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Direction de la séance

Projet de loi

Relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire

(Nouvelle lecture)

(n° 714 , 715 )

N° 1

20 septembre 2018


 

Question préalable

Motion présentée par

C Favorable
G Défavorable
Adopté

Mme LOISIER et M. RAISON

au nom de la commission des affaires économiques


TENDANT À OPPOSER LA QUESTION PRÉALABLE


En application de l’article 44, alinéa 3, du Règlement, le Sénat décide qu’il n’y a pas lieu de poursuivre la délibération sur le projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture, pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous (n° 714).

Objet

Après l’échec inédit de la commission mixte paritaire sur un alinéa pourtant voté à l’identique dans les deux chambres, l’Assemblée nationale a confirmé, en nouvelle lecture, son intransigeance à l’égard des propositions du Sénat.

En première lecture, le Sénat s’est montré constructif, tentant d’améliorer le projet de loi afin qu’il traduise mieux les attentes exprimées au sortir des États généraux de l’alimentation.

En balayant d’un revers de main ses principaux apports, l’Assemblée nationale a traité le travail sénatorial par le mépris.

Même la création du fonds d’indemnisation des victimes professionnelles des produits phytopharmaceutiques, mesure de justice votée à l’unanimité au Sénat qui transcende les clivages partisans, n’aura pas trouvé grâce à ses yeux.

Loin de rapprocher les points de vue, la nouvelle lecture à l’Assemblée a été l’occasion, pour la majorité gouvernementale, d’aggraver encore le déséquilibre d’un texte qui non seulement échouera à relever le prix payé aux agriculteurs, mais aura même l’effet inverse sur leurs revenus, par l’addition des charges nouvelles qu’il instaure.

Sans l’intervention de l’Observatoire des prix et des marges des produits alimentaires pour proposer ou valider des indicateurs en cas de défaut de l’interprofession, les producteurs seront à la merci d’indicateurs élaborés de toutes pièces par la grande distribution, qui y travaille déjà.

En plus de peser sur les charges des paysans, ces contraintes supplémentaires vont considérablement alourdir celles des collectivités territoriales.

Pourront-elles financer, dans le même temps, l’amélioration de la qualité des repas servis dans les cantines et le renouvellement à marche forcée de tout leur matériel pour répondre à l’interdiction, dès 2020, des boîtes ou plateaux-repas en plastique ?

Sur la forme, nombre de dispositions pourtant substantielles n’ont fait l’objet d’aucune étude d’impact, voire ont été adoptées en nouvelle lecture en méconnaissant la Constitution.

La constitutionnalité d’autres dispositions est aussi contestable sur le fond : ainsi, le fait de réserver l’usage des drones pour l’épandage sur les terrains en pente à une certaine catégorie d’agriculteurs constitue une atteinte claire au principe d’égalité, sans lien avec l’objectif poursuivi qui ne vise qu’à renforcer la sécurité des personnes.

Dès lors, le Sénat ne saurait cautionner par son vote un projet de loi qui, en multipliant les contraintes sans augmenter les revenus, trahit l’esprit des États généraux de l’alimentation et ruine les espoirs des agriculteurs.

Au vu de l’ensemble de ces désaccords, sur la méthode comme sur le fond, votre commission vous propose d’adopter la présente motion.

Tout démontre en effet, dans l’attitude du Gouvernement et de sa majorité, que le Sénat ne gagnera rien à amender à nouveau le texte – sauf à donner l’impression d’en endosser la logique et d’en assumer les défauts – puisqu’aucune de ses propositions ne sera reprise.

À l’inverse, l’adoption de la question préalable se veut un signe fort adressé à l’exécutif et à sa majorité : il est temps d’entendre les agriculteurs, de répondre à leur mal-être non par un surcroît de normes et de charges, mais par des protections renforcées et un partage équitable de la valeur qui soient à la hauteur de leurs efforts et du service qu’ils rendent à la société.



NB :En application de l'article 44, alinéa 3, du Règlement, cette motion est soumise au Sénat avant la discussion des articles.