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Direction de la séance

Projet de loi

Projet de loi de finances pour 2024

(1ère lecture)

SECONDE PARTIE

MISSION ÉCONOMIE

(n° 127 , 128 , 129, 132)

N° II-203

27 novembre 2023


 

AMENDEMENT

présenté par

C Défavorable
G Défavorable
Rejeté

M. GONTARD, Mmes de MARCO et SENÉE, MM. BENARROCHE, Grégory BLANC, DANTEC, DOSSUS et FERNIQUE, Mme GUHL, MM. JADOT et MELLOULI, Mme OLLIVIER, M. PARIGI, Mme PONCET MONGE, M. SALMON et Mmes SOUYRIS et Mélanie VOGEL


Article 35 (crédits de la mission)

(État B)


I. – Créer le programme :

Politique d’Accompagnement et développement des monnaies locales

II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

 (en euros)

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Développement des entreprises et régulations

dont titre 2

 

 

 

 

Plan France Très haut débit

 

 

 

 

Statistiques et études économiques

dont titre 2

 

 

 

 

Stratégies économiques

dont titre 2

 

2 160 000

 

2 160 000

Financement des opérations patrimoniales en 2024 sur le compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État »

 

 

 

 

Politique d’Accompagnement et développement des monnaies locales

2 160 000

 

2 160 000

 

TOTAL

2 160 000

2 160 000

2 160 000

2 160 000

SOLDE

0

0

 

Objet

L’amendement proposé ci-dessus s’inscrit dans les recommandations du Conseil Supérieur de l’Économie Sociale et Solidaire (CSESS), mandaté par le Gouvernement pour évaluer la loi ESS de 2014, régissant les monnaies locales à son article 16. Dans son Avis sur le Bilan de la loi de 2014 (pages 86- 90), publié en juillet de cette année, le CSESS recommande que l’État impulse un financement de l’ordre de 2,2 millions d’euros par an pour soutenir le changement d’échelle des monnaies locales. Ce financement initial sera ensuite complété par des investissements privés et des collectivités locales. 

Les monnaies locales complémentaires (MLC) se développent en France depuis 2010 et il en existe aujourd’hui 80, rassemblant plus de 10 000 entreprises et associations. De nombreuses collectivités territoriales, dont les métropoles de Bordeaux, Lyon, Strasbourg, Grand Angoulême, Grand Avignon, Nantes et les régions Normandie et Bourgogne-Franche-Comté ont compris les avantages économiques, sociaux et environnementaux des MLC, les intégrant dans leurs dépenses publiques et services.

Les impacts positifs ont été confirmés par une mesure d’impact et des études universitaires : un paiement en MLC génère entre 25 % et 55 % de revenus supplémentaires pour le territoire par rapport à un paiement en euros en incitant les professionnels à favoriser les commerces locaux. Après leur adhésion à leur monnaie locale, les professionnels voient en moyenne leur chiffre d’affaires augmenter de 9 à 12 %[1], via la création d’un réseau de fidélisation de la clientèle. On peut ajouter à cela un impact environnemental du fait des circuits courts et des évolutions des pratiques par les adhérents professionnels comme individuels.

Les MLC promeuvent des valeurs de cohésion sociale chères à l’économie sociale et solidaire (ESS) : de nombreuses MLC sont impliquées dans des initiatives en faveur des publics les plus vulnérables, comme les dispositifs de sécurité alimentaire. Au-delà de cela, elles constituent un formidable levier pour créer des liens et favoriser les partenariats, voire encourager l’innovation entre les acteurs qui poursuivent des objectifs communs sur un territoire.

L’enveloppe de 2,16 millions d’euros demandée permettra de créer au moins 25 emplois directs sur l’ensemble du territoire français à court terme. Les fonds seront utilisés pour financer :

-Le programme d’accompagnement au changement d’échelle dispensé par les structures nationales auprès des monnaies lauréates (3 jours de diagnostic terrain par monnaie, formation continue professionnalisante auprès des porteurs de projet, prestation de conseil pour la digitalisation des monnaies, suivi mensuel des monnaies lauréates, capitalisation des savoirs, évaluation d’impact) = 430 000 €.

-Le développement d’outils numériques efficaces et sécurisés : d’une part, des outils de gestion spécifiques aux besoins des monnaies locales et, d’autre part, les outils de digitalisation de la monnaie elle-même (application mobile de paiement, gestion des flux, sécurité, etc.) = 300 000 €.

-3 postes clefs au sein des monnaies lauréates : 1 coordinateur, 1 chargé de développement et 1 assistant administratif et financier. Ces trois postes doivent permettre à l’association de se développer et d’atteindre le seuil d’autofinancement à cinq ans. À ces trois postes, s’ajoute un budget communication nécessaire au développement du projet = 1 030 000 €.

-Un fonds de sécurisation dédié aux monnaies locales non lauréates du programme d’accompagnement mais présentant des perspectives de développement à moyen terme. Ce fonds permettra, au cas par cas, de financer de l’investissement numérique, des études de faisabilité, de l’aide à l’embauche, de la communication, etc. selon les besoins des monnaies concernées = 400 000 €.

Si l’essentiel de ce financement profitera à court terme à une dizaine de monnaies locales réparties sur le territoire métropolitain, l’objectif est d’essaimer les compétences et connaissances acquises vers toutes les monnaies locales françaises afin d’assurer leur professionnalisation et l’accroissement progressif de leur autofinancement par l’augmentation du nombre d’adhérents et la mise en place de nouvelles activités. L’Eusko, monnaie locale du Pays basque, a ainsi atteint 85 % d’autofinancement grâce à cette méthodologie.

Afin de gager cette création de programme au sein de la mission « Économie » dans le respect des règles prévues par la loi organique relative aux lois de finances (LOLF), il est proposé de flécher 2 160 000 euros de l’action 1 « Définition et mise en œuvre de la politique économique et financière de la France dans le cadre national » du programme 305 « Stratégies économiques » vers ce nouveau programme intitulé « Politique d’accompagnement et développement des monnaies locales ». Néanmoins, l’intention de cet amendement n’étant pas de réduire les moyens affectés au programme « Stratégies économiques », les auteurs de cet amendement appellent le Gouvernement à lever le gage.

Cet amendement a été travaillé avec le mouvement SOL. 

[1] Oriane Lafuente-Sampietro. The multiplier effect of convertible local currencies : case study on two French schemes. 2021