-9-1. – Tout membre du conseil d’arrondissement qui, sans excuse, a manqué cinq séances consécutives cesse d’être membre du conseil d’arrondissement. Le fait qu’un membre a manqué sans excuse cinq séances consécutives est constaté par une mention sur le registre destiné à recevoir les procès-verbaux du conseil d’arrondissement.

« Art. L. 2511-9-2. – L’opposition contre la décision du conseil d’arrondissement mentionnée à l’article L. 2511-9-1 est portée devant le tribunal administratif dans les dix jours de la date à laquelle la décision attaquée a été prise ou la constatation consignée au procès-verbal.

« L’opposition ne peut être formée que par les conseillers d’arrondissement directement intéressés.

« Elle est jugée par la voie de la pleine juridiction.

« Le jugement du tribunal administratif est définitif, sous réserve du recours en cassation. » ;

3° Après l’article L. 5211-6-3, sont insérés deux articles ainsi rédigés :

« Art. L. 5211-6-4. – Tout membre d’un conseil communautaire qui, sans excuse, a manqué cinq séances consécutives cesse d’être membre du conseil communautaire. Le fait qu’un membre a manqué sans excuse cinq séances consécutives est constaté par une mention sur le registre destiné à recevoir les procès-verbaux du conseil communautaire.

« Art. L. 5211-6-5. – L’opposition contre la décision du conseil communautaire mentionnée à l’article L. 5211-6-4 est portée devant le tribunal administratif dans les dix jours de la date à laquelle la décision attaquée a été prise ou la constatation consignée au procès-verbal.

« L’opposition ne peut être formée que par les membres d’un conseil communautaire directement intéressés.

« Elle est jugée par la voie de la pleine juridiction.

« Le jugement du tribunal administratif est définitif, sous réserve du recours en cassation. » ;

4° Après l’article L. 5211-8, sont insérés deux articles ainsi rédigés :

« Art. L. 5211-8-1. – Tout délégué qui, sans excuse, a manqué cinq séances consécutives cesse d’être membre de l’organe délibérant. Le fait qu’un membre a manqué sans excuse cinq séances consécutives est constaté par une mention sur le registre destiné à recevoir les procès-verbaux de l’organe délibérant.

« Art. L. 5211-8-2 .– L’opposition contre la décision mentionnée à l’article L. 5211-8-1 est portée devant le tribunal administratif dans les dix jours de la date à laquelle la décision attaquée a été prise ou la constatation consignée au procès-verbal.

« L’opposition ne peut être formée que par les membres de l’organe délibérant directement intéressés.

« Elle est jugée par la voie de la pleine juridiction.

« Le jugement du tribunal administratif est définitif, sous réserve du recours en cassation. »

La parole est à M. Olivier Jacquin.

M. Olivier Jacquin. Cet amendement vise à concilier à la fois le sens de l’engagement et le respect de la collectivité dans laquelle nous sommes élus. Il prévoit que tout membre du conseil municipal qui, sans excuse, a manqué cinq séances consécutives cesse d’être membre du conseil municipal. Le fait qu’un membre ait manqué sans excuse cinq séances consécutives est constaté par une mention sur le registre destiné à recevoir les procès-verbaux du conseil municipal.

Il vise à étendre à l’ensemble du bloc communal – communes, syndicats, EPCI – la règle applicable en Alsace et en Moselle concernant les démissions en cas d’absentéisme répété d’un conseiller de l’assemblée concernée – articles 2541-9 à 2541-11 du code général des collectivités territoriales. Cette disposition serait un moyen de prévenir l’absentéisme répété et non justifié d’élus.

Il est avéré que la pratique des mandats évolue, que l’assiduité a pu diminuer dans le temps. Cela a sans doute à voir avec les nouvelles formes d’engagement, mais aussi avec l’évolution des modes de vie. Nous connaissons tous des communes dans lesquelles le maire n’arrive plus à contacter un conseiller municipal qui a déménagé. Ainsi, il arrive que des élus quittent leur territoire et ne donnent plus signe de vie, empêchant l’arrivée d’un nouveau conseiller plus motivé.

Bien sûr, il y a un rapport au civisme dans cette proposition, mais je la présente sous un angle purement technique, permettant de fluidifier le fonctionnement des assemblées locales du bloc communal.

Je tiens à préciser que je n’ai pas repris une autre disposition du code applicable en Alsace et en Moselle prévoyant d’exclure, pour un temps déterminé ou pour la durée du mandat, des conseillers municipaux ayant troublé l’ordre.

Article additionnel après l'article 11 quinquies - Amendement n° 907 rectifié bis
Dossier législatif : projet de loi relatif à l'engagement dans la vie locale et à la proximité de l'action publique
Article additionnel après l'article 11 quinquies - Amendement n° 274 rectifié bis

Mme la présidente. L’amendement n° 721 rectifié ter, présenté par MM. Husson, Danesi, Sol et Houpert, Mme Noël, M. Bazin, Mme Bonfanti-Dossat, MM. Brisson et Lefèvre, Mme Deroche, MM. Mandelli, Courtial et Grosdidier, Mme Deromedi, MM. Longuet et Karoutchi, Mmes Lassarade et Gruny, MM. Dallier, Sido et Savary, Mmes Troendlé, Morhet-Richaud et Lamure, M. Laménie, Mme Deseyne, M. Hugonet, Mme A.M. Bertrand, MM. Bonne, Segouin et Poniatowski, Mme Bories et MM. H. Leroy et Gremillet, est ainsi libellé :

Après l’article 11 quinquies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La section 2 du chapitre 1er du titre II du livre Ier de la deuxième partie du code général des collectivités territoriales est ainsi modifiée :

1° L’intitulé est ainsi rédigé : « Démissions et exclusions » ;

2° Sont ajoutés deux articles ainsi rédigés :

« Art. L. 2121-…. – Tout conseiller municipal qui, sans excuse suffisante, a manqué trois séances successives du conseil, ou qui a troublé l’ordre à plusieurs reprises sans tenir compte des avertissements du président, peut, par décision de l’assemblée, être exclu du conseil municipal pour un temps déterminé ou pour toute la durée de son mandat.

« Art. L. 2121-…. – Tout membre du conseil municipal qui, sans excuse, a manqué cinq séances consécutives cesse d’être membre du conseil municipal. Le fait qu’un membre a manqué sans excuse cinq séances consécutives est constaté par une mention sur le registre destiné à recevoir les procès-verbaux du conseil municipal. »

La parole est à M. Jean-François Husson.

M. Jean-François Husson. Cet amendement a le même objet que le précédent et va un peu au-delà. Comme partout, si les règles sont enfreintes, soit on ne dit rien, soit on prend des décisions, y compris d’exclusion. Ces dispositions, cela vient d’être dit, reprennent le droit local d’Alsace-Moselle.

Avant la décentralisation, jusque dans les années 1980, ce pouvoir était dévolu au préfet. Nous avons changé d’époque, mais plusieurs élus m’ont alerté sur des situations d’obstruction au bon fonctionnement d’une assemblée municipale, quelle que soit la taille de la commune, pour des conflits de personnes ou de majorités. Dans un conseil municipal de quinze membres, par exemple, une élection donne une majorité de huit élus contre sept. Ce conseil peut faire l’objet d’une volonté éventuellement durable d’obstruction pour garantir le quorum. La majorité peut de surcroît être affaiblie, même si elle fait bloc, par des modifications liées à des déménagements. Le bon fonctionnement de l’assemblée peut ainsi se trouver régulièrement entravé.

Dans un projet de loi sur l’engagement, il convient de rappeler que les femmes et les hommes qui s’engagent doivent assumer leur mandat ou présenter leur démission. Tout cela est parfaitement organisé et réglé en Alsace-Moselle. Il ne s’agit pas de se transformer en gendarmes, mais de permettre le bon fonctionnement des assemblées. Les élus sollicitent la confiance de leurs concitoyens pour six ans, l’obtiennent et se doivent d’être à la hauteur. Dans quelques cas particuliers, peu nombreux, les décisions de ce type étant rares, cela permet de dénouer assez simplement des conflits.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Françoise Gatel, rapporteur. Ces deux amendements portent sur un vrai sujet : un conseiller municipal qui brille par son absence pouvant provoquer des situations difficiles. J’attire néanmoins l’attention sur le fait que les maires ne sont pas toujours avides de constater les absences des conseillers municipaux lorsque celles-ci pourraient conduire à renouveler le conseil municipal.

Je répondrai à M. Jacquin que des dispositions permettent déjà au juge administratif de déclarer démissionnaire un conseiller municipal complètement absent.

Monsieur Husson, vous faites référence à un droit local, antérieur à la Constitution, appliqué en Alsace-Moselle, composé de règles très précises permettant d’exclure du conseil municipal des conseillers ayant manqué sans excuse suffisante trois séances successives ou ayant troublé l’ordre du conseil. Il prévoit par ailleurs la cessation des fonctions pour les conseillers ayant manqué cinq séances consécutives.

Vous soulevez une vraie question, mais dont il faut mesurer les conséquences. Des difficultés particulières ont peut-être été rencontrées au cours du dernier mandat. Avec l’obligation de constituer des listes dans les communes de plus de 1 000 habitants, certaines personnes se sont portées candidates pour faire nombre sans forcément mesurer l’importance de leur engagement. Des conseillers municipaux, pour des raisons professionnelles, sont également amenés à être plus mobiles et sont moins disponibles.

La commission a émis un avis défavorable. À titre personnel, j’émettrai un avis de sagesse.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Sébastien Lecornu, ministre. Je suis convaincu de l’opportunité du débat porté par ces deux amendements. Un texte sur l’engagement doit prévoir également le défaut d’engagement. Vous prévoyez d’ailleurs des situations d’absences consécutives et non justifiées.

Monsieur le sénateur Husson, votre amendement comporte toutefois une formule qui pourrait fragiliser le dispositif, puisque tout conseiller municipal ayant troublé l’ordre à plusieurs reprises sans tenir compte des avertissements du président pourrait également être exclu. Nous ne sommes plus dans le registre de l’absentéisme, mais dans celui du comportement au sein d’une assemblée. Que souhaitez-vous faire ? Cela relève plus de l’ordre démocratique, y compris dans cet hémicycle : lorsque quelqu’un proteste énergiquement, qui procède à l’appréciation du « trouble » ? (Mme Cécile Cukierman sexclame.) Oui, la sénatrice Cukierman aurait du souci à se faire ! (Sourires.)

Je vous invite donc à retirer votre amendement au bénéfice de l’amendement n° 907 rectifié bis, qui prévoit toutes les situations d’appel devant la juridiction administrative, ce qui présente des avantages, ou bien à le rectifier en supprimant ce qui relève du comportement.

Cela n’a l’air de rien, mais nous sommes sur le point d’introduire une nouvelle disposition en droit, à savoir qu’un élu qui s’absente cinq fois consécutives sans excuse du conseil municipal se verra déchu de son mandat électif par décision de l’assemblée. Ce n’est pas neutre, mais j’y suis favorable. Un texte sur l’engagement doit également sanctionner celles et ceux qui occupent des postes sans remplir leurs obligations et ne permettent pas à d’autres, suivants de listes notamment, de siéger à leur place.

Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Jacquin, pour explication de vote.

M. Olivier Jacquin. Je souhaite remercier Mme la rapporteure de son avis de sagesse et préciser les spécificités de l’amendement n° 907 rectifié bis, qui suscite un intérêt.

J’ai apprécié votre intervention, monsieur le ministre. Cet amendement comporte des dispositions qui s’appliquent à l’ensemble des collectivités du bloc communal ; ce qui vaudrait dans les communes vaudrait aussi dans les intercommunalités ou dans les syndicats, mais pas au Sénat, au conseil départemental ou au conseil régional, je tiens à le préciser.

Madame la rapporteure, le recours au juge administratif dans le droit actuel prend un certain temps, vous n’êtes pas sans le savoir. Je maintiens donc cet amendement, qui pourrait être approfondi pendant la navette. C’est effectivement un texte sur l’engagement. J’avais pris soin, en concertation avec mon association des maires, de retirer l’aspect « trouble à l’ordre », qui me semble relever d’une appréciation en opportunité.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-François Rapin, pour explication de vote.

M. Jean-François Rapin. Je suis d’accord sur le fond de ces amendements, moyennant les quelques remarques qui ont été formulées notamment sur le trouble à l’ordre des réunions.

Je m’interroge simplement sur la notion d’excuse. Sera-t-elle définie dans le règlement intérieur du conseil municipal ? Ou bien par décret ? La jurisprudence sur les excuses a parfois troublé les débats au tribunal administratif et au Conseil d’État. Elle nécessite des précisions.

Mme la présidente. La parole est à M. André Reichardt, pour explication de vote.

M. André Reichardt. En qualité de sénateur alsacien, je voterai ces deux amendements sans faire de détail, pour deux raisons. Premièrement, il est vraiment exceptionnel que l’on se prévale du droit local alsacien-mosellan pour demander son extension à l’ensemble du territoire national. Ce jour mérite d’être marqué d’une pierre blanche : je ne vais pas faire la fine bouche ! Deuxièmement, il est tout aussi rare qu’un membre du Gouvernement émette un avis favorable, même si cela ne concerne que l’un des amendements. Je remercie donc mes collègues de les avoir déposés. Si nous pouvions avoir une belle majorité sur cette extension, j’en serais ravi.

Je souhaiterais d’ailleurs que cela puisse se reproduire en d’autres occasions. Comme nos collègues ont pu le constater lors d’un petit séminaire particulièrement suivi organisé par M. le président de la commission des lois, le droit local alsacien-mosellan possède beaucoup d’atouts – à côté de quelques inconvénients –, particulièrement pour les collectivités locales, mais aussi pour d’autres secteurs, qui n’attendent qu’une extension pour prospérer. Or la décision Somodia du Conseil constitutionnel nous empêche de faire évoluer notre droit local autrement que dans le sens du rapprochement avec le droit général. Je me réjouis que l’inverse se produise.

Mme la présidente. La parole est à M. Dominique de Legge, pour explication de vote.

M. Dominique de Legge. C’est un débat intéressant, mais le caractère automatique de la sanction me gêne dans l’amendement de M. Jacquin. Nous sommes dans une logique d’engagement, de proximité, de simplification. Or, telle n’est peut-être pas votre intention, mais cela m’inquiète que des difficultés entre élus se règlent devant le tribunal administratif.

M. Dominique de Legge. Je préfère de loin l’amendement de M. Husson, qui introduit la possibilité pour l’assemblée de délibérer et d’apprécier et renvoie à la responsabilité des collectivités territoriales. Je voterai contre l’amendement de M. Jacquin et pour l’amendement de M. Husson, qui est un amendement de liberté et de responsabilité.

Mme la présidente. La parole est à Mme le rapporteur.

Mme Françoise Gatel, rapporteur. Ce débat nourri est sans doute justifié. J’ai émis un avis de sagesse à titre personnel, mais sous certaines réserves.

Premièrement, avec un caractère automatique, il faut veiller à ne pas mettre en difficulté des municipalités qui n’atteindraient plus le nombre requis de conseillers municipaux, ce qui les contraindrait à organiser des élections générales. Deuxièmement, je suis sensible à l’argument sur la nature des absences qui seraient prises en considération : un congé de maternité, un accident de voiture, une contrainte professionnelle ou que sais-je encore.

Le débat a sa raison d’être, mais j’attire votre attention sur les effets collatéraux d’une telle mesure, y compris le plus redoutable d’entre eux, l’obligation de renouveler le conseil municipal.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marie Mizzon, pour explication de vote.

M. Jean-Marie Mizzon. Je voudrais rassurer ceux de mes collègues qui ne le seraient pas. Avec ces amendements, nous n’allons pas à l’aventure : ce dispositif a fait ses preuves, il est efficace. Je l’ai moi-même expérimenté et cela vaut rappel au règlement pour les autres conseillers municipaux. C’est une bonne manière de rappeler leurs engagements à ceux qui ont eu l’honneur d’être élus. Cinq absences consécutives sans excuse aucune justifient une réaction.

Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission.

M. Philippe Bas, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et dadministration générale. Imaginez, mes chers collègues, que nous transposions cette règle à une assemblée parlementaire, non pas au Sénat, bien sûr, mais par exemple l’Assemblée nationale. (Sourires.) Jugeriez-vous légitime que la première sanction soit l’exclusion définitive ? C’est un peu raide ; il faudrait concevoir les choses avec davantage de gradualité.

La piste qui est ainsi ouverte mérite d’être explorée. Toutefois, en ce qui me concerne, après l’avis de sagesse qui a été émis, je trouve que cela va un peu vite et risque de servir ensuite des conflits politiques locaux, où l’on discutera de la légitimité des excuses avancées par quelqu’un qui aurait eu un accident de voiture, une maternité, un déplacement professionnel de longue durée à l’étranger et manqué cinq conseils municipaux…

Dans certains cas, appliquée de bonne foi, cette règle pourrait être justifiée, mais je préférerais une modulation, une hiérarchie des sanctions qui n’aille pas directement aux extrêmes, alors que ces élus sont l’émanation du suffrage universel. Quelle que soit la taille de la collectivité, le lien entre le citoyen et son représentant est le même. Il a été envoyé dans une assemblée par la volonté du suffrage universel ; il ne doit pas pouvoir en être exclu par une délibération de celle-ci.

C’est la raison pour laquelle je voterai contre. (M. Cédric Perrin applaudit.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Bigot, pour explication de vote.

M. Jacques Bigot. Je me réjouis, comme André Reichardt, en tant qu’Alsacien-mosellan et actuel président de la commission du droit local, après lui, de cette inspiration alsacienne.

Cela étant, le dispositif n’est que rarement appliqué et c’est le conseil municipal qui décide si la personne cesse ses fonctions. Il n’y a pas d’automaticité, ce qui paraît sage. Une décision du tribunal administratif de Strasbourg a néanmoins récemment confirmé la décision d’un conseil municipal.

J’ai été maire pendant vingt ans et, au fil des mandats, j’ai constaté de plus en plus d’absences. Il me paraît bon de rappeler certains élus à leurs devoirs, d’autant que d’autres figurent sur la liste. Néanmoins, il conviendrait de préciser que la décision émane d’une délibération du conseil municipal, sans automaticité, pour tenir compte des circonstances.