SÉMINAIRE "AGGLOMERATIONS : LES ENJEUX DU NOUVEAU
MANDAT"
(jeudi 28
juin 2001, au Sénat)
Monsieur
le Président,
Mesdames et messieurs les élus locaux,
Mesdames, Messieurs,
Merci, cher Marc CENSI, de me donner le plaisir de m'exprimer devant vous
aujourd'hui à l'occasion de votre second séminaire
« Agglomérations : les enjeux du nouveau
mandat ».
Merci au dynamique président de l'Assemblée des Districts et
Communautés de France d'avoir pris l'initiative d'organiser de telles
rencontres car il fait là oeuvre utile.
En ouverture de vos travaux, je voudrai simplement rappeler l'attachement du
Sénat à l'intercommunalité et ouvrir quelques pistes de
réflexion concernant son avenir.
D'emblée, je voudrais rappeler que le Sénat a voté la loi
du 12 juillet 1999 dite « loi Chevènement ». Nous ne
pouvons que nous en réjouir. Tout au long de l'examen de ce texte, un
esprit de dialogue à prévalu, tant avec le gouvernement qu'avec
l'Assemblée nationale. Assemblée avec laquelle nous sommes
parvenus à un accord, au terme d'une commission mixte paritaire de plus
de 17 heures ! Un accord qui a fait droit aux principales exigences,
institutionnelles et financières, du Sénat.
Ainsi, le risque d'une intercommunalité à deux vitesses,
que comportait initialement le texte du gouvernement, a été
écarté.
Le Sénat est en effet parvenu à rééquilibrer un
texte, à l'origine davantage centré sur les zones urbaines que
sur le monde rural. Je pense notamment à la DGF bonifiée qui
bénéficiera donc aussi aux communautés de communes et pas
seulement aux communautés d'agglomération.
Au total, en tant que président du Sénat, je ne peux que me
réjouir de l'incontestable succès de la relance de
l'intercommunalité d'autant que le Sénat y a très
largement contribué.
Dans un pays fortement attaché à ses structures séculaires
que sont les communes, les élus locaux ont compris que la meilleure
réponse consistait à unir leur forces. Car seul, on n'est
rien ou si peu !
C'est aussi cela l'alchimie de l'intercommunalité :
dépasser les clivages territoriaux pour unir son destin autour de
projets communs, choisis librement.
Pour autant, il ne s'agit pas de renier ses origines ou ses
spécificités.
L'intercommunalité ne sonne pas le glas des communes. Au
contraire, je crois qu'elle garantit leur avenir !
Mais, pour réussir pleinement, l'intercommunalité ne peut
être un leurre. Je crois donc davantage à une
« intercommunalité de projet » qu'à
une « intercommunalité de papier ». Et bien
sur, le principe du volontariat doit toujours prévaloir.
En tant que Président du Sénat, je ferai simplement trois
remarques :
Les deux premières concernent les finances intercommunales, la
troisième l'évolution institutionnelle des
intercommunalités.
-S'agissant tout d'abord de la fiscalité, je veux
réaffirmer, mon attachement au régime de taux de taxe
professionnelle unique sur le territoire intercommunal, qui, seul, peut
neutraliser certains égoïsmes fiscaux, et favoriser un
développement économique plus harmonieux et plus solidaire.
-S'agissant ensuite des dotations financières de l'Etat, je crois
que c'est l'ensemble du système qui est à revoir.
L'incontestable succès de la loi Chevènement est en train de
faire imploser le mode de financement des collectivités locales
et de leurs groupements. Ainsi, pour la première fois en 2001, la part
de la DGF intercommunale (7 milliards de francs) sera supérieure
à celle des dotations de péréquation (6 milliards de
francs).
Sauf à considérer que l'intercommunalité constitue en soi
une forme de péréquation, cette évolution est
l'illustration d'un système à bout de souffle qu'il faut
rénover pour assurer sa pérennité. Comptez donc sur moi
pour appeler l'attention du gouvernement sur ce sujet !
-S'agissant enfin de la place de l'intercommunalité au sein de
notre édifice institutionnel, je crois que l'on ne peut pas faire
l'économie d'un débat d'ensemble. Vous le savez, la
définition d'une collectivité territoriale de plein exercice
repose sur sa faculté à lever l'impôt, sur l'exercice de
compétences... et sur l'élection de ses représentants au
suffrage universel direct.
Manifestement, les structures intercommunales remplissent déjà
les deux premières conditions. Reste donc la troisième.
Car, dès lors que les groupements de communes assument des
compétences toujours plus nombreuses et qu'ils lèvent
l'impôt, peut-on éternellement faire l'impasse sur
l'évolution de leur mode de représentation ?
A titre personnel, je ne le crois pas.
L'Assemblée nationale vient, à ce sujet, d'adopter un amendement,
dans le cadre du projet de loi « Démocratie de
proximité » prévoyant l'élection au suffrage
universel direct des structures intercommunales dès 2007.
Sur le fond, je n'y suis pas hostile.
Néanmoins, il faut se garder d'une décision trop
hâtive qui serait de nature à freiner l'actuel
développement de l'intercommunalité. Pour moi,
l'élection au suffrage universel des conseils communautaires doit
venir parachever la « révolution
intercommunale » en cours.
Aussi, me semble-t-il raisonnable de se donner rendez-vous, par exemple en
2005, pour faire le bilan de l'intercommunalité et de décider,
alors, de l'opportunité et, le cas échéant, des
modalités d'une élection directe en 2007.
Prendre une telle décision dès aujourd'hui serait, je
l'affirme à nouveau clairement, prématuré. Cela
reviendrait à faire courir un risque très sérieux à
la poursuite du développement de l'intercommunalité en France.
Comptez sur moi, en tant que Président du Sénat,
représentant constitutionnel des collectivités locales, pour
accompagner et anticiper ces grandes évolutions qui conditionnent
l'avenir de notre pays.
Je souhaite plein succès à vos travaux et vous souhaite la
bienvenue au Sénat.