OUVERTURE DES XXe
JOURNEES NATIONALES DE LA MER
(jeudi 8 février
2001, au Sénat)
Monsieur le
président,
Mesdames, messieurs les parlementaires,
Mesdames, messieurs,
Je voudrais tout d'abord vous souhaiter la bienvenue pour ces XXe Journées
nationales de
la Mer que le Sénat est heureux d'accueillir.
Je voudrais ensuite vous féliciter du choix du thème que vous avez retenu
pour vos
travaux : " Le Pavillon national ". Bien sûr, il
ne m'appartient
pas d'anticiper sur les tables rondes et les conclusions que vous en
tirerez, mais je
voudrais, avant que vous n'engagiez vos réflexions, faire quelques
observations et poser
quelques questions.
Lors de deux récentes catastrophes maritimes -je veux parler des naufrages
de l'Erika et
du Ievoli Sun- la question du pavillon a notamment été soulevée comme
facteur de
sécurité ou d'insécurité. L'excellent rapport de la Mission d'information
du Sénat
présidée par Madame Anne Heinis et dont le rapporteur est mon ami Henri de
Richemont,
qui animera d'ailleurs l'une des tables rondes de ce matin, analyse les
données de cette
" crise du pavillon français ". Pour ma part, je me
contenterai
d'observer que s'agissant des pavillons de complaisance, largement mis en
cause à
l'occasion de ces deux catastrophes, il convient de distinguer ceux qui sont
" complaisants " sur la sécurité et laissent circuler
des navires
" sous-normes " et ceux qui, selon la traduction
anglaise de
complaisance, sont des pavillons de facilité fiscale ou juridique mais dont
les règles
de sécurité sont strictes. C'est le cas du pavillon du Liberia, par
exemple. Si le
pavillon de complaisance n'est pas nécessairement un risque pour la
sécurité maritime,
faut-il alors défendre le pavillon national, et en ce qui nous concerne, le
pavillon
français ?
Ma réponse, vous vous en doutez, est oui. Pour des raisons de sécurité et
d'indépendance, tout d'abord. Pour des raisons d'emploi ensuite, touchant
tant à la
filière maritime qu'à la filière portuaire : qu'il me suffise de
rappeler que le
transport maritime mondial a connu un taux de croissance annuel moyen de 5
% en volume
depuis dix ans. Enfin, pour des raisons tenant à la qualité de la formation
des
personnels d'équipage français qu'il faut préserver.
Malgré toutes ces bonnes raisons, le pavillon français est en crise :
en 1945 la
France était la quatrième puissance maritime mondiale ; elle occupe
aujourd'hui le
26e rang ! Ce recul s'explique tant pas la
décolonisation que par
les crises pétrolières et, de manière plus structurelle, par le coût des
" conditions de travail ", entendues au sens large.
Certes, des mesures ont été prises pour tenter de répondre à cette crise
dont vous
ferez sans doute tout à l'heure le bilan : je veux parler des
dispositifs de
remboursement de la part maritime de la taxe professionnelle et de
certaines charges
sociales et surtout du GIE fiscal qui a remplacé le dispositif quirataire.
Aujourd'hui, il me semble nécessaire d'explorer d'autres voies, en
s'inspirant notamment
des politiques conduites par nos voisins européens.
Sans doute faudrait-il, en premier lieu, faire du pavillon Kerguelen, un
véritable
" pavillon bis ". Je sais que cela pose un problème
avec les
syndicats. Mais ce n'est pas une raison pour ne pas en parler.
Ensuite faudrait-il aussi réfléchir à l'instauration d'une taxation
forfaitaire au
tonnage comme cela existe dans certains pays européens et est à l'étude
dans la
plupart. Mais je ne doute pas qu'au cours des tables rondes qui vont suivre
vous
évoquerez toutes ces questions.
Avant de vous laisser à vos travaux, je voudrais soulever une dernière
question quitte
à paraître un peu iconoclaste : il me semble en effet que s'il faut à
l'évidence
moderniser le régime du pavillon français, celui-ci n'est pas seul en cause
dans le
recul de notre marine marchande. En effet, la flotte contrôlée par des
intérêts
français a diminué d'un quart en quinze ans. Si seul le coût du pavillon
français
était en cause, on aurait dû voir un déplacement des immatriculations vers
des
pavillons tiers, ce qui n'a pas été le cas. Messieurs les armateurs, c'est
là une
observation que je tenais aussi à faire.
Et maintenant bon travail !