Direction de la séance |
Proposition de loi Simplification du droit de l'urbanisme et du logement (1ère lecture) (PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE) (n° 694 , 693 , 684) |
N° 165 rect. 12 juin 2025 |
AMENDEMENTprésenté par |
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Mme BELLUROT, M. POINTEREAU, Mme DI FOLCO, MM. LEFÈVRE, REICHARDT, FRASSA, SAUTAREL et SOL, Mme MICOULEAU, MM. SAURY et PIEDNOIR, Mme RICHER, MM. BOUCHET, SOMON et BRISSON, Mme BELLAMY, M. GUERET, Mmes Pauline MARTIN, IMBERT et VENTALON, MM. DUMOULIN, GENET, SIDO et Paul VIDAL, Mme LASSARADE et M. DELIA ARTICLE 4 |
Après l'alinéa 12
Insérer quatre alinéas ainsi rédigés :
...) Le IV est ainsi modifié :
- Le premier alinéa est ainsi rédigé :
« Indépendamment des poursuites pénales qui peuvent être exercées, lorsqu’il n’existe aucun moyen technique permettant de régulariser, en conformité avec les règlements, les travaux entrepris ou exécutés mentionnés au I du présent article, et lorsque la mise en demeure est restée sans effet au terme du délai imparti, l‘autorité compétente peut procéder d‘office à la réalisation des mesures prescrites, aux frais de l‘intéressé y compris, si la mise en conformité l‘impose, en procédant aux démolitions nécessaires après y avoir été autorisée, dans cette dernière hypothèse, par un jugement du président du tribunal judiciaire statuant selon la procédure accélérée au fond. » ;
- Le dernier alinéa est supprimé.
Objet
1. Le dispositif des astreintes est une réelle avancée mais reste insuffisant en présence d’une infraction non régularisable :
La procédure d’astreinte administrative, instaurée par la loi n° 2019-1461 du 27 décembre 2019 relative à l’engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique, vise à mieux assurer l’effectivité des règles d’urbanisme en renforçant les pouvoirs de police du maire.
Ce dispositif constitue une réelle avancée mais, dans la pratique, son efficacité reste cantonnée aux infractions les moins graves et qui sont régularisables. Pour ces infractions, le risque de payer une astreinte journalière est en effet de nature à inciter le contrevenant à régulariser l’infraction (le cas échéant, par le simple dépôt d’une autorisation administrative ou par des modifications mineures sur sa construction).
En revanche, pour les infractions plus conséquentes, le contrevenant qui ne met pas son installation irrégulière en conformité s’expose « tout au plus » au paiement d’une astreinte administrative sauf lorsque le bâtiment menace ruine.
Certes, le Conseil d’État a récemment jugé que la mise en demeure de mettre la construction en conformité peut impliquer qu’il soit procédé aux démolitions nécessaires (CE, 22 décembre 2022, n° 463331, au Recueil). Pour autant, cette mise en conformité reste du ressort du contrevenant : s’il n’y procède pas, l’autorité administrative est contrainte d’en prendre acte et ne peut plus davantage agir. Le maire ne disposant d’aucun moyen de contrainte pour imposer la mise en conformité, il est contraint de s’en remettre aux voies de droit commun (volets pénal et civil), qui sont déficientes.
2.Une construction irrégulière non régularisable échappe à la démolition, en raison d’un circuit judiciaire déficient :
Rappelons qu’une fois que le maire a dressé PV, la décision que peut prendre le Parquet reste très aléatoire – car fonction de la politique générale pénale et de l’encombrement du tribunal – et intervient bien souvent après une ou deux années de procédure. Quant à la décision des magistrats du siège, elle intervient également après plusieurs années de procédure. Les mêmes lenteurs de procédure sont à déplorer en matière civile.
Et, au pénal, comme au civil, la démolition n’est que très rarement prononcée puis exécutée en raison des difficultés d’assurer l’injonction d’une décision de démolition et de la primauté du droit au respect de la vie privée et familiale ( « totem » de nature à faire obstacle à toute démolition, les contrevenants ayant librement pu occuper la construction concernée après plusieurs années de procédure… et invoquer ainsi ce droit).
Cette situation, et l’impuissance publique qu’elle induit, est dénoncée par de nombreux élus.
3.En cas de défaillance du contrevenant, le maire doit pouvoir procéder d’office aux mesures nécessaires de mise en conformité aux frais du contrevenant :
La présent amendement consiste à faire évoluer le dispositif existant de l’astreinte administrative en permettant in fine au maire de faire procéder d’office, en lieu et place de la personne mise en demeure et à ses frais, à l’exécution des mesures prescrites pour l’ensemble des constructions irrégulières et non régularisables. Le cas échéant, la mise en conformité peut impliquer la démolition d’office de la construction irrégulière et non régularisable.
Il s’agit, ni plus ni moins, que d’aller au bout de la logique du dispositif des astreintes :
-Après l’établissement des formalités substantielles (PV d’infraction, phase de contradictoire et de mise en demeure de se mettre en conformité assortie d’une astreinte) ;
- Le maire doit pouvoir agir en lieu et place du contrevenant défaillant qui refuse de se mettre en conformité (étant rappelé que, ainsi que l’a précisé le Conseil d’État, la mise en conformité peut impliquer la démolition de la construction irrégulière) ;
-La mise en conformité, et en particulier la démolition d’office, aux frais du contrevenant, s’exécuterait ainsi sous le contrôle du juge judiciaire.
4.Cette proposition répond à plusieurs objectifs d’intérêt général, en lien avec les objectifs poursuivis par la proposition de loi :
- Garantir l’effectivité de la nécessaire maîtrise, par les collectivités publiques, de l’occupation des sols et du développement urbain (qui présente un caractère général, ainsi que l’a reconnu le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2000-436 DC du 7 décembre 2000). En effet, cet objectif n’est pas garanti en l’état, du fait du caractère aléatoire de la mise en mouvement de l’action publique, et des délais de procédure particulièrement longs des actions civiles en démolition ;
-L’objectif d’une simplification des procédures judiciaires et administratives puisque la construction irrégulière non régularisable ferait l’objet d’un traitement rapide et efficace, sous le contrôle du juge ;
-Le droit de propriété ne s’en trouverait nullement atteint puisque la mise en conformité pourrait intervenir dès l’édification, par le contrevenant, d’une construction de façon irrégulière (sans autorisation ou en méconnaissance de celle-ci) et non régularisable (ex. construction en zone inconstructible ; construction en méconnaissance des coefficients d’espaces verts à respecter… les exemples sont nombreux).