compte rendu intégral

Présidence de M. Gérard Larcher

Secrétaires :

M. Pierre Cuypers,

M. Loïc Hervé.

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

1

Procès-verbal

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

2

Hommage à la victime de l’attentat de Rambouillet

M. le président. Monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, attentat après attentat, nous avons l’impression de répéter les mêmes mots, d’assister aux mêmes cérémonies, de rencontrer les mêmes familles dévastées par le chagrin. (Mmes et MM. les sénateurs, ainsi que M. le Premier ministre et Mmes et MM. les ministres, se lèvent.)

Pourtant, ce qui s’est passé à Rambouillet, le 23 avril dernier, a constitué pour la communauté de la police et pour les Rambolitains un degré supplémentaire dans la douleur que nous avons déjà vécue.

Cet attentat a touché dans ce commissariat des femmes et des hommes qui, pour beaucoup d’entre nous, et pour moi-même, sont familiers. Cet islamiste a assassiné Stéphanie Monfermé, que nous connaissions particulièrement.

Ce crime a été pour tous les Yvelinois, après Magnanville et Conflans-Sainte-Honorine, la nouvelle étape d’une tragédie qui paraît ne jamais finir.

Aucun lieu de notre territoire n’est désormais épargné par l’islamisme radical. Notre seule volonté doit être l’efficacité dans la lutte contre ce terrorisme et dans la protection de nos concitoyens.

Face à ce que certains qualifient de « guerre », face à la volonté de diviser notre nation par cette violence, ne cédons pas. Répondons avec détermination, en démocrates solides sur nos valeurs. C’est ce que nous avons réaffirmé à vos côtés, monsieur le Premier ministre, et aux côtés des élus présents vendredi dernier. Soyons déterminés, c’est notre responsabilité !

Monsieur le Premier ministre, mes chers collègues, je vous propose maintenant d’observer un moment de recueillement à la mémoire de la victime, en l’unissant à toutes les mémoires des victimes depuis 2012. Je pense à ces chemins de douleur qui sont parcourus depuis tant d’années. (Mmes et MM. les sénateurs, ainsi que M. le Premier ministre et Mmes et MM. les ministres, observent une minute de silence.)

(M. Roger Karoutchi remplace M. Gérard Larcher au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE DE M. Roger Karoutchi

vice-président

3

Questions d’actualité au Gouvernement

M. le président. L’ordre du jour appelle les réponses à des questions d’actualité au Gouvernement.

Mes chers collègues, je vous rappelle que la séance est retransmise en direct sur Public Sénat et sur notre site internet.

Au nom du bureau du Sénat, j’appelle chacun d’entre vous à observer au cours de nos échanges l’une des valeurs essentielles de notre assemblée : le respect, celui des uns et des autres, mais aussi celui du temps de parole.

pass sanitaire

M. le président. La parole est à M. Pierre Médevielle, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)

M. Pierre Médevielle. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, chers collègues, jeudi dernier, le Président de la République a annoncé la mise en place d’un pass sanitaire pour concilier sortie de crise et respect des libertés individuelles. La vaccination n’étant pas encore accessible à tous et restant facultative, l’idée de mettre en place un passeport vaccinal a été écartée au profit d’un dispositif moins restrictif.

Le pass sanitaire sera donc délivré sur présentation d’une attestation vaccinale, d’un certificat de guérison ou du résultat négatif d’un test PCR ou antigénique réalisé dans les soixante-douze heures.

Il devrait être obligatoire dès le 9 juin dans les lieux particulièrement fréquentés, tels que les foires et les salons, et à partir du 30 juin pour participer à des rassemblements de plus de 1 000 personnes. Ce pass sera également un prérequis pour l’accueil des touristes étrangers.

Dans l’attente du prochain débat au Parlement à ce sujet, plusieurs questions restent en suspens.

Pour l’heure, l’Agence européenne du médicament a reconnu quatre vaccins : Pfizer, AstraZeneca, Moderna et Johnson & Johnson.

Ma première question est la suivante : d’autres vaccins seront-ils acceptés par le dispositif pour permettre, par exemple, d’accueillir des touristes de pays ayant fait un choix vaccinal différent du nôtre ?

Nous aimerions également savoir si le pass sanitaire sera obligatoire pour les mineurs et, le cas échéant, à partir de quel âge.

À l’échelon européen, un cadre commun est en cours de définition : les eurodéputés se sont prononcés, le 29 avril dernier, sur la mise en place d’un certificat vert numérique d’ici à la fin du mois de juin. Son instauration devrait permettre de faciliter les déplacements entre les pays membres.

Pourriez-vous nous confirmer que sa délivrance se fera dans les mêmes conditions que le pass sanitaire ?

Enfin, pouvez-vous nous éclairer sur les conditions de la levée des mesures de quarantaine ? (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l’autonomie.

Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargée de lautonomie. Je vous remercie, monsieur le sénateur, de ces nombreuses questions. Je vais vous répondre, à ce stade, sur le pass sanitaire et sur les avancées que vous avez déjà précisées.

Pour le reste, vous le savez bien, tout dépendra d’autres négociations et d’autres transactions. Par ailleurs, vous serez saisis d’un texte, que le ministre de la santé vous présentera.

Tout d’abord, je salue la résilience des Français dans cette crise sanitaire, ainsi que leur engouement pour la vaccination. Près de 16 millions de Français ont reçu au moins une dose, soit 30 % de la population. Ne serait-ce qu’au cours de la journée d’hier, quelque 550 000 injections ont été réalisées.

Avec l’augmentation des doses disponibles et l’extension progressive des publics concernés, nous atteignons notre objectif de protéger progressivement toute la population. C’est une condition sine qua non pour retrouver une vie normale. Le Président de la République a fixé un cap clair : dès le 15 juin prochain, les Français majeurs qui le souhaitent – j’espère que ce sera le cas de tous – pourront se faire vacciner.

Cette situation ouvre donc la possibilité d’un pass sanitaire qui, à l’inverse du passeport vaccinal, ne sera pas uniquement lié à l’acte de vaccination. Il sera accessible sur les téléphones et énumérera les tests PCR, les tests positifs de moins de trois mois, ainsi que les certificats de vaccination.

La vaccination étant fortement encouragée, le pass sanitaire ne pénalisera pas les personnes non vaccinées contre la covid-19, d’autant que, je le rappelle, les tests sont gratuits en France, ce qui est assez unique en Europe.

À l’échelon européen, la mise en place d’un certificat sanitaire permettant aux citoyens européens de voyager au sein de l’Union européenne est en train d’être débattue. Plusieurs compagnies aériennes envisagent également d’utiliser ces passeports sanitaires pour les vols hors de France.

Ces éléments sont actuellement discutés dans le cadre de l’examen du projet de loi relatif à la gestion de la sortie de crise sanitaire, qui est défendu par le ministre Olivier Véran et sur lequel vous aurez l’occasion de vous prononcer clairement au sein de votre assemblée. (M. François Patriat applaudit.)

nomination du directeur de l’assistance publique des hôpitaux de marseille

M. le président. La parole est à M. Alain Milon, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Alain Milon. Madame la ministre, voilà maintenant plus de deux mois que l’Assistance publique-Hôpitaux de Marseille, l’AP-HM, est dans l’attente d’un nouveau directeur général.

Les procédures ont pourtant été respectées de façon scrupuleuse. Un consensus local a même été établi concernant les candidatures proposées par la présidente du conseil de surveillance, Mme Rubirola, le doyen de la faculté de médecine, le professeur Leonetti, par ailleurs conseiller régional, et le président de la commission médicale d’établissement, la CME, le professeur Rossi.

Cette situation est d’autant plus pénalisante que, dans le cadre du Ségur de la santé, les autres CHU ont pris l’initiative de proposer des plans de financement complémentaires, récemment acceptés par les tutelles. Malheureusement, à Marseille, du fait de la situation bloquée, aucune initiative n’a été prise en ce sens, privant ainsi cette institution d’un financement complémentaire absolument nécessaire.

Localement, l’incompréhension est totale face à cette situation, et le ressenti est celui d’un certain mépris pour les acteurs de terrain.

Ce sentiment de mépris est exacerbé – c’est un doux euphémisme ! – par la rumeur entretenue par la presse selon laquelle le nouveau directeur de l’AP-HM pourrait être M. Salomon, actuel directeur général de la santé (Ah ! sur les travées du groupe Les Républicains.), décision prise par Paris, sans tenir compte du choix des décideurs locaux, dont Renaud Muselier, qui étaient tous d’accord sur la personne de M. Crémieux.

Madame la ministre, pouvez-vous nous indiquer quelle est votre décision quant à la nomination du nouveau directeur de l’AP-HM ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l’autonomie.

Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargée de lautonomie. Monsieur le sénateur Alain Milon, d’une part, cette décision ne m’appartient pas, et, d’autre part, il ne faut jamais croire les rumeurs.

La vacance ayant commencé, il est normal que nous entamions les consultations nécessaires à la nomination à la tête de cet ensemble si prestigieux.

Je puis vous confirmer que le processus de recrutement a été lancé, comme vous l’avez souligné. Les candidatures ont été examinées par un comité de sélection locale, avec, d’une part, l’agence régionale de santé, l’ARS et, d’autre part, le doyen, le président de la commission médicale d’établissement et la mairie de Marseille.

Trois noms ont été proposés au ministère. À l’issue de ce processus, les échanges se sont poursuivis, notamment avec les acteurs locaux.

Deux éléments importants justifient la poursuite des discussions. Compte tenu de l’importance de ce centre et de la difficulté de diriger une telle institution, le processus de désignation est capital : il est normal d’en prendre le plus grand soin, vous en conviendrez.

Par ailleurs, le ministère des solidarités et de la santé a veillé à ce qu’il n’y ait pas d’intérim ; c’est encore plus nécessaire au regard de la situation actuelle. Nous avons donc prolongé dans ses fonctions le précédent directeur général, pour assurer la continuité.

La décision sera prise en conseil des ministres dans les meilleurs délais, soyez-en assuré.

M. le président. La parole est à M. Alain Milon, pour la réplique.

M. Alain Milon. Je me doutais bien que la réponse ne pouvait pas venir directement du ministère, puisqu’elle paraît relever du bureau du Président de la République…

Je voudrais juste souligner un point : M. Véran a dit ici qu’il tenait beaucoup à M. Salomon, dont on connaît les relations ambiguës avec les agences. S’en séparer sans s’en séparer et pour s’en séparer n’est pas une solution, ni pour l’AP-HM ni pour M. Salomon lui-même.

Par ailleurs, retarder les décisions entraîne un retard de financement pour l’AP-HM,…

Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Pas du tout !

M. Alain Milon. … ce qui est préjudiciable pour l’ensemble de la Provence. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

répartition de la dotation globale de fonctionnement 2021

M. le président. La parole est à M. Hervé Maurey, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

M. Hervé Maurey. Ma question s’adresse à Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.

Madame la ministre, la direction générale des collectivités locales vient de publier la répartition de la dotation globale de fonctionnement, la DGF, pour l’année 2021. Si le montant de celle-ci est globalement stable, cette année encore, plus de la moitié des communes – 53 % d’entre elles, exactement – connaissent une diminution de cette dotation.

Ces baisses ne concernent qu’un tiers des communes de plus de 20 000 habitants, mais elles touchent 55 % des communes de moins de 1 000 habitants.

Ces communes, qui ont déjà une dotation forfaitaire par habitant bien inférieure à celle des communes urbaines, observent ainsi leurs recettes, déjà limitées, diminuer d’année en année, et éprouvent de plus en plus de difficultés à équilibrer leur budget.

Que les communes de toutes tailles ignorent les causes de ces diminutions, tant le calcul de la DGF est opaque, accentue l’incompréhension des élus concernés.

Cette situation est particulièrement choquante cette année, alors que, du fait de la crise sanitaire, les communes, notamment les communes rurales, ont eu à supporter des dépenses supplémentaires et des pertes de recettes non compensées par l’État.

Pourquoi tant de diminutions, et pourquoi celles-ci touchent-elles plus particulièrement et de manière récurrente les petites communes ?

Compte tenu de la situation, n’aurait-il pas été opportun d’accorder a minima cette année un gel des dotations à ces communes ? (Très bien ! et applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains. – M. Christian Bilhac applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.

Mme Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales. Monsieur le sénateur Hervé Maurey, vous avez rappelé que la stabilité de l’enveloppe de la DGF était une réalité. Je souligne, par ailleurs, que la DGF représente en moyenne 7 % des dépenses du budget de l’État et 15 % des recettes des communes, ce qui est bien loin d’être anodin.

Nous procédons chaque année à des redéploiements au sein de la DGF, mais nous ne le faisons pas au hasard ; nous tenons compte de la variation de la population des communes ou de la richesse fiscale. Des évolutions individuelles existent, vous le savez, mais elles sont modérées : en 2021, quelque 80 % des variations sont inférieures à 1 % des recettes de fonctionnement des budgets.

Se pose, bien sûr, la question du niveau de base de la DGF, notamment du fameux coefficient logarithmique.

Ce coefficient, qui existe depuis près de vingt ans, traduit le fait que les charges d’une commune croissent avec sa population. Cette corrélation n’est contestée par personne, pas même par ceux qui avaient envisagé une réforme de la DGF.

Pour prendre un exemple que vous connaissez bien, monsieur le sénateur, la commune de Bernay reçoit 250 euros de DGF par habitant, contre 172 euros en moyenne pour les communes de son intercommunalité. Pourquoi ? Tout simplement parce que Bernay est au cœur d’un bassin de vie et fournit des services et des équipements à une population qui dépasse largement son territoire.

J’ajoute qu’il faut envisager la question dans une perspective dynamique. Depuis 2017, les communes de moins de 3 500 habitants ont gagné 72 millions d’euros de DGF, quand, sous le quinquennat précédent, elles avaient perdu 700 millions d’euros de dotation.

Mme Françoise Gatel. C’est vrai ! Nous avions été saignés à blanc.

Mme Jacqueline Gourault, ministre. Je vous rappelle, par ailleurs, que nous avons réformé la DGF des intercommunalités en 2019, dans un sens très favorable aux intercommunalités rurales,…

M. le président. Il faut conclure, madame la ministre.

Mme Jacqueline Gourault, ministre. … qui sont souvent très bien intégrées et qui étaient pénalisées.

Cette année encore, 75 % des communautés de communes ont vu leurs dotations augmenter. (M. François Patriat applaudit.)

M. le président. La parole est à M. Hervé Maurey, pour la réplique.

M. Hervé Maurey. Je suis très sensible, madame la ministre, au fait que vous vous intéressiez à la DGF de Bernay. Vous auriez pu aussi parler de celle de Vernon, qui est trois fois supérieure à celle de Louviers, alors que ce sont des villes de taille sensiblement comparable et que la population augmente à Louviers et non à Vernon ! Mais tel n’est pas le sujet.

Je regrette que vous n’ayez pas répondu à ma question…

Mme Jacqueline Gourault, ministre. Si !

M. Hervé Maurey. … et que vous ne répondiez pas aux inquiétudes des maires des communes rurales, qui voient chaque année baisser leurs dotations sans avoir d’explications rationnelles.

Mme Jacqueline Gourault, ministre. Ce n’est pas vrai !

M. Hervé Maurey. Cette situation conduit à des votes protestataires, que vous regrettez, mais que, avec un tel comportement, vous ne faites rien pour empêcher ! (Vifs applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains.)

Mme Sophie Primas. C’est vrai !

fin de la trêve hivernale

M. le président. La parole est à Mme Marie-Claude Varaillas, pour le groupe communiste républicain citoyen et écologiste. (Mme Laurence Cohen applaudit.)

Mme Marie-Claude Varaillas. Madame la ministre déléguée chargée du logement, alors que notre pays fait face à une crise sanitaire mondiale, c’est à présent une crise sociale majeure que nous devons affronter.

À l’heure où de très nombreuses familles sont confrontées à la précarité, des associations demandent le prolongement de la trêve hivernale jusqu’au 31 octobre.

En effet, les expulsions locatives, déjà en hausse constante depuis des années, pourraient doubler cette année si rien n’est fait. Selon l’Insee, parmi les 10 % de ménages les plus modestes, 35 % ont subi une dégradation de leur situation financière. La Banque de France prévoit, elle, un pic du chômage supérieur à 11,5 % d’ici à quelques mois.

Comme le souligne la Confédération nationale du logement, qui a lancé une pétition à ce sujet, il convient de ne pas ajouter à la situation économique et psychologique dramatique l’angoisse d’une expulsion pour des milliers de ménages.

Une expulsion locative n’est pas un simple acte administratif ; c’est un drame humain aux multiples répercussions. C’est la raison pour laquelle nous soutenons l’idée d’une « sécurité sociale du logement », via un fonds de solidarité nationale.

Madame la ministre, que comptez-vous faire pour garantir le droit au logement, reconnu comme un objectif à valeur constitutionnelle ?

Allez-vous, enfin, reporter la trêve hivernale, comme nous le demandons systématiquement et comme l’autorise l’article 7 du projet de loi relatif à la gestion de la sortie de crise sanitaire ? Surtout, allez-vous faire de l’année 2021 une année « zéro expulsion locative » ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée du logement.

Mme Emmanuelle Wargon, ministre déléguée auprès de la ministre de la transition écologique, chargée du logement. Madame la sénatrice Marie-Claude Varaillas, face à la crise sanitaire que nous connaissons, nous avons pris des mesures exceptionnelles pour protéger les locataires vulnérables.

Dès l’année dernière, à l’issue de la trêve hivernale, que nous avons prolongée jusqu’à juillet 2020, nous avons fixé comme consigne qu’il n’y ait pas d’expulsion sans proposition de relogement ou d’hébergement, consigne qui s’est traduite par un nombre d’expulsions exceptionnellement bas en 2020.

Nous prolongeons de nouveau la trêve hivernale cette année, du 31 mars au 31 mai. Nous avons par ailleurs ouvert un nombre exceptionnel de places d’hébergement pour la mise à l’abri. Nous en sommes aujourd’hui à plus de 200 000 places. C’est un geste de solidarité très fort vis-à-vis des personnes en difficulté.

Nous devons désormais réussir la fin de la trêve, la fin de ces mesures temporaires, pour assurer un retour progressif au cadre de la loi. Nous préparons donc depuis plusieurs mois, avec toutes les associations de solidarité, la fin de cette trêve, avec une priorité : continuer à protéger les personnes précaires et vulnérables.

Si une expulsion a lieu après le 1er juin, elle sera assortie d’une proposition de relogement ou, a minima, d’hébergement. Un travail sera réalisé également en amont de l’expulsion, pour proposer un accompagnement social et une solution aux locataires.

Il importe que nous réussissions cette transition face au droit commun, car nous devons aussi prendre en compte la situation des petits propriétaires, dont le loyer constitue une source importante de revenu. Nous ne pouvons pas avoir une année blanche en matière d’expulsions.

C’est aussi pour cette raison que l’État s’est engagé à indemniser rapidement les propriétaires concernés. Nous abonderons dès juillet prochain le fonds d’indemnisation des propriétaires bailleurs d’un montant complémentaire, estimé à 20 millions d’euros.

Enfin, nous avons décidé de mettre en place à titre exceptionnel pour 2021 quelque 30 millions d’euros de fonds d’aide aux impayés de loyers.

Il s’agit d’une demande portée par les associations. Cette somme viendra abonder les fonds solidarité logement des collectivités locales pour aider les ménages en difficulté à se maintenir dans leur logement. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. le président. La parole est à Mme Marie-Claude Varaillas, pour la réplique.

Mme Marie-Claude Varaillas. Madame la ministre, votre réponse est loin de me satisfaire. Il faut sortir le logement de la logique marchande.

Nous avons besoin de moyens financiers non seulement pour le fonds d’indemnisation, mais aussi pour les bailleurs, afin de construire du logement social et pour la réquisition des logements vacants.

Ce ne sont pas vos vagues instructions aux préfets ni vos annonces qui changeront la donne. Et permettez-moi de vous rappeler que des solutions d’hébergement ne seront jamais équivalentes à un accès pérenne au logement. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE.)

examen du baccalauréat

M. le président. La parole est à Mme Nadège Havet, pour le groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.

Mme Nadège Havet. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’éducation nationale.

Mes premiers mots vont aux équipes pédagogiques et aux élèves qui, partout en France, ont repris le chemin de l’école lundi dernier. Après une année difficile, très difficile, il faut saluer leurs efforts remarquables et entendre les inquiétudes légitimes qui sont aujourd’hui exprimées à l’approche des examens finaux.

Nos terminales, notamment, abordent la dernière ligne droite avant ce rite de passage que constitue toujours le baccalauréat, un diplôme cadre qui est aussi une entrée dans l’enseignement supérieur et dans l’âge adulte. Des diplômes, des épreuves, le stress qui va avec… Un stress accru dans la période actuelle. Les épreuves, le grand oral et la philosophie arrivent.

Certains expriment des doutes quant à la faisabilité pour les lycéennes et lycéens de plancher en présentiel. Des inégalités dans l’avancement dans les programmes, en fonction des établissements, sont mises en avant.

Nous le savons, le virus a frappé partout, mais il n’a pas touché tous les territoires et tous les lycées de la même façon, ni avec la même intensité et les mêmes conséquences en matière de continuité pédagogique.

Même si la France a connu un maintien du nombre de jours d’école remarquable par rapport aux autres pays depuis le début de la pandémie, face à ces constats, monsieur le ministre, faut-il prévoir un contrôle continu généralisé ?

Faut-il envisager des aménagements supplémentaires ? Certains ont déjà été opérés : je pense aux épreuves de spécialité de mars dernier, aux épreuves anticipées de français de la classe de première et au contenu de l’épreuve de philosophie.

Vous avez rencontré hier les syndicats et les organisations lycéennes, afin d’étudier de nouvelles pistes pour ajuster les épreuves. Pourriez-vous nous en dire plus ? En particulier, quid des élèves inscrits dans les écoles hors contrats ?

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports.

M. Jean-Michel Blanquer, ministre de léducation nationale, de la jeunesse et des sports. Madame la sénatrice Nadège Havet, vous soulevez des questions très importantes, que beaucoup de jeunes et de familles se posent.

Le premier mot-clé depuis le début de cette crise sanitaire est « bienveillance ». Le second est « pragmatisme » : nous devons nous adapter aux circonstances.

Je vous remercie d’avoir souligné que nous avons réussi quelque chose que les autres pays européens ne sont pas parvenus à faire, à savoir maintenir les établissements ouverts. Mais, bien entendu, cette année scolaire n’a tout de même pas été normale. Vous l’avez noté, il existe une certaine hétérogénéité, en particulier entre les lycéens.

Voilà pourquoi nous procédons à des adaptations. Nous l’avons déjà fait tout au long de l’année. Vous le savez, nous disposons d’un comité de suivi du baccalauréat. Nous disposons également d’un comité de suivi spécifique de la voie professionnelle. Qu’il s’agisse du baccalauréat général et technologique ou du baccalauréat professionnel, nous nous adaptons.

Vous avez relevé les plus importantes de ces adaptations récentes, notamment le fait d’avoir transformé en contrôle continu des épreuves terminales qui étaient prévues en mars dernier. Nous avons encore devant nous pour le baccalauréat général et technologique l’épreuve de philosophie écrite et le grand oral.

Comme vous l’avez souligné, j’ai échangé hier, par visioconférence, avec les organisations lycéennes. Nous discutons aussi avec les organisations représentatives des personnels. Bien entendu, les propositions qui nous sont soumises peuvent être contradictoires entre elles.

Notre seul et unique objectif est de maintenir la valeur du diplôme et d’amener les élèves vers la réussite, le tout dans de bonnes conditions. Nous voulons donc qu’ils passent le plus possible une épreuve terminale, mais, en même temps, nous cherchons des aménagements pour qu’ils réussissent.

C’est pourquoi, par exemple, nous prendrons très vraisemblablement des mesures pour qu’un élève puisse indiquer à l’oral les parties du programme qu’il n’a pas vues, en présentant à l’examinateur un document signé par son professeur.

C’est un exemple parmi d’autres des aménagements que nous envisageons de mettre en place. Les discussions étant en cours, je ne suis actuellement pas en mesure de vous en dire plus, d’autant qu’il s’agit de sujets complexes – je pense, en particulier, au baccalauréat professionnel, avec ses spécificités, et aux épreuves de français de première.

Je ne doute pas que nous parviendrons à une solution à la fois pragmatique et bienveillante, nos deux mots-clés. J’espère pouvoir vous en dire plus au cours des prochaines heures ou des prochains jours. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

assurance chômage