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Direction de la séance

Projet de loi

Transparence, lutte contre la corruption et modernisation de la vie économique

(1ère lecture)

(PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE)

(n° 713 , 712 , 707, 710)

N° 41 rect.

4 juillet 2016


 

AMENDEMENT

présenté par

C Demande de retrait
G Demande de retrait
Retiré

M. FRASSA, Mmes DEROMEDI et GIUDICELLI et MM. COMMEINHES, MILON, LEFÈVRE, HOUEL, DOLIGÉ, GUERRIAU et MANDELLI


ARTICLE 12 BIS


Après l’alinéa 17

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« L’ordonnance de validation est motivée par les constatations, d’une part, que la transaction judiciaire est dans l’intérêt de la justice et, d’autre part, que les termes négociés avec le procureur de la République sont raisonnables et proportionnés au regard des circonstances de l’infraction et de la personnalité de son auteur, notamment eu égard à la coopération de la personne morale et des mesures correctives mises en œuvre.

Objet

L’homologation de la transaction par un magistrat du siège garantit aujourd’hui la transparence de l’accord négocié et permet par la même de le légitimer. Aussi, est-il est important de définir plusieurs critères de validation afin d’aider le juge dans sa tâche mais aussi d’assurer une homogénéisation de la procédure.

Afin de définir de tels critères, il est possible de s’inspirer de systèmes similaires français et étranger. 

En France, il s’agit de la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC) pour laquelle l’article 495-11 du code de procédure pénale précise qu’en cas d’homologation l’ordonnance est motivée par les constatations, d’une part, que la personne, en présence de son avocat, reconnaît les faits qui lui sont reprochés et accepte la ou les peines proposées par le procureur de la République et, d’autre part, que cette ou ces peines sont justifiées au regard des circonstances de l’infraction et de la personnalité de son auteur.

Le Conseil constitutionnel, saisi en interprétation de la loi, est venu préciser que le Président du tribunal du tribunal de grande instance peut ainsi « refuser l’homologation s’il estime que la nature des faits, la personnalité de l’intéressé, la situation de la victime ou l’intérêt de la société justifient une audience correctionnelle ordinaire » (Cons. Const. 2 mars 2004, décision 2004-492). Ainsi, le président du tribunal de grande instance, s'il estime la peine trop sévère ou insuffisamment sévère, il ne l'homologuera pas.

Au Royaume-Uni, lorsque le juge est saisi pour l’homologation d’un Deferred Prosecution Agreement, DPA, deux points sont déterminants pour la validation de ce dernier :

Est-ce que le DPA est dans l’intérêt de la justice ?

Pour répondre à cette question le juge britannique regarde quatre points :

-La gravité du comportement délictuel/criminel ;

-Le comportement de l’entreprise une fois qu’elle a appris l’existence des faits délictueux : déclaration volontaire et coopération avec les autorités en charge de l’enquête (ce point est très important pour le juge britannique dans la validation du DPA car c’est l’idée que même lorsqu’un fait illégal a déjà été commis et que le mal est fait il est encore possible d’influencer de façon positive via une déclaration volontaire et une pleine et entière coopération) ;

-Si l’entreprise a déjà été condamnée par le passé pour des faits identiques ou similaires ;

-La structure et l’organisation de l’entité avec laquelle il est proposé de conclure un DPA.

Est-ce que les termes du DPA sont justes, raisonnables et proportionnés ?

On relèvera que dans le premier dossier ayant mené à l’homologation d’un DPA au Royaume-Uni, l’affaire Standard Bank (Crown Court at Southwark, case N° U20150854), le juge a revu l’ensemble de ces critères et également fait l’analyse du montant de la sanction. La loi anglaise requiert en effet que cette sanction prononcée dans le cadre d’un DPA soit équivalente à ce qui aurait été prononcé par un tribunal. Pour ce faire, des lignes directrices ont été émises par le Sentencing Council pour aider les magistrats à évaluer la gravité des faits et donc la sanction adéquate, guide qui a été suivi en l’espèce.

Les critères d’homologation susmentionnés peuvent ainsi être repris pour la validation de la transaction judiciaire.

Les auteurs de cet amendement recommandent en outre l’adoption par le Garde des Sceaux d’une circulaire complémentaire à celle qu’il a publié le 3 juin 2016, à l’attention des procureurs afin de préciser les facteurs que ces derniers seront encouragés à prendre en compte avant de s’engager dans la négociation d’une transaction (notamment la pleine et entière coopération de l’entreprise ; la défense non coopérative devant être lourdement sanctionnée), des orientations sur la manière de conduire les négociations ou encore sur les modalités d’exécution de la transaction.  

Cet amendement est donc proposé afin d’assurer une validation des transactions judiciaires dans l’intérêt public et une séparation effective des pouvoirs.



NB :La présente rectification porte sur la liste des signataires.