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Direction de la séance

Projet de loi

Financement de la sécurité sociale pour 2026

(1ère lecture)

(n° 122 , 131 , 126)

N° 1871

21 novembre 2025


 

AMENDEMENT

présenté par

C Favorable
G Favorable
Adopté

Le Gouvernement


ARTICLE 15


I. – Après l’alinéa 1

Insérer quatre alinéas ainsi rédigés :

II. – Après le II septies de l’article 4 de l’ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale, il est inséré un paragraphe ainsi rédigé :

« II.... – A.- La couverture des déficits de l’exercice 2024 des branches mentionnées aux 1° et 3° de l’article L. 200-2 du code de la sécurité sociale est assurée par des transferts de la Caisse d’amortissement de la dette sociale à l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale dans la limite de 15 000 000 000 euros.

« Ce montant est affecté à la couverture des déficits de ces branches, au prorata de leur situation nette patrimoniale au 31 décembre 2024.

« B. – Les transferts mentionnés au A interviennent au plus tard le 31 décembre 2026. Leurs dates et montants sont fixés par décret. »

Objet

Cet article procède, conformément à l'article 2 de l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996, au transfert de 15 Md€ de déficit cumulés des branches Vieillesse et Maladie du régime général vers la Caisse d’amortissement de la dette sociale (CADES).

Saisi par le Premier ministre d’une demande d’avis portant sur l'interprétation des règles organiques encadrant le transfert de déficits à la Caisse d’amortissement de la dette sociale au moment du transfert, le Conseil d’Etat a confirmé que les dispositions organiques permettent au législateur de transférer de la dette sociale à la CADES à condition que les informations qui lui sont fournies lui permettent d'apprécier l’effet que ce transfert aura sur la durée d’amortissement. Cela implique qu’il dispose non seulement de projections présentant la durée d’amortissement de la dette déjà transférée, mais également de projections actualisées tenant compte des nouveaux montants dont le transfert est envisagé. Dans le cas où le Gouvernement prévoirait d’y procéder dans le cadre d’un PLFSS déjà en cours d’examen au Parlement, le Conseil d’Etat demande que les informations permettant au législateur d’apprécier les effets de ce transfert sur la durée d’amortissement puissent figurer dans l’exposé des motifs qui accompagnerait un éventuel amendement.

Le Conseil d’État considère en outre que les dispositions organiques l’autorisent, lorsque la trajectoire d’amortissement s’améliore et que la date d’extinction prévisionnelle de la dette est en-deçà du terme du 31 décembre 2033, à transférer de nouvelles dettes sociales à la CADES, y compris sans l’accompagner de nouvelles ressources affectées, si ce transfert ne porte pas le terme de l’amortissement de la dette sociale au-delà de cette date. A l’inverse, si la trajectoire d’amortissement de la dette sociale se dégradait et que le terme de l’amortissement était à l’avenir jugé susceptible de dépasser le 31 décembre 2033, la plus prochaine loi de financement de la sécurité sociale devrait affecter de nouvelles ressources à la CADES pour garantir que ce terme ne soit pas dépassé.

Afin de réduire le besoin de financement de l’ACOSS, cet amendement prévoit, conformément au cadre organique précisé par le Conseil d’Etat, la reprise d’une part importante des déficits des branches vieillesse et maladie du régime général par la Caisse d’amortissement de la dette sociale (CADES),. Dans le but de réduire à la fois les déficits cumulés de ces deux branches, il est proposé de reprendre 15 milliards d’euros de déficits cumulés de l’exercice 2024, sans apurer les déficits plus anciens restant à la charge de la branche vieillesse. En effet, les lois organique et ordinaire du 7 août 2020 relatives à la dette sociale et à l’autonomie ont repoussé la date d’extinction de la CADES au 31 décembre 2033 pour permettre un transfert de 136 milliards d’euros, visant à couvrir :

-          les déficits cumulés de la branche « maladie » et de la branche « vieillesse » du régime général, ainsi que ceux de la CNRACL, dans la limite de 31 Md€, pour l’exercice 2019 ;

-          les déficits cumulés de la branche « maladie », la branche « vieillesse » et la branche « famille » pour les exercices 2020 à 2023 ainsi que le Fonds de solidarité vieillesse du régime général, mais aussi la branche « vieillesse » du régime agricole, dans la limite de 92 Md€ ;

-          Le soutien aux établissements publics de santé, notamment dans la perspective de leur désendettement, à hauteur de 13 Md€.

Ces transferts ont été effectués de la façon suivante :

-          20 Md€ au cours de l’exercice 2020 ;

-          40 Md€ au cours de l’exercice 2021 ;

-          40 Md€ au cours de l’exercice 2022 ;

-          27,2 Md€ au cours de l’exercice 2023 ;

-          Enfin, 8,8 Md€ sur l’exercice 2024.

Cette dernière reprise s’est inscrite dans une trajectoire de reprises régulières depuis la création de la Caisse en 1996, qui l’a conduite à reprendre un total de 396,5 Md€, dont elle aura amorti 291 Md€ en 2026, soit plus de 70 % de la dette transférée.

 

Année de reprise de dette

Dette reprise cumulée

Amortissement annuel

Amortissement cumulé

Situation nette de l'année

1996

23 249

2 184

2 184

-21 065

1997

25 154

2 907

5 091

-20 063

1998

40 323

2 444

7 535

-32 788

1999

42 228

2 980

10 515

-31 713

2000

44 134

3 226

13 741

-30 393

2001

45 986

3 021

16 762

-29 224

2002

48 986

3 227

19 989

-28 997

2003

53 269

3 296

23 285

-29 984

2004

92 366

3 345

26 630

-65 736

2005

101 976

2 633

29 263

-72 713

2006

107 676

2 815

32 078

-75 598

2007

107 611

2 578

34 656

-72 955

2008

117 611

2 885

37 541

-80 070

2009

134 611

5 260

42 801

-91 810

2010

134 611

5 135

47 936

-86 675

2011

202 378

11 678

59 614

-142 764

2012

209 026

11 949

71 563

-137 463

2013

216 745

12 443

84 006

-132 739

2014

226 887

12 717

96 723

-130 164

2015

236 887

13 513

110 236

-126 651

2016

260 496

14 426

124 662

-135 834

2017

260 496

15 044

139 706

-120 790

2018

260 496

15 444

155 150

-105 346

2019

260 496

16 253

171 403

-89 093

2020

280 496

16 089

187 492

-93 004

2021

320 496

17 813

205 305

-115 191

2022

360 496

18 961

224 266

-136 230

2023

387 728

18 305

242 571

-145 157

2024

396 496

15 989

258 559

-137 936

2025

396 496

16 195

274 754

-121 772

2026

396 496

16 439

291 193

-105 304

Source : annexe 3 au PLFSS pour 2026

 

La Cades est donc actuellement engagée aujourd’hui dans le seul amortissement de ce dernier transfert. La durée d'amortissement des déficits passés repris par la Cades est présentée à l'annexe 2 du projet de loi de financement.

Les prévisions qui justifiaient la date retenue dans la loi organique pour l’extinction de la dette sociale, à savoir le 31 décembre 2033, ont été progressivement affinées et actualisées par la Cades au regard du contexte macro-économique dans le cadre de ses publications annuelles, destinées à informer le Parlement comme à permettre au Conseil constitutionnel de vérifier le respect des dispositions organiques. Cette actualisation s’est accompagnée d’une anticipation progressive de la date d’extinction de la dette sociale.

Aujourd’hui, les perspectives d’extinction de la dette sociale, telles qu’elles apparaissent en annexe au projet de loi d’approbation des comptes de la sécurité sociale de 2024, sont les suivantes.

 

5 % des scénarios les plus favorables

Scénario médian

5 % des scénarios les plus défavorables

Objectif

Date d’extinction prévisionnelle de la CADES

mai-31

juil-32

mars-33

Non-report de la date d’extinction de la dette portée par la CADES

Sur la base du scénario dit « médian », qui avait servi de fondement à l’analyse des précédentes reprises, la dette sociale devrait donc s’éteindre en juillet 2032. Même dans les scénarios les plus pessimistes, à savoir les 5 % des scénarios les plus défavorables, la dette s’éteindrait en mars 2033.

Pour accompagner le dépôt du présent amendement, le Gouvernement a conduit de nouvelles simulations actualisées pour estimer l’impact d’un transfert de 15 Md€ sur les perspectives d’extinction de la dette. En effet, l’impact à simuler est double :

-          Le transfert conduit naturellement à augmenter le montant brut de la dette sociale à amortir et donc le montant des recettes affectées à cet amortissement ;

-          Il aboutit en outre à modifier la composition de l’endettement de la Cades lui-même, pour intégrer cette part supplémentaire.

Dès lors, le transfert d’un montant supplémentaire de 15 Md€ aboutit aux scénarios suivants :

Scénario très pessimiste*

Scénario pessimiste**

Scénario médian

décembre 2033

novembre 2033

mai 2033

* Ce scénario correspond au scénario le plus optimiste parmi les 5 % de scénarios les plus pessimistes

** Ce scénario correspond au scénario le plus optimiste parmi les 10 % de scénarii les plus pessimistes

 

Sur la base du scénario médian, la dette transférée à la CADES serait donc amortie dans son ensemble au plus tard à la fin du mois de mai 2033, soit sept mois avant la date inscrite dans la loi organique. Même dans le scénario dit « le plus pessimiste », celle-ci serait amortie en décembre 2033.

 

S’agissant de l’affectation de la couverture des déficits des branches, il est proposé de répartir, au sein du régime général, la répartition entre les branches déficitaires, dont les situations nettes prévisionnelles sont les plus dégradées au 31 décembre 2025, soit les branches « maladie » et « vieillesse » du régime général. Cette répartition pourrait ainsi être la suivante :

-          9 Md€ pour la branche « maladie » ;

-          6 Md€ pour la branche « vieillesse ».

 

Cet amendement présente donc un transfert de dettes à cadre organique inchangé, du fait de la capacité d’amortissement supplémentaire qui est désormais constatée dans le cadre de la présentation annuelle des lois de financement de la sécurité sociale. Il entraîne un prolongement de l’affectation des recettes pour une durée équivalente à celle de la durée supplémentaire nécessaire pour l’apurement de cette dette en 2032, soit environ 11 mois.

 

Cette reprise de dette doit s’accompagner, en parallèle, de la mise en œuvre d’une trajectoire de réduction du déficit des régimes obligatoires de base de la sécurité sociale en vue de son retour à l’équilibre d’ici à 2029.