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ASSEMBLEE GENERALE DE L'ASSOCIATION DES MAIRES DU NORD

(jeudi 1er février 2001, à Lille)


Monsieur le Premier Ministre,

Monsieur le Président,

Monsieur le Président du Conseil général,

Madame et messieurs les sénateurs,

Monsieur le Préfet,

Mesdames, Messieurs les maires,

Chers amis,

Comment vous le cacher, c'est pour moi un grand plaisir de me trouver ici dans le Nord, dans un de ces départements de France dont l'histoire et la chaleur de l'hospitalité ne peuvent me laisser insensible.

C'est un plaisir de retrouver ici mes collègues du Sénat. Je le leur ai déjà dit hier soir, mais je veux le redire ici devant vous : leurs qualités humaines et leur engagement parlementaire honorent notre assemblée. Je tiens aussi à remercier M. Jean-Pierre DECOOL, votre dynamique président, d'avoir pris l'initiative de me convier à votre traditionnelle assemblée générale et d'avoir su vous mobiliser afin de pouvoir dialoguer tous ensemble. Merci à M. le Préfet de nous recevoir ici dans les salons de la préfecture.

Aujourd'hui, je veux vous dire combien je suis ému d'être parmi vous pour cette ultime rencontre avant le renouvellement de mars prochain. Avant toute chose, je veux vous rappeler le sens de ma présence aujourd'hui. Il s'agit pour moi de vous écouter et de débattre dans la sérénité et le respect de l'autre. Cet esprit républicain est pour moi essentiel. C'est celui qui permet de dépasser les clivages bien souvent stériles pour se retrouver, ensemble, sur l'essentiel. C'est cet esprit qui nous a tous animés en septembre 1999 lorsque j'ai eu l'honneur d'ouvrir, ici à Lille avec mon ami Pierre MAUROY, les Etats généraux des élus locaux de Nord-Pas-de-Calais.

C'est celui qui nous anime chaque jour au Sénat lorsque ensemble nous agissons pour que la décentralisation, qui vous doit tant cher Pierre, soit prolongée et définitivement ancrée dans le troisième millénaire.

Et pour moi, après m'être rendu devant les maires de quelques soixante départements de France, je veux vous dire tout simplement que la décentralisation n'est ni de droite ou de gauche !

C'est tout simplement une inclinaison, une responsabilité collective, un projet de société passionnant dans lequel aujourd'hui une large majorité des français se reconnaît et se retrouve.

Ce qui motive mon action, c'est la nécessaire relance de cette réforme bénéfique afin d'améliorer les conditions d'exercice des mandats et de rendre les Français égaux en matière d'accession aux fonctions électives. Vous le comprenez, mon action n'est pas un combat politicien. C'est une ambition pour notre pays, pour cette " République territoriale " dans laquelle l'Etat, les politiques et les citoyens, chacun à leur place, seraient enfin réconciliés.

Mon ambition première a donc été de redonner du " tonus " au véritable " socle humain " de la décentralisation, c'est-à-dire à vous les élus locaux. Serviteurs infatigables de l'intérêt général, vous êtes, Mesdames et Messieurs les maires, bien souvent les " premiers recours " et les " derniers secours " d'une société toujours plus individualiste.

Toujours prêts à vous mettre à la disposition de vos concitoyens, vous ne ménagez pas votre peine, ni votre temps de loisirs, ou votre vie familiale et professionnelle pour apporter des solutions à leurs difficultés et améliorer leur vie quotidienne.

Cette abnégation vous honore, mais vous n'êtes pas toujours, ou si peu, " payés de retour ".

C'est pourquoi, j'ai souhaité vous rendre l'hommage que vous méritiez en organisant pour tous la Fête de la Fédération, le 14 juillet dernier, afin que nous puissions communier ensemble et célébrer les vertus de la démocratie de proximité. (près de 400 maires et conjoints du Nord étaient présents le 14 juillet 2000)

Aujourd'hui, je veux vous délivrer un message d'espoir sur certains des sujets qui vous préoccupent car nous ne pouvons laisser sans réponses les légitimes attentes des plus fidèles serviteurs de la République.

Au premier rang de ces inquiétudes, la responsabilité pénale. Rappelez-vous, nous en avions très largement débattu en septembre 1999 à l'occasion des Etats généraux des élus locaux de Nord-Pas-de-Calais.

J'avais alors pris l'engagement devant vous de faire aboutir une réforme législative afin de lutter contre les effets pervers pour notre démocratie d'une " judiciarisation " excessive d'une société dont les maires étaient en passe de devenir les boucs émissaires trop faciles. Où en sommes-nous dix-huit mois plus tard ?

Cette prise de conscience collective m'a conduit à " faire campagne ", avec mes collègues sénateurs, pour que les choses " changent ".

A l'époque, c'est vrai, les esprits étaient, reconnaissons-le, encore loin d'être mûrs. Mais, c'est désormais chose faite. Cet engagement est devenu, depuis le 10 juillet 2000, une loi de la République.

Je tiens, à cette occasion, à rendre hommage à l'esprit de responsabilité, dont le gouvernement a su faire preuve en surmontant ses réticences initiales, pour entendre la voix des élus locaux dont je m'étais, avec le Sénat, fait le porte-parole.

Nous avons vécu là un de ces moments, trop rares, où par delà nos différences les exigences de l'intérêt général ont primé pour le bien de tous.

Au total, le résultat de notre action, c'est-à-dire la loi du 10 juillet 2000 relative aux délits non intentionnels, a permis l'édiction d'un texte équilibré, afin de lutter efficacement contre la paralysie qui guettait l'action des élus locaux et leur découragement.

Et les premières applications de la réforme du code pénal par les juridictions (Tribunal de Grande instance de La Rochelle et Cour d'Appel de Rennes) sont tout à fait encourageantes, même s'il est encore bien sûr trop tôt pour en tirer des conclusions définitives.

Si seulement ce texte vous a redonné espoir, espoir de prolonger un engagement essentiel à notre démocratie, j'aurai alors le sentiment que notre pari est en passe d'être gagné.

*

* *

Ce " premier pas ", très concret, vous l'avez bien compris, en appelle d'autres.

Je vous le dis clairement : il n'y a pas de raison de différer encore le nécessaire débat sur ce qu'il est convenu d'appeler le " statut de l'élu ".

Dans ce domaine, qu'il s'agisse de la formation souvent inaccessible, coûteuse ou inadaptée, de la protection sociale, des retraites ou de la réinsertion professionnelle, c'est d'une véritable réforme dont nous avons tous besoin. Une fois encore, le Sénat n'a pas failli à sa mission.

Ainsi, le 18 janvier dernier, nous sommes passés des intentions aux actes en adoptant une série de mesures relative au fonctionnement de la " Démocratie locale " : revalorisation des indemnités des maires et adjoints des petites et moyennes communes, définition d'un véritable droit à la formation, octroi d'une protection sociale accrue et garantie de retour à la vie professionnelle.

Telles sont les composantes d'une réforme destinée à favoriser l'égal accès des citoyens à l'exercice des mandats locaux, sans pour autant tomber dans les " errements " d'une inacceptable " fonctionnarisation " des élus.

A ceux qui objecteraient le coût d'une telle réforme, je pose une simple question : notre démocratie a-t-elle un prix ?

D'ailleurs, M. Daniel VAILLANT annonce le dépôt d'un projet de loi sur la " Démocratie citoyenne ".

Nous allons donc dans la même direction. Je ne puis que m'en réjouir, pour nous, pour vous !

*

* *

Sans vouloir abuser de votre attention, je ne peux m'empêcher, pour conclure, de vous faire part de mon engagement en faveur d'une garantie de l'autonomie fiscale des collectivités locales, bien mise à mal ces dernières années au fil des " réformes-suppressions ".

Méfions-nous de la " pente glissante " de la dépendance financière des collectivités locales !

La libre administration, principe constitutionnel, ne saurait se satisfaire de cette déresponsabilisation fiscale et encore moins d'un " assistanat " financier, bref de voir les collectivités locales toujours plus à la " merci de Bercy " !

En vingt ans de décentralisation, nos assemblées locales se sont montrées à la hauteur de leurs nouvelles responsabilités, ce n'est pas vous M. le Préfet qui me contredirez ! C'est pourquoi, nous avons pris nos responsabilités au Sénat pour qu'on ne franchisse pas la " ligne jaune ".

Ainsi, en octobre dernier, j'ai pris l'initiative de faire adopter une proposition de loi visant à inscrire dans notre Constitution le principe de prépondérance des ressources fiscales, librement perçues au sein des budgets locaux.

De quoi s'agit-il ? Tout simplement de fixer un minimum incompressible, catégorie par catégorie de collectivité locale, pour la part des recettes fiscales. De même, nous avons souhaité conditionner la suppression d'un impôt local au transfert, en tout ou partie, d'autres ressources fiscales de nature équivalente.

Mais attention, ne nous méprenons pas ! Je ne préconise pas le " tout impôt ", mais je refuse le " tout dotations " qui trouverait d'ailleurs très vite ses limites financières.

A mon sens, ces garanties constitutionnelles constituent le préalable à toute volonté, sincère ou de façade, de réforme de la fiscalité locale.

Alors à tous ceux qui contesteraient l'utilité de cette démarche, en invoquant la nécessité d'une modernisation préalable de la fiscalité locale, je répondrai très directement : pour moderniser les impôts locaux, encore faudrait-il qu'il en reste !

Il sera, en effet, bien difficile de moderniser nos " quatre vieilles ", qui c'est vrai en ont bien besoin, lorsqu'on les aura toutes supprimées.

Dans ces domaines, " la balle est dans le camp " du gouvernement. Croyez-moi, nous resterons donc vigilants pour dessiner ensemble les contours d'une architecture fiscale plus efficace et plus lisible.

*

* *

Sur tous ces sujets et bien d'autres, je voudrais encore une fois vous rappeler que le Sénat poursuivra son action, jour après jour, pour que les principes de notre démocratie locale soient préservés et, mieux, promus ! J'en prends le pari devant vous, cette action " au long cours " permettra de conforter le " réseau de solidarité irremplaçable " des élus locaux, au service d'une France humaine, moderne et dynamique.

Et puis à tous ceux qui vont solliciter à nouveau la confiance de leurs électeurs en mars prochain, tout simplement, je voudrais leur dire bonne chance !

A ceux qui ont décidé de " raccrocher les gants " dans quelques semaines, je leur demande, s'il n'est pas trop tard, de réfléchir encore un peu. Car l'expérience qu'ils ont acquise au cours de leur(s) mandat(s) constitue un capital démocratique d'une valeur inestimable. Leur engagement et leur passion, le coeur qu'ils ont mis au service de leurs concitoyens représentent autant d'atouts pour bâtir, ensemble, cette France du troisième millénaire.




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