Direction de la séance |
Projet de loi Refondation de Mayotte (1ère lecture) (PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE) (n° 613 rect. , 612 , 609, 610, 611) |
N° 141 19 mai 2025 |
AMENDEMENTprésenté par |
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Mmes PONCET MONGE et SOUYRIS, MM. BENARROCHE, Grégory BLANC et DANTEC, Mme de MARCO, MM. DOSSUS, FERNIQUE et GONTARD, Mme GUHL, MM. JADOT et MELLOULI, Mme OLLIVIER, M. SALMON et Mmes SENÉE et Mélanie VOGEL ARTICLE 15 |
Alinéa 2
Supprimer les mots :
à l'exception de l'aide médicale d’État,
Objet
L’AME est une prestation sociale qui relève aussi d’une politique de santé publique, mesure essentielle et universelle : elle garantit l’accès aux soins vitaux des personnes en situation irrégulière, préservant ainsi la santé de tou·te·s les habitant·e·s du territoire. Maintenir Mayotte en marge de ce dispositif reviendrait à perpétuer une inégalité territoriale flagrante, alors même que l’article 15 est supposé harmoniser les droits sociaux, et aggraverait les risques sanitaires sur l’île.
Pour justifier cette exclusion, la rapporteure a invoqué en commission la « difficulté à maîtriser l’immigration irrégulière » et laisse entendre qu’étendre l’AME créerait un « appel d’air ». Or la recherche scientifique, française comme internationale, a maintes fois démontré que les déterminants des migrations relèvent avant tout des conflits, des stratégies économiques, des liens familiaux ou encore des héritages coloniaux, et non du niveau de protection sociale. Brandir l’AME comme facteur d’attractivité relève donc d’un fantasme démenti par l’état des connaissances, et cela fragilise la cohérence de notre droit en en rompant l’universalité.
La rapporteure a également avancé qu’une « réflexion sur l’évolution du panier de soins ouvrant droit à cette prestation » rendrait nécessaire de différer son extension à Mayotte. Cet argument est hors de propos : toute réforme du panier de l’AME s’appliquera, le moment venu, à l’ensemble du territoire national, y compris Mayotte si elle est incluse dans le dispositif. Par ailleurs, son contenu actuel se limite déjà aux soins indispensables et minimaux. Faire peser sans raison l’éventualité d’une réforme nationale future sur les patient·e·s mahorais·es revient à leur refuser des droits élémentaires qui auraient pu, et dû, converger avec l’hexagone.
En refusant l’AME à Mayotte, on rompt le principe constitutionnel d’égalité, on porte atteinte à la solidarité nationale et on prend le risque de multiplier les urgences et les coûts sanitaires à terme.
Car les conditions de vie des personnes concernées sont déjà tellement dégradées qu’elles sont vulnérables aux maladies infectieuses et transmissibles (comme la tuberculose), ou à des pathologies telles les infections aiguës du système respiratoire ; les femmes enceintes ont un manque de suivi, qui les met en danger ainsi que leur enfant, et tout refus de cet accès aux soins de premier recours ou son caractère tardif s’avèrera plus coûteux (en plus du coût humain), et entrainera un report aux urgences du système hospitalier sans compter les conséquences en termes de santé publique.
Cette exclusion est une aberration financière et médicale en plus de témoigner d’un manque d’humanité.
Adopter le présent amendement permettra de garantir l’universalité réelle de la protection sociale sur l’ensemble du territoire de la République, de prévenir les risques épidémiques en assurant un accès effectif aux soins de premier recours et de mettre fin à une différence de traitement injustifiée et discriminatoire à l’égard des résident·e·s de Mayotte. Il convient donc de supprimer la mention de l'exclusion de l’AME, afin de rendre pleinement cohérent l’objectif de convergence sociale inscrit dans ce projet de loi.