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Direction de la séance

Projet de loi

Responsabilités locales

(1ère lecture)

(n° 4 , 31 , 32, 33, 34, 41)

N° 928

27 octobre 2003


 

AMENDEMENT

présenté par

C Défavorable
G Défavorable
Rejeté

MM. MARC, PEYRONNET, FRIMAT, SUEUR, LAGAUCHE, DAUGE, REINER, GODEFROY, MAUROY, MANO, DOMEIZEL, CHABROUX, CAZEAU, BEL, COURTEAU, KRATTINGER, TODESCHINI

et les membres du Groupe socialiste et apparenté


ARTICLE 14


Supprimer le II de cet article.

Objet

Par le présent article 14 du projet de loi relatif aux responsabilités locales, le gouvernement
a envisagé de transférer aux départements, la propriété et la gestion de 20 000 km de routes supplémentaires aujourd'hui nationales.
Ce même article offre surtout la possibilité aux collectivités territoriales d'instituer des péages sur leur domaine routier respectif dans la perspective d'assurer la couverture totale ou partielle des dépenses de toute nature, liées à la construction, l'exploitation, l'entretien, l'aménagement et l'extension du réseau.
S'agissant du péage sur voies nationales et voies « express », une véritable inquiétude s'est exprimée en France depuis quelques mois en particulier dans les zones géographiquement les plus excentrées par rapport au cœur du grand marché européen.
Interrogé au Sénat lors des questions d'actualité au gouvernement du 2 octobre 2003, le Premier ministre a voulu rassurer son interlocuteur J. de Rohan, président de la région « Bretagne », en précisant que les péages sur voies « express » ne faisaient pas partie des « réflexions » engagées par le gouvernement.
Mais dès lors que la possibilité de transfert aux régions et départements de tout ou partie du réseau de voies « express » est envisagée dans ce projet de loi, la question du péage prend une toute autre configuration.
Car si l'Etat se refuse à instituer un péage, n'est-il pas en train d'inciter par ce texte les collectivités territoriales à la faire et à induire de ce fait un transfert d'impopularité vers des collectivités qui, livrées à elles-mêmes, n'auraient en définitive d'autre moyen que de taxer les usagers routiers.
En réalité c'est la question même de la préservation d'une politique nationale d'aménagement du territoire qui est posée par cet article sur le droit de péage. S'il s'agissait simplement avec l'article 14 de vouloir réglementer le trafic sur les zones à passage routier intensif et de promouvoir la logique de « l'utilisateur payeur », il serait sans doute opportun de clarifier les choses et de délimiter étroitement la compétence transférée. Mais l'article 14 a visiblement une portée plus étendue dans la mesure où le droit de péage serait ouvert à toutes les collectivités territoriales, y compris celles dont le trafic routier est pour l'essentiel non pas un trafic de passage mais un trafic de desserte locale.
Les territoires français les plus éloignés des centres économiques, structurellement pénalisés par leur périphéricité payent déjà lourdement les conséquences de leur handicap géographique : transporteurs routiers, entreprises agroalimentaires, industries à flux tendus en savent déjà quelque chose.
Ces entreprises et activités économiques risquent d'être encore plus pénalisées si un péage est institué à un moment ou à un autre. Et malheureusement, régions et départements risquent un jour d'être contraints de prélever cette forme de ressources compte tenu des charges accumulées qu'ils vont devoir assumer.
L'article 14 conduirait donc sur ce point à un risque majeur de déséquilibre de l'aménagement du territoire national : des régions géographiquement avantagées prélèveraient un péage sur des clientèles de passage totalement captives sans que cela ne handicape lourdement les entreprises locales tandis qu'à l'inverse, des régions excentrées auraient un droit de péage vécu pour l'essentiel comme un facteur de pénalisation accentuée des acteurs économiques locaux et de la perte d'attractivité régionale.
Et que dire de l'imbroglio susceptible d'être créé par des péages différenciés d'un département à l'autre, d'une région à l'autre !
Il est donc demandé la suppression du paragraphe II de l'article 14.