M. Laurent Burgoa. N’importe quoi ! Toujours la même rengaine…

Mme Raymonde Poncet Monge. Saluons toutefois la déconjugalisation de l’AAH, qui a été obtenue aux forceps après des années de luttes militantes et parlementaires.

Dans la mesure où il manque sa cible, ne contribuant pas à protéger les plus vulnérables et n’engageant pas l’indispensable rattrapage de notre retard en termes de transition énergétique, retard qui conduit de fait à des reculs, le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires votera contre ce projet de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST. – Mme Esther Benbassa et M. Joël Bigot applaudissent également.)

M. le président. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour le groupe communiste républicain citoyen et écologiste. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE.)

Mme Cathy Apourceau-Poly. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, sans surprise, les députés de la majorité gouvernementale et les sénateurs de la majorité sénatoriale sont parvenus à se mettre d’accord en commission mixte paritaire sur une version commune du projet de loi pour la protection du pouvoir d’achat.

Nous avions assisté au Sénat à l’annonce des fiançailles entre la droite et le Gouvernement ; nous pouvons maintenant féliciter les heureux mariés qui se sont dit « oui » ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE, ainsi que sur des travées du groupe SER. – Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)

Le panier de la mariée est pourtant amer ! Dans sa version initiale, le projet de loi prévoyait des mesures de protection du pouvoir d’achat largement insuffisantes.

Ainsi, le bouclier social du Gouvernement inclut la revalorisation de 4 % des prestations sociales et du point d’indice des fonctionnaires, ainsi que la revalorisation de 1,1 % des retraites de base, alors que l’inflation s’élève à 6 %. En réalité, il ne s’agit là que de mesures de rattrapage partielles de la perte de pouvoir d’achat des Françaises et des Français.

Le Gouvernement préfère encourager le versement de primes temporaires dans les entreprises, plutôt que d’inciter les patrons à augmenter les salaires. Avec ces primes, il donne aux salariés d’une main ce qu’il reprend de l’autre au niveau des pensions de retraite.

Au Sénat, la droite a chargé la dot, en votant de nouveaux reculs sociaux et en ajoutant à la liste des mesures de pouvoir d’achat la défiscalisation des heures supplémentaires et la suppression des cotisations sociales des employeurs sur les heures supplémentaires. Aussi, la situation des Français s’est aggravée.

Pour résumer, grâce au Gouvernement, nos concitoyens ne perdront que 2 % de pouvoir d’achat en 2022, tandis que, avec la droite sénatoriale, ils devront travailler davantage pour gagner autant qu’en 2021 ! Les efforts sont toujours demandés aux salariés. En revanche, les entreprises et nos compatriotes les plus riches, qui ont profité de la crise, ne paieront pas un euro supplémentaire…

M. Laurent Burgoa. Oh là là !

Mme Cathy Apourceau-Poly. Les efforts de la droite et du Gouvernement pour éviter une taxation des superprofits sont particulièrement évocateurs.

La droite et le Gouvernement refusent de mettre les Français les plus riches à contribution et privent la sécurité sociale et l’État de dizaines de millions d’euros de recettes. Ces pertes de recettes auront des conséquences dans nos territoires.

Alors que nous faisons déjà face à la fermeture des trésoreries, des centres des finances publiques, des accueils des caisses d’allocations familiales (CAF), des commissariats de police et des brigades de gendarmerie nationale, vous allez aggraver la situation. Le désengagement de l’État au détriment des collectivités territoriales, ça suffit ! À un moment donné, il faut dire stop aux politiques d’austérité et aux logiques libérales mortifères !

Pour notre part, nous pensons qu’une autre politique est possible. Face à l’inflation et aux spéculations des marchés, nous proposons de bloquer temporairement les prix et, pour ne pas pénaliser nos agriculteurs, d’appliquer un coefficient multiplicateur à l’ensemble des produits alimentaires, afin de tenir compte du prix de vente des produits agricoles.

Durant les débats, nous avons également proposé une revalorisation du SMIC à 1 500 euros, la revalorisation de 10 % du point d’indice des fonctionnaires…

Mme Cathy Apourceau-Poly. … et la convocation d’une conférence générale sur les salaires par entreprise et par branche collective, pour augmenter les salaires et donner immédiatement du pouvoir d’achat aux travailleurs. (Exclamations sur les travées des groupes Les Républicains, UC et RDPI.)

Mme Cathy Apourceau-Poly. J’ai bien compris que ce que nous proposons ne vous faisait pas plaisir, chers collègues ! (Sourires sur les mêmes travées.)

Pour les retraités, nous proposons d’indexer les pensions sur l’évolution du salaire moyen, de supprimer la hausse de la CSG décidée en 2018 et de porter à 1 041 euros le montant de l’allocation de solidarité aux personnes âgées.

Pour les jeunes, autres grands oubliés de la politique du Gouvernement, nous proposons de créer une garantie d’autonomie : elle concernerait les 18-25 ans et son montant atteindrait 1 102 euros.

Enfin, pour les collectivités locales, nous demandons la mise en place d’un bouclier énergie pour compenser la hausse de leurs dépenses et la revalorisation du point d’indice des fonctionnaires territoriaux.

Ces mesures sont possibles, dès lors que l’on accepte de taxer les superprofits des entreprises pétrolières et gazières (Exclamations ironiques sur les travées des groupes Les Républicains et RDPI.),…

M. Martin Lévrier. Ben voyons !

Mme Cathy Apourceau-Poly. … que l’on rétablit l’impôt de solidarité sur la fortune ou les cotisations perdues au titre du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE), qui ampute le budget de l’État de 20 milliards d’euros par an. (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE, SER et GEST. – Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)

En conclusion, le Gouvernement et la droite ont profité d’un texte sur le pouvoir d’achat pour remettre en cause les droits sociaux et refuser de mettre à contribution les plus riches d’entre nous, en tapant toujours sur nos concitoyens les plus fragiles.

Pour toutes ces raisons, le groupe communiste républicain citoyen et écologiste votera contre ce projet de loi. (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE, SER et GEST. – Exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à Mme Élisabeth Doineau, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

Mme Élisabeth Doineau. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je vous avertis que mon intervention risque de vous paraître un peu fade en comparaison de celle de notre collègue Cathy Apourceau-Poly… (Sourires.) Mais après tout, chacun est en droit de défendre ses convictions, l’essentiel étant que les uns et les autres se respectent.

Nous examinons cette après-midi les conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat.

S’agissant d’un enjeu majeur pour les Français, je salue le compromis obtenu par nos deux chambres. Je remercie tout particulièrement Mme le rapporteur, Frédérique Puissat, avec qui j’ai l’habitude de travailler de manière fructueuse, ainsi que l’ensemble des rapporteurs pour avis, qui ont livré, avec leurs homologues députés, un très fructueux travail aboutissant à ces conclusions.

L’enjeu était primordial, puisque nous connaissons actuellement la plus forte inflation depuis 1985. Si nous pouvons nous réjouir de la réaction rapide du Gouvernement, nous devons toutefois souligner que peu de mesures figurant dans ce projet de loi auront des incidences directes sur le pouvoir d’achat des Français.

Néanmoins, ne nous trompons pas, l’objectif de ce texte était clairement exposé dans son intitulé : il visait à protéger ce pouvoir d’achat, et non à l’améliorer ; certains pourront le regretter, mais personne ne pourra dire que rien n’a été fait.

C’est singulièrement l’article 5 qui produira des effets directs, puisqu’il prévoit une réévaluation de 4 % de l’ensemble des prestations, allocations ou aides individuelles, revalorisées annuellement. Le coût estimé de cette opération est de l’ordre de 4,6 milliards d’euros pour la sécurité sociale – je tiens à le préciser – et de 2 milliards d’euros pour l’État et les collectivités territoriales en 2022 et en 2023.

Le travail de la commission mixte paritaire sur l’article 1er est à saluer. Nous en sommes revenus à la version de l’Assemblée nationale, tout en la complétant par certains apports du Sénat, tels que la limitation à quatre versements dans l’année de la prime de partage de la valeur ou l’avancée de son versement au 1er juillet.

Il prévoit aussi le triplement des plafonds de la PEPA, ouvre la possibilité de verser la prime aux employés rémunérés au-delà de 3 SMIC et pérennise le dispositif. En effet, la prime de partage de la valeur ne doit se substituer ni à l’intéressement ni à une part de salaire – nous y serons attentifs.

L’article 1er bis, inséré dans le texte par le Sénat, a également été conservé, mais a vu sa portée limitée aux entreprises de 20 à 250 salariés.

Les articles 2, 3 et 3 bis n’appellent pas d’observations particulières.

Concernant l’article 4, un désaccord persistait entre la commission et le Gouvernement : nous attendions les explications de chacun pour nous positionner en première lecture et avons finalement suivi l’avis de notre commission. La commission mixte paritaire a réintroduit l’article 4 : nous en prenons acte.

L’article 4 bis, un apport du Sénat en première lecture, a été conservé : il ouvre la voie à une procédure accélérée d’extension des accords salariaux : c’est une très bonne chose.

Bien que nous ayons adopté l’article conforme, nous constatons à notre grande satisfaction que l’AAH sera bientôt déconjugalisée. Cette lutte de longue date trouve enfin une issue favorable. Nous pouvons nous en réjouir pour les intéressés. Je salue la détermination des associations qui se mobilisent à ce sujet depuis longtemps, ainsi que les parlementaires qui ont relayé ces attentes – je me permets de saluer plus particulièrement Philippe Mouiller, dont chacun connaît l’implication dans ce combat.

Concernant le champ des affaires économiques et du développement durable, la philosophie du texte est de protéger les Français, notamment en préparant notre pays à l’hiver, afin de limiter la hausse des prix de l’énergie, ou encore en leur permettant de se défaire de contrats aussi facilement qu’ils peuvent les souscrire.

Nous pouvons nous féliciter du plafonnement de droit commun de l’indexation des loyers des particuliers, ainsi que du plafonnement de leur hausse à 2,5 % pour les collectivités ultramarines et à 1,5 % pour la collectivité de Corse.

En revanche, le groupe Union Centriste regrette que son amendement visant à plafonner cette hausse des loyers à 1,5 % pour les 17 000 communes placées en zone de revitalisation rurale (ZRR) n’ait pas été adopté. C’est pourtant un enjeu décisif pour empêcher une explosion du coût de la vie dans les zonez rurales. Il serait bon que le Gouvernement explore avec nous un certain nombre de dispositions permettant de traiter ce sujet d’importance.

Concernant le dispositif du plafonnement à 3,5 % des loyers commerciaux, introduit dans le texte à la suite de l’adoption d’un amendement déposé par le groupe RDPI, nous en partagions l’objectif, mais proposions une rédaction un peu différente. Quoi qu’il en soit, nous en saluons l’adoption.

Mme Élisabeth Doineau. Pour ce qui concerne notre souveraineté énergétique, les mesures adoptées vont dans le bon sens au regard de l’urgence qui est la nôtre, mais la question de notre indépendance reste entière, et nous devons la régler rapidement.

En conclusion, nous voterons le texte établi par la commission mixte paritaire, tout en regrettant les délais d’examen réduits qui nous ont été imposés. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et RDPI, ainsi que des travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à Mme Nathalie Delattre, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)

Mme Nathalie Delattre. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, à l’issue de ce marathon législatif estival, je ne puis que me réjouir, à mon tour, de l’accord trouvé lundi soir en commission mixte paritaire sur ce projet de loi portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat.

Comme toujours, les débats au Sénat ont été riches et de bonne tenue, malgré des délais de transmission très courts, et même trop courts, madame la ministre.

Le groupe RDSE a apporté sa pierre à l’édifice, avec l’adoption de mon amendement visant à limiter à 3,5 % la variation de l’indice des loyers commerciaux (ILC). Aussi, je me félicite de son maintien dans le texte issu de la CMP.

Je salue, par ailleurs, des mesures comme la revalorisation anticipée de 4 % des prestations sociales, ainsi que la prime de pouvoir d’achat – désormais appelée prime de partage de la valeur –, aux nombreuses possibilités d’attribution, le vote conforme sur la déconjugalisation de l’AAH, que notre groupe soutenait depuis longtemps, ou encore le déblocage de l’épargne salariale.

Un compromis a été trouvé à l’article 2, afin de permettre aux jeunes agriculteurs – vous savez combien cette filière m’est chère – d’exercer un droit d’option entre la réduction de leur taux de cotisations maladie-maternité et l’exonération partielle de cotisations. Cela contribuera à leur donner plus de souplesse s’agissant de la protection de leur pouvoir d’achat, alors qu’ils souffrent tant des crises qui se succèdent sans fin.

Ce projet de loi prévoit aussi d’encourager la diffusion de l’intéressement dans les petites et moyennes entreprises (PME). Je salue l’aboutissement de cette idée déjà défendue par mon groupe, lors de la discussion de la loi relative à la croissance et la transformation des entreprises, dite Pacte, en 2019, en particulier par mon ancien collègue Jean-Marc Gabouty.

La CMP a retenu une position d’équilibre concernant la réutilisation des huiles alimentaires usagées : l’emploi de ce type de produit en l’état, comme substitut aux huiles de moteurs, n’apparaît pas souhaitable.

Je salue, en outre, les dispositions renforçant la protection des consommateurs face aux pratiques commerciales abusives et aux coûts fixes suscités par la souscription de certains contrats d’abonnement avec engagement. Elles s’inscrivent dans la continuité des initiatives parlementaires prises ces dernières années concernant la lutte contre le démarchage abusif.

Enfin, le projet de loi portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat comporte tout un volet de dispositions relatives à la protection de notre souveraineté énergétique, sur le détail desquelles le temps qui m’est imparti dans cette discussion ne me permet pas de revenir.

Retenons que la France et les Français seront mieux armés pour affronter les tensions s’agissant de l’approvisionnement énergétique, en particulier l’hiver prochain. Ces mesures prises dans l’urgence ne sauraient toutefois nous dispenser d’une politique énergétique de long terme, soucieuse de garantir à la fois des prix raisonnables aux usagers et un approvisionnement sécurisé et plus en adéquation avec les objectifs de lutte contre le changement climatique.

J’ai quelques regrets malgré tout : mes propositions visant à faire bénéficier les stagiaires de la prime de partage de la valeur ou encore à la majorer pour les personnes en situation d’insertion n’ont pas été adoptées. Je pense aussi à mon amendement visant à un meilleur fléchage de l’allocation de rentrée scolaire, notamment en direction des coopératives scolaires, malheureusement déclaré irrecevable, comme de nombreux autres amendements émanant de tous les groupes. Plusieurs d’entre nous souhaitaient également une augmentation du salaire net des personnes les plus précaires qui travaillent.

Cependant, malgré ces réserves, les membres du groupe RDSE voteront pour l’adoption des conclusions de la commission mixte paritaire. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)

M. le président. Conformément à l’article 42, alinéa 12, du règlement, je mets aux voix, dans la rédaction résultant du texte élaboré par la commission mixte paritaire, modifié par les amendements du Gouvernement, l’ensemble du projet de loi portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 152 :

Nombre de votants 344
Nombre de suffrages exprimés 272
Pour l’adoption 245
Contre 27

Le Sénat a adopté définitivement. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)

Explications de vote sur l'ensemble (début)
Dossier législatif : projet de loi portant mesures d'urgence pour la protection du pouvoir d'achat
 

10

Ordre du jour

M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à demain, jeudi 4 août 2022 :

À dix-sept heures et, éventuellement, le soir :

Sous réserve de leur dépôt, conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi de finances rectificative pour 2022.

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

(La séance est levée à dix-huit heures trente-cinq.)

Pour le Directeur des comptes rendus du Sénat,

le Chef de publication

FRANÇOIS WICKER