M. Loïc Hervé. C’est important !

M. Ludovic Haye. … ou encore la composition du congrès des élus départementaux et régionaux de la Guadeloupe.

Le titre relatif à la simplification de l’action publique locale aura, lui aussi, fait l’objet de plusieurs consensus. La meilleure mise en œuvre du service public numérique pour tous les usagers, avec l’application « dites-le-nous une fois », principe qui prévoit que les usagers n’aient plus à communiquer de nouveau les documents et informations que l’administration leur a déjà demandés par ailleurs, la faculté des collectivités et de leurs groupements de recourir au financement participatif pour leurs investissements ou encore l’extension du dispositif de réunion par visioconférence pour les conseils départementaux et régionaux aux conseils des syndicats intercommunaux et aux syndicats mixtes fermés font partie des mesures de simplification qui ont été adoptées au Sénat.

En conséquence, chers collègues, vous l’aurez compris, en prenant en compte ces éléments, le groupe RDPI votera en faveur du projet de loi 3DS, dans le droit fil des actions menées depuis 2017 en faveur des élus locaux et des collectivités. Nous émettons toutefois plusieurs réserves sur certaines dispositions adoptées par le Sénat.

Si certains ont souhaité rejouer le match de la loi Engagement et proximité ou du projet de loi Climat et résilience, nous ne pouvons pas revenir sur les équilibres qui ont pu être trouvés, comme nous l’avions indiqué au début de l’examen. À titre d’exemple, le transfert de la compétence « eau et assainissement » ou du PLU à l’établissement public de coopération intercommunale, les compétences à la carte pour les EPCI, les capacités d’intervention pour les départements dans le domaine économique, le durcissement des conditions d’accès à la prestation du RSA ou encore l’obligation d’un avis conforme du conseil municipal pour les projets d’installation d’éoliennes sont des propositions que nous pouvons entendre, mais qui ne créent à ce jour aucun consensus et que notre groupe ne partage pas.

Mme Françoise Gatel. C’est un tort !

M. Ludovic Haye. Le texte poursuivra son examen à l’Assemblée nationale. Nous formons le vœu sincère que les débats constructifs et bienveillants que nous avons eus au sein de la Haute Assemblée et que l’esprit de compromis ayant caractérisé nos rapporteurs et guidé le Sénat et le Gouvernement perdurent. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

Mme le président. La parole est à Mme Nathalie Delattre, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)

Mme Nathalie Delattre. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, nous achevons quinze jours d’examen d’un projet de loi dont les débats furent finalement plus engagés qu’attendu, même s’ils furent toutefois sous-tendus par la fatigue du marathon législatif particulièrement intense que nous avons subi cette année. À cela s’ajoute l’amer constat, quasi unanimement souligné lors de la discussion générale, de voir combien ce texte, en arrivant sur nos pupitres, nous a paru éloigné de son ambition initiale et des fortes attentes qu’il suscitait de la part des collectivités, d’autant que son examen a suivi de quelques jours un scrutin marqué par une abstention record et préoccupante.

Face à cet horizon encombré, le Sénat a toutefois su faire remonter toute la profondeur des problématiques locales. Nos échanges ont traduit combien la vie de nos territoires était riche et montré que s’y jouaient des questions majeures de la vie de notre nation. Je pense, par exemple, à nos discussions autour de l’article 17 et de l’application de la loi SRU.

Certains ont fait part de leur crainte que ce projet de loi ne dénature l’esprit initial de la loi au motif de davantage de souplesse. D’autres ont pu souligner, au contraire, qu’à défaut de souplesse, les objectifs de la loi SRU ne seraient jamais atteints, car parfois irréalisables. Néanmoins, au-delà des positions soutenues, nous nous accordons à regretter qu’un tel sujet n’ait pas fait l’objet d’une discussion à part entière, au lieu de le traiter entre le transfert des compétences « voiries » et la réforme de la gouvernance des ARS.

Au cours des débats, certaines mesures adoptées ont révélé des clivages profonds mettant en lumière, là aussi, toute l’importance de la vie politique locale. Ce fut le cas, par exemple, de la disposition adoptée en commission des lois qui permet au département de décider de priver du RSA les personnes disposant d’une épargne trop importante. Une majorité des membres du RDSE doutent que cette mesure soit la plus à même de lutter efficacement contre les abus de notre système de solidarité.

Nonobstant ces premières considérations, je veux saluer le travail du Sénat, à commencer par celui de nos rapporteurs. Notre assemblée a su non seulement s’approprier pleinement un texte au sujet duquel nous avions d’abord fait part de notre déception, mais aussi garder sa cohérence. C’est le cas de la réintroduction d’un droit à l’erreur pour les collectivités locales, qui, hélas ! peine toujours à vous convaincre, madame la ministre.

Le groupe du RDSE tient également à saluer la transposition, dans ce texte, de la proposition de loi visant à moderniser et faciliter la procédure d’expropriation de biens en état d’abandon manifeste, largement adoptée au Sénat le 14 avril dernier, avec un avis favorable du Gouvernement. Ces dispositions devraient permettre de mieux soutenir la revitalisation de nos communes face au problème croissant de la sous-optimisation des biens immobiliers et des terrains abandonnés par leurs propriétaires.

Malgré tout, je crains que nous n’ayons pas pleinement su rattraper les défauts et les insuffisances initialement constatés dans le volet de la différenciation, et cela malgré les améliorations apportées au cours de cet examen. La question de la portée réelle de ce principe se pose toujours, notamment au regard des moyens, d’autant que la différenciation porte en elle-même le risque d’une inégalité territoriale qui se creuserait encore davantage avec le temps. Si nous voulons que ce nouveau souffle territorial soit porteur d’un meilleur avenir pour nos collectivités, il faudra se montrer particulièrement vigilant dans les années à venir pour éviter toute forme de dérives et de particularismes locaux au détriment des territoires moins favorisés.

Reste qu’il est difficile de rejeter ce projet de loi pour ce motif, tant il est fait de dispositions diverses qui comportent de bonnes mesures, pour beaucoup introduites par le Sénat. Parmi ces améliorations, je pense à l’article inséré dans le texte après l’adoption de l’amendement de notre collègue Jean-Yves Roux visant à permettre aux communes touristiques membres d’une communauté d’agglomération de retrouver l’exercice de la compétence « promotion du tourisme ». Nos débats nous auront aussi permis d’éviter de commettre certaines erreurs, comme sur la modification de la composition des Ceser, à travers un amendement que je portais au nom de mon groupe.

J’aimerais revenir sur la non-suppression de l’article 7 du projet de loi, qui institue une expérimentation permettant aux régions d’exercer la compétence d’aménagement et de gestion des routes nationales et autoroutes non concédées.

Nous avons dit combien cette disposition nous interrogeait quant à la lisibilité des compétences des collectivités en matière de voirie routière, d’autant que les départements sont connus et reconnus pour l’exploitation de leur domaine routier, alors que les régions sont loin de disposer de telles compétences. Aussi, je regrette que cet article n’ait finalement pas été supprimé à la faveur d’un second vote, à minuit et demi, hier soir, alors que l’amendement que je portais avait été adopté dans la semaine.

Pour l’essentiel, notre groupe demeure attaché aux communes et aux départements et ne souhaite pas privilégier à l’excès les échelons intercommunaux et régionaux.

M. Philippe Folliot. Très bien !

Mme Nathalie Delattre. Nous y voyons un risque d’éloignement des organes de décision des territoires, à l’image de ce que nous avons défendu au sujet de la réforme des agences de l’eau.

Mme Nathalie Delattre. De cette même manière, certains points suscitent encore d’importantes interrogations, notamment en ce qui concerne l’Ademe. Nous ne comprenons pas, malgré les premières réponses apportées par la commission, sinon le sens, du moins l’intérêt de la réforme.

En dernier lieu, je voudrais dire un mot de ce qui n’a pas été examiné dans ce texte. Un exemple nous a particulièrement affectés : durant ces deux semaines, nous avons souvent abordé la question des communes de montagne, ce qui n’a rien de surprenant dans un texte prônant la différenciation juridique des territoires. Mais, étonnamment, certains aspects n’ont pas pu être développés au motif d’irrecevabilités parfois peu compréhensibles.

Notre collègue Guylène Pantel en a fait part durant les débats en indiquant regretter que son amendement relatif au droit de l’urbanisme et aux risques d’une double application des lois Littoral et Montagne ne puisse être examiné.

Dans ce même esprit, je pense à l’amendement qu’aurait souhaité porter notre collègue André Guiol visant à repenser les conséquences de la suppression des zones NB dans les règlements locaux d’urbanisme.

L’ambitieuse simplification aurait justifié que ces sujets soient au moins abordés, tant ils sont l’objet, pour nos communes, de difficultés au quotidien.

Aussi, au regard de ces éléments, vous comprendrez que le groupe du RDSE ne tiendra pas une position unanime.

M. Alain Richard. Ça alors !

Mme Nathalie Delattre. Chacun de ses membres conservera, comme il est de principe, sa pleine liberté de vote. Toutefois, une majorité des membres de notre groupe adoptera ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)

Mme le président. Je mets aux voix, dans le texte de la commission, modifié, l’ensemble du projet de loi relatif à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

Mme le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)

Mme le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 161 :

Nombre de votants 345
Nombre de suffrages exprimés 334
Pour l’adoption 242
Contre 92

Le Sénat a adopté. (Applaudissements sur des travées des groupes Les Républicains, UC, RDSE et RDPI.)

La parole est à Mme la ministre.

Mme Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales. Madame la présidente, mesdames les sénatrices, messieurs les sénateurs, nous arrivons au terme de ces débats très riches, de ces dix jours et nuits passés ensemble, avec plus de 1 000 amendements examinés en séance.

Je tiens à remercier la commission des lois, son président, François-Noël Buffet, et ses rapporteurs, Françoise Gatel et Mathieu Darnaud, qui ont accompli leur mission avec conviction.

Je tiens également à remercier les rapporteurs pour avis, Dominique Estrosi Sassone, Alain Milon et Daniel Gueret, pour leur apport décisif et leur engagement à défendre ce texte.

Je souhaite aussi vous remercier, madame la présidente, ainsi que l’ensemble de vos collègues qui ont présidé pendant ces dix jours de séance, pour l’exigence d’efficacité et de sérénité que vous avez portée.

Je veux souligner l’état d’esprit constructif dans lequel nous avons collectivement œuvré et que nous partageons depuis de nombreux mois.

Comme je le soulignais en ouverture de nos débats, le 7 juillet dernier, il s’agit d’un texte de confiance vis-à-vis non seulement des élus locaux, mais aussi du Sénat, qui a fait preuve de responsabilité et qui a le plus souvent convergé avec le Gouvernement, n’en déplaise à ceux qui veulent réécrire l’histoire et faire passer le récit d’une confrontation – il n’en a rien été !

Bien évidemment, des divergences demeurent, et c’est normal, notamment sur l’intercommunalité, comme cela vient d’être souligné. Toutefois, je suis sûre qu’une position d’équilibre entre les besoins de proximité et la nécessité de mutualisation et de mise en commun saura être trouvée à la faveur de la navette.

Je retiens aussi qu’un grand nombre de mesures importantes ont été adoptées. Les différents orateurs qui se sont succédé les ont rappelées. Je ne vais pas être exhaustive, mais je voudrais retenir l’extension du pouvoir réglementaire local, la pérennisation de la loi SRU et sa mise en œuvre différenciée via le contrat de mixité sociale, le transfert des routes nationales aux départements et l’expérimentation en direction des régions volontaires, la capacité pour les collectivités à financer des établissements de santé et à recruter des soignants, l’expérimentation de la recentralisation du RSA ou encore le renforcement des pouvoirs des collectivités locales pour mettre en œuvre concrètement la transition écologique sur leur territoire. Je ne serai pas plus longue : toutes ces mesures portent des avancées concrètes au bénéfice des territoires et de nos concitoyens.

Je vous remercie de nouveau, toutes et tous, pour votre investissement et je remercie ceux d’entre vous qui ont voté en faveur de ce texte, qui répond aux besoins concrets des territoires. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI, RDSE, INDEP, UC et Les Républicains.)

Mme le président. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-sept heures quarante, est reprise à dix-sept heures quarante-cinq.)

Mme le président. La séance est reprise.

Organisation des travaux

Mme le président. Mes chers collègues, en accord avec le Gouvernement et la commission des lois, je suspendrai la séance à l’issue de l’examen du projet de loi de règlement et d’approbation des comptes de l’année 2020.

Nous reprendrons nos travaux à vingt et une heures, pour l’examen, en nouvelle lecture, du projet de loi relatif à la prévention d’actes de terrorisme et au renseignement.

Explications de vote sur l'ensemble (début)
Dossier législatif : projet de loi relatif à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale
 

5

 
Dossier législatif : projet de loi de règlement du budget et d'approbation des comptes de l'année 2020
Discussion générale (suite)

Règlement du budget et approbation des comptes de 2020

Rejet en nouvelle lecture d’un projet de loi

Discussion générale (début)
Dossier législatif : projet de loi de règlement du budget et d'approbation des comptes de l'année 2020
Article liminaire

Mme le président. L’ordre du jour appelle la discussion en nouvelle lecture du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture, de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2020 (projet n° 784, rapport n° 788).

Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre délégué.

M. Olivier Dussopt, ministre délégué auprès du ministre de léconomie, des finances et de la relance, chargé des comptes publics. Madame la présidente, monsieur le rapporteur général de la commission des finances, mesdames, messieurs les sénateurs, nous nous retrouvons aujourd’hui pour examiner, en nouvelle lecture, le projet de loi de règlement que vous avez rejeté en première lecture et qui, fort logiquement, n’a pas fait l’objet d’un accord en commission mixte paritaire. Je vais donc être bref et éviter les redondances avec la première lecture.

Toutefois, je me dois de rappeler que l’exécution budgétaire de l’année 2020 est exceptionnelle, en ce qu’elle témoigne de la réponse massive et rapide apportée par l’État à la crise que nous avons connue et qui s’est traduite par la mise en œuvre d’un certain nombre de dispositifs nécessaires pour limiter l’impact économique des mesures prises pour protéger l’ensemble des Français. Ces mesures ont représenté un choc important pour notre économie et entraîné une récession de 7,9 %.

Immédiatement après l’annonce du premier confinement, nous avons donné aux acteurs économiques les moyens de tenir bon. Avec le concours du Parlement, nous avons créé trois dispositifs de soutien dès le premier projet de loi de finances rectificative, renforcés et améliorés au fil du temps.

Je pense tout d’abord à l’activité partielle : le Gouvernement a proposé au Parlement une forme d’activité partielle très généreuse, dès le début de la crise, pour un montant total d’environ 35 milliards d’euros, dont 26,3 milliards d’euros en 2020, sur lesquels 17,8 milliards d’euros ont été directement décaissés depuis le budget de l’État. Au plus fort de la crise, en avril 2020, ce sont 1 million d’entreprises qui ont fait appel à l’activité partielle, pour plus de 8 millions de salariés.

Je pense ensuite au fonds de solidarité. Depuis sa création, plus de 35 milliards d’euros ont été versés en réponse à une dizaine de millions de demandes, portées par 2,2 millions d’entreprises.

Je pense aussi aux prêts garantis par l’État. Ce dispositif a connu un succès important : plus de la moitié des entreprises des secteurs les plus touchés y ont eu recours et un tiers des entreprises a contracté un PGE, pour un total de plus de 140 milliards d’euros.

D’autres dispositifs de soutien ont vu le jour, comme les reports fiscaux et sociaux, les exonérations de cotisations sociales, les aides au paiement ou encore le renforcement exceptionnel des participations de l’État au capital d’entreprises stratégiques.

Face à l’ampleur de ces dispositifs et à la nécessité de les maintenir dans la durée, la question de leur financement n’avait rien d’une évidence. Lors de chacun des quatre projets de loi de finances rectificative présentés en 2020, nous avons donc fait preuve de prudence et de prévoyance pour ne pas manquer de crédits. L’incertitude dans laquelle la crise nous a plongés – et nous plonge encore – nous a conduits à proposer d’ouvrir des crédits d’un montant suffisamment important pour faire face à d’éventuels durcissements de la situation sanitaire, ce que l’évolution de l’épidémie a ensuite justifié.

De nombreux parlementaires en première lecture comme la Cour des comptes ont fait part de leurs interrogations quant au niveau des reports de crédits de 2020 vers 2021 – c’est d’ailleurs l’un des premiers arguments que vous aviez opposés. Comme je l’avais alors souligné, notre objectif a toujours été le même : garantir le paiement des aides d’urgence aux entreprises, à travers le fonds de solidarité et l’activité partielle. Nous avons toujours prévu des crédits d’un montant suffisant pour répondre aux hypothèses les plus pessimistes.

Ainsi, nous avions prévu, dans le quatrième projet de loi de finances rectificative, des crédits calibrés pour un confinement de deux mois – il n’a duré qu’un mois – et retenu l’hypothèse d’une chute d’activité de 20 % sur deux mois – elle n’a été que de 11 % durant le confinement de novembre et de 6 % après les mesures de restriction de décembre.

Au-delà de la question du financement, le résultat confirme que l’État a fait les bons choix : ces dispositifs ont permis de préserver le pouvoir d’achat des Français, qui a globalement augmenté de 0,4 % en 2020, malgré une baisse de production d’environ 8 % ; l’aide de l’État a permis de préserver les entreprises, en particulier les TPE et les PME ; la capacité de financement des collectivités locales a été préservée. Ces dernières, malgré les difficultés rencontrées, ont le plus souvent affiché une bonne santé financière à la fin de l’année 2020 : leur besoin de financement était de 1,2 milliard d’euros, contre zéro en 2019 – dans le même temps, le besoin de financement cumulé de l’État et de la sécurité sociale s’est élevé à 137 milliards d’euros.

Si l’exécution budgétaire a permis de soutenir l’économie en 2020, c’est aussi parce que nous avions reconstitué des marges de manœuvre budgétaires depuis 2017. Je me dois de rappeler que le déficit public de 2019 a été le plus faible depuis 2001, retombant à 2,2 % du PIB, hors CICE. De même, le ratio de dette publique a diminué en 2018, pour la première fois depuis 2007. Enfin, le Gouvernement a tenu ses engagements, puisque le taux de prélèvements obligatoires a baissé de 1,3 point entre 2017 et 2019.

Aujourd’hui, le financement des dispositifs de crise nous place face à un défi de taille : le déficit public s’est élevé à 9,2 % et le déficit budgétaire de l’État à 178,2 milliards d’euros, soit presque deux fois plus que le déficit prévu en loi de finances initiale pour 2020. Ces déficits s’expliquent, en ce qui concerne l’État, à la fois par des dépenses de 44,1 milliards d’euros, dans le budget général, consacrées au soutien à l’économie et aux Français pendant la crise et par une chute de 37,1 milliards d’euros des recettes fiscales en 2020.

Au-delà du seul budget de l’État, nos finances publiques, dans leur ensemble, doivent retrouver le cap de la soutenabilité. Pour ce faire, nous nous appuierons sur quatre axes : la croissance, que nous maximiserons par le plan de relance ; la sortie progressive des dispositifs d’urgence, si la situation sanitaire le permet ; le sérieux dans la gestion des dépenses ordinaires ; la modernisation du cadre de gouvernance des finances publiques.

En ce qui concerne ce dernier axe, l’Assemblée nationale a adopté, lundi soir, deux propositions de loi organique respectivement portées par M. Mesnier pour les finances sociales et par MM. Woerth et Saint-Martin pour les finances de l’État. Nous aurons l’occasion d’en débattre, et nos travaux seront nourris par d’autres initiatives, notamment celle de M. Jean-Marie Vanlerenberghe et de la commission des affaires sociales sur les lois organiques pour le financement de la sécurité sociale.

Voilà, mesdames, messieurs les sénateurs, ce que je souhaitais rappeler en ouverture de ce débat. Je souhaite bien évidemment que cette nouvelle lecture vous donne l’occasion d’adopter ce projet de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – M. Pierre Louault applaudit également.)

Mme le président. Mes chers collègues, je vous rappelle que le port du masque est obligatoire dans l’hémicycle et qu’il doit recouvrir le nez. Je comprends les désagréments que cela peut entraîner, mais songez aux soignants qui le supportent toute la journée. Merci de bien vouloir respecter cette règle !

La parole est à M. le rapporteur général.

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues – avec le masque sur le nez (Sourires et applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains) –, le projet de loi de règlement, tel que voté par l’Assemblée nationale le 16 juin 2021, en première lecture, et transmis au Sénat, comportait neuf articles, dont l’article liminaire. Le Sénat décidait, le 15 juillet dernier, de rejeter le texte.

Ce projet de loi clôt budgétairement une année 2020 exceptionnelle à bien des égards, compte tenu bien évidemment de l’épidémie de covid-19 et de ses conséquences sur notre économie et sur l’économie mondiale. L’économie française a ainsi subi un choc historique, avec une récession de 7,8 % du PIB, plus forte que dans la zone euro et surtout beaucoup plus élevée que notre voisin et partenaire, l’Allemagne.

Par ailleurs, cette année d’exécution exceptionnelle s’accompagne d’une dégradation d’une ampleur inédite de nos comptes publics, avec un déficit budgétaire de l’État d’un niveau tout aussi inédit de plus de 178 milliards d’euros.

Chacun le sait, cette crise a rendu urgente et vitale la mise en œuvre de mesures de soutien tant aux entreprises qu’aux ménages. Ainsi, plus de 40 milliards d’euros ont été dépensés sur la seule mission « Plan d’urgence face à la crise sanitaire », qui n’existait bien évidemment pas en loi de finances initiale.

Le Sénat a voté ces mesures de soutien, qu’il s’agisse du fonds de solidarité, de l’activité partielle ou des PGE. Les effets de la crise ont ainsi été absorbés à plus de 80 % par les administrations publiques, ce qui a permis de protéger le revenu des ménages. Cependant, ces résultats auraient pu être meilleurs : plus de 20 % des pertes de revenus des entreprises sont restées à leur charge. Les administrations françaises n’ont pas été en mesure de les absorber dans des proportions équivalentes à l’Allemagne ou à l’ensemble de la zone euro. Pour quelles raisons ?

La principale raison, à mon sens, correspond évidemment au manque de marges de manœuvre budgétaires dont disposait le Gouvernement. Il a ainsi été contraint à moins intervenir sur fonds publics, en recourant, par exemple, davantage aux prêts garantis par l’État qu’à des subventions directes.

Il est regrettable de subir ainsi le choix du Gouvernement de reporter systématiquement le redressement des comptes publics au cours des dernières années, alors que l’on bénéficiait à la fois d’une croissance supérieure à son potentiel et d’un fort dynamisme des prélèvements obligatoires. Cette situation nous a indéniablement fragilisés lorsque la crise est survenue : nous payons maintenant les conséquences des choix pris par le Gouvernement, qui n’a pas su – ou voulu – créer les conditions qui nous auraient permis de disposer de marges de manœuvre budgétaires supplémentaires, qui nous auraient été bien utiles.

Nonobstant ce regret, nous avons voté les quatre projets de loi de finances rectificative pour 2020, obtenant au passage d’importantes évolutions et enrichissant les textes d’apports parfois significatifs. Nous avons en particulier adopté les mesures de soutien qui étaient essentielles pour maintenir les entreprises à flot et protéger les ménages.

Toutefois, nous ne partagions pas tous les choix du Gouvernement ayant guidé la construction de la loi de finances initiale pour 2020. Outre les critiques déjà énoncées sur la politique budgétaire globale, à savoir l’absence d’assainissement des finances publiques et de maîtrise de la dépense publique avant la crise, nous nous étions aussi opposés à certaines mesures et avions regretté de n’avoir pas été entendus sur le schéma de financement pour les collectivités territoriales au titre de la suppression de la taxe d’habitation.

Par ailleurs, l’objectif du Gouvernement de réduction de 50 000 emplois au sein de l’État et de ses opérateurs sur le quinquennat apparaît totalement abandonné et désormais inatteignable.

Enfin, du point de vue du respect de l’autorisation parlementaire, si l’exécution des crédits sur l’année 2020 ne pose pas de difficulté particulière, les opérations de reports massifs en fin d’année vers 2021 me poussent à exprimer ma contestation : 36 milliards d’euros ont ainsi été reportés, ce qui est tout à fait considérable. Par ailleurs, la destination initialement prévue n’a pas nécessairement été respectée. Je le redis, cette pratique nuit au contrôle parlementaire et constitue une entorse à la sincérité des lois de finances.

Le 15 juillet dernier, la commission mixte paritaire a constaté qu’elle ne pouvait parvenir à un accord et a conclu à l’échec de ses travaux. Sans surprise, hier, l’Assemblée nationale a adopté le texte en nouvelle lecture dans des termes identiques à ses travaux de première lecture. Par cohérence avec le vote du Sénat en première lecture, la commission propose à notre assemblée de ne pas adopter le projet de loi de règlement et d’approbation des comptes de l’année 2020 et de n’adopter, en conséquence, aucun des articles du projet de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)